samedi 1 septembre 2018

A BEAUTIFUL DAY. Prix d'interprétation Joaquin Phoenix, Prix du Scénario, Cannes 2017.

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"You Were Never Really Here" de Lynne Ramsay. 2017. Angleterre/France. 1h30. Avec Joaquin Phoenix, Ekaterina Samsonov, Alessandro Nivola, Alex Manette, John Doman.

Sortie salles France: 8 Novembre 2017 (Int - 12 ans avec avertissement). U.S: 23 Février 2018

FILMOGRAPHIE: Lynne Ramsay est une réalisatrice britannique, née le 5 décembre 1969 à Glasgow (Royaume-Uni). 1999: Ratcatcher. 2002: Le Voyage de Morvern Callar. 2011: We Need to Talk about Kevin. 2017: A Beautiful Day.


Remarquée avec l'excellent thriller We Need to Talk about KevinLynne Ramsay redouble d'ambition avec le difficilement apprivoisable A beautiful Day. De par sa mise en scène à la fois contemplative et expérimentale ainsi que le jeu viscéral du fantôme errant Joaquin Phoenix (il traîne sa lourde carcasse amplifiée de son visage bouffi), A beautiful Day bouscule les habitudes du spectateur si bien qu'une majorité d'entre eux risque d'y être dérouté. Car à travers un récit classique mais d'une grande intensité dramatique, la réalisatrice compte sur sa personnalité singulière pour détourner les codes du genre. Tant auprès de l'intelligence du non-dit, du silence entre les mots pour les remplir d'humanité déchue que d'un refus du racolage à travers son thème si sordide. Ainsi, en abordant la pédophilie de la manière la plus éthérée qui soit, A beautiful day nous retrace la descente aux enfers documentée d'un tueur à gage délibéré à retrouver la fille d'un sénateur kidnappée par un réseau pédophile.


Partageant son existence avec sa mère décatie, Joe ne compte que sur l'amour et la tendresse de cette dernière pour se donner encore une ultime raison existentielle. Mais sa nouvelle mission d'extirper Nina de la prostitution va l'entraîner dans une déchéance morale à la limite de la schizophrénie. Les fantômes du passé refaisant surface, notamment à travers un périple belliqueux (c'est un ancien marine), faute d'innocences sacrifiées. Traversé d'éclairs de violence barbares d'une rare brutalité, A beautiful day ne sombre aucunement dans la complaisance si bien que le hors-champs est souvent de rigueur ou que la résultante des meurtres permet au récit de rebondir malgré l'aspect routinier d'une telle décadence criminelle où chaque individu ne compte que sur son propre intérêt selon la volonté d'une autorité souveraine. Sombre, désespéré, chaotique en photographiant scrupuleusement une métropole urbaine tentaculaire comme hantée par le Mal le plus couard, Lynne ramsay dresse un tableau anxiogène sur la nature humaine partagée entre la haine, le pouvoir et la perversité. Joe arpentant machinalement à l'aide de son marteau les quartiers noctambules à l'instar d'un robot monolithique sans vergogne. Seule l'étincelle d'espoir à retrouver Nina en vie l'amènera peut-être à s'extraire du bout du tunnel en dépit de sa solitude aliénante où perce une désillusion suicidaire.


Fort d'une mise en scène très stylée (BO entraînante à l'appui !) adepte de l'anticonformisme et du jeu vénéneux de Joaquin Phoenix (Prix d'interprétation à Cannes) transperçant l'écran avec une alchimie morale quasi surnaturelle (notamment à travers la puissance de son regard rapace), A beautiful day est un voyage au bout de la nuit. Une quête existentielle de dernier ressort à renouer avec l'innocence et tenter de dénicher un semblant d'havre de paix au sein d'une société de stupre nécrosée par le pouvoir. 

* Bruno

Récompenses: Festival de Cannes 2017
Prix d'interprétation masculine pour Joaquin Phoenix
Prix du scénario pour Lynne Ramsay

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