vendredi 23 novembre 2018

Le Métro de la Mort

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Death Line/Raw Meat" de Gary Sherman. 1972. Angleterre. 1h28. Avec Donald Pleasance, David Ladd, Sharon Gurney, Christopher Lee, Norman Rossington, Clive Swift.

Sortie salles France: 13 Août 1986 (int - de 13 ans). U.S: Septembre 1976

FILMOGRAPHIEGary A. Sherman est un réalisateur, scénariste et producteur américain né en 1943 à Chicago dans l'Illinois. 1972: Le Métro de la mort, 1981: Réincarnations, 1982: Descente aux enfers, Mystérious Two (TV film), 1984: The Streets (TV film), 1987: Mort ou Vif, 1988: Poltergeist 3, 1990: Lisa, After the Shock, 1991: Murderous Vision (TV film).
                                 

Premier essai du réalisateur néophyte Gary Sherman avant de s'être révélé 9 ans plus tard avec son chef-d'oeuvre Réincarnations, Le Métro de la Mort demeure une série B plutôt follingue et insolite. De par son contexte improbable auquel des monstres cannibales croupissent sous un métro et sa scénographie malsaine annonçant les futures ambiances poisseuses de Massacre à la Tronçonneuse  et La Colline a des yeux à l'orée des Seventies. Dans le métro londonien, un couple découvre un homme inanimé sur l'escalier d'un quai. Après avoir informé la police, ils se rendent à nouveau sur les lieux et découvrent que le corps a disparu. Ayant appris que cet éventuel notable eut était porté disparu, l'inspecteur Calhoun mène l'enquête. Mais trois nouveaux meurtres viennent ébranler sa perplexité ! Amateurs de bisseries débridées, méfiez vous de l'affiche initiale résolument kitch et outrancière car annonçant un gros délire cartoonesque avec en tête d'affiche ce gourou sectaire entouré de ses disciples ! Dans la mesure où cette étrange curiosité occultée depuis trop d'années (d'ailleurs, il sort en salles tardivement chez nous !) privilégie l'aspect documenté d'une sordide filiation anthropophage. Scénarisé par Sherman himself, Le Métro de la mort renvoie plutôt à la fable caustique à travers son sous-texte socio-politique, à l'instar d'un  Georges A. Romero frondeur, et ce en pointant du doigt l'immoralité d'un entrepreneur exploitant les défavorisés pour ensuite lâchement les abdiquer faute de faillite financière. Spoil ! Pour cause, au 19è siècle, suite à un éboulement, un groupe d'ouvriers resta coincé à l'intérieur d'un souterrain qu'ils venaient de façonner pour l'achèvement d'un métro londonien. Suite à une crise financière, le projet est avorté et ces derniers restèrent cloîtrés dans leur crevasse pour ne jamais en sortir.


L'horreur sociale qui y émane est que ces ouvriers condamnés à l'oubli sont parvenus à survivre en se nourrissant de chair humaine et de rats d'égout. Réduits à l'état primitif et co-existant dans un environnement crasseux envenimé par la peste, nos SDF vont réapprendre à survivre dans leur taudis déshumanisé. Fin du Spoil. Extrêmement consciencieux à radiographier l'existence intime d'un couple de mutants au sein de leur cocon mortifère, Gary Sherman dépeint avec émotion et appréhension le retour à l'instinct de survie de ces monstres apatrides destinés à croupir, tel des pestiférés, sous les égouts de la ville. Le réalisateur s'attachant à décrire avec une discrète humanité le portrait miséreux de ces nouveaux pauvres livrés à l'autarcie, la solitude, l'incommunicabilité, la famine et l'insalubrité. Ainsi donc, il voue une certaine empathie auprès du patriarche éploré après que sa dulcinée engrossée succomba à la maladie. Du côté de l'enquête que mène l'inspecteur  Calhoun, elle s'avère limite semi parodique tant Donald Pleasance se glisse dans le corps d'un jean-foutiste à l'aide de répliques sarcastiques un chouilla déroutantes. A l'instar de son étrange score dissonant plutôt en décalage avec l'horreur scrupuleusement dépeinte en gros plan. Un leader plus préoccupé à préparer son thé anglais ou à s'imbiber d'alcool avec un adjoint plutôt que de résoudre une affaire criminelle irrésolue depuis trop d'années. Ce n'est qu'avec la disparition d'un notable de classe supérieure (alors que le jour de sa disparition ce dernier sollicita une prostituée sur le quai de métro !) que les forces de l'ordre décident accordent enfin un quotient d'intérêt, notamment grâce au couple juvénile en proie à l'incompréhension et la curiosité, et avant que les services secrets ne tentent d'étouffer l'affaire.


Tourné dans des décors naturels afin d'accentuer sa facture réaliste (sur ce point le film est une authentique réussite immersive sous un éclairage sépia !), Le métro de la mort constitue une excellente bobine horrifique grâce à son parti-pris documenté d'y dépeindre un environnement malsain improbable jalonné d'estocades gorasses (les impressionnants macchabées putrescents sont particulièrement olfactifs !). Bien que son rythme un peu languissant pâti d'un manque de surprises, le récit parfois poignant et intense (notamment auprès de sa dernière partie en mode survival) dégage une forte personnalité sous le pivot de sa thématique politique stigmatisant une société condescendante et élitiste. D'autre part, et pour confirmer les intentions sincères de l'ébauche macabre, le Métro de la mort gagna au fil des décennies un statut culte mérité si bien que le cinéaste Christopher Smith lui rendit hommage en 2004 avec l'excellent Creep (autrement terrifiant, plus contemporain et haletant).

* Bruno
23.11.18. 3èx
09.04.11. 182 v

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