mercredi 16 mars 2011

LES DISPARUS (APARECIDOS)

                                      

de Paco Cabezas. 2007. 1H46. Espagne/Argentine. Avec Ruth Diaz, Javier Pereira, Pablo Cedron, Hector Bidonde, Luciano Caceres, Damaso conde, Isabela Ritto.

L'ARGUMENT: Malena et Pablo, une soeur et un frère qui voyagent en Argentine, découvrent un journal intime qui décrit des crimes commis vingt ans auparavant. Cette même nuit, une famille est assassinée selon les détails du journal. Malena et Pablo tentent de faire la part entre le réel et l’imaginaire...

                                                 

Premier long-métrage de Paco Cabezas, également scénariste et déjà acteur de diverses séries TV, voir de la récente comédie franchouillarde "Camping 2" de Fabien Onteniente, "Les Disparus" mélange les genres en narrant une enquête troublante et passionnante ancrée dans le pur fantastique pour affronter de manière réaliste l'horreur humaine sur fond de génocide politique.
Un frère et une soeur vont être amené à élucider la mystérieuse disparition d'une mère et de sa fille après que le mari fut sauvagement assassiné dans un hotel. Aidé d'un journal de bord et des fantomes du massacre de cette famille, Malena et Pablo oseront à peine imaginer quelle abominable vérité se cache derrière cette énigme sordide jamais résolue !
A la manière du "6è sens" ou de "l'orphelinat" pour l'emploi maternel et fraternel de fantomes aidants, "Les Disparus" se propose à la manière d'une enquête policière, confuse et quelque peu maladroite de prime abord mais qui va rapidement installer un suspense et une tension distillée avec assez de savoir-faire grâce à une trame complexe mais passionnante et réalisée de manière assez judicieuse pour l'emploi renouvelé d'apparitions fantomatiques ancrées dans notre réalité ou tout du moins à travers celle des 2 héros du film, en quête éternelle de la vérité et de la véracité d'un journal décrivant multiples rebondissements dramatiques et horribles méfaits à diverses horaires de cadran d'une montre et endroits précis fatidiques dans une région reculée naturellement photographiée de l'Argentine.
La force scénaristique de Paco Cabezas est également de dénoncer à travers une énigme fantastique un sujet politique, fasciste qui a eu cours en Argentine durant les années 1976-1986, une dictature militaire qui a entrainé une éradication systématique des opposants au régime (les desaparecidos), qui ont été plus de 30000. Des milliers d'êtres humains torturés, nettoyés, lapidés, expérimentés au nom de la haine et du pouvoir totalitaire rappelant aussi les pires atrocités commanditées par Hitler dans les divers camps de concentration créés en sa faveur durant la seconde guerre mondiale. "Les Disparus" renvoit une dête chère à l'humanité à travers ses fantomes emprisonnés sur eux-mêmes au plus profond de leur âme souillée devant l'horreur crapuleuse des dictatures, l'épouvantable supplice que des milliers d'innocents ont dû subir durant des journées interminables. Et si la dernière partie est assez éprouvante et crue dans ces quelques séquences de tortures infligées c'est pour mieux nous rendre conscience de l'agonie et de la souffrance de ces victimes commises durant le 20è siècle.
Paco Cabezas nous emmene donc à travers cette histoire parfois émouvante de fantomes errants sur un terrain boueux d'une triste actualité, sur un ignoble fait divers honteusement trafiqué et camouflé par les pouvoirs publics et les forces de l'ordre. Une histoire douloureuse d'autant plus sensible car fragilisé par l'amour fraternel, l'union familiale d'un frère et d'une soeur déterminés à résoudre ensemble deux disparitions pour les remettre au grand jour et responsabiliser, condamner, voir tuer le coupable présumé.
Malgré quelques légères incohérences et certaines facilités de ficelles éprouvées (la fille qui se délivre facilement de ses menottes où les victimes s'échappant par le trou d'une cave alors que le meurtrier cherchera bêtement à sortir par le grillage !), "Les Disparus" intrigue, interpelle et tient en haleine au fur et à mesure de la progression du récit davantage intense dans un suspense enthousiasmant mené avec entrain et le final superbement touchant, relevé d'images poétiques lacrymales dans sa pâle tonalité, émeut avec son constat alarmiste renoué grâce au moment de vérité et sa délivrance libertaire qui s'ensuit. .
Un discours final optimiste, idéalisé et emprunt de naiveté pouvant prêter à sourire pour souhaiter de nous convaincre de ne pas recommettre les erreurs et les horreurs du passé et vivre de manière plus pacifiste, harmonieuse pour le prochain siècle à venir et à subir. Evènement décrit de manière caustique car à l'aube du 11 Septembre 2001 !
Une bonne surprise intelligente venue à nouveau du pays de l'Espagne qui manque de maitrise dans sa réalisation mais se révèle pleine de bonnes intentions sans jamais nous indifférer devant la force d'un sujet aussi brulant, authentique, douloureux et humaniste.

                                               

01/06/10.

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