mardi 13 juin 2017

A CURE FOR LIFE

                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site nerdist.com

"A Cure for Wellness" de Gore Verbinski. 2017. U.S.A/Allemagne. 2h27. Avec Dane DeHaan, Jason Isaacs, Mia Goth, Celia Imrie, Harry Groener, Adrian Schiller.

Sortie salles France: 15 Février 2017. U.S: 17 Février 2017

FILMOGRAPHIEGregor « Gore » Verbinski est un réalisateur et producteur américain né le 16 mars 1964. 1997 : La Souris. 2001 : Le Mexicain. 2002 : Le Cercle : The Ring. 2003 : Pirates des Caraïbes: La Malédiction du Black Pearl. 2005 : The Weather Man. 2006 : Pirates des Caraïbes: Le Secret du Coffre maudit. 2007 : Pirates des Caraïbes: Jusqu'au bout du Monde. 2011 : Rango. 2013 : Lone Ranger, naissance d'un héros. 2017 : A Cure for Life.


Psycho thriller (aquatique) sous couvert de satire caustique sur la compétition financière, A cure for Life joue la carte du suspense horrifique sous le pilier d'un scénario complètement mad ! Et ce en dépit d'une dernière partie emprunt de facilités dans ses rebondissements anticipés et l'absence de perspicacité du héros à démêler le vrai du faux. Pour autant, l'intrigue machiavélique et ses thèmes impartis à l'éternelle jeunesse préservent son pouvoir de fascination dans sa faculté à susciter l'inquiétude sans esbroufe, et ce en dépit de séquences-chocs viscérales à la limite du supportable ! (la chirurgie dentaire ou encore le lavage d'estomac que le patient endure à déglutir de visqueuses anguilles). Ayant pour mission de rapatrier son patron parti en cure dans un sanatorium germanique, Lockhart se retrouve pris au piège au sein de cet établissement renfermant un obscur passé quant à la relation incestueuse des anciens propriétaires des lieux. Un éminent baron avide de pureté et sa soeur condamnée au bûcher par les villageois. D'une durée conséquente de 2h27, A cure for Life nous immerge dans un cauchemar anxiogène résolument captivant en sus d'instaurer une fulgurance visuelle d'un onirisme baroque. Tant auprès d'un panorama montagneux à donner le vertige que des pièces de la clinique constituées de piscine, d'un réfectoire, de couloirs limpides et passages souterrains secrets. Pour un peu, on se croirait à la croisée de Suspiria et du Fantôme de l'Opéra, notamment si je me réfère à sa dernière partie flamboyante (valse en trois temps à l'appui !), pur hommage à une épouvante archaïque réactualisée dans un contexte moderne.


Gore Verbinski stylisant à merveille le cadre ésotérique du château par le truchement d'une photo blafarde d'un vert criard. Retraçant scrupuleusement la lente descente aux enfers morale du jeune cadre témoin d'évènements irrationnels si bien qu'on lui soupçonne une pathologie paranoïaque à daigner coûte que coûte imputer la responsabilité d'une disparition (Mr Pembroke) au corps médical, A cure for a life fait illusion au moins durant 90 mns. Chargé d'un mystère latent autour d'hallucinations cauchemardesques qu'éprouve celui-ci dans son esprit contrarié, et auprès d'une présence féminine famélique sortie d'un conte de fée vitriolé, A cure for Life baigne dans un climat aussi bien dérangeant que malsain. La présence naturelle et omniprésente de "l'eau", élément purificateur que chaque patient s'adonne goulûment nous suscitant un trouble sentiment de méfiance puis de malaise viscéral ! Là où le bat blesse un peu (voir beaucoup chez les plus aguerris), c'est que sa dernière partie plus démonstrative s'avère moins habile et surprenante quant aux tenants et aboutissants de l'entreprise médicale et la manière malhabile de suspecter l'éventuelle psychose du héros. Cependant, cette ambiance schizo indécrottable et sa facture visuelle éminemment ensorcelante culminant au règlement de compte autrement horrifique parviennent à instaurer une emprise démoniaque aussi bien vénéneuse que charnelle (la dernière image évocatrice la conclut de manière corrosive !).


Les Amants d'outre-tombe
Servi par une distribution convaincante dont le charisme interlope fonctionne sans fard, A cure for Life affiche un réalisme cauchemardesque au sein d'un thriller méphitique chargé de malaise. Certes imparfait lors de sa dernière demi-heure mais pour autant fascinant dans son alliage de conte de fée frelaté et de variation moderne du vampirisme. 

