jeudi 27 février 2014

MARTIN

                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site silverferox.blogspot.com

de George A. Romero. 1977. U.S.A. 1h35. Avec John Amplas, Lincoln Maazel, Christine Forrest, Elyane Nadeau, Tom Savini, Roger Caine.

Sortie salles France: 5 Juillet 1978. Cannes: Mai 1977. U.S: 7 Juillet 1978

FILMOGRAPHIE: George Andrew Romero est un réalisateur, scénariste, acteur, auteur américain, né le 4 Février 1940 à New-York.
1968: La Nuit des Morts-vivants. 1971: There's Always Vanilla. 1972: Season of the Witch. 1973: The Crazies. 1977: Martin. 1978: Zombie. 1981: Knightriders. 1982: Creepshow. 1985: Le Jour des Morts-vivants. 1988: Incidents de parcours. 1990: Deux Yeux Maléfiques. 1992: La Part des Ténèbres. 2000: Bruiser. 2005: Land of the Dead. 2008: Diary of the Dead. 2009: Survival of the Dead. 2011: Deep Red.


Martin est mon film favori. Ce fut l'unique fois où je pus exactement retranscrire à l'image ce qui était écrit dans le scénario. Je me rappelle également le plaisir que j'ai eu à le réaliser, épaulé par une équipe fantastique. Un moment très fort de ma carrière.
George Romero.

Considéré comme l'oeuvre la plus personnelle et préférée de son auteur, Martin emprunte le mythe du vampire avec une originalité sans égale. Baignant dans une atmosphère dépressive, le film illustre le cheminement mortuaire de Martin, un jeune homme timoré contraint de se nourrir de sang humain sans qu'il connaisse la véritable raison de son addiction. Afin de ne pas faire souffrir ses victimes, il les endort avec un sédatif avant de leur entailler les veines et ingurgiter leur sang. De retour dans sa région natale, Martin est froidement accueilli par son oncle, un vieillard intégriste persuadé que son neveu est l'incarnation de Nosferatu ! 


Au niveau des meurtres sanglants qui émaillent le récit, ils s'avèrent plutôt crus dans leur réalisme que les FX conçus par le débutant Tom Savini vont renforcer avec une simple efficacité ! Outre le gore déployé, il en émane aussi une ambiance glauque et malsaine par son esthétisme blafard et ces décors restreints (le compartiment d'un train, le vase clos d'une maison) ou industriels (l'usine de Pittsburgh dégageant d'épaisses fumées de pollution). Filmé à la manière d'un documentaire, George Romero dépeint donc le constat d'un univers anxiogène où tous les personnages que l'on côtoie éprouvent un malaise existentiel au sein de leur société conformiste. Les thèmes de l'adultère, du fanatisme religieux et de la solitude sont largement mis en avant afin de dépeindre l'errance de citadins en manque de repères où ennui, incommunicabilité et chômage les confinent vers la sinistrose. En marginal criminel, Martin observe cette population avec amertume puisque incapable d'entamer une amitié durable avec ses proches SPOILER ! (sa cousine décide de quitter le foyer de son oncle pour rejoindre un amant infidèle, quand bien même la voisine avec qui il avait eu un rapport sexuel finit par se suicider) FIN DU SPOILER. D'un pessimisme radical, le film inspire aussi l'empathie vis à vis de ces citadins esseulés et auprès du triste destin de Martin (son châtiment cruel invoqué en guise d'expiation). Sa condition pathologique de vampire malgré lui nous décrivant une victime incapable de contenir ses pulsions tout en étant consciente qu'elle n'est en rien le monstre immortel mimé au cinéma. D'apparence blême et d'une timidité refoulée, on peut saluer l'interprétation viscérale de John Amplas, incarnant à merveille un tueur complexé par son instinct morbide et la crainte des femmes (outre sa coucherie avec Mme Santini, il les endort avant de les violer), faute d'une éducation parentale sectaire. 


Désenchanté et mélancolique (l'élégie musicale de Donald Rubinstein y doit également beaucoup !), dérangeant et malsain, beau et fascinant, Martin renouvelle le mythe du vampire dans une vision personnelle afin de mettre en exergue l'aliénation d'une société anachronique. 

Bruno Matéï

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