vendredi 28 septembre 2018

AUCUN HOMME NI DIEU

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Hold the Dark" de Jeremy Saulnier. 2018. U.S.A. 2h06. Avec Jeffrey Wright, Alexander Skarsgård, James Badge Dale, Riley Keough, Julian Black Antelope, Macon Blair.

Diffusé sur Netflix le 28 Septembre 2018

FILMOGRAPHIE: Jeremy Saulnier est un réalisateur, scénariste et directeur de photographie américain. 2007: Murder Party. 2013: Blue Ruin. 2015 : Green Room. 2018 : Aucun homme ni Dieu.


Excellent thriller à la lisière de l'horreur et d'un fantastique mystique, Aucun homme ni dieu est une descente aux enfers aux tréfonds de l'âme humaine que Jeremy Saulnier maîtrise avec un brio indiscutable. Un retour à la sauvagerie primitive de par le passé traumatique d'hommes profondément offensés par la barbarie (celle de la guerre), la désillusion et l'injustice, faute de disparitions infantiles irrésolues. Ne comptant que sur leur indépendance, ils se résignent à perpétrer l'auto-justice au sein d'une contrée indienne livrée à la ségrégation et au laxisme d'une police infructueuse ! En Alaska, une mère de famille implore à un spécialiste de retrouver le loup criminel de son jeune fils mystérieusement disparu. Russel Core accepte en toute loyauté, et ce sans y être rémunéré. Dès lors, il part à la traque aux loups avant de se raviser le soir même et de retourner chez l'étrange inconnue à son tour disparue. Mais la subite présence macabre de son défunt fils va amener Russel à reconsidérer l'improbable situation parmi l'ingérence de la police. D'une extrême violence au sein d'un panorama naturel aussi vaste qu'envoûtant et impénétrable, Aucun homme ni dieu dilue une vénéneuse atmosphère hostile. De par son silence ouaté aux relents de magie noire et des agissements putassiers de criminels interlopes dont il est difficile d'y cerner les véritables enjeux dans leur détermination à ne laisser aucune clémence à leurs prochains.


Tant auprès du corps policier que de la communauté indienne, voir aussi auprès de quidams sans défense. Imprégné de mystère diffus et de suspense latent, l'intrigue semée d'éclairs de violence abrupts (le massacre des policiers est une chorégraphie morbide proprement anthologique !) nous laisse le souffle coupé de par son réalisme effréné et sa radicalité à ne laisser aucune concession aux victimes d'autant plus innocentes et (le plus souvent) lâchement molestées. Profondément nihiliste, amer, noir et sans espoir, Aucun homme ni Dieu nous dresse un triste tableau de la nature humaine dépendante de son instinct primitif, de sa perversité (Spoil on y suggère en prime l'inceste selon notre interprétation fin du Spoil), de son hypocrisie, de ses mensonges, trahisons et coups bas si bien qu'elle se résigne à purifier son entourage lors d'un bain de sang paroxystique. Or, une majorité de spectateurs risque finalement de faire grise mine quant au dénouement hermétique du récit en suspens nous réservant plus de questions que de réponses quant aux véritables intentions des criminels en étroite relation avec la nature sauvage des loups (et une complicité paraphile). Dans la mesure où les us et coutumes de ces derniers (celle par exemple d'entamer un infanticide pour préserver leur groupe en cas de survie) s'avère difficilement explicable, notamment si on oppose les états d'âme équivoques (pour ne pas dire déviants) du couple maudit anéanti par le chagrin d'une mort innocente.


Un homme parmi les loups
Bougrement dommage donc que ce final mystique à multiples niveaux de lecture sème doute et frustration quant à l'ultime coupable de cet infanticide en étroite relation avec la cause des loups. Car Aucun homme ni Dieu était à deux doigts d'effleurer la réussite probante, notamment sous l'impulsion vigoureuse de son casting inquiétant laissant libre court à des pulsions dépressives dévastatrices. Où lorsque l'homme ne croit plus en sa nature humaine mais en l'éthique du loup ! 

* Bruno

jeudi 27 septembre 2018

MASK. Prix d'interprétation féminine, Cannes 85.

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Peter Bogdanovitch. 1985. U.S.A. 2h00. Avec Eric Stoltz, Cher, Sam Elliott, Estelle Getty, Richard Dysart, Laura Dern.

Sortie salles France: 29 Mai 1985. U.S: 8 Mars 1985.

FILMOGRAPHIEPeter Bogdanovich est un critique, réalisateur et acteur de cinéma américain né le 30 juillet 1939 à Kingston, New York. 1968 : Voyage to the Planet of Prehistoric Women. 1968 : La Cible. 1971 : La Dernière Séance. 1971 : Directed by John Ford (documentaire). 1972 : On s'fait la valise, docteur ? 1973 : La Barbe à papa. 1974 : Daisy Miller. 1975 : Enfin l'amour. 1976 : Nickelodeon. 1979 : Jack le Magnifique. 1981 : Et tout le monde riait. 1985 : Mask. 1988 : Illégalement vôtre. 1990 : Texasville. 1992 : Bruits de coulisses. 1993 : Nashville Blues. 2001 : Un parfum de meurtre. 2007 : Tom Petty and the Heartbreakers: Runnin' Down a Dream (documentaire). 2014 : Broadway Therapy. 2018 : The Great Buster.


"Ce qu'il y a de bien dans la vie, esquimaux et gâteaux, balades en moto, chimpanzés en liberté, la pluie sur ma langue et le soleil qui inonde mon visage. Ce qu'il y a de moche dans la vie, poussière dans mes cheveux, trous dans mes souliers, pas de sous dans mes poches et le soleil qui inonde mon visage." 

Bouleversant mélo retraçant le destin singulier d'un adolescent atteint de dysplasie craniométaphysaire (visage allongé difforme apparenté à un masque), Mask s'inspire de l'histoire vraie de Roy L. Dennis avec une vérité humaine brute de décoffrage. Les comédiens se fondant dans leur rôle avec une spontanéité fringante si bien que l'on se familiarise à leur côté comme s'il s'agissait de notre propre famille. Cet esprit de famille gravitant autour de Rocky, cette tendresse immodérée imprimée dans la réalité de leur quotidien marginal, Peter Bogdanovich les met en exergue avec une dignité souvent intègre. Et ce en dépit d'un soupçon de pathos à certains brefs moments (particulièrement à travers les expressions de 2/3 regards constipés) et de la facilité de bons sentiments rapidement pardonnés grâce à la vigueur des comédiens pleinement impliqués à travers leur idéologie libertaire. Mask nous relatant avec autant de pudeur que de candeur le parcours initiatique, la remise en question identitaire de Rocky en proie à une soif de vivre ainsi qu'une quête désespérée d'y apprivoiser l'amour. Ainsi, ce sentiment insupportable d'abstinence, cette appréhension de ne jamais connaître la chaleur d'un baiser charnel, Eric Stoltz nous les retransmet avec une sensibilité écorchée vive !


