mardi 7 janvier 2020

Roubaix, une lumière. Bayard d'or du Meilleur Film.

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Arnaud Desplechin. 2019. France. 1h59. Avec Roschdy Zem, Léa Seydoux, Sara Forestier, Antoine Reinartz, Chloé Simoneau, Betty Cartoux.

Sortie salles France: 21 Août 2019

FILMOGRAPHIEArnaud Desplechin est un cinéaste français né le 31 octobre 1960 à Roubaix. 1992 : La Sentinelle. 1996 : Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle). 2000 : Esther Kahn. 2003 : Léo, en jouant « Dans la compagnie des hommes ». 2004 : Rois et Reine. 2007 : L'Aimée (documentaire). 2008 : Un conte de Noël. 2013 : Jimmy P. 2014 : La Forêt (téléfilm). 2015 : Trois souvenirs de ma jeunesse. 2017 : Les Fantômes d'Ismaël. 2019 : Roubaix, une lumière.


Une sordide descente aux enfers d'une insupportable détresse morale.
Retraçant avec un glaçant vérisme l'effroyable fait divers d'une octogénaire strangulée par 2 jeunes paumées toxicos (bien que le récit ne s'attarde jamais sur leur addiction), Arnaud Desplechin ne nous laisse pas le temps de souffler lors de son éprouvante seconde partie (la 2è heure de métrage) au climat dépressif suffocant. Si bien que nous subissons de plein fouet une véritable épreuve de force morale auprès des jeunes coupables gardées à vue lors d'interrogatoires estomaquant de vérité à travers des violences et accalmies verbales. On peut d'ailleurs songer à Police de Pialat ou encore à Série Noire de Corneau, tant auprès de l'hypnose de son réalisme documenté que de l'acrimonie sociale d'une France profonde laminée par le chômage, la drogue, l'immigration la plus marginale, l'isolement et la délinquance. Drame psychologique transplanté dans le cadre du polar rubigineux (photo un chouilla sépia à l'appui), Roubaix, une lumière est avant tout scandé des prestances écorchées vives de Léa Seydoux et de Sara Forestier communément amantes et complices d'un crime sordide d'une lâcheté éhontée. Tant auprès de l'âge avancée de la victime alitée, confinée seule dans sa demeure décatie, que de leurs rapports conflictuels fondés sur le mensonge et la manipulation à reporter la faute l'une sur l'autre. D'une fragilité névralgique, Sara Forestier explose l'écran parmi la juste mesure d'un jeu d'expressions à la fois démunies et désespérées, eu égard de son inculture et de son amour irrépressible pour la commanditaire du crime. Ses instants de doute, de crainte et d'appréhension progressive, sa profonde solitude et son mal-être existentiel d'avoir toujours été une perdante nous agrippent à la gorge sous l'impulsion d'une intensité dramatique tantôt bouleversante, tantôt accablante.


Psychologiquement plus solide, rebelle, autoritaire et surtout dominatrice, mais également d'un humanisme déboussolé (jusqu'aux larmes de la délivrance !), Léa Seydoux lui partage la vedette au gré d'une expression déterminée autrement viscérale de par sa lâcheté d'occulter la vérité au profit de l'éducation de son fils. Ainsi, cette misère sociale implantée dans la région nordiste de Roubaix nous est illustrée sans fioritures par un Arnaud Desplechin extrêmement scrupuleux quant au déroulement de la vénéneuse enquête. Si bien que de prime abord, il prend son temps (comptez 1 heure d'exposition) à dépeindre la quotidienneté routinière du commissaire Daoud et son équipe tentant d'appréhender un violeur de métro, de retrouver une jeune fugueuse à l'orée de sa majorité, et de résoudre le mystérieux incendie du domicile d'un quartier défavorisé. On peut d'ailleurs déplorer à certains moments le jeu un tantinet théâtral de certains figurants et seconds-rôles d'un charisme louablement authentique à défaut de nous convaincre de leur autorité frondeuse ou autrement contenue. En tout état de cause, rien de préjudiciable quant à la tonalité déjà captivante de sa 1ère partie policière sobrement mise en place, notamment grâce à l'autorité lestement ensorcelante de Roschdy Zem d'un aplomb hyper nuancé en commissaire fin psychologue. Probablement le meilleur rôle de sa carrière, notamment lorsqu'il nous retransmet sans soupçon d'orgueil son humanisme dépouillé d'éprouver une certaine empathie auprès de ces jeunes filles destituées des liens parentaux (le thème central du film !). Notamment parce que lui aussi eut probablement connu une forme de démission parentale depuis sa solitude de vivre en France sans aucun appui familial.


Eprouvant et bouleversant, voir parfois même déchirant, Roubaix, une lumière laisse en état de choc moral face à ce tableau dérisoire d'une jeunesse galvaudée livrée à une déchéance miséreuse dans leur condition d'exclusion. Deux profils crapuleux louablement condamnables mais pour autant transcendés d'un humanisme fébrile à fleur de peau.  

Dédicace à Jean-Marc Micciche

*Bruno

Récompense: Festival international du film francophone de Namur 2019 : Bayard d'or du meilleur film

Ci-joint l'opinion concise de Jean-Marc Micciche.
Séance découverte avec Roubaix une lumière....on peut pas dire que je suis le plus grand partisan du cinéma de Arnaud Depleschin mais là j'avoue avoir pris un grand plaisir à voir ce polar rural d'une solennité comme un échos lointain à un certain cinéma de Kurosawa, notamment ses films où les perso portent un regards pleine de compassion et détaché du drame et du monde et c'est vraiment la force de ce beau, notamment du personnage du commissaire Daoud (sublimement interprété par l'acteur Roschdyn Zem)....la grande subtilité de ce polar, c'est au départ de présenté différentes enquêtes de proximité (une voiture brûlée, un violeur de métro, une simple fugue, une intrusion de domicile) pour finalement grâce à la grande sensibilité de l'enquêteur parvenir à un simple crime crapuleux....d'une grande élégance formel (photo et cadre), et hanté par un score musical obsédant mais d'un super casting féminin (Sarah Forestier et Léa Seydoux), le film explose lors d'une dernière heure d'une grande puissance dramatique...bref grande réussite et le film aurait mérité un prix à Cannes....après le magnifique Trois jours et une vie, Roubaix une lumière est l'autre grand polar rural de cette année...

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