lundi 11 février 2019

Frissons

                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site films.cultes.free.fr

Shivers / Parasite Murders / They Came from Within de David Cronenberg. 1975. Canada. 1h28. Avec Paul Hampton, Joe Silver, Lynn Lowry, Allan Kolman, Susan Petrie, Barbara Steele, Ronald Mlodzik, Barry Baldaro, Camil Ducharme, Hanka Posnanska, Wally Martin.

Sortie salles France: 4 Août 1976. U.S: 6 Juillet 1976. Canada: 10 Octobre 1975

FILMOGRAPHIEDavid Cronenberg est un réalisateur canadien, né le 15 mars 1943 à Toronto (Canada). 1969 : Stereo, 1970 : Crimes of the Future, 1975 : Frissons, 1977 : Rage,1979 : Fast Company, 1979 : Chromosome 3, 1981 : Scanners, 1982 : Videodrome, 1983 : Dead Zone, 1986 : La Mouche, 1988 : Faux-semblants,1991 : Le Festin nu, 1993 : M. Butterfly, 1996 : Crash, 1999 : eXistenZ, 2002 : Spider, 2005 : A History of Violence, 2007 : Les Promesses de l'ombre, 2011 : A Dangerous Method. 2012: Cosmopolis.


La maladie, c'est l'amour partagé de deux corps étrangers 
David Cronenberg

L'homme est un animal qui pense trop. Un animal qui a perdu le contact avec son corps et ses instincts. L'être humain est au fond un animal qui s'englue dans ses pensées, une créature vraiment trop rationnelle perdue dans son intellect au détriment de son corps et de son instinct. L'homme est trop cérébral et pas assez viscéral. Pour y remédier, créons un parasite. C'est à dire un combiné entre un dérivé d'aphrodisiaque et une maladie vénérienne qui pourrait transformer le monde en une magnifique et démentielle orgie. Une belle et insouciante orgie !
Extraits de Frissons


Premier succès commercial de David Cronenberg et premier long-métrage professionnel pour sa troisième réalisation, Frissons demeure une expérience jusqu'au-boutiste, un cauchemar lubrique s'infiltrant dans le corps et l'intellect de manière résolument viscérale ! Au coeur d'un immeuble, leurs propriétaires sont tour à tour contaminés par un étrange parasite ayant la faculté de les rendre nymphomanes. Un médecin assiste impuissant à l'épidémie endémique. Attention, film choc à ne pas mettre devant tous les yeux ! Si bien que ceux n'ayant jamais eu l'aubaine de le découvrir, Frissons  constitue un électro-choc "orgasmique" dont il est difficile de sortir indemne. Car à partir d'un canevas incongru (pour substituer un rein, un professeur créé un parasite en combinant un dérivé d'aphrodisiaque et une maladie vénérienne afin de transfigurer le monde en une magnifique orgie !), Frissons nous achemine à une descente aux enfers suffocante au sein d'un huis-clos exigu.


Si bien que les exactions maladives commises dans les chambres, sous-sol et corridors de l'immeuble  nous provoque un sentiment de claustration prégnant de par son atmosphère aussi irrespirable que licencieuse ! Ainsi donc, avec des moyens très réduits et des comédiens non professionnels (en dépit de la présence annexe de Barbara Steele), le néophyte David Cronenberg parvient à nous ébranler avec provocation en compilant une succession d'images cauchemardesques d'une redoutable intensité graphique. Qui plus est, la photo sépia amplifie le réalisme nauséeux émanant de ces incroyables effets gores supervisés par Joe Blasco, quand bien même la scénographie "formica" de l'immeuble estampillée seventie distille une étrange atmosphère de malaise indicible lorsque l'on y conjugue sexe et gore sous l'impulsion d'un score musical mélancolique ! Dans la mesure où son thème majeur évoque notre rapport à la fois intrinsèque et équivoque face au besoin sexuel. Alors que sous l'autorité d'un metteur en scène facétieux, son argument clairement impudent et couillu aurait pu virer à la pantalonnade semi-parodique. Mais grâce à l'intervention clinique du maître de l'horreur organique, ce cauchemar séminal interpelle, dérange, tétanise les mirettes de par son flot de situations horrifiques parfois scabreuses (les 2 bambins à moitié nu promenés en laisse tels des animaux de compagnie, la gamine embrassant de force un quinquagénaire ou encore le papy en étreinte avec sa propre petite fille !) si bien que de nos jours (conservateurs !) il serait assurément censuré, ou pire, banni de nos salles.


Et si l'ensemble paraît plutôt itératif, voir sans surprise et que l'interprétation manque d'aplomb, la réalisation modeste de Cronenberg s'avère suffisamment assidue, contemplative, expérimentale pour nous agrémenter efficacement des séquences d'agressions cinglantes de par leur impact émotionnellement trouble. D'autant plus qu'à travers un sentiment d'extrême urgence (le médecin peine à pouvoir enrayer l'orgie), nous suivons en temps réel cette propagation de maladie vénérienne auquel ses occupants sont inévitablement infectés par un parasite phallique. Et pour se glisser dans le corps étranger, cette forme de sangsue visqueuse s'infiltre (ou s'en extrait !) par voie buccale en produisant chez certains sujets des protubérances dans l'estomac. Passé l'inoculation, les victimes sont instinctivement éprises d'un désir sexuel si incontrôlé qu'elles sont parfois poussées à une folie meurtrière afin de propager leur maladie à autrui. Et donc, le sentiment d'impuissance octroyé au médecin afin de contrecarrer la contamination nous éprouve davantage quant à l'escalade de cette exubérance sexuelle culminant vers une conclusion anthologique (le piège se refermant dans une piscine) des plus glaçantes !


Un électro-choc crapoteux d'une intensité paraphile asphyxiante.
Réflexion sur l'altération de l'organisme, métaphore sur l'addiction sexuelle, voir notamment la dépendance aux drogues, Frissons provoque et malmène, trouble et désoriente dans sa manière viscérale de nous confronter à nos propres désirs sensuelles. La stimulation du corps et ces zones érogènes en quête d'activité lubrique nous suggérant ici que la perversité est innée en nous (cette énergie relative au désir de la chair nous contrôlant inconsciemment). A réserver à un public averti donc car l'oeuvre scabreuse douée d'une folle originalité garde intacte son pouvoir de fascination en communiant sexe et gore avec un réalisme clinique hyper malsain.

Ci-joint la critique de Florian Hellefty Goujon : http://films.cultes.free.fr/frissons.htm?fbclid=IwAR3pAMbjgM-aKzb0IroTz4RdudJexbe8LGxQcJGcWobRP4iiypV2HPemrOs

*Bruno
11.02.18. 7èx
09.08.12. (571 v)
(28.07.02)

La critique de Rage: http://brunomatei.blogspot.fr/2014/02/rage-rabid.html

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