mercredi 2 mars 2011

LA GIFLE

                      (avis subjectif d'un puriste amateur)


                              

de Claude Pinoteau. 1974. 1H44. France. Avec Lino Ventura, Isabelle Adjani, Annie Girardot, Francis Perrin, Jacques Spiesser, Michel Aumont, Nathalie Baye, Robert Hardy, Nicole Courcel, Georges Wilson.

FILMOGRAPHIE:
Claude Pinoteau est un réalisateur et scénariste français, né le 25 mai 1925 à Boulogne-Billancourt (France). Il est le frère de Jack Pinoteau et de Arlette Merry. Leur père, Lucien, était régisseur.
1973 : Le Silencieux, 1974 : La Gifle, 1976 : Le Grand Escogriffe, 1979 : L'Homme en colère, 1980 : La Boum 1982 : La Boum 2 , 1984 : La Septième Cible, 1988 : L'Étudiante , 1991 : La Neige et le Feu 1994 : Cache cash , 1997 : Les Palmes de M. Schutz , 2005 : Un abbé nommé Pierre, une vie pour les autres (documentaire).

L'ARGUMENT: Jean, un professeur d'une cinquantaine d'année, divorcé et père d'une jeune étudiante en médecine, Isabelle, traverse une période difficile. Sa maîtresse vient de le quitter et il en vient aux mains avec des policiers en civil qui s'en étaient pris à des étudiants. Alors que son univers vacille, le fossé se creuse avec sa fille, passionnée et avide de vivre. L'heure des mises au point familiales va bientôt sonner.

                    

LA CRISE.
"Tu parles mal, tu travailles mal, tu danses mal, tu grandis mal... mais tu ne me fais pas peur Isabelle."

Un an après son polar d'espionnage Le silencieux, Claude Pinoteau change de registre, reprend son acteur fétiche (Lino Ventura) et nous livre une touchante comédie douce amère sur les rapports conflictuels et passionnels d'un père de famille, Jean, divorcé et de sa fille Isabelle, 18 ans, en pleine fureur de vivre.
Lui, est prof de Géographie, elle, est étudiante en médecine. Un jour, elle décide de tout plaquer pour s'en aller vivre avec Marc, un jeune garçon immature sans ambition particulière.
Un soir, après qu'Isabelle ait avoué à son père son désir de quitter le domicile familial, une violente dispute intervient entre eux, à tel point qu'elle reçoit une sévère gifle. Le lendemain, elle décide de partir rejoindre sa mère pour aller vivre en Australie.

                      

Avec une grande affection pour ses personnages emprunts de tendresse et de rancoeur, superbement campés par Ventura, Adjani  et Girardot, Claude Pinoteau nous tisse le portrait d'une famille désunie, divorcée de leur amour commun, auquel leur fille, Isabelle, perdue au milieu de tous semble déstabilisée, l'âme en peine d'avoir vécu une si brutale rupture entre ses parents aimants.
Avec des scènes intimistes focalisées sur la relation d'un père rigoureux et de sa fille ardente, alternant le chaud et le froid, le rire et les larmes, la tendresse et la colère, La Gifle est l'histoire tendre, parfois touchante, pleine de vie d'un couple orageux aux générations dissemblables. Un duo en crise qui a du mal à se comprendre et s'orienter mais qui au bout du compte ne peut se passer l'un de l'autre. Même si finalement, Isabelle décidera une fois de plus in extremis de partir à l'aventure, pour tenter d'envisager une vie plus harmonieuse dans les bras d'un nouvel amant.
Tandis qu'au bout de ses conflits extravertis, Claude Pinoteau  évoque également un regard poignant d'un couple qui sait rester en révérence, s'estimer et éprouver malgré tout un regain de compassion, d'amour commun. En étant finalement conscient qu'au bout du compte ils ne sont plus faits pour vivre ensemble s'il y avait matière à retenter un éventuel second élan romanesque.

                                 

L'immense Lino Ventura impose de sa présence massive un paternel possessif, exigeant, droit et autoritaire qui ne souhaite pas voir sa fille quitter son cocon et encore moins virer du mauvais coton. Mais ce père futilement grognon, débordant d'amour pour sa progéniture sait aussi se montrer humble, affectueux, tendre et respectueux pour les choix d'Isabelle devenue adulte. Désenchanté aussi quand il se rend compte qu'elle est davantage en âge de raison mais en phase précaire d'une quête indentitaire, alors qu'elle décidera de partir dans les bras d'un inconnu et voyager dans un pays étranger.
C'est la jeune et rayonnante Isabelle Adjani  qui campe cette charmante étudiante rebelle et fougueuse, au bord de la crise de nerf, totalement désorientée de ses espoirs déchus vers un avenir incertain, en connivence avec ces furtives conquêtes masculines. Des frivoles relations amoureuses hasardeuses auquel personne ne semble avoir la faculté de la rendre véritablement aimante et épanouie.
La radieuse Annie Girardot  interprète avec beaucoup d'aisance, d'équilibre et de fraicheur une mère libre de sa nouvelle vie de célibat dans sa vaste demeure campagnarde, accompagnée d'un maitre de maison d'origine anglaise. Cependant,  elle reste une maman esseulée, dubitative, son instinct maternel brimé du fait de la divergence maritale auquel sa tendre fille avait de prime abord décidé de vivre avec son père à Paris.
Il y a aussi le jeune Francis Perrin, totalement adéquat dans un rôle convenu de gaffeur malgré lui, amoureux d'Isabelle mais furtivement impertinent, insouciant dans sa quête de vouloir à tous prix s'approprier le choix hasardeux de sa nouvelle dulcinée.
On remarquera aussi la composition attachante et charismatique de la jeune Nathalie Baye dans un rôle futile ainsi que dans une moindre mesure les acteurs novices Richard Berry  et André Dussolier  à l'aube d'une riche carrière reconnue.

                       

LA SEPARATION.
Inscrit dans une époque rebelle qui a vécu antérieurement un Mai 68 historique,  La Gifle, qui débute par des affrontements entre jeunes et forces de l'ordre évoque aussi en toile de fond un témoignage social sur cette décennie 70 d'une jeunesse en crise et révoltée.
Une jolie comédie pleine de tendresse et d'humanité dans ses relations familiales déstructurées, un hommage touchant, simple et spontané sur la difficulté de grandir dans un avenir versatile et d'affronter cette vie sociale quand les enfants auront été témoins de l'incompatibilité des parents à maitriser une vie de couple fusionnelle.
Avec beaucoup de vivacité et de tempérament, le trio Lino Ventura / Isabelle Adjani  / Annie Girardot  crève l'écran et doit beaucoup au charme complice, à la légèreté environnante et à l'attendrissement éthéré de cette évocation familiale pragmatiste virevoltante.

A Annie...

29.11.10.  2.

LES RAISINS DE LA MORT (PESTIZIDE)


de Jean Rollin. 1978. France. 1h30. Avec Marie-Georges Pascal, Félix Marten, Serge Marquand, Mirella Rancelot , Patrice Valota , Patricia Cartier , Michel Herval, Brigitte Lahaie, Evelyne Thomas.

FILMOGRAPHIE: Jean Michel Rollin, Roth Le Gentil est un réalisateur, producteur et scénariste français, né le 3 novembre 1938 à Neuilly-sur-Seine (France). 1958 : Les Amours jaunes, 1961 : Ciel de cuivre, 1963 : L'Itinéraire marin, 1964 : Vivre en Espagne, 1965 : Les Pays loin, 1968 : Le Viol du vampire, 1969 : La Vampire nue, 1970 : Le Frisson des vampires, 1971 : Requiem pour un vampire, 1973 : La Rose de fer, 1974 : Les Démoniaques, 1975 : Lèvres de sang, 1978 : Les Raisins de la mort, 1979 : Fascination, 1980 : La Nuit des traquées, 1981 : Fugues mineures (Les Paumées du petit matin, 1981 : Le Lac des morts vivants (sous le pseudonyme de J. A. Lazer), 1982 : La Morte vivante, 1984 : Les Trottoirs de Bangkok, 1985 : Ne prends pas les poulets pour des pigeons (sous le pseudonyme de Michel Gentil), 1989 : Perdues dans New York, 1990 : La Griffe d'Horus (TV), 1991 : À la poursuite de Barbara, 1993 : Killing Car, 1997 : Les Deux Orphelines vampires, 2002 : La Fiancée de Dracula, 2007 : La Nuit des horloges, 2010 : Le Masque de la Méduse.


Les vignobles contre attaquent !
Trois ans après Lèvres de sang réalisé en 1975, Jean Rollin continue de surfer sur le fantastique et l'horreur après avoir tourné quelques films X pour renflouer son porte-monnaie. Le producteur Claude Guedj lui propose un récit d'épouvante catastrophiste, dans la mouvance des succès américains des seventies en vogue parmi lesquelles Zombie de Romero et La Tour Infernale de GuillerminRollin accepte de bon coeur cette commande impartie au mythe du mort-vivant et reprend le thème écolo du Massacre des morts-vivants de Gorge Grau dans une ossature "catastrophe". Un vigneron instaure un nouveau pesticide sur ses vignes mais le produit infecte tout le raisin pour y répandre une épidémie. Pendant ce temps, une jeune fille, Elisabeth, accompagnée d'une amie, voyage dans un train pour rejoindre son compagnon, gérant d'une exploitation de vignoble. Mais durant le trajet, ces dernières remarquent que le wagon est presque vide de passagers, quand bien même un individu  patibulaire fait son apparition pour s'asseoir à côté d'Elisabeth. Peu à peu, le visage de l'inconnu semble se putréfier pour laisser transparaître des pustules cutanées ! Pétrifiée de peur, Elisabeth tire la sonnette d'alarme ! En sortant du compartiment, elle découvre subitement dans le corridor le corps sans vie de son amie. Elle décide alors de s'enfuir du train à proximité d'un pont pour courir à travers champs. C'est le début d'un cauchemar irrationnel qu'Elisabeth va subir au sein d'un village maudit.


D'après cette trame inquiétante débutant par une scène horrifique plutôt inattendue, notre aimable faiseur d'images érotico-poétiques ne va pas révolutionner le mythe du Zombie et encore moins celui du film catastrophe. Cependant, il va malgré tout apporter sa patte particulière avec quelques séquences plutôt soignées. A savoir, filmer la nature dans ces paysages solaires de campagne désolée. Il emprunte également son traditionnel onirisme lancinant avec la venue impromptue de cette jeune fille aveugle, Lucie, vêtue de blanc, divaguant dans une plaine aux abords de rochers. Il y a aussi l'apparition charnelle de Brigitte Lahaie, elle aussi accoutrée d'une chemise de nuit et accompagnée de deux chiens cerbères (en référence au Masque du Démon afin de singer Barbara Steel). Un peu plus tard, au beau milieu d'une nuit hostile, nous retrouverons notre charmante Brigitte dans une posture totalement dénudée, laissant donc apparaître une anatomie voluptueuse et sensuelle ! Entre ses séquences clefs, le métrage se résume à un chassé croisé entre l'héroïne faisant connaissance avec deux inconnues ainsi que la menace davantage grandissante d'un groupe de paysans zombifiés. L'ambiance d'étrangeté nocturne séduit le spectateur particulièrement intrigué par l'apparence  repoussante des contaminés déambulant dans le village fantôme. Des quidams défigurés laissant transparaître sur leur corps d'horribles plaies purulentes. D'ailleurs, on ne peut pas vraiment parler de zombie puisque nos contaminés ne sont pas morts puisque sous emprise incontrôlée d'une folie meurtrière depuis l'infection des pesticides. Les maquillages rudimentaires sont malgré tout réussis et font leur petit effet.


De plus, on n'a peu l'habitude de voir au cinéma des paysans franchouillards bien de chez nous marcher lentement de manière amateuriste pour feindre une démarche zombiesque. Il y a aussi à divers moments de l'intrigue quelques scènes gentiment gores alternant la maladresse (le coup à la tête d'un mannequin décapité) et la réussite plastique (la fourche plantée dans l'estomac d'une paysanne). A noter que pour ses effets spéciaux sommaires, outre le soutien d'un maquilleur français, Jean Rollin fit appel à un spécialiste italien des trucages venu spécialement pour les besoins du tournage. Le rythme est donc suffisamment entretenu pour ne pas s'ennuyer si bien que notre survivante ne cesse d'arpenter un endroit à un autre en vue de certaines rencontres secourables. Quand bien même certaines scènes nocturnes où l'on aperçoit nos paysans enragés cultivent une atmosphère poétique macabre. La mélodie électro déroutante et insolite accompagne aussi certains moments anxiogènes ou anodins afin de mettre en exergue une atmosphère de terroir interlope. Les comédiens non professionnels prêtent parfois (souvent) à sourire même si notre héroïne endossée par Marie Georges Pascal s'en sort mieux que ses congénères. Sans compter la présence attachante de l'égérie du X pour son 1er rôle au cinéma dit traditionnel. On évitera d'aborder le jeu pathétique, souvent maladroit de nos deux acolyutes, Félix Marten et Serge Marquand, se vautrant dans le ridicule lors d'une séquence finale virant à la pantalonnade digne d'un Pecas


Brie Comte Robert chez les toqués de la grappe. 
Sympathique, atmosphérique et ludique, Les Raisins de la mort constitue une attrayante bisserie Z, tantôt grotesque tantôt maladroite mais non dénuée de charme dans son esthétisme macabre inscrit dans le terroir. Un film d'exploitation dénaturant un peu la personnalité singulière de Jean Rollin mais certainement le plus plaisant et le mieux rythmé à travers une filmo aussi inégale que passionnante. Du moins pour les inconditionnels du (petit) maître...

NOTE: Jean Rollin fait une apparition clin d'oeil durant le prologue.

Dédicace à Mathias Chaput et Jean Rollin qui nous a quitté Mercredi 15 Décembre.

30.11.10

A BOUT DE COURSE (Running on Empty)

                                                     (avis subjectif d'un puriste amateur)
                                   

de Sidney Lumet. 1988. U.S.A. 1H55. Avec Christine Lahti, River Phoenix, Judd Hirsch, Jonas Abry, Martha Plimpton, Ed Crowley, L.M. Kit Carson, Steven Hill, Augusta Dabney, David Margulies...

BIOGRAPHIE: Sidney Lumet (né le 25 juin 1924) est un réalisateur américain, avec plus de 50 films sous sa direction, dont Douze Hommes en colère, son 1er long-métrage acclamé par la critique en 1957 et Network, main basse sur la TV  en 1976.
Il a remporté l'Oscar d'honneur en 2005 pour ses "brillants services rendus aux scénaristes, acteurs et à l'art du cinéma".
Sidney Lumet était un acteur avant de devenir réalisateur. Ses parents étaient l'acteur de théâtre yiddish Baruch Lumet et la danseuse Eugenia Wermus. Il est monté pour la première fois sur les planches au Yiddish Art Theater de New York à l'âge de quatre ans et a joué dans les théâtres Yiddish et de Broadway jusque dans les années 1950.
Filmo sélective: 12 Hommes en colère (1957), l'Homme à la peau de serpent (1959), Point Limite (1964), Serpico (1976), Un après-midi de chien (1975), Network, main basse sur la TV (1976), Le Prince de New-York (1981), Piège mortel (1982), A bout de course (1988), Jugez moi coupable (2006).

                     

L'ARGUMENT:   Danny, jeune homme de dix-sept ans, est le fils d'anciens militants terroristes.Sa famille est obligé de fuir le FBI lancé à leur trousse depuis leur méfaits commis.
Un jour Danny tombe amoureux d'une fille et cette relation va bouleverser la vie de sa famille autoritaire.

COMME UN HOMME LIBRE.
Deux ans après le thriller Le Lendemain du Crime réalisé en 1986, Sidney Lumet  s'oriente cette fois-ci vers le drame psychologique en abordant en toile de fond le terrorisme à travers une famille unie au lourd passé, obligé de fuir et déménager, parce que le FBI est lancé à leur trousse depuis des années.
Des parents libertaires qui auront été auparavant des activistes convaincus de leur démarche contre la guerre du Vietnam pour avoir commis un attentat à la bombe dans une fabrique de Nepalm. Malheureusement, un gardien qui ne devait pas se retrouver à ce moment précis se retrouvera paralysé et aveugle suite à l'impact de l'explosion.

                    

La démarche de Sidney Lumet n'est pas de nous orienter vers un film politique et disserter sur le terrorisme. Il se destine de prime abord à nous conter l'histoire poignante et bouleversante d'une famille sacrifiée parce que des parents, anciens militants auront commis un acte illégal impardonnable envers la société. Les conséquences dramatiques de cet acte frauduleux vont faire éclater en lambeau la cellule familiale constamment obligée de se terrer, telle des pestiférés d'une région à une autre pour éviter d'être démasquée.
Ce sont les enfants, le jeune Harry et surtout Danny, 17 ans qui vont devoir subir dans leur moralité une vie morne et déstructurée, éreintante aussi du fait des départs incessants commis par ses parents pour fuir le FBI.
Danny se réfugie alors dans la musique, ce à quoi il voue un véritable don dans l'amour du piano que son professeur de lycée ne tardera pas à lui faire valoir. Un jour, il rencontre la fille du professeur, Lorna, auquel il va éperdument tomber amoureux. Ce sont ces deux révélations, l'amour du piano et celle de cette jeune fille qui vont faire basculer la vie du jeune garçon solitaire, davantage épris de liberté, d'envie de se forger, s'assumer et progresser pour un avenir plus ambitieux.
Mais les parents rigides, d'une prudence à toute épreuve, qui auront eux même abandonnés leurs géniteurs à une époque déjà lointaine vont devoir obstruer les choix libertaires de Danny et refuser à ce qu'il prenne sa vie en main.

                   

Cette puissante narration riche en densité par ces conflits psychologiques d'une teneur dramatique intense nous fait pénétrer à l'intérieur d'une famille qui ne sait plus ce qu'elle pourrait envisager pour mieux subir cette traque inlassable avant que les remords et les contritions du passé ne remontent à la surface. Parce que leurs enfants n'ont pas le droit à une vie comme les autres, la mère compatissante du mal être de Danny va prendre conscience de son égoïsme et de sa lâcheté, à refuser à ce que son fils Danny, davantage en âge de raison, devienne un futur pianiste renommé.
Le père irascible et austère, forgé par son pouvoir autoritaire et sa révolte rancunière contre la société ne l'entend pas de la même manière. A moins qu'en dernier recours, un regain de prise de conscience morale ne le pousserait à changer d'avis.

L'émouvant et regretté River Phoenix incarne le rôle introverti du jeune Danny avec fragilité et sensibilité dans sa douleur affectée d'être le témoin malgré lui de parents fuyards, anciens marginaux contre leur société patriotique.
Mais une idylle amoureuse et la passion dévorante pour une leçon de piano vont pouvoir décanter sa façon de percevoir et affronter un jour prochain son destin improbable.

                    

LES LIENS DU COEUR.
Sans effet de pathos et encore moins de discours pompeux, Sidney Lumet  a concocté avec une sensibilité nue une mise en scène minutieusement élaborée au service de ses personnages magnifiquement campés par des comédiens au ton naturel.
A bout de course se livre à un bouleversant drame familial auquel des parents condamnés à la solitude seront obligés dans une prise de conscience soudaine à sacrifier les liens affectifs pour subvenir aux besoins de leur progéniture.
Un grand film méconnu d'une profondeur humaine intense, au scénario impeccablement rodé et à la conclusion terriblement fataliste. Où chaque protagoniste fustigé gardera en son âme affligée de lourdes séquelles irréversibles.

01.12.10

TERROR FIRMER

                                                       (avis subjectif d'un puriste amateur)

                                   

de Lloyd Kaufman. 1999. U.S.A. 1H57. Avec Will Keenan, Alyce Latourelle, Lloyd Kaufman, Trent Haaga et Ron Jeremy

BIOGRAPHIE: Lloyd Kaufman (né Stanley Lloyd Kaufman Jr. le 30 décembre 1945), est un réalisateur, producteur et acteur de cinéma underground et indépendant américain. Il a fondé Troma Entertainment, la plus ancienne compagnie de cinéma indépendant, avec son ami Michael Herz. Son film le plus célèbre est Toxic Avenger.
Ce passionné du cinéma Trash indépendant compte 109 films en tant qu'acteur (souvent de petits rôles), 61 comme producteur, 31 comme réalisateur et 27 comme scénariste. Il a également composé la musique de Tromeo and Juliett.

L'ARGUMENT: Larry Benjamin est un réalisateur aveugle ! Cela ne l'empêche toutefois pas de vouloir tourner un film trash indépendant, avec l'aide de l'équipe Troma. Mais un imprévisible tueur va perturber le bon déroulement du tournage.

                                

AFFREUX, SALES ET MECHANTS.
Trois après Troméo et Juliette, notre bon samaritain Lloyd Kaufman  réalise en 1990 une satire féroce (à sa sauce frelatée) du milieu du cinéma, en égratignant les films à gros budget tournés machinalement sans âme ni saveur. Des réalisateurs formatés dans la bienfaisance et le politiquement correct qui se contentent de respecter la ligne directrice de producteurs sans scrupule. Des hommes d'affaire qui ne semblent pas connaitre la noblesse des mots: magie, rêverie, évasion assouvies au 7è art (tout ce que Troma nous offre depuis des décennies).
A ce titre, Lloyd Kaufman ne va pas hésiter à "balancer" son mépris et son indifférence sur certains réalisateurs dont Steven Spielberg  sera le porte parole pour Terror Firmer !

Tout l'univers Troma est réuni dans ce délire trash sous acide pour le meilleur et pour le pire, comme dans la plupart de cette longue filmographie étiquetée "bête et méchant". Des petits métrages à la sauvette dérangés du bulbe, oh combien jouissifs dans son décomplexe à imaginer les pires scènes provocantes jamais réalisées, tout en se moquant de chaque citoyen qui nous entoure dans une jungle délurée. Que ce soit les obèses, les handicapés mentaux, les aveugles, les obsédés, les hermaphrodites, les homos, les vieillards, les bébés, les femmes enceintes, les pervers, les sadiques et les meurtriers.

                                

Le récit bordélique et déstructuré nous refait le coup du "film dans le film", se déroulant sur les lieux d'un tournage commandité par Larry Benjamin (Lloyd Kaufman himself !), un cinéaste indépendant atteint de cécité, accompagné de sa jeune fille handicapée.
Sur place, notre réalisateur plein d'ambition a beaucoup de mal à faire régner l'ordre durant l'entreprise folingue de son nouveau long-métrage (qui est une nouvelle suite aux aventures de Toxic Avenger). Et cela même s'il ne s'en porte pas plus mal !
Mais un mystérieux tueur sévit sur le plateau et va semer la panique et la zizanie parmi les figurants dans le chaos le plus total  !

L'introduction nous amène d'entrée de jeu dans une séquence gore comique auquel un quidam va se faire arracher les deux jambes par une mystérieuse inconnue. La seconde séquence hallucinée dans son mauvais goût assumé (située à 50 secondes du film précisément) nous envoie frontalement un crochet dans la gueule quand une mère se fait éventrer l'estomac à main nue par cette même inconnue vêtue d'une jupe et portant des lunettes noires. De ses mains pénétrées dans les viscères de la gente dame, la meurtrière invétérée en sortira un foetus vivant, ensanglanté, devant les hurlements de la mère estomaquée ! Alors que le petit bébé maladroitement malaxé dans les mains de la tueuse cogitera aveuglément en s'exclamant par des pleurs incessants.
La scène abjecte, totalement barrée et filmée en gros plan ferait passer le viol du bébé de A Serbian Film pour une comptine ! (enfin presque !). On se demande même si l'on doit se moquer avec complicité ou s'inquiéter d'un tel niveau de mauvais goût, tant l'effet comique recherché est quand même dénaturé de mon point de vue.
Heureusement, la suite se révèle formidablement plus ludique, délirante, axé sur la débilité des personnages et des situations toutes plus cinglées les unes que les autres (comme de coutume dans une prod Troma).
C'est ce que Tonton Lloyd va nous balancer dans la tronche durant près de 2 heures dans une accumulation de séquences trash axées sur le cul, la vulgarité, le crade, la bassesse, l'incorrect, le mauvais goût et le gore dans une ambiance festive de carnaval effronté, tourné avec dérision et cynisme.

                                 

Un homme particulièrement très obèse va se retrouver happé par un tapis roulant et se faire littéralement écrabouiller la masse graisseuse en explosant de douleur !
Un travello se fera brûler vif par un marginal placé en position courbée, de manière à ce que son cul défroqué soit en retrait, prêt à envoyer un pet en direction de sa cible visée. Quand un de ses complices allumera la flamme d'un briquet située au bord de son anus pour envoyer cette production lumineuse d'un gaz en combustion et immoler le travello tétanisé de stupeur !
Ces deux exemples éloquents ne sont qu'une mise en bouche pour vous démontrer le niveau d'inventivité et de créativité que Terror Firmer va nous offrir généreusement durant près de deux heures.
Même l'intrigue criminelle douée de sens et de raison est plutôt bien amenée dans la révélation finale du dit tueur au passé traditionnellement tromatique !

LES DEBILES DE TROMAVILLE.
A travers ce métrage complètement frappadingue et fier de l'être, oh combien jouissif et débridé dans le sens le plus extrême et vulgaire du terme, Lloyd Kaufman  nous évoque également en toile de fond son amour immodéré pour le cinéma indépendant et ces metteurs en scène néophytes qui éprouvent d'immenses difficultés à monter un projet cinématographique. Il clame son respect et son estime pour ces métrages bricolés confectionnés par des réalisateurs créatifs et passionnés par leur profession. Il n'hésite pas à tirailler l'univers des grosses entreprises, les "Blockbusters" réalisés pour être grassement ingérer par le spectateur hébété, pour ne pas dire lobotomisé de la génération Fast Food. Tout en fustigeant ces réalisateurs indolents, présomptueux, condescendants et tous ses producteurs engagés dans une morale perfide, avides de pouvoir et d'appât du gain.
Alors, Terror Firmer, spectacle débile ou plaidoirie pour la liberté d'expression ? 

Dédicace à Anthony Le Phuoc.

02.12.10

                               

lundi 28 février 2011

SPEAK

Photo empruntée sur Google, appartenant au site ossospechososdesiempre.blogspot.com

de Jessica Sharzer. 2004. U.S.A.1H29. Avec Kristen Stewart , Steve Zahn , Robert John Burke, Michael Angarano, Allison Siko, Hallee Hirsh, Eric Lively, Elizabeth Perkins, D.B. Sweeney, Kimberly Kish, Leslie Lyles.
FILMOGRAPHIE: Jessica Sharzer  est une réalisatrice et scénariste américaine, née le 26 Octobre 1972 à Iowa City, Iowa, USA. Elle s'est illustrée en 2004 avec un premier film indépendant, remarqué au festival de Sundance: Speak.
. Fly Cherry  (2003)
. The L Word: Layup  (2007)

L'ARGUMENT: Mélinda Sordino est une adolescente qui s'est fait violer par un ami, lors d'une fête, un an plus tôt.
Elle parle très peu et n'a plus d'amis, depuis le soir de son viol. Elle va faire la connaissance de David Pétrakis, qui va devenir son seul véritable ami.

L'INTROSPECTION DE MELINDA.
D'après une adaptation du roman de Laurie Halse Anderson, Jessica Sharzer  aborde ici le thème douloureux et délicat du viol à travers le portrait d'une adolescente meurtrie. La réalisatrice s'y emploie sans aucune esbroufe ni apitoiement sur sa victime mise en cause, et encore moins de grandiloquence ou pathos. Des pièges complaisants facilement influents auquel nombre de cinéastes n'auront pas su parfois éviter. Alors que d'autres s'y seront vautrés avec outrance et orgueil putassié, de manière à exacerber le caractère spectaculaire, violent d'un acte aussi abject, insidieux et cruel.

Dans une mise en scène modeste compromise au caractère naturel du jeu sobre de la jeune et ravissante Kristen Stewart , Speak retrace le cheminement de cette lycéenne, Melinda, traumatisée par une agression sexuelle commise par un jeune garçon qu'elle aura malencontreusement rencontré au cours d'une soirée festive chez sa meilleure amie.
Depuis cet acte barbare d'une lâcheté sans égale, Melinda Sordino va se replier sur elle même pour s'enfoncer dans un mutisme qui ne lui apportera que moqueries sarcastiques et rancunes tenaces auprès de ces camarades de classe.
Ces remontrances gratuites et puérils viennent du fait qu'après le viol subi, Melinda, transi de terreur, se décidera à décrocher le téléphone pour appeler un service de police avant de se rétracter dans les secondes suivantes. Mais l'appel étant localisé, les forces de l'ordre interviendront furtivement au domicile de sa meilleure amie, tandis que tous les invités quelque peu éméchés détaleront pour éviter tout ennui judiciaire.

Son rejet de dévoiler l'horrible vérité à quiconque va lentement la dissoudre dans une moralité qui l'incitera à la solitude et l'errance. Tandis que ses parents trop occupés par leur tâche personnelle et fonction professionnelle ne pourront déceler son mal-être persistant dans sa douleur morale incurable.
Alors que le coupable influent aura vampirisé une nouvelle conquête féminine, Melinda, décontenancée et dépitée par cette nouvelle va peu à peu réapprendre à s'estimer. C'est avant tout durant les cours de dessin argumentés par un professeur adepte de psychologie et de philosophie dans l'art graphique que Melinda va retrouver un regain d'intérêt pour sa vie réduite à la morosité et la peur. Réfugiée dans un nébuleux sellier situé à l'intérieur de son lycée, elle va pouvoir de manière récurrente se consacrer à sa quête identitaire, son envie de murir et progressivement se relever du poids de sa souffrance imparable. C'est ce qui va lui permettre d'aboutir à pouvoir divulguer la pleine mesure de son talent dans un travail consciencieux établi sur la créativité introspective. Une résultante dantesque compromise dans l'avidité d'un état d'esprit florissant que nous ne connaitrons qu'à la toute fin du métrage.

Pour ceux qui étaient allergiques aux élans romantico-niais de la trilogie Twilight dans son interprétation quelque peu mielleuse et galante feraient mieux de venir jeter un oeil dans ce drame intime d'une grande sensiblité car Kristen Stewart  se révèle ici épatante de fragilité et de sobrité dans un rôle difficile qu'elle porte du haut de ses frêles épaules.
De prime abord taciturne et introvertie, son rôle de victime emprisonnée, rongée par sa peur intérieure lui permettra durant son évolution conflictuelle à trouver la force, la raison équitable de se redresser, s'extérioriser et enfin pouvoir s'exclamer avec courage. La foi salvatrice de pouvoir communiquer son iniquité au monde sauvage qui l'entoure.
Les séquences finales poignantes, voires bouleversantes vont laisser place aux révélations cathartiques. Ce qui nous permettra à nouveau de dévoiler le talent d'une actrice modeste réussissant à trouver le ton juste, l'équilibre gracile dans une composition épurée qui ne prête jamais au cabotinage ou l'effet académique de sensiblerie.

L'ART DE LA REDEMPTION.
Totalement passé inaperçu depuis sa sortie et inédit dans notre pays hexagonal, Speak est un très beau drame introspectif sur la dignité humaine qui doit beaucoup à l'interprétation surprenante de Kristen Stewart et à sa mise en scène limpide, affinée au service de ses personnages.
A travers un sujet aussi brulant, Jessica Sharzer  réussit à éviter les pièges de la complaisance ou du racolage et ainsi traiter avec tact et humilité le portrait poignant d'une adolescente violée, déchirée de l'intérieur de l'âme.
Un acte de violence inavouable commis dans le silence le plus éhonté auquel cette jeune fille aura la lourde tâche d'exorciser ce démon intérieur et pouvoir finalement communiquer au monde sa devise de vivre librement.
L'intimité des dernières secondes, soumises à une confrontation / révélation parentale sont d'une force suggestive émotionnelle auquel les plus sensibles ne pourront s'offusquer à la perdition des larmes.

Note: Le film sera à sa sortie très bien accueilli par le festival de Sundance où Kristen Stewart recevra de grandes éloges pour sa remarquable interprétation.

Dédicace à Luke Mars.

03.12.10

                                         

ENTER THE VOID (version alternative, 2H23, non diffusé en salles)


de Gaspard Noé. 2009. 2H23. France. Avec Nathaniel Brown, Paz de la Huerta, Ciril Roy, Sara Stockbridge

BIOGRAPHIE: Gaspar Noé, né le 27 décembre 1963 à Buenos Aires en Argentine, est un scénariste, producteur et réalisateur franco-argentin.
  • 1998 : Seul contre tous
  • 2001 : Irréversible
  • 2009 : Enter the Void
Intro à Enter the Void.
" Je me suis aussi beaucoup inspiré d’un Livre des morts Tibétain – celui dont on parle dans le film, que j’ai découvert à l’âge de 18 ans, à une époque où je lisais beaucoup de choses au sujet de la mort et de la réincarnation. Je me suis vraiment énormément renseigné sur ce livre, apprenant au passage qu’il avait aussi beaucoup inspiré Philip K. Dick, et j’ai décidé d’adopter sa structure au moment de la mort d’Oscar. Ce livre parle du voyage de l’esprit qui s’effectue entre la mort et la réincarnation, un voyage sensé durer 49 jours. Je n’ai pas été fidèle à 100% au bouquin, mais j’ai quand même tenu à bien mettre en scène ce voyage astral totalement dis-fonctionnel et lumineux, d’où l’importance, surtout dans la scène de fin, de ces jeux de lumière lors des scènes de baise à l’hôtel, où la lumière émane des corps. "
Gaspard Noé.

2010, L'ODYSSEE DE L'ESPRIT.
Huit ans après son très controversé Irréversible, Gaspard noé nous revient avec un nouveau métrage beaucoup moins provocateur qu'à l'accoutumé et nous livre un trip filmique hallucinogène dont l'objectif premier sera de tenter de nous "transporter". Un jeune garçon, Oscar, affectivement lié à sa soeur Linda se retrouve à Tokyo pour flâner sous l'emprise de drogue qu'il négocie dans les quartiers nocturnes de la ville. Un soir, à l'occasion d'un deal de drogue compromis dans un bar, Oscar se fait coincer par la police. Il se réfugie en désespoir de cause dans les toilettes et meurt quelques secondes plus tard d'une balle dans la poitrine par ses oppresseurs. En traitant du thème mystique de l'origine existentielle et de la croyance en la réincarnation, Enter the Void est un un film expérimental atypique créant la fascination grâce au pouvoir spirituel. Le film illustrant de manière subjective l'âme d'un jeune junkie voguant dans l'invisible. La première partie psychédélique nous entraînant dans un délire visuel vertigineux à travers la prise de drogue qu'Oscar inhale. La réalisation virtuose laissant libre court aux images versicolores d'une beauté envoûtante. Nous sommes véritablement dans un "ailleurs" hallucinogène, de la manière introspective du héros observant sa nouvelle condition irréelle. Ses moments idylliques provoquant chez nous une véritable sensation palpable d'abandon, un trip sensitif perceptible selon notre implication émotionnelle. Passé ce délire mystique permettant à travers la drogue une manière (hallucinatoire) de matérialiser les mystères insondables de l'origine de la vie, la narration déstructurée nous emmène dans les moments clef de la vie abrégée d'Oscar. Comme dans le livre des morts qu'il aura lu auparavant, notre héros va subir entre passé, présent et futur toutes les étapes spirituels décrites dans cette publication. D'une prémisse de son abandon à la vie jusqu'à sa réincarnation dans une prochaine vie acquise. Parce qu'il refuse de quitter le monde des vivants à cause d'une promesse fidèlement léguée envers sa soeur, Oscar va observer ses protagonistes familiers et errer dans la ville de Tokyo. Dès lors, nous allons découvrir la raison des liens d'amour qui unissent un frère et une soeur perturbés par un drame familial aussi brutal que tragique. En effet, durant leur tendre enfance, ils auront été témoins de la mort inopinée de leur parent dans un accident de voiture. Installés à l'arrière passager du véhicule, Oscar et Linda avaient été fortement éprouvés d'assister à la mort en direct. Cette vision d'horreur va venir hanter l'écran à plusieurs moments intermittents du récit pour rappeler l'aspect traumatique d'un évènement aussi morbide par le point de vue candide des enfants. La seconde partie nous entraîne ensuite dans l'amertume inconsolable de sa soeur meurtrie, dans les brefs instants de culpabilité d'un jeune dealer (qui éprouvait une rancune envers Oscar, coupable d'avoir entretenu des relations sexuels avec sa mère) et enfin dans l'errance de Victor, l'ami le plus proche du défunt, davantage épris de compassion pour Linda. Dans un maelström d'images oniriques et de musique hybride, Gaspar Noé  filme et autopsie de manière tentaculaire la ville de tokyo en caméra subjective. Il s'emploie à l'aide moyens techniques insensés à filmer des plans séquences aériens inconcevables, la caméra traversant les murs pour accéder à l'autre décor voisin. Il étudie à travers l'entité invisible d'un esprit flottant dans l'espace la déambulation de marginaux au coeur d'une société anxiogène. Des personnages lambda perdus dans la souffrance d'un décès soudain mais délibéré à continuer d'avancer avant d'enfanter la vie. A ce titre, le final exutoire confiné dans un hôtel où des personnages s'accouplent langoureusement, dégageant ainsi des fluides fluorescents émanant de leur corps extatique se révèle d'une beauté séminale insolite. Quand bien même il fallait oser filmer en gros plan l'acte sexuel d'un pénis pénétré dans l'orifice vaginal de l'héroïne sans vulgarité ! Ce happy-end annoncé, clôturant un acte d'altruisme suprême fondé sur la promesse d'une fidélité parentale s'avère bouleversant d'humanité dans son amour immodéré, jusque dans l'infini des premières larmes d'un nouveau-né.

Le Livre des Morts
En s'adressant au mystère insondable des forces vitales et en suggérant une potentielle croyance en la réincarnation, Enter The Void est un ovni filmique d'une virtuosité vertigineuse.  Une expérience émotionnelle indicible prenant le pari risqué de nous faire voyager dans l'espace temps comme aucun cinéaste visionnaire ne l'avait fantasmé. Ce méga trip sensoriel pouvant aussi s'interpréter comme un hymne à la procréation et au pouvoir divin de la biologie. Fantasmatique, effervescent et véritablement immersif.

Dédicace à Antonin Carette, Danny Dumont et Caroline Masson.

04.12.10

RECOMPENSES:
  • Festival international du film de Catalogne 2009
    • Meilleure photographie (Benoît Debie)
    • Prix spécial du Jury (Gaspar Noé)
"Narcisse du meilleur film au Festival International du film fantastique de Neuchatel.

QUESTION / REPONSE évoquant la potentielle prise de drogue sur le tournage.
Pour la drogue, c’était open bar sur le tournage ?
G. N. : Si tu te drogues sur un film, tu ne peux pas bosser correctement. Sur le tournage, personne ne se droguait, même pas un joint. C’était la condition sine qua non.

I SAW THE DEVIL (Akmareul boattda / j'ai rencontré le diable)

                      (avis subjectif d'un puriste amateur)

                    

de Kim Jee-Woon. 2010. Corée du Sud. 2H24. Avec Byung-hun Lee, Choi Min-sik, Min-sik Choi and Gook-hwan Jeon, Oh San-ha, Cheon Ho Jin.

BIOGRAPHIE: Kim Jee-woon est un réalisateur et scénariste sud-coréen né à Séoul le 6 juillet 1964.
D'abord intéressé par le théâtre, il commence sa carrière comme comédien et metteur en scène dans plusieurs pièces (Hot Sea et Movie Movie). En 1997, il remporte successivement le concours du meilleur scénario pour Wonderful Seasons et le prix du meilleur scénario du magazine de cinéma coréen Ciné 21 pour The Quiet Family. En 1998, il s'essaie au métier de réalisateur en portant à l'écran The Quiet Family. Il est depuis considéré comme l'un des symboles du nouveau cinéma sud-coréen.
  • 1998 : The Quiet Family 
  • 2000 : The Foul King 
  • 2003 : Deux Sœurs 
  • 2005 : A Bittersweet Life 
  • 2008 : Le Bon, la Brute et le Cinglé 
  • 2010 : I Saw the Devil
                    

VENGEANCE AVEUGLE.
"Que celui qui lutte avec des monstres veille à ce que cela ne le transforme pas en monstre"

Difficile d'avoir un avis clair et tranché après un tel étalage de violence nauséeuse qui n'évite pas l'outrance au risque parfois de converger à la lassitude et à l'écoeurement.

I saw the devil débute de plein gré comme un thriller à suspense très brutal à la manière de l'époustouflant The Chaser, sans fioriture et avec un sens précis de la crudité austère.
La mise en scène alerte et maitrisée nous offre dès l'introduction une jolie tension suspendue dans les méfaits commis par un serial-killer voué à la perversité et la douleur physique envers ces proies. De jeunes et jolies filles qu'il kidnappe pour les ramener dans son foyer et ainsi les torturer à sa guise sans être dérangé.
Puis la trame policière bifurque furtivement vers une longue chasse à l'homme improbable et incongrue quand un agent secret décide de venger la mort de sa fiancée après avoir retrouvé son corps coupé en morceaux, aux abords d'un terrain vague marécageux.

                    

Dès lors, l'homme rongé par la haine et la rancoeur sera obstiner à retrouver l'assassin présumé avec comme preuve à l'appui des photos de portrait de pervers sexuels et meurtriers hautement suspectés par ses services d'ordre.
Sa traque inlassable va rapidement l'amener dans la gueule du loup, quand au moment opportun, il décidera de laisser la vie sauve à son bourreau. Un revirement de conscience soudaine pour mieux piéger son assassin et lui faire subir inlassablement les pires souffrances physiques en guise de repentance ou d'un potentiel regain de remord.
Aidé d'un "mouchard" téléguidé qu'il aurait fait ingérer dans la bouche du criminel, le flic robuste aura l'opportunité d'entendre ses serments, connaitre ses moindres faits et gestes jusqu'au moment où les rôles vont subitement s'inverser...

Cette réflexion sur le pouvoir du Mal et sur le sens de la vengeance déroute au plus haut point et provoque la nausée tant cette confrontation grand guignolesque répétitive mais assez efficace tourne à la boucherie pure et simple.
Avec un gout amer de sang dans la bouche qu'on a du mal à se débarrasser sitôt le générique de fin écoulé au risque de ne pas sortir indemne.
En démontrant sans subtilité mais avec une certaine émotion parfois attendrie (dernière image poignante et humble dans sa prise de conscience) que la violence engendre la violence et que la quête de vengeance ne mène qu'à une perte identitaire jusqu'à y pervertir son âme, le métrage de Kim Jee-Woon ne pourra faire l'unanimité (d'où son échec commercial et critique en Corée du Sud signalisé d'une d'interdiction au moins de 18 ans) 
Et son degré de folie hautement contagieux dans sa narration livrée à la torture gratuite éprouve durement un spectateur décontenancé, perdu au beau milieu de ces deux protagonistes déconnectés de la raison dans un affrontement pathétique et saugrenu. Un duo martyr assoiffé de violence, uniquement déterminé au bout du compte à savoir qui sera le plus moralement affecté pour en sortir perdant.

                         

L'interprétation de notre duo de cinglés revanchards apporte une réelle densité et surtout un sens du délire commun dans les rapports de force impitoyables commis en leur (dé)faveur, jusqu'à ce qu'il n'en restera plus qu'un au moment fatalement tragique.
Byung-hun Lee dans le rôle irascible du flic obstiné se révèle rigide et glaçant dans sa démarche expéditive imparable.
Une révolte animale condamnée à fustiger son bourreau jusqu'au bout de ses supplices, quitte à y perdre son âme et les vies de ceux qu'il chérit encore de manière affectée.
Le serial-killer sadique est incarné par Choi Min-sik (Old Boy), proprement sidérant de froideur, terrifiant de bestialité dans son état d'esprit dépravé avili par le mal absolu. Un tueur grassouillet suintant la sueur et le sang séché de ses victimes souillées. Un monstre déshumanisé voué à la bassesse et l'immondice dans son immoralité pervertie.

SENTENCE DU MAL.
Parce que le Mal ne connait ni la peur et la douleur, I Saw the Devil souhaite démontrer que le combat pour une vengeance bestiale vilipende et annihile celui qui s'y résout. Que ce besoin humain d'extérioriser sa haine vindicative par la violence gratuite est une labeur perdue d'avance à tenter d'avilir et anéantir l'esprit putassier de la monstruosité.
Avec un fort accent prononcé pour le gout de la violence graphique, extrêmement brutale et nauséabonde, ce thriller fracassant habité par la folie de la violence nuisible déroute autant qu'il fascine, effraie et inquiète durablement le spectateur perplexe sur l'utilité d'une telle boucherie pour dénoncer que la vengeance n'apporte aucune solution à l'apaisement de sa rancune affective.
Superbement interprété et mis en scène avec vigueur et efficacité, I saw the devil ne pourra faire l'unanimité et divisera autant les conquis pour son rythme endiablé, sa folie paroxystique livrée dans une texture baroque que les indécis pour son côté répétitif, le manque de profondeur du thème évoqué et la teneur malsaine d'un sujet aussi scabreux se vautrant finalement dans l'outrance et la surenchère.
Il sera en tous cas difficile d'oublier un métrage malade aussi rageur, ravagé et malsain dans le regard dérangé de deux êtres stigmatisés, épuisés par la soif de violence, condamnés par le Mal.

Dédicace à Christophe de la Gorgone.

07.12.10.

                     

Interview de Lee Byung Hun avec 10Asia
Le 19 Août dernier, l’acteur Lee Byung Hyun accordait une interview à 10Asiae. De l’échec de son dernier film(comparé aux nombreux succès qu’il a connu),  il se livre sans détour et en toute franchise.
 I Saw The Devil”,  film le plus récent de Lee Byung Hun, n’est pas le film de l’année. Cependant, il est certain qu’il est celui qui a suscité le plus de controverse. Kim Ji Woon a mêle son humour particulier à des scènes très violentes tout au long du film qui a reçu des critiques très mitigées de la part de l’industrie cinématographique coréenne. Vu sous cet angle, on pourrait se demander pourquoi Lee Byung Hun a accepté de participer à ce projet. Pourquoi, Lee, qui a fait des débuts très remarqués à Hollywood, a-t-il fait ce choix risqué sur le plan commercial ?

Que pensez-vous de “I Saw The Devil?” Il paraît que le résultat final vous a choqué pendant la projection.
Lee Byung Hun (Lee): Que j’ai été choqué, ce n’est pas le problème. (rires) Mais c’est vrai que j’ai eu l’impression que c’était différent de la première impression que je m’étais faite à la lecture du scénario parce que le film ne reflète pas toute la cruauté et la violence. J’ai pensé que ce projet était différent des films qui se font généralement sur le thème de la vengeance et j’en ai senti toute la force rien qu’en lisant le scénario. Et puis pendant le tournage, je me suis dit « ça va vraiment être hardcore ». Après la première projection, j’étais un peu inquiet parce que j’ai commencé à me demander comment les gens allaient réagir face au film et je me suis souvenu de l’atmosphère très sombre et très sérieuse qui régnait sur le tournage. Après la projection, je me suis retrouvé dans la salle d’attente avec Choi Min Sik(acteur) et M. Kim, le réalisateur et nous n’avons pas échangé un mot. Choi Min Sik m’a quand même dit une chose : « Hé, t’as du feu ? » (rires)

4 MOIS, 3 SEMAINES, 2 JOURS

                               (Palme d'Or, Cannes 2007)

                                                    (avis subjectif d'un puriste amateur)

                   

de Cristian Mungiu. 2007. 1H53. Roumanie. Avec Anamaria Marinca, Laura Vasiliu, Vlad Ivanov, Alex Potocean, Luminita Gheorghiu, Adi Carauleanu, Eugenia Bosânceanu, Ioan Spadaru, Cristina Burbuz...

BIOGRAPHIE: Christian Mungi est un Réalisateur, Scénariste, Producteur, né le 27 avril 1968 à Iasi en Roumanie.
Il étudie la littérature anglaise à l’université de Lasi et la réalisation cinématographique à l’université du film de Bucarest. Il travaille comme professeur et comme journaliste pour la presse écrite, radio et télévisée jusqu’en 1994. Durant ses études cinématographiques, il a été assistant réalisateur sur des productions étrangères tournées en Roumanie. Après l’obtention de son diplôme, en 1998, il réalise de nombreux courts-métrages.
Son premier long métrage OCCIDENT à été primé à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2002, et à ensuite reçu de nombreux autres prix. Il fonde sa société de production MOBRA FILMS en 2003.
  • 2002 : Occident
  • 2007 : 4 mois, 3 semaines, 2 jours
  • 2009 : Contes de l'Âge d'Or
                    

VIVRE LIBRE.
En évoquant le douloureux problème de l'avortement dans un pays totalitaire, alors que le régime communiste de Ceausescu touchait peu à peu à sa fin (nous sommes en 1987),  ce drame social d'une humanité accablée est plus un combat pour la liberté féminine bafouée que de condamner celles qui osent transcender la morale du choix de vie ou de mort infantile.

4 mois, 3 semaines, 2 jours est le temps qui sépare le moment où Gabita a fait l'amour avec son petit ami et le fameux jour où elle se décidera à avorter au risque de passer quelques années derrière les barreaux pour avoir oser transgresser cet acte lourdement répréhensible, considéré comme un crime.

L'action se situe en Roumanie, dans une chambre d'hôtel auquel Ottila et Gabita s'y sont réfugiées pour tenter l'acte condamnable avec l'aide d'un certain Mr bébé. Un médecin perfide immoral pratiquant l'avortement clandestin en toute impunité.
Nous allons vivre de prime abord, presque en temps réel, le calvaire de ces deux jeunes filles à tenter de convaincre un maitre chanteur appâté par le gain. Un être abjecte corrompu qui n'hésitera pas à abuser sexuellement de l'une d'entre elles puisque celles-ci n'auront pas pu regrouper la somme nécessaire pour pratiquer une telle opération de chirurgie.

                    

L'ambiance terriblement anxiogène et dépressive soumise d'abord à un huis-clos étouffant dans le refuge austère d'un hôtel régit par une hôtesse d'accueil dédaigneuse et orgueilleuse, s'accapare des sens du spectateur pour l'entrainer
dans un langoureux drame lié aux tourments, aux angoisses et aux conséquences psychologiques devant une décision aussi alarmiste et radicale.
Cristian Mungiu nous soumet avec une force de vérité âpre et un souci implacable de réalisme brut devant une prise de conscience davantage lourdement affectée. L'immense appréhension palpable d'un duo esseulé dans un pays intransigeant, écrasé par le poids de la culpabilité envers une décision aussi grave. Deux roumaines déterminées,  responsables d'avoir permis d'ôter la vie à un foetus ressemblant aux traits d'un petit enfant du fait de ces cinq mois de gestation à peine révolus.
A cet égard, la séquence épouvantée et bouleversante de la vision ensanglantée d'un petit être mort né délicatement posé dans une serviette de bain est tétanisante d'émotion trouble déséquilibrée. Une scène transie inoubliable, gravée à jamais dans notre mémoire auquel il est difficile de retenir ces larmes devant l'apparition frêle d'une présence aussi innocente.
C'est à cet instant lourdement acquis, que chacune leur tour, les deux jeunes filles auront été témoins de la résultante de leur labeur et d'un sacrifice. Alors que Gabita demandera à Ottila d'enterrer le corps en guise de respect et d'affectation, aux abords d'un terrain vague. Dans l'antre morose d'une nuit noire, d'une ville angoissée où le moindre individu lambda semble suspicieux et inquiété.
C'est alors tout le poids de la tristesse, de la peur, une culpabilité rendue palpable entre les deux héroines livrées à elles mêmes qui se fait ressentir auprès du spectateur anxieux et lamenté. Nos émotions troublées sont soumises avec empathie envers la tâche douloureuse de ces deux héroïnes dans ce drame féministe voué à l'échec maternel mais aussi à la liberté du choix fatidique d'avorter ou permettre la vie d'une future naissance.

                    

Il faut saluer l'interprétation sidérante de vérité dans une présence de ton naturelle des deux comédiennes se livrant corps et âme devant une caméra scrutant leurs moindres sentiments et angoisses perceptibles, en cohésion avec la sensitivité du spectateur.
Laura Vasiliu interprète avec fragilité naïve et sensibilité innocente le rôle d'une roumaine juvénile dénuée de maturité, angoissée par l'avenir d'un enfant qu'elle ne désire pas. Sans connaitre d'explications personnelles pour avoir décidé de pratiquer cet avortement clandestin. 
Anamaria Marinca est proprement bluffante dans celle qui va épauler, soutenir dans une force d'esprit bienveillante mais très affectée son parcours dantesque à encourir les risques les plus graves pour sauver la vie de son amie.
Un péril d'autant plus contraignant qu'Ottila est effrayée à l'idée d'imaginer qu'elle pourrait subir le même labeur avec son propre ami. Une cause à effet miroir, engagée dans la crainte, qui pourrait amener de lourdes conséquences quand à l'équilibre conflictuelle de son couple, au bord d'une potentielle rupture.

LE CHOIX DE GABITA.
Nonobstant un titre peu subtil qui pourrait paraitre rudimentaire, 4 mois, 3 semaines, 2 jours est un douloureux drame humain qui ne tombe jamais dans le débat sulfureux, à savoir s'il faut approuver ou non le choix discutable de l'avortement.
Il démontre avec un souci de réalisme documentaire, au plus près des sentiments de ses personnages que cet acte frauduleux lourdement funeste et virulent est un choix drastique pour savoir s'il faut se résoudre à supprimer une vie pour sa cause personnelle.
Une oeuvre exceptionnelle à la mise en scène limpide et minutieuse, portée par deux actrices au talent naturel criantes d'humanité. Le réalisateur retransmet avec une intensité émotionnelle rare le portrait empathique de deux jeunes roumaines lourdement éprouvées par une épreuve aussi rigoureuse sur fin de tragédie.
Mais il s'agira avant tout ici de narrer avec beaucoup d'humilité l'histoire difficile et délicate de deux femmes soumises, décidées à tenir tête face à la dictature d'un pays indécent, incompatible avec le sens de la dignité humaine.
Difficile de sortir indemne après une telle épreuve à autopsier les conflits intérieurs de deux témoins dans leur psyché lamenté, fortement entaillé.

08.12.10

                     

RECOMPENSES:
  • PALME D'OR au Festival de Cannes 2007
  • Prix de l'Éducation nationale et Prix FIPRESCI au Festival de Cannes
  • European Award du meilleur film et du meilleur réalisateur 2007
POLEMIQUES ET CONTROVERSES:
Le sujet délicat du film (l'avortement) et la manière de traiter ce thème ont engendré plusieurs polémiques et controverses.
En France, des associations anti-avortement, et certaines personnes comme la ministre Christine Boutin, ont voulu interdire le DVD pédagogique promis par le Prix de l'Éducation nationale que le film avait reçu lors du Festival de Cannes. Les contestations face à une telle censure éventuelle, largement relayées par les médias, ont néanmoins conduit le ministre de l'éducation, Xavier Darcos, à autoriser ce DVD. La controverse était d'autant plus étonnante que le film adopte une position neutre vis-à-vis de l'avortement, ce que confirma l'actrice Anamaria Marinca lors d'une interview en présence du réalisateur : « nous avons mis un point d'honneur à ne pas prendre parti pour laisser le spectateur se forger son opinion ». D'autre part, le film a finalement été classé "tout public" en France par la commission de classification, assorti d'un bandeau d'avertissement pour les spectateurs sensibles, ce qui a facilité la décision du ministre de diffuser le DVD.
En Italie, le Vatican s'est montré très indigné lors de la sortie du film : « A présent que le recours excessif aux scènes de sexe a épuisé le potentiel d'attraction (du public), un nouveau coup bas est infligé à la dignité du spectateur, avec ce film récompensé par la Palme d'Or : un signal dramatique d'un retour à la barbarie, individuel comme collectif, de nos consciences (...). On parle avec désinvolture de fœtus comme s'il s'agissait de choses, d'objets, et non pas d'êtres humains, appelés à la vie puis martyrisés, trucidés et jetés à la poubelle »

HARPOON (REYKJAVIK WHALE WATCHING MASSACRE