mardi 8 octobre 2019

Au coeur de la nuit

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

"Dead of Night" de Alberto Cavalcanti, Charles Crichton, Basil Dearden et Robert Hamer. 1945. Angleterre. 1h44. Avec Mervyn Johns, Roland Culver, Mary Merrall, Anthony Baird, Robert Wyndham, Judy Kelly, Sally Ann Howes, Michael Allan, Googie Withers, Ralph Michael, Basil Radford, Naunton Wayne, Frederick Valk, Allan Jeayes, Michael Redgrave.

Sortie salles France: 8 Mai 1946

FILMOGRAPHIEAlberto de Almeida Cavalcanti (Rio de Janeiro, 6 février 1897 - Paris, 23 août 19821), est un scénariste, réalisateur et producteur d'origine brésilienne. 1926 : Le Train sans yeux. 1926 : Rien que les heures. 1927 : En rade. 1927 : Yvette. 1930 : Dans une île perdue. 1930 : Les Vacances du diable. 1931 : À mi-chemin du ciel. 1932 : Le Truc du Brésilien. 1932 : En lisant le journal. 1933 : Le Mari garçon. 1933 : Coralie et compagnie. 1944 : Champagne Charlie. 1945 : Au cœur de la nuit. 1958 : Les Noces vénitiennes. 1971 : La Visite de la vieille dame, téléfilm.


Si Au coeur de la nuit fait office de jalon des années 40 au sein du moule omnibus et qu'il influença une ribambelle de cinéastes (la célèbre firme Amicus lors des années 60 et tous ces fleurons british incarnés avec classe, la série TV La 4è Dimension créée par Rod Serling, la série B méconnue La Poupée Diabolique de Lindsay Shonteff, la saga des Chucky, etc...), il s'avère néanmoins désuet à travers ses segments à la fois trop courts, timorés et finalement peu surprenants. Si bien que depuis de l'eau a coulé sous les ponts car d'autres modèles autrement plus créatifs et audacieux se sont réappropriés du concept avec beaucoup plus d'imagination, d'efficacité, de folie et de violence (on peut d'ailleurs citer Histoires d'outre-tombe, Frissons d'outre-tombe, Creepshow ou encore Trick or Treat en guise de parangons du genre). Pour autant, Au coeur de la Nuit vaut encore le détour à travers sa troisième histoire gentiment ludique, un brin fascinante (un miroir déformant la réalité auprès de son nouvel acquéreur poussera ce dernier à la folie criminelle), et surtout avec son ultime sketch proprement fascinant, j'ai nommé le Mannequin du Ventriloque (que Richard Attenborough poursuivra en format long quelques décennies plus tard avec son chef-d'oeuvre Magic endossé par le jeune et déjà talentueux Anthony Hopkins).


Car prenant pour thèmes le dédoublement de personnalité, la possessivité et la démence autour d'un enjeu professionnel suggérant la compétition d'un confrère, le Mannequin du ventriloque dégage un climat de folie irréel compromis par les sentiments fétides de domination perverse lorsqu'une poupée à l'éloquence sarcastique semble douée de vie sous l'impulsion de son maître à penser tirant ses ficelles vocales. Transi d'émoi, de contrariété et d'angoisse palpable à travers son visage humecté par l'alcool et ses yeux aussi exorbités que vaporeux, Michael Redgrave crève l'écran, provoque l'empathie, distille gêne et malaise auprès de sa condition torturée de se livrer à l'infernale soumission de sa création de porcelaine. A moins que toute cette mise en scène impayable découle de son esprit schizophrène de s'être adonné corps et âme à son don de ventriloque afin de contenter un large public intransigeant. Puissant, vertigineux, terrifiant et d'autant plus cruel quant à sa conclusion davantage sardonique, ce sketch glaçant n'a aujourd'hui rien perdu de son pouvoir de fascination sous l'impulsion d'une intensité dramatique escarpée eu égard de la tournure navrante des conséquences battis sur la jalousie, l'emprise de la folie et la peur de l'anonymat. Ainsi donc, rien que pour l'impact émotionnel qu'il suscite encore aujourd'hui sur notre conscience, Au coeur de la Nuit est à ne pas rater auprès de ce bouquet final littéralement anthologique, qui plus est renforcé d'une photo monochrome renforçant ainsi le vérisme de cette tragique confrontation entre un artiste et son double.

*Bruno
2èx 

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