Dédicace à Ruuffet Nelly
Bruno Matéï

La critique de Nelly Ruuffet:
Lockhart est un jeune cadre ambitieux. Il doit retrouver un certain Pembroke, son patron, qui a disparu dans un mystérieux centre dans les Alpes suisses. Lockhart se retrouve alors pris au piège de cet étrange institut et de son corps médical. On lui diagnostique le même mal qui habite l’ensemble des pensionnaires. Lockhart est obligé de se soumettre à l’étrange cure délivrée par le centre.

Un thriller fantastique à l’ambiance vénéneuse et au visuel incroyable ! Dès le début du film, le ton est donné, le spectateur sait d’emblée qu’il va être immergé dans un univers malsain voire psychotique où l’eau tient un rôle majeur et nous sera montrée sous un angle inédit particulièrement dangereux pour la santé. Le visuel est majoritairement verdâtre et sombre au sein de l’institut – ce qui provoque une impression de malaise - et les scènes en extérieur dans le jardin de la cure nous paraissent paradoxalement malsains, dérangeants. On scrute tout, comme Lockhart, qui comprend au fur et à mesure du film à quel point tout est manigancé pour le faire tourner en bourrique. L’ambiance horrifique est omniprésente, le spectateur n’a pas une seconde de répit et l’on sait très vite que l’on a affaire à un film hors du commun pour son temps qui sort des sentiers battus.

Verbinski semble avoir digéré de multiples références allant de Shining (la scène sur le route avec ce point de vue surplombant au-dessus des montagnes) aux films de Cronenberg (Volmer nourri aux anguilles, les morts vivants que deviennent les patients, le côté expérimental, notamment au cours de la scène où Lockhart est immergé dans une cuve et où ses visions sont mêlées à l’imaginaire érotique et malsain de l’homme et de la femme censés surveiller l’expérience) et à l’esthétique gothique (la musique dans le bar où Hannah et Lockhart s’échouent, la cure en elle-même qu’on rapproche très facilement d’une maison aux prises avec des esprits malins, le sous-sol etc). L’ambiance sonore du film est elle aussi démente tant elle nous tient sur les nerfs pendant presque 2 heures 30 : bruits anxiogènes de glaçons dans une carafe filmée en gros plan lorsque Lockhart s’évanouit dans la salle du réfectoire, craquements des dents des patients au contact de la nourriture, déglutitions, bruits angoissants d’une mécanique pulsée etc. Sans compter le fameux air chantonné par Hannah que l’on entend dès les premières minutes du film et qui est directement associé à la mort.

Le personnage d’Hannah est fascinant, il fait directement penser à l’univers d’Alice au pays des merveilles mais une Alice désenchantée, perdue, entourée d’une aura funeste qui perdurera jusqu’à la fin du film. Elle restera un des noyaux qui fait tenir l’intrigue en parallèle des pérégrinations de Lockhart, toutes + anxiogènes les unes que les autres. Les personnages se meurent dans un univers entre cauchemar et réalité, ce qui fait d’ailleurs écho symboliquement à la ballerine peinte par la mère de Lockhart qui, en décrivant la figurine, affirmait qu’elle vivait dans un rêve sans le savoir.

Le film est peuplé de scènes fortes que personne n’oubliera après le visionnage : que dire de la scène du dentiste et du bourrage d’anguilles, très difficilement supportables ! D’autant que le choix des plans est très fin, on voit Lockart d’un œil surplombant, on se retrouve face au regard horrifié de l’homme d’affaires et de ses gémissements désespérés. Les scènes où l’on voit les patients immergés dans des cuves d’eau, figés comme des rats de laboratoires coupent le souffle également ! Le spectateur est pétrifié.

Le seul bémol se situe dans les dernières 45 minutes avec des ficelles un peu trop faciles même si elles n’en perdent pas pour autant leur pouvoir envoûtant et vénéneux. La scène de « révélation » aux patients est somme toute attendue mais bien menée tout autant que la fulgurance de la scène funèbre du bal, dont le classicisme apparent est pénétré d’une esthétique baroque très bien menée, alternant avec la poursuite de l’intrigue. Une œuvre très riche, captivante, très esthétisée et fascinante à bien des niveaux !!! Une petite merveille !

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