jeudi 23 mai 2013

PAPER HOUSE. Grand Prix de l'Etrange à Avoriaz, 1989.


                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Zonebis.com

de Bernard Rose. 1988. Angleterre. 1h32. Avec Ben Cross, Charlotte Burke, Jane Bertish, Samantha Cahill, Glenne Headly, Sarah Newbold, Gary Bleasdale.

Récompenses: Corbeau d'Or au BIFFF 1989
Grand Prix de l'étrange à Avoriaz, 1989.
Prix de la Meilleure actrice (Charlotte Burke) et Prix spécial du jury à Fantasporto en 1989

FILMOGRAPHIE: Bernard Rose est un réalisateur, scénariste, acteur, directeur de photo et monteur britannique, né le 4 Août 1960 à Londres.
1986: Smart Money. 1987: Body Contact. 1988: Paperhouse. 1990: Chicago Joe and the Showgirl. 1992: Candyman. 1994: Ludwig van B. 1997: Anna Karénine. 2000: Ivans xtc. 2005: Snuff Movie. 2008: The Kreutzer Sonata. 2010: Mr Nice. 2011: Two Jacks.


Film culte des années 80 honteusement inédit en salles, Paperhouse fit les beaux jours des fantasticophiles qui eurent l'aubaine de le louer auprès de leur vidéo de quartier. Conte initiatique sur la puberté confrontée au deuil d'un être cher, le film de Bernard Rose est une denrée précieuse du fantastique contemporain par son pouvoir prégnant de fascination en liaison direct avec l'au-delà des songes ! Elève rebelle et chahuteuse au point d'avoir été expulsée d'un cours, Anna va subitement entretenir une étrange relation matérielle avec ses rêves. En dessinant une maison sur une feuille de papier, elle se retrouve plongée dans un monde parallèle émanant de son imagination. Après avoir appris par son entourage la grave maladie d'un jeune garçon, elle réussit à établir sa rencontre en interne du rêve puis se motive à perdurer une relation amicale. 


D'après l'oeuvre de Catherine Storr, une écrivaine spécialiste en conte pour enfants, Paperhouse est un ovni singulier à mi-chemin entre le fantastique onirique (scénographie enfantine à l'architecture baroque, nature clairsemée étrangement feutrée) et l'horreur crépusculaire (toute la partie belliqueuse au sein de la demeure centrée sur la venue du père s'avère réellement terrifiante !). Réalisé avec souci de transgression afin de bafouer les codes des genres, l'impact immersif de cette oeuvre gracile réside dans son souci d'expérimenter, notamment cet instinct de persuasion à établir un rapport commun entre le monde réel et celui des songes. Avec la dimension humaine d'une fillette candide mais désinvolte (magnifiquement campée par la nature innocente de Charlotte Burke !), Paperhouse nous confronte à son introspection compromise par une absence paternelle (son père violent et alcoolique est en l'occurrence soigné dans un centre spécialisé). Esseulée, incomprise par sa mère et en quête d'identification, elle se conçoit instinctivement un monde parallèle par l'entremise du rêve, puis tente par la même occasion d'épargner de sa propre réalité la mort d'un enfant. Par la chimère d'une adolescente, l'étrange relation que le film élabore avec notre matérialité quotidienne et celui du songe nous entraîne (par la main) dans son délire fantasmatique aussi torturé que libérateur. L'esthétisme formel alloué à toutes les séquences oniriques participe grandement à ce sentiment d'évasion que perçoit l'héroïne et le spectateur, à ce besoin inhérent d'escompter un monde meilleur afin d'apprivoiser un climat plus serein. 


Réflexion existentielle sur le sens de la réalité et la motivation du rêve, métaphore sur la puberté et nos terreurs enfantines (peur innée d'accéder à la maturité, affres de l'ogre symbolisé ici par un paternel irresponsable), Paperhouse s'achemine en conte clair-obscur pour nous rappeler avec vibrante émotion l'univers prodigieux du cap de l'enfance. 

23/05/13 (précédente diffusion 03.02.11). 4èx
Bruno Matéï

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