lundi 10 octobre 2016

DESIERTO. Prix FIPRESCI, Toronto 2015.

                                                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Jonás Cuarón. 2015. Mexique. 1h32. Avec Gael García Bernal, Jeffrey Dean Morgan, Alondra Hidalgo, Diego Cataño, Marco Pérez,

Sortie salles France: 13 Avril 2016. Interdit - de 12 ans. Mexique: 15 Avril 2016.

FILMOGRAPHIE: Jonás Cuarón est un réalisateur et scénariste mexicain né en 1981 à Mexico. Il est le fils d'Alfonso Cuarón.
2007: Año uña. 2007: The Shock Doctrine (documentaire). 2013: Aningaaq (court métrage). 2015:
Desierto.


Survival cauchemardesque d'un réalisme percutant, Desierto est la seconde réalisation du mexicain Jonas Cuaron, fils du célèbre cinéaste Alfonso Cuaron (Les Fils de l'homme, Gravity). A partir d'un pitch linéaire (des migrants mexicains voulant rejoindre les Etats-Unis par le désert californien sont subitement coursés par un prédateur raciste), Jonas Cuaron exploite habilement son potentiel alarmiste sous l'impulsion d'une chasse à l'homme escarpée ! Optant comme unité de lieu la vaste scénographie d'un désert rocheux émaillé d'éléments hostiles (les sentiers des cactus, le nid des serpents, les immenses rochers blancs), le cinéaste magnifie son cadre solaire et crépusculaire (photo naturel à l'appui !) que les protagonistes à bout de souffle arpentent avec la peur au ventre !


En relançant efficacement l'action des règlements de compte par de multiples itinéraires que ces derniers improvisent par instinct de survie, Desierto laisse les mains moites à observer de manière aussi impuissante une dérive criminelle d'autant plus intolérable par ses actes xénophobes. D'un réalisme âpre quant au sentiment de déréliction que les survivants éprouvent inlassablement, Desiorto recourt à une violence tranchée lorsqu'un chasseur habité par la haine de l'étranger décide de les exterminer avec une ruse perfide. Et sur ce point, on peut compter sur le charisme impérieux de Jeffrey Dean Morgan (Sans retour, Extrême Préjudice) pour exprimer la posture virile d'un bourreau méprisant de lâcheté et de turpitude. Avec l'appui d'un berger allemand dressé pour tuer, le cinéaste compte notamment sur ce pilier secondaire pour perdurer la tension des poursuites par le biais d'estocades criminelles d'une grande violence ! Sans romancer la notion d'héroïsme, le cinéaste dresse notamment le portrait équivoque d'un migrant mexicain (Gael García Bernal impressionnant de vigueur viscérale dans son regard en émoi !) partagé entre un courage endurant mais aussi une lâcheté contestable (une condition pourtant indispensable à la survie !), Spoiler ! même si au final son instinct de préserver la vie d'autrui le rappellera à l'ordre ! Fin du Spoil.


“La lâcheté, cette condition que personne ne reconnaît ou n'accepte, pourtant indispensable à la survie.”
Pamphlet anti raciste, hymne à l'espoir de la liberté par l'entremise du courage de la survie, Desierto exploite le thème éculé de la chasse à l'homme avec une efficacité en roue libre. Tant par le brio de sa mise en scène ne cédant jamais à une vaine esbroufe que par la prestance humaine des seconds-rôles pleinement investis dans leur fonction de bêtes traquées. Excellent. 

B-M

Le point de vue de Jean-Marc Micciche
Séance de rattrapage avec le magnifique survival Desierto. On se souviens déjà l'année dernière de The sea fog, les clandestins, où comment un sujet qui prêtait un traitement dramatique se laissait déborder par l'horreur de son sujet pour embrasser quelques chose de plus viscérale. Par son jusqu'au boutisme, The sea fog transcendait les clichés pour afficher une vrai démarche d'auteur dans le cinéma de genre. Et un an plus tard, à travers un sujet qui malheureusement schlingue le fait divers, Desertio nous montre qu'il n'y a rien de mieux qu'un sujet de B Movies pour nous parler avec horreur de notre époque. Le méchant du film du film incarné comme un ange de la mort (magnifique Jeffrey Dean Morgan) est le prisme révélateur de notre époque. Dans les années 80, on tapait sur le clochard, sur le voyou, sur les russes. Aujourd'hui, la source de haine et de peur est incarné par l'émigré, l'étranger, le clandestin. A travers son postulat aussi simple qu'évident (des clandestins se font charcler comme des merdes par un malade et son clébard), Desertio suit une logique narrative inébranlable. Bien sûr, cerise sur le gâteau, Desertio renvoie par sa simplicité et sa force brute à une pléthorique bande culte, de Duel en passant par Hitcher, Calme Blanc, Blue Steel auquel on peut aussi cité le moins connu Marathon Killer), un sens du cadre et de l'atmosphère (le plan d'ouverture est sublime) qui captive et réjouit, un décor qui incarne à merveille cette descente en enfer. Pas de pose 'festival' (comme Ma loute, The Assassin ou The Neon Demon), juste une ligne brute, qui nous rappelle que le cinéma sera toujours le meilleur sous cette forme. Alors on peut regretter que le score musical ne soit pas plus tranchant (un truc à la Tangerine dream), que le face à face final ne se pas nourrit pas un idée plus marquante. Mais honnêtement pour un premier film, Jonas Curaon frappe juste et fort pour marquer les esprits.

Récompenses: Prix FIPRESCI au Festival international du film de Toronto 2015 : sélection « Special Presentations »

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire