jeudi 20 décembre 2012

BARBE BLEUE (Bluebeard)

                                                                Photo offerte pas Ciné-Bis-Art

de Edward Dmytryk et Luciano Sacripanti. 1972. U.S.A. 2h05. Avec Richard Burton, Raquel Welch, Virna Lisi, Nathalie Delon, Marilù Tolo, Karin Schubert, Agostina Belli, Sybil Danning, Edward Meeks, Jean Lefebvre, Mathieu Carrière.

Sortie salles France: 3 Mai 1973. U.S: 1er Septembre 1972

FILMOGRAPHIEEdward Dmytryk est un réalisateur américain, né le 4 Septembre 1908 à Grand Forks, Colombie-Britannique (Canada), décédé le 1er Juillet 1999 à Encino (Californie).
1940: Golden Gloves. 1941: The Devil Commands. 1943: Les Enfants d'Hitler. 1943: Face au soleil levant. 1946: Jusqu'à la fin des temps. 1954: Ouragan sur le Caine. 1954: La Lance Brisée. 1955: La Main Gauche du Seigneur. 1956: La Neige en Deuil. 1958: Le Bal des Maudits. 1959: l'Homme aux Colts d'or. 1966: Alvarez Kelly. 1968: Shalako. 1972: Barbe Bleue. 1975: La Guerre des Otages. 1979: Not Only Strangers. Luciano Sacripanti est le réalisateur d'un unique film: Barbe Bleue.


Enième adaptation cinématographique du célèbre conte de Charles Perrault, Barbe Bleue est une production binaire, co-réalisée par le briscard Edward Dmytryk et le novice Luciano Sacripanti. Avec une distribution éclatante de stars notoires déployant un défilé de demoiselles voluptueuses (Raquel Welch, Virna Lisi, Nathalie Delon, Marilù Tolo, Karin Schubert, Agostina Belli et Sybil Danning !), cette semi-parodie du célèbre personnage créé en 1697 est une merveille d'ironie macabre. Véritable ballet érotique de donzelles extraverties, assujetties à un misogyne impuissant, Barbe Bleue s'érige en farce saugrenue d'où l'attrait esthétique flamboyant contraste avec les corps extatiques. Dans l'antre d'un immense château rempli de pièces monochromes alternant l'azur et le carmin, une jeune épouse en instance d'exécution écoute les vicissitudes meurtrières d'un mari subordonné aux conquêtes extravagantes. 


Spoil ! Ancien héros de guerre respecté mais xénophobe, il est accoutré d'une barbe bleue afin de masquer ses cicatrices. Avec un concours de circonstances liées à la déveine, cet individu hautain à la mine renfrognée multiplie les mariages avec d'élégantes potiches dérisoires. Mais dès qu'il s'agit de passer à l'acte sexuel, Barbe Bleue se défile de la couette par frustration névrosée, faute d'une affection amoureuse pour sa mère décédée. Son cadavre embaumé est d'ailleurs préservé sous les soins d'une gouvernante sexagénaire. C'est donc au moment fatal de la copulation qu'il décide de supprimer chaque dulcinée. Anne, sa dernière épouse, est sur le point de vivre ses dernières heures parce qu'elle aura eu la malchance de pénétrer à l'intérieur d'une pièce secrète occultant les cadavres de son époux. Apeurée mais éprise d'un flegme courageux, la jeune femme va tenter de le dissuader à l'assassiner. Fin du Spoil. Humour macabre, érotisme sensuel et suspense progressif se télescopent adroitement dans cette version cynique du mythe de Barbe Bleue, incarné en l'occurrence par le monstre sacré Richard Burton. Tour à tour inquiétant, sinistre et austère, l'acteur véhicule une prestance orgueilleuse dans ses ambitions conjugales vouées aux filles ingénues particulièrement gracieuses. 


Mais sa pathologie mentale compromise à l'inhibition sexuelle lui extériorise soudainement des pulsions meurtrières misogynes afin de masquer sa propre honte. Avec un humour lubrique mais aussi une cocasserie parfois hilarante (Agostina Belli, impassible devant la découverte du cadavre momifié de la mère !), les deux réalisateurs nous concoctent une comédie érotique en forme de sketchs, où les femmes les plus radieuses (et les plus niaises !) composent des numéros de potiches totalement farfelues. Que ce soit la nonne reconvertie, la garçonne masochiste, la bonimenteuse inculte, la chanteuse aguicheuse, l'amoureuse dépitée ou la juvénile flâneuse ! Seule, la dernière épouse, Anna, (superbement campée par Joey Heatherton) réussit à tirer son épingle du jeu dans sa spontanéité et sa docilité à amadouer un tueur en série opiniâtre ! Il faut impérativement saluer le jeu espiègle de chacune des comédiennes déployant avec fougue communicative des comportements désinvoltes sous une silhouette longiline emplie de sensualité. Jalonné de meurtres inventifs au sein d'un château rempli de pièces gothiques et d'instruments de torture (la fameuse chaise électrique !), Barbe Bleue se savoure en farce lubrique rehaussée d'un suspense en nette ascension ! (caractère haletant du point d'orgue vertigineux !).


Sorti depuis peu en dvd chez Bach Films (ou disponible également en version intégrale sur certains sites du net), Barbe Bleue est un bijou d'humour noir où l'érotisme charnel des actrices exacerbe toujours plus les névroses pathologiques d'un châtelain acariâtre. A (re)découvrir de toute urgence pour les amateurs de facétie mortuaire, d'autant plus que le score épuré de Morricone inspire une concupiscente tendresse.

Un grand merci à Ciné-Bis-Art !
Bruno Matéï
20.12.12


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