Plaidoyer pour le droit à la différence, à l'instar du chef-d'oeuvre Elephant Man, Mask nous laisse également en état second eu égard de son intensité dramatique convergeant vers une cruelle conclusion résolument crève-coeur. Outre le soin scrupuleux d'y dresser l'inoubliable portrait d'un ado défiguré inévitablement sujet aux brimades, à l'intolérance et à la discrimination, Peter Bogdanovich se permet notamment à travers le jeu si chétif et maternel de (l'ultra sexy !) Cher d'y esquisser un magnifique profil de mère marginale à la fois caractérielle, instable et paumée, faute de ses rencontres lubriques d'un soir et de son addiction pour la drogue auprès d'une communauté de motards pour autant humbles et solidaires. Pour se faire, la comédienne (chanteuse) n'a pas dérobé son Prix d'Interprétation Féminine à Cannes dans sa palette de sentiments contradictoires naviguant entre déchéance morale, remord et rédemption. Et ce pour la cause d'un amour immodéré pour son rejeton et celui (en ascension) de son amant (que campe sobrement le génial car si charismatique Sam Elliott). Couple mythique s'il en est, Eric Stoltz (méconnaissable en freak d'une sensibilité aiguë !) et Cher immortalisent de leur empreinte un recueil de tendresses et d'émotions à travers leur trajectoire existentielle semée de discordes, de scènes de ménages, de conflits familiaux, si bien que l'allégresse, l'espoir et l'infortune ne cessent de se chamailler la mise.


Un crève-coeur désarmant d'intensité prude. 
Terrassant d'émotions (même si certains accuseront le coté futilement mielleux de certaines postures sensiblement outrées) à travers son message d'amour, de vie et de sagesse entre une mère immature et son fils difforme, Mask ébranle le coeur avec un réalisme trouble si je me réfère aux souvenirs qu'il nous imprime passé le générique de fin. Dans la mesure où le spectateur hanté de ces décharges émotionnelles semble avoir la trouble impression d'avoir perdu un propre membre de sa famille. 

Amitié à Seb Lake.

* Bruno
4èx

Récompense: Prix d'interprétation féminine pour Cher, Cannes 1985.


Roy L. Dennis

mercredi 26 septembre 2018

Les Aventures d'un Homme Invisible / Memoirs of an Invisible Man

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de John Carpenter. 1990. U.S.A. 1h39. Avec Chevy Chase, Daryl Hannah, Sam Neill, Michael McKean, Stephen Tobolowsky, Jim Norton.

Sortie salles France: 29 Juillet 1992. U.S: 28 Février 1992

FILMOGRAPHIE: John Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis). 1974 : Dark Star 1976 : Assaut 1978 : Halloween, la nuit des masques. 1979: Le Roman d'Elvis. 1980 : Fog 1981 : New York 1997 1982 : The Thing 1983 : Christine 1984 : Starman 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles 1992 : Les Aventures d'un homme invisible 1995 : L'Antre de la folie 1995 : Le Village des damnés 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward.


Echec critique et commercial à sa sortie alors qu'il s'agit d'une des rares commandes du maître John Carpenter, Les Aventures d'un Homme Invisible ne méritait pas tant de discrédit à travers son format de série B ludique dénuée de prétention. Et si l'intrigue minimaliste a de quoi décevoir les plus exigeants (une simple course poursuite entre bons et méchants sur fond d'étreinte amoureuse), John Carpenter parvient intelligemment à s'extirper de la routine de par la disparité de situations aussi funs que cocasses (avec un discours autrement caustique sur la fidélité amicale souvent biaisée), par l'inventivité de ces effets-spéciaux aussi surprenants que convaincants et par la tendre complémentarité du duo impromptu Chavy Chase / Daryl Hannah franchement attendrissant en amants marginaux s'épaulant mutuellement afin de s'opposer à l'espionnage international que Sam Neil leur sollicite avec un cynisme perfide en odieux mégalo usant de son pouvoir régi par la CIA. 


Le couple en fuite portant le film sur leurs épaules tant Carpenter accorde beaucoup d'importance à leur romance fusionnelle à travers le thème si cher du droit à la différence. Si bien que la tendre compagne d'Harvey accepte facilement la condition atypique de son amant de par les sentiments ardents qu'elle éprouve pour lui en n'attachant aucune importance à son physique aseptique. Emaillé de courses-poursuites et scènes d'action plutôt bien troussées au sein d'une métropole joliment photographiée, les Aventures d'un Homme Invisible cède notamment place à un onirisme candide (proche de la féerie) au fil de l'évolution sentimentale du couple apprenant à se connaître dans la confiance et la confidence puis à s'épauler avec une émotion attendrie modestement charmante. Et ce sans sombrer dans une quelconque mièvrerie, notamment grâce à la sobriété des comédiens suscitant une intègre chaleur humaine qu'on ne retrouve plus de nos jours, faute de cinéastes opportunistes comptant le plus souvent sur une action hyperbole pour y combler le grand public. 


Un fort sympathique divertissement donc, aussi mineur soit-il (ce qui renforce aujourd'hui son charme rétro), parvenant sans temps morts à amuser et à fasciner de par l'astuce retorse de ses nombreux trucages efficacement gérés autour d'une traque aussi fun que tendrement romantique. 


* Bruno
11.05.22. 3èx

mardi 25 septembre 2018

MR. MAJESTYK

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site dailymars.net

de Richard Fleischer. 1973. U.S.A. 1h43. Avec Charles Bronson, Al Lettieri, Linda Cristal, Paul Koslo, Frank Maxwell.

Sortie salles France: ?. U.S: 17 Juin 1974.

FILMOGRAPHIE: Richard Fleischer est un réalisateur américain né le 8 décembre 1916 à Brooklyn,  et décédé le 25 Mars 2006 de causes naturelles. 1952: l'Enigme du Chicago Express, 1954: 20 000 lieux sous les mers, 1955: les Inconnus dans la ville, 1958: les Vikings, 1962: Barabbas, 1966: le Voyage Fantastique, 1967: l'Extravagant Dr Dolittle, 1968: l'Etrangleur de Boston, 1970: Tora, tora, tora, 1971: l'Etrangleur de Rillington Place, 1972: Terreur Aveugle, les Flics ne dorment pas la nuit, 1973: Soleil Vert, 1974: Mr Majestyk, Du sang dans la Poussière, 1975: Mandingo, 1979: Ashanti, 1983: Amityville 3D, 1984: Conan le destructeur, 1985: Kalidor, la légende du talisman, 1989: Call from Space.


Modèle d'efficacité au sein du film d'action que Richard Fleischer supervise avec souci professionnel, Mr. Majestyk est un jubilatoire jeu de massacre transcendé par le tempérament imperturbable de Charles Bronson en justicier louable. Je m'explique: propriétaire de pastèques auprès de 65 hectares, Vince Majestyk envisage d'employer de modestes ouvriers mexicains au moment même où un exploiteur sans vergogne souhaite les substituer par ses hommes de main. Face au refus péremptoire de Vince et après s'être affrontés verbalement, une risque s'ensuit entre eux mais Vince parvient à dérober la carabine de son rival pour le brimer à nouveau. Arrêté par la police suite à la plainte de son agresseur, c'est en cellule qu'il fait la connaissance du mafieux Frank Renda. Totalement indifférent à sa réputation criminelle, Vince se contente de le railler alors qu'au moment d'escorter Renda vers un autre pénitencier, des règlements de compte sanglants ont lieu en centre urbain afin de le faire évader. Mais dans le feu de l'action, Vince parvient à s'échapper en bus avec Renda.


Après s'être planqués dans une cabane, ce dernier lui propose une transaction en échange de sa liberté. Loyal, honnête mais rusé, Vince décide plutôt d'opérer un marché avec la police afin de récupérer sa propre liberté et ses pastèques à cueillir. Mais grâce à la complicité de sa compagne venue lui prêter main forte, Renda parvient in extremis à s'évader. Dès lors, transi de haine et de rancoeur, il jure de se venger en souhaitant la peau de Vince. Fort de cette intrigue habilement structurée, prétexte à règlements de compte sanglants et poursuites en règles jamais gratuits (rare pour ne pas le souligner dans le cadre du film d'action bourrin !), Mr. Majestyk diffuse un rythme effréné pour tenir lieu d'un affrontement stoïque entre un mafieux aussi obtus qu'empoté et un ancien vétéran du Vietnam, fin limier et héros aguerri en justicier gouailleur ! Et donc à travers un jubilatoire jeu du chat et de la souris où les rôles seront amenés à s'inverser en cours de trajectoire épique, Mr. Majestyk redouble d'efficacité en opposant l'injustice d'une violence expéditive résolument couarde contre une auto-justice contre-intuitive misant sur le self contrôle que Bronson instaure avec une force tranquille imprégnée de dérision. Le tout dans le cadre solaire d'une série B purement ludique à la scénographie rurale.


Western moderne survitaminé pour autant jamais racoleur lors des récurrentes confrontations (aussi bien verbales que physiques) entre bons et méchants, Mr. Majestyk s'adonne à la ferveur expansive à travers les charismes striés du légendaire Charles Bronson et du robuste (par la taille) Al Lettieri aussi bien impressionnant que délectable en salopard sournois ne reculant devant aucune turpitude pour avoir le dernier mot. D'autres seconds-rôles aussi irrésistibles dans leur posture chafouine sont également à la fête (Paul Koslo en faire-valoir mesquin), quand bien même la très élégante et attachante Linda Cristal tente de se faire une place dans le coeur de Bronson avec une détermination sentimentale entêtée. Rondement mené car réalisé de main de maître sous l'impulsion dramatique de quelques éclairs de brutalité assez rugueux (et ce même si le hors-champs est parfois de mise), Mr Majestyk se permet en prime d'inciser ses dialogues à travers des répliques aussi cocasses qu'inventives nous provoquant le rire nerveux ! Une véritable réussite "vintage" auquel le dernier blockbuster mainstream fait bien pâle figure. 

* Bruno
3èx

lundi 24 septembre 2018

Superstition / la malédiction de la sorcière


de James W. Roberson. 1982. Canada. 1h26. Avec James Houghton, Albert Salmi, Lynn Carlin, Larry Pennell et Jacquelyn Hyde.

Sortie salles Canada: 12 Mars 1982

FILMOGRAPHIE: James W. Roberson est un réalisateur canadien. 1980: The Legend of Alfred Packer (sous le nom de Jim Roberson). 1982: Superstition. 1991: The Giant of Thunder Mountain.

                                  

Une ambiance morbide native du Canada. 
Inspiré par la vague des films de demeure hantée ayant sévi quelques années plus tôt (Poltergeist, Amityville 1 et 2le Couloir de la mort, Trauma), Superstition fut à l'époque de sa sortie Vhs un hit dans les rayons des vidéo-clubs chez l'amateur de gore festif au grand dam de son invisibilité en salles dans nos contrées. Car outre son alléchante jaquette horrifico-sensuelle, il doit en effet son succès et sa réputation grâce à l'efficacité de ses effets-spéciaux réalisés de manière professionnelle car n'ayant rien à envier aux exploits de maître notoires comme Tom Savini, Ed French ou encore  Dick Smith. 
Le pitchAlors que deux meurtres inexpliqués viennent d'avoir lieu dans une demeure abandonnée réputée hantée, les paroissiens d'une église décident de la mettre en location. Rapidement, une famille y emménage. Mais de mystérieux évènements ne vont pas tarder à se manifester alors que la police aux aguets tente d'appréhender le potentiel criminel.

                                  

Réalisé sans prétention et avec amour du genre, ce B movie inédit en salles aura marqué toute une génération de vidéophiles des années 80 tant le bouche à oreille fut rapidement enthousiaste. Le film étant surtout précédé d'une réputation sulfureuse de par sa violence graphique pour me répéter. Mais lorsque l'on revoit aujourd'hui Superstitions (j'en suis au 7è visionnage !), on se rend compte à quel point son scénario linéaire et le jeu perfectible (mais quelque peu attachant) des comédiens méconnus peuvent être palliés par l'abondance de scènes horrifiques particulièrement sanglantes et spectaculaires ainsi que par son atmosphère horrifique symptomatique des années 80. Si bien que personne n'a omis son inquiétant préambule (la meilleure séquence du film !) baignant dans une ambiance feutrée lorsque deux énergumènes confinés dans une sombre demeure abandonnée seront sauvagement assassinés par une entité surnaturelle. Corps élevé en lévitation pour être violemment fracassé contre le plafond, tête humaine explosée dans un micro onde, et surtout l'impressionnante séquence auquel un des jeunes lascards se retrouve coincé entre une porte fenêtre se refermant subitement sur son corps sectionné en deux. Une scène abrupte réellement bluffante de par son impact réaliste et sa cruauté incisive qui s'ensuit.

                                    

Ainsi, ce prologue prometteur riche en ambiance diffuse et émotions fortes s'avère sa meilleure attraction avant de renouer avec ce même climat à la fois mortifère, sanglant et explosif lors de son point d'orgue truffé de péripéties meurtrières. A l'instar de cette séquence cinglante illustrant avec verdeur le châtiment d'une jeune donzelle trucidée à coup de pieu dans le crane ! Pour autant, à travers son cheminement narratif sans surprises y émane une modeste efficacité de par la métronomie de séquences chocs intervenant en moyenne toutes les dix minutes. Le script occulte se focalisant sur une légende locale lorsqu'en 1684 une sorcière jugée par l'inquisition fut condamnée à périr noyée au fond d'un lac. Ayant juré de se venger face au témoignage des villageois en liesse, elle promis de revenir dans un avenir proche importuner leurs descendants afin d'appliquer sa terrible vengeance. Hormis son manque d'inventivité narrative donc et la standardisation de personnages dénués de psychologie, Superstition  parvient tout de même à attiser la sympathie grâce à la pertinence des effets-chocs très réussis, à une réalisation aussi sincère que modestement soignée et à l'attrait bonnard de ces protagonistes (aussi naïfs soient-ils !) dans leur fonction démunie ou héroïque. A l'instar du flic obtus, obstiné à appréhender un simplet du village, potentiel coupable de la mort de son coéquipier; du Révérend Maier lors d'une courte (mais marquante !) apparition, et surtout du révérend Thompson (le héros du film !) prêt à protéger chaque membre de la famille avec une pugnacité aimablement fébrile !

                                  

Scherzo video productions
Ainsi, en dépit de ses défauts précités, notamment auprès de son absence patente de suspense,  Superstitions demeure une fort sympathique série B scandée de l'audace de ses effets gores (trois séquences chocs font office d'anthologie), de son ambiance lourde parfois oppressante et de son casting de seconde zone se débattant avec une attachante naïveté contre les forces du Mal sous l'impulsion d'une BO percutante insufflant par moments une intensité épique à la dramaturgie (étonnamment) prononcée. 

* Bruno
25.05.22. èèx
24.09.18. 
25.04.11. 325 vues

vendredi 21 septembre 2018

ABANDONNEE

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Los Abandonados" de Nacho Cerda. 2006. Angleterre/Espagne. 1h36. Avec Anastasia Hille, Karel Roden, Valentin Ganev, Paraskeva Djukelova et Carlos Reig-Plaza.

Sortie en salles en France le 30 Mai 2007

FILMOGRAPHIENacho Cerda est un réalisateur et scénariste espagnol né en 1969.
1990: The Awakening (court). 1994: Aftermath (court). 1998: Genesis (court). 2006: Abandonnée
                                     

« Nous nous hantons nous-mêmes. Ils sont notre mort, notre futur… »
Après s'être fait repéré avec sa trilogie de la mort et son inoubliable poème nécrophile AftermathNacho Cerda était attendu au tournant pour l'entreprise de son premier long tourné en Bulgarie. Hommage à l'Au-delà de Lucio FulciAbandonnée invoque le bad trip quasi expérimental pour laisser le spectateur en état second, entre malaise et fascination morbide, et ce à travers un voyage temporel jusqu'au bout des ténèbres. Adoptée depuis sa naissance par une famille d'accueil et n'ayant jamais connu l'identité de ses parents, Marie apprend la découverte du cadavre de sa mère et se retrouve héritière de la ferme familiale. Avec la compagnie d'un étrange guide, elle se rend sur les lieux de son pays natal en Russie. Sur place, elle rencontre un individu énigmatique, Nikolaï, réunit dans la demeure pour ses mêmes raisons personnelles. A travers son prélude suspicieux se déroulant en 1966 dans une contrée forestière de Russie (une femme mourante livre en désespoir de cause deux bébés éplorés à des paysans), l'ambiance mortifère d'Abandonnée s'inscrit déjà dans une tonalité rugueuse avec cette mère anémique esquissant son dernier souffle de vie. Ainsi, 40 ans plus tard, le frère et la soeur de celle-ci tenteront donc de renouer avec leur trouble passé en revenant sur les lieux d'un horrible drame familial, tandis que leur doppelganger tentera de les appréhender. Magnifié d'une photo blafarde aux superbes éclairages, Nacho Cerda transfigure son décorum forestier afin de nous perdre dans une ambiance cauchemardesque résolument perméable. A l'instar des deux héros de l'Au-delà de Fulci et de cette temporalité déstructurée, à mi chemin entre rêve et réalité, Marie et Nikolaï déambulent tels des témoins hagards dans une demeure hantée par leur propre double.
                                 

Conscients de découvrir leur prochaine destinée, ceux-ci en proie à l'interrogation et la paranoïa tenteront de saisir les tenants et aboutissants de la mort de leurs parents, notamment auprès de l'identité du père abusif adepte de forces obscures ("ne brisons pas le cercle", répétera t-il à plusieurs reprises !). Ainsi, de par la vigueur d'un réalisme cafardeux, une ambiance tangible de morosité et d'angoisse étouffante ne lâcheront pas d'une semelle nos héros davantage surmenés à connaître leur triste fatalité. Chaque pièce démembrée de la demeure diluant une aura malsaine de décrépitude. Tant auprès des sols boisés enduits de moisissure, des cloisons suintant l'humidité que des filets de toiles d'araignées agrippant tous les meubles à l'odeur de renfermé. De surcroît, l'accès au sous-sol envahi par les eaux laisse sous entendre l'écho de voix inquiétantes, de légers râles d'agonie issus d'outre-tombe auquel des silhouettes obscures de cadavres parcheminés invoquent l'invitation. Ainsi, ce voyage vénéneux dénué de temporalité emprisonne le spectateur dans un véritable cauchemar éveillé ! Tant et si bien que réalité et fiction se confondent à corps perdu en enchaînant des évènements toujours plus violents et terrifiants afin de nous faire perdre nos repères et la raison. A l'image de ces porcs déchiquetant outrageusement un cadavre en gros plan ou lorsqu'un bébé est sacrifié, la tête plongée dans une eau rubigineuse (une séquence claustro évidemment difficile). Et donc à travers la puissance de ses images horrifico-macabres plus vraies que nature (Nacho Cerda exploitant scrupuleusement et dans tous les cadrages possibles les diverses chambres du huis-clos, dédale tentaculaire de tous les dangers !) et l'intensité de son intrigue hermétique, Abandonnée s'adonne au cauchemar métaphysique au pouvoir de fascination à la fois diaphane et capiteux.
                                   

Au-delà de la mort
Imprégné d'une ambiance ténébreuse à l'aura d'étrangeté expressive, Abandonnée structure à l'aide d'une caméra agressive un cauchemar éveillé en proie au doute, à la déraison, à la crainte et à la peur de trépasser à proximité d'un ectoplasme délétère. Endossé par de sobres comédiens transis d'émoi et d'anxiété dans leur quête aussi bien identitaire qu'existentielle, ce poème macabre enfonce un peu plus le clou de la perplexité vers son point d'orgue nihiliste tout en y suggérant une délivrance pour la postérité de l'orpheline. Du pur cinéma d'ambiance, écorché, singulier, sensitif, personnel, pièce maîtresse de l'horreur à la fois putride et éthérée.

* Bruno
21.09.18. 3èx
27.05.11. (2283 vues)

jeudi 20 septembre 2018

Le Fantôme de Milburn / Ghost-Story

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site allpicspeople.skyrock.com

de John Irvin. 1981. U.S.A. 1h50. Avec Fred Astaire, Melvyn Douglas, Douglas Fairbanks Jr, John Houseman, Craig Wasson, Patricia Neal, Alice Krige.

Sortie salle France: 30 Juin 1982

FILMOGRAPHIE SELECTIVEJohn Irvin est un réalisateur et scénariste anglais, né le 7 Mai 1940 à Newcastle-upon-Tyne en Angleterre. 1980: Les Chiens de Guerre. 1981: Le Fantôme de Milburn. 1984: Champions. 1986: Le Contrat. 1987: Hamburger Hill. 1989: Un Flic à Chicago. 1990: La Guerre des Nerfs. 1991: Robin des Bois. 1994: Parfum de Scandale. 1997: City of Crime. 2001: Vengeance Secrète. 2008: The Garden of Eden.


Réalisateur éclectique, John Irvin s'entreprend avec son second long d'adapter une histoire de fantômes d'après une nouvelle de Peter Straub. Bien connu des amateurs de films de guerre et d'action, à l'instar des Chiens de GuerreHamburger Hill ou du ContratJohn Irvin empreinte ici la voie de l'épouvante vétuste parmi l'aimable intervention d'anciennes gloires des années 30 (Fred Astaire ici dans son dernier rôle, Melvyn DouglasDouglas Fairbanks Jr, puis dans une moindre mesure John Houseman !). Le PitchUn groupe de septuagénaires, anciens amis de longue date, sont communément confrontés à endurer le même cauchemar durant leurs nuits d'insomnies. Hantés par un terrible secret, ces derniers vont devoir affronter le fantôme d'une jeune dame revancharde ! Confectionné sous le moule d'une ghost story vintage en oscillant la reconstitution des années 30 avec celle contemporaine des années 80, Le Fantôme de Milburn a de quoi fantasmer les amateurs de bonnes vieilles histoires horrifiantes que l'on aime se narrer au coin du feu autour d'un verre de cognac ! C'est ce que nous suggère son prologue quelque peu envoûtant (à l'instar de l'intro anthologique de Fog de Carpenter narrée par le même acteur) lorsque 5 notables se réunissent pour écouter ensemble une histoire macabre en bonne et due forme.


Quand bien même le soin de la photo envoûtante, les impressionnants maquillages élaborés par le spécialiste Dick Smith au travers de visions macabres redoutablement réalistes et la prestance d'anciens vétérans d'Hollywood prédisposent une oeuvre solide traitée avec modeste conviction. Evacué de séquences spectaculaires ou effrayantes il est vrai, les quelques apparitions spectrales qui jalonnent le récit s'avèrent tout de même marquantes (bien que concises) auprès de l'aspect morbide des cadavres en putréfaction ! Mais surtout, la beauté glaçante de la vénéneuse actrice Alice Krige emporte tout sur son passage de par sa trouble charnalité illuminant l'écran à travers son regard redoutablement austère. Son jeu lestement ombrageux émanant des réminiscences de son ancienne tragédie alterne emprise érotique (les étreintes sexuelles torrides sont sensorielles par leur réalisme décomplexé) et sentiment trouble de malaise eu égard de ses postures versatiles que ces amants reluquent avec une inquiétude mêlée de peur et de fascination. John Irvin prenant soin, entre simplicité et efficacité, à nous broder autour de ce personnage interlope une superbe ghost-story où l'érotisme quasi omniprésent et l'anxiété du danger sous-jacent titillent les sens des protagonistes et du spectateur tourmentés par un vortex d'émotions contradictoires eu égard de l'enjeu du désir galvaudé. 


D'un onirisme tout à la fois macabre et sensuel formellement velouté, conté avec attention et formidablement interprété par de solides monstres sclérosés réunis pour le meilleur d'une ghost-story adulte, Le Fantôme de Milburn envoûte notre attention sous l'impulsion de la beauté blafarde Alice Krige résolument magnétique en spectre revancharde incapable d'acquérir le repos faute de ses prétendants infortunés. A revoir fissa, de préférence un soir d'hiver, en VO.  

* Bruno
20.10.22. vostfr. 5èx
20.09.18. 
29.05.13 (107 vues)

mercredi 19 septembre 2018

BEAU-PERE. Prix du Meilleur Film Etranger, Critics Awards 1982.

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Bertrand Blier. 1981. France. 2h04. Avec Patrick Dewaere, Ariel Besse, Maurice Ronet, Geneviève Mnich, Maurice Risch, Nathalie Baye, Nicole Garcia, Macha Méril.

Sortie salles France: 16 Septembre 1981 (Int - 13 ans)

FILMOGRAPHIEBertrand Blier est un réalisateur, scénariste et écrivain français, né le 14 mars 1939 à Boulogne-Billancourt.1967 : Si j'étais un espion. 1974 : Les Valseuses. 1976 : Calmos. 1978 : Préparez vos mouchoirs. 1979 : Buffet froid. 1981 : Beau-père. 1983 : La Femme de mon pote. 1984 : Notre histoire. 1986 : Tenue de soirée. 1989 : Trop belle pour toi. 1991 : Merci la vie. 1993 : Un, deux, trois, soleil. 1996 : Mon homme. 2000 : Les Acteurs. 2003 : Les Côtelettes. 2005 : Combien tu m'aimes ? 2010 : Le Bruit des glaçons. 2019 : Convoi exceptionnel.


Relatant sans aucune trivialité la relation scabreuse entre une ado de 14 ans et son beau-père trentenaire suite au décès précipité de son épouse, Beau-père bouleverse nos sens et notre morale sous l'impulsion d'un duo de comédiens transis d'émoi amoureux. Bertrand Blier, auteur sulfureux émérite abordant ici le thème de l'hébéphilie avec autant de pudeur que d'audace inouïe dans son désir jusqu'au-boutiste, frontal, de nous confronter à une improbable histoire d'amour entre un adulte et une ado consentante. Si bien qu'en l'occurrence, la prémices du désir émane de Marion littéralement enivrée par sa passion viscérale pour son beau-père alors que celui-ci s'efforcera (de prime abord) de repousser ses avances dans sa responsabilité adulte et paternelle. Sans jamais juger le comportement si amoral de ses personnages ou de nous faire la morale du bien-penseur, Bertrand Blier nous plonge dans leur vertige amoureux avec une intensité dramatique parfois éprouvante, eu égard de l'immoralité de leur liaison interdite et de l'issue en demi-teinte de son cruel dénouement.


Et donc à travers la difficulté de gérer la perte de l'être aimé, l'auteur nous radiographie avec tact, dérision (les dialogues inventifs s'avèrent parfois grinçants au point de provoquer quelques rires nerveux !) et beaucoup de pudeur la plongée intimiste du duo familial dans l'emprise des sentiments, faute de leur fragilité esseulée et de leur désarroi existentiel (d'autant plus que Rémi est au chômage en dépit de son métier de pianiste à ses heures perdues). Au-delà de son climat aussi bien dérangeant que perturbant à travers un huis-clos clairsemé à la fois étouffant et rustique (l'appartement puis la maison de campagne en second acte), Beau-père est illuminé par la force d'expression de Patrick Dewaere (le plus grand acteur français selon mon jugement de valeur) en beau-père paumé et indécis, voir névrosé, pour autant rempli d'affection, d'amour et de bienveillance pour sa belle-fille. Quand à Ariel Besse, on reste ébahi par sa performance naturelle très audacieuse à exhiber son plus simple appareil en ado pubère en proie au désir corporel et sentimental. Douce, fragile, flegmatique et d'autant plus si innocente, Marion ne parvient pas à refréner ses pulsions sexuelles et sentimentales en dépit de sa sagesse, sa compréhension Spoil ! à laisser Rémi s'autoriser une adultère potentiellement rédemptrice. Fin du Spoil. Bref, ce duo inoubliable plongé dans leur stricte solitude nous laisse finalement dans une drôle d'impression morale, une ambiguïté émotionnelle mêlée d'échec, d'amertume et de libération.


Folle romance paraphile proprement vertigineuse, voire même limite sensorielle dans la retranscription vériste des sentiments (et des corps) mis à nu face caméra, Beau-père fait office d'expérience émotionnelle sensiblement scabreuse dans sa manière radicale de nous bouleverser la raison (avec toutefois une subtile pudeur) auprès d'un amour condamnable. Magnifique dans la fragilité expressive des amants mais aussi perturbant dans leur tendresse irraisonnée, on en sort finalement transformé passée sa conclusion aussi bien amère qu'équivoque. Si bien que personne, spectateur compris, ne semble en sortir indemne...
Pour public averti.

* Bruno

Boston Society of Film Critics Awards 1982 : Prix du meilleur film étranger

Note (Wikipedia): Bertrand Blier précise que l'affiche n'est pas celle qui avait été choisie à l'origine. Le producteur aurait imposé la version (plus sulfureuse) que l'on connaît à son insu. Ce qui a nuit au film et à la jeune actrice si bien qu'il y a eu un "procès" à ce sujet.

Le point de vue de Mathias Chaput:
« Beau-père » traite d’un sujet douloureux et délicat, très peu exploité au cinéma, du moins de cette façon, la pédophilie, mais Blier est malin et sensible, ici aucune outrance ni vulgarité mais une succession de saynètes simples dans des décors épurés et un jeu d’acteur respectueux et pudique…
Dewaere est habité par son rôle comme dans la plupart de ses films et la jeune Ariel Besse étonnante de professionnalisme et d’intelligence, il faut un grand courage pour endosser son personnage loin des lolitas décérébrées que l’on avait l’habitude de voir, elle représente Marion, le personnage central du métrage, celle par qui tout arrive, c’est elle le vecteur de l’intrigue et de cette histoire d’amour quasi impossible mais rendue attachante par un Blier au firmament…
Les seconds rôles sont à la fois distants et proches de Rémi, notamment le contrebassiste et son épouse ou les deux femmes qui apparaissent au début et au final du film (Nicole Garcia et Nathalie Baye, la veuve qui ouvrira les yeux de Dewaere et par conséquent le sauvera de sa relation folle avec Marion)…
L’escapade à Courchevel permet de confirmer l’amour fou entre Rémi et Marion, tour à tour passionné et d’une tentation quasi irréelle, Blier pose sa caméra et laisse aller ses personnages dans une lente mais efficiente love story insolite qui pourra encore de nos jours paraître déplacée voire illégale mais « Beau-père » n’est jamais un film obscène ou pédophile dans le sens « pornographique » du terme, c’est plus un drame passionnel où gravitent des protagonistes paumés et sans repères…
Le repère, justement, aussi bien pour le spectateur que pour Rémi, c’est Marion ; Rémi a tout perdu, sa femme, son travail de pianiste, il vit dans un environnement délétère qui n’a que peu de sens pour lui, et dès qu’il intègre le fait que Marion est amoureuse de lui, sa vie change mais heureusement pour la bienséance, de façon partielle et éphémère…
Ce n’est que lorsque sa raison regagne sa place et la rencontre avec Nathalie Baye que sa conscience reprend ses droits et qu’il retombe sur ses pieds…
Finement joué et assumé totalement par Bertrand Blier, « Beau-père » est une œuvre dérangeante mais à l’histoire suffisamment bien ficelée qui évolue en flux tendu par son côté scabreux mais qui demeure le témoignage d’un très bon cinéma, osé et talentueux…
Il faut être ouvert cinématographiquement pour le visionner mais « Beau-père » est une grande performance dramatique, à contre-courant du cinéma traditionnel, Blier a une nouvelle fois entrepris un pari risqué qu’il a gagné haut la main…
C’est le genre de metteurs en scène qui rend honneur au cinéma hexagonal, nous nous devons de le souligner…

Note : 9/10

mardi 18 septembre 2018

LE DEMON DANS L'ILE. Prix du Suspense, Avoriaz 83.

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Francis Leroy. 1983. France. 1h39. Avec Jean-Claude Brialy, Anny Duperey, Gabriel Cattand, Pierre Santini, Cerise, Janine Magnan.

Sortie salles France: 30 Mars 1983

FILMOGRAPHIE PARTIELLE (le monsieur ayant tourné une quarantaine de films X): Francis Leroi est un cinéaste français, né le 5 septembre 1942 à Paris, décédé le 21 mars 2002 à l’île Maurice. 1968 : La Poupée rouge. 1969 : Ciné-Girl. 1972 : La Michetonneuse. 1982 : Le Démon dans l’île.


Quelle bien étrange curiosité que ce Démon dans l'île portant la signature de Francis Leroy,  (réalisateur entre autre de films X) et incarné par nos illustres acteurs Jean-Claude Brialy, Anny Duperey. Débarquée sur une île bretonne afin d'oublier la disparition tragique de son époux et de son fils, Gabrielle Martin est témoin d'incidents domestiques inexpliqués. Les citadins étant victimes de leurs appareils ménagers potentiellement défectueux. Son enquête l'amène à fréquenter l'étrange et solitaire docteur Paul Henry Marshall. Série B française correctement menée et réalisée, le Démon dans l'île possède l'indéniable efficacité de nous proposer des séquences chocs redoutablement impressionnantes par leur impact horrifique à la fois spectaculaire, inventif, gore et viscéral.


De par la diversité des ustensiles utilisés (couteau électrique, four, ours en peluche, téléviseur, rasoir), les scènes chocs se succèdent habilement sans jamais nous lasser, et ce en dépit de leur aspect itératif. Et donc sur ce point, le film s'avère une franche réussite, tant auprès des FX simples mais relativement soignés, que de l'instauration d'un suspense tendu quant à l'éventuelle sort de la victime manipulant insouciamment l'appareil domestique. Francis Leroy jouant notamment avec un suspense sardonique lorsque 2 ou 3 protagonistes réunis dans la même maison pourraient faire les frais de l'appareil diabolique qu'ils manipulent indépendamment dans une pièce distincte ! Quant aux tenants et aboutissants de l'intrigue assez nébuleuse, à mi chemin entre la parodie involontaire et la sobriété la plus louable, on reste autant surpris qu'interloqués à traiter du thème de la télékinésie avec une certaine ambiguïté. Pour autant, grâce au jeu très convaincant d'Anny Duperey en investigatrice pugnace et au dynamisme du rythme (rehaussée d'un climat insulaire sensiblement envoûtant), on suit son trajet avec autant d'appréhension que de soif de vérité à percer le mystère qui entoure l'île hantée d'un secret infantile éhonté. On n'en dira pas tant de la prestance un peu trop rigide de Jean-Claude Brialy en manipulateur ésotérique trop altier pour être convaincant.


Récompensé du Prix du Suspense à Avoriaz, du Prix d'interprétation féminine pour Anny Duperey et des Meilleurs Effets spéciaux à Fantasporto, Le Démon dans l'île dilue une aura d'étrangeté toute particulière à travers la personnalité intègre de Francis Leroy s'efforçant scrupuleusement de nous distraire dans un jeu de peur irrationnel aussi troublant et poétique qu'hermétique d'une certaine manière. L'intrigue elliptique cédant un peu à la facilité, aux chemins de traverse finalement à travers l'exploitation d'un cerveau surdimensionné. A découvrir en tous cas avec intérêt, notamment auprès de sa nationalité française plutôt frileuse avec le genre Fantastique. 

* Bruno
2èx

lundi 17 septembre 2018

FLAGELLATIONS

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Pete Walker. 1974. Angleterre. 1h42. Avec Barbara Markham, Penny Irving, Robert Tayman, Patrick Barr, Ray Brooks

Sortie salles France: 4 Janvier 1984. Angleterre: 19 Avril 1974

FILMOGRAPHIE: Pete Walker est un réalisateur, scénariste et producteur britannique, né en 1939 à Brighton. 1968: l'Ecole du sexe, For men only, 1970: Cool, c'est Carol, 1971: Man of violence, Die Screaming, Marianne, 1972: Quatre dimensions de Greta, le Théâtre de l'angoisse, 1973: Tiffany Jones, 1974: Flagellations, Frightmare, 1976: The Confessionnal, Schizo, 1978: Hallucinations, 1979: Home Before Midnight, 1983: House of the long shadows.


Si l'idée de départ était plutôt alléchante sur le papier (anciens dirigeants d'une prison, un groupe de retraités rigoristes kidnappent des jeunes filles dans leur maison de correction pour les expier de leurs pêchers), Flagellations ne dépasse pas le stade du sympathique divertissement de par son intrigue redondante éludée de surprises. Et ce même si sa cruelle dramaturgie peut parfois agréablement surprendre dans son refus de concession. Incarnés par des comédiens tout juste convaincants et réalisé avec  l'attachante maladresse qu'on lui connait, Pete Walker exploite passablement son sujet, notamment auprès de la caractérisation de ces personnages tantôt trop équivoques ou versatiles (le fils de la matriarche - incarné par Robert Tayman - ne sait pas vraiment sur quel pied danser dans sa position contradictoire de kidnappeur clément). Pour autant, et sans doute avec indulgence, la farce gentiment horrifique se gaussant du fondamentalisme et des chartes archaïques de la juridiction se laisse suivre sans ennui à défaut de lui tolérer un second visionnage. On a en tous cas connu Pete Walker plus fou, audacieux et inspiré avec Frightmare, Hallucinations et surtout Mortelles Confessions (son oeuvre la plus aboutie et convaincante).

* Bruno

samedi 15 septembre 2018

MANIAC

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site marvelll.fr

de Franck Khalfoun. 2012. France/U.S.A. 1h30. Avec Elijah Wood, Nora Arnezeder, Liane Balaban, America Olivo, Joshua De La Garza.

Sortie salles France: 2 Janvier 2013

FILMOGRAPHIEFranck Khalfoun est un réalisateur, scénariste, acteur et monteur américain
2007: 2è Sous-sol. 2009: Engrenage Mortel (Wrong Turn at Tahoe). 2012: Maniac


Discrédité avant même l'entreprise de sa réalisation puisque estampillé remake bancable d'après un chef-d'oeuvre traumatisant, Maniac, nouvelle mouture, prenait également le risque d'attribuer son rôle titre à un illustre acteur au minois infantile. Un choix particulièrement couillu qui laissait craindre le pire, d'autant plus que son réalisateur novice était déjà responsable de deux manufactures conventionnelles. Produit par William Lustig en personne, épaulé des français Aja et Levasseur  (notamment crédités au scénario), cette déclinaison autrement sophistiquée adopte l'intelligence de ne pas vulgairement copier-coller son modèle cradingue. Ainsi, filmé entièrement en caméra subjective du point de vue du tueur, Maniac version 2012 est une nouvelle descente aux enfers dans les bas-fonds de Los Angeles qu'un tueur psychopathe s'entreprend de nettoyer auprès d'une gente féminine aguicheuse. Dès le prologue, l'ambiance anxiogène et crépusculaire d'un New-York insalubre nous est illustrée avec un réalisme cafardeux (badauds désoeuvrés se mêlent à la foule cosmopolite arpentant des trottoirs inondés de déchets où s'entremêlent par endroits 2/3 tentes de fortune). A l'image prophétique du premier crime prémédité aussi réaliste que concis et radical. Et donc à travers cette séquence choc dérangeante, on sent que Maniac ne sera pas une partie de plaisir ludique à travers son intensité dramatique abrupte. 


La cruauté du meurtre et l'impuissance à laquelle la victime ne puisse exprimer la moindre clameur nous saisissant de stupeur ! La bonne nouvelle c'est qu'ensuite l'errance quotidienne du maniac dans les rues nocturnes restera une dérive introspective jalonnée d'estocades aussi terrifiantes qu'éprouvantes. Car durant son cheminement meurtrier, le spectateur est forcément contraint de s'identifier instinctivement à son existence sordide grâce à l'agilité d'une caméra subjective en interne du sujet ! L'effet d'immersion est immédiat mais surtout il dérange, incommode, asphyxie son public pris en otage par ses pensées déficientes, ses visions horrifiées de mannequins ensanglantés blottis dans une chambre tamisée et surtout ses crimes crapuleux lâchement perpétrés avec violence acérée ! Autant avouer qu'avec cette nouvelle mouture, l'effet de submersion sensorielle est beaucoup plus prégnant qu'auprès de son modèle initial. A contrario, on est loin du traumatisme imposé par le climat poisseux de Lustig et du jeu transi d'émoi de Joe Spinell ! Néanmoins, certaines séquences gores percutantes ont de quoi retourner les estomacs les plus fragiles, mais surtout sa sauvagerie cuisante qui en découle effleure parfois l'insupportable (le meurtre à coups de poignard d'une prostituée réfugiée dans un parking est franchement pénible à endurer !).


Magnifiquement photographié dans un New-York aussi documenté que stylisé (notamment le décor baroque du métro), on peut saluer la maîtrise de sa mise en scène expérimentale (le jeu de miroirs judicieux pour entrevoir le visage du tueur) ou affinée (certaines séquences stylisées surprennent par son esthétisme poétique d'autant plus épurée de couleurs limpides), et la manière habile dont le réalisateur exploite son potentiel de terreur face aux exactions du maniac profondément esseulé. A ce titre, le point d'orgue jusqu'au-boutiste s'avère un moment d'anthologie particulièrement éprouvant lors de la traque de la dernière victime en instance de survie. Et le gore paroxystique d'atteindre son apogée dans un épilogue aussi bestial et grand-guignol que son ancêtre. Pour parachever, nos scénaristes ont eu la bonne idée d'insister sur l'idylle entre Franck et une photographe de mode. En l'occurrence, l'empathie accordée à ce dernier s'avère beaucoup plus persuasive si bien qu'une réelle compassion lui est finalement tolérée auprès du spectateur. Le réalisateur prenant bien soin d'illustrer sa psyché torturée à travers une réminiscence infantile résultant des exactions sexuelles de sa mégère. Et donc à travers ses victimes sauvagement sacrifiées, c'est sa mère qu'il désire châtier sans jamais pouvoir refréner ses pulsions de haine et de rancoeur et se réconforter auprès d'une liaison amoureuse ! En résulte une ambiance de nonchalance pétrie de mélancolie que la pellicule imprègne en permanence, amplifiée d'une bande-son mélodieuse infiniment fragile, et ce afin de rendre compte de la solitude existentielle du tueur noyé de tristesse morale. Un parti-pris idoine donc afin de mettre en exergue la romance fébrile des deux protagonistes esseulés tout en auscultant en arrière plan psychologique le passé sordide du tueur misogyne, victime malgré lui d'une enfance galvaudée car sévèrement traumatisé par une sexualité maternelle débauchée.


Elégie morbide. 
Résolument terrifiant, glaçant, glauque et malsain de par son immersion expérimentale (même si à 100 lieux du chef-d'oeuvre initial), mais surtout sauvage, cruel et déprimant au gré d'une intensité mélancolique très dérangeante, Maniac s'offre la dextérité de se démarquer de son modèle en insistant sur la déchéance mentale du tueur pathétique livré à une insurmontable solitude. Et si au premier abord Elijah Wood avait de quoi laisser dubitatif pour émuler le jeu maladif de Joe Spinell, il parvient sobrement à y imprimer sa propre identité dans celui d'un psychopathe à la fois timoré et chétif, enseveli par l'aigreur d'un amour insoluble. La nouvelle génération peut applaudir, un nouveau chef-d'oeuvre de l'horreur hardcore leur est aujourd'hui légué grâce à la personnalité autonome du nouvel auteur Franck Khalfoun résigné à nous bouleverser de la manière la plus sensorielle et viscérale. Tant et si bien qu'après le générique de fin un malaise sous-jacent subsiste à s'agripper à l'encéphale. 

* Bruno
15.09.18
05.01.13

vendredi 14 septembre 2018

PRINCE DES TENEBRES. Prix de la Critique, Avoriaz 88.

                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site patatedestenebres.over-blog.com

"Prince of Darkness" de John Carpenter. 1987. U.S.A. 1h42. Avec Donald Pleasance, Jameson Parker, Victor Wong, Lisa Blount, Dennis Dun, Susan Blanchard, Anne Marie Howard, Ann Yen, Ken Wright, Dirk Blocker.

Sortie salles France: 20 Avril 1988. U.S: 23 Octobre 1987

FILMOGRAPHIE: John Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis). 1974 : Dark Star 1976 : Assaut 1978 : Halloween, la nuit des masques 1980 : Fog 1981 : New York 1997 1982 : The Thing 1983 : Christine 1984 : Starman 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles 1992 : Les Aventures d'un homme invisible 1995 : L'Antre de la folie 1995 : Le Village des damnés 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward


Passé le terrible échec commercial des Aventures de Jack BurtonJohn Carpenter poursuit les budgets exigus pour entamer son second volet à la trilogie de l'Apocalypse initiée par The Thing et finalisé par l'Antre de la FoliePrince des Ténèbres renouvelant avec puissance d'évocation sa thématique du Mal à travers le sacre d'un ostensoir renfermant un fluide vital. Dans une église et à la demande d'un prêtre, un groupe de scientifiques et un professeur en philosophie sont recrutés pour déchiffrer et étudier un cylindre contenant un étrange liquide. Ce canister tenu secret, car confiné dans une crypte depuis des millénaires par les membres d'une secte religieuse (les frères du sommeil), révélerait l'arrivée du fils de Satan sur Terre ! Lourdement éprouvé et dépité par son précédant métrage délaissé par le public, John Carpenter ne prend pas de risque pour dépeindre la venue de l'antéchrist dans le modeste huis-clos d'une église gothique. Avec son budget réduit et ses têtes d'affiche de série B (oh combien convaincantes !), notre briscard de l'horreur contemporaine nous concocte avec sagacité inventive un concentré d'horreur sataniste contournant habilement tous les clichés inhérents. Dès le générique d'ouverture étalé sur plus de 10 minutes, nous sommes frappés par le soin du montage au cours de laquelle nous rencontrons chacun des protagonistes déambulant dans une bourgade en un temps furtif. Quand bien même ce préambule stylé est scandé d'une musique cérémonielle entêtante érigée par Carpenter et Howarth. Magnifiquement orchestré donc, le spectacle que nous peaufine le maître s'édifie en survival mystique dénaturant les fondements religieux (Jésus serait l'ancêtre d'un extra-terrestre !). Car à travers l'objet cylindrique d'une puissance démoniaque prête à mettre en action ses funestes ambitions, Prince des Ténèbres  nous livre dans un laps de temps record (moins de 24 heures) une course contre la montre contre l'avènement de l'antéchrist que des scientifiques s'efforceront de déjouer dans un élan de panique davantage ingérable !


Ainsi, à travers son suspense cauchemardesque impeccablement ciselé, Carpenter gère avec autant d'inspiration que de brio des rebondissements en pagaille avec un sens de l'efficacité optimale. Chaque péripéties horrifiques nous scotchant au fauteuil de par son habileté à multiplier les revirements dramatiques pour mieux nous convaincre de la venue du fils du diable. Et donc, sans nécessiter de procédés spectaculaires racoleurs, Carpenter rivalise d'astuces et de détails inquiétants (notamment l'intrusion potentiellement hostile des insectes et des larves, le climat solaire dépressif, les clodos en faction autour de l'église) afin de conjuguer une montée progressive d'appréhension et de tension par le truchement d'images cauchemardesques atypiques. Tel cet ostensoir confiné au fond d'une crypte d'une couleur verte fluo alors qu'en externe du monastère quelques SDF subordonnés au Mal assiègent la demeure à l'instar de zombies statiques (on reconnaîtra d'ailleurs en tête de peloton le chanteur Alice Cooper en icone spectrale !). Au même moment, dans l'église, la panique va crescendo lorsque quelques scientifiques sont sujets à la contamination après avoir dégluti le fluide contre leur gré. Si bien que chacun leur tour, tels des possédés impassibles, ils se résignent à dominer leurs acolytes en projetant sur leur visage ce fameux liquide minéral ! Mais les moments les plus prégnants restent encore ces fameux jeux de miroir auquel Satan en personne n'attend qu'une main secourable pour pouvoir s'y extraire et ainsi régir son pouvoir sur terre (vision diaphane d'une main ténébreuse saisissante de réalisme !). Tandis que de façon récurrente une voix inaudible de l'au-delà (incarnée par une ombre sans visage) s'efforce de transmettre un message prémonitoire aux scientifiques durant leur sommeil afin de les inciter à modifier le présent. Ainsi, de façon implacable et métronomique, nous témoignons impuissants des agressions meurtrières intentées sur des protagonistes ayant souvent une longueur de retard à devancer le danger. En proie à la peur, l'affolement et en perte de repères, ces derniers condamnés à l'épreuve de survie s'efforceront de résister à la menace avec une bravoure parfois poignante eu égard du sens du sacrifice imposé en dernier ressort par l'un d'eux.


Chef-d'oeuvre démonial. 
Sous l'impulsion si attachante de personnages bigarrés peu à peu convaincus que le Mal est sur le point d'asseoir sa réputation sur terre (on peut d'ailleurs saluer la présence symbolique de Donald Pleasance en prêtre contrarié en proie au doute de l'échec), Prince des ténèbres inquiète en pagaille autour d'un concept mystique contredisant au passage les doctrines religieuses. Réflexion métaphysique sur l'abstraction du Mal et l'altération de notre réalité qu'un groupe de scientifiques essaie d'étudier et de contrecarrer, Prince des Ténèbres tire parti de son efficacité dramatique de par la puissance de sa scénographie cauchemardesque transfigurant une entité délétère en voie de mutation corporelle. Et ce jusqu'à la stupéfiante révélation d'une conclusion potentiellement pessimiste car équivoque. Carpenter prenant soin de tirer le rideau au moment le plus alarmiste d'une romance déchue. 

Récompense: Prix de la Critique au Festival d'Avoriaz en 1988.

* Bruno
14.09.18. 5èx
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