mercredi 16 novembre 2011

UN MONDE SANS PITIE. César de la meilleure première oeuvre, Prix Louis-Delluc.


d'Eric Rochant. 1989. France. 1h24. Avec Hippolite Girardot, Mireille Perrier, Yvan Attal, Jean-Marie Rollin, Cécile Mazan, Aline Still, Paul Pavel, Anne Kessler, Patrick Blondel.

Sortie en salles en France le 22 Novembre 1989. U.S: 31 Mai 1991

Récompenses: César de la meilleure première oeuvre.
César du Meilleur Espoir Masculin pour Yvan Attal
Prix Louis-Delluc en 1989.

FILMOGRAPHIE: Erich Rochant est un réalisateur et scénariste français né le 24 Février 1961.
1989: Un Monde sans Pitié
1990: Aux Yeux du monde
1994: Les Patriotes
1996: Anna Oz
1997: Vive la République !
2000: Total Western
2006: l'Ecole pour tous


"On n'a plus qu'à être amoureux, comme des cons; et ça, c'est pire que tout.."
Récompensé de deux césars et du Prix Louis-Delluc, le premier film d'Eric Rochant est le porte parole d'une génération désabusée. Celle de la fin des idéologies des années 80 auquel une certaine jeunesse désorientée se morfondait dans les idylles naissantes alors que d'autres s'improvisaient dealer de shit pour compenser la maigreur du RMI.

Hippo est un trentenaire sans illusion, vivant en collocation d'un appartement précaire avec son jeune frère vendeur de drogue. Un jour, il rencontre Nathalie, une ambitieuse étudiante et tombe facilement sous son attrait naturel. Ensemble, ils vont tenter d'envisager une liaison romantique malgré leur personnalité divergente et un regard antinomique sur le monde contemporain. 
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Pour un premier essai derrière la caméra, Eric Rochant aura marqué toute une génération de cinéphiles avec ce portrait aigri d'un jeune chômeur avide de liberté épanouie mais incapable de s'insérer dans une société individualiste et drastique. Régulièrement appréhendé par la police, faute de l'état délabré d'un véhicule volé et vivant sous le toit de son jeune frère, dealer de shit, Hippo sacrifie son temps dans les soirées festives entre amis ou les parties de poker illégalement financières. Avec la rencontre impromptue d'une jeune fille optimiste pleine de vigueur, il va à nouveau se laisser attendrir par l'amour pour mieux supporter la tare d'une vie miséricorde sans espoir de réussite sociale. Au fil de leur relation en demi-teinte d'un caractère distinct et du pessimisme nihiliste d'Hippo, leur liaison amoureuse va peu à peu s'étioler dans une déception inéquitable.


Dans une ambiance morose et nonchalante scandée par la mélodie fragile de Gérard Torikian, Eric Rochant dresse un douloureux portrait sur un quidam déboussolé de ses angoisses existentielles. Où ses parents puritains et austères ne comprennent plus leur rejeton fuyant instinctivement sa responsabilité pour se réfugier dans une solitude apathique. Ou les amants faussement amoureux fuient leur banalité pour renouer avec un semblant de tendresse éphémère. Ne reste alors pour Hippo que l'amitié fraternelle d'un acolyte bienveillant tout aussi défaitiste pour s'allier contre une misère sociale intransigeante.
Si le cheminement hasardeux de notre protagoniste réussit sincèrement à nous toucher et interpeller, c'est en partie grâce à la prestance du novice comédien Hippolite Girardot, livrant peut-être son rôle le plus intense. D'un naturel révolté dans son idéologie misanthrope, il parvient admirablement à retranscrire sa détresse sous-jacente et son lourd désarroi face à un monde sans pitié tributaire de l'égotisme et du chômage expansif.


Hormis un début parfois emphatique dans les rapports humains contradictoires, Un monde sans pitié réussit souvent à provoquer une fébrile émotion face à tant de désillusion engendrée par un jeune glandeur inhibé par sa rage d'exister. Sa conclusion d'une acerbe ironie illustre fatalement le déclin d'une love story insoluble. 

16.11.11. 3èx
Bruno Matéï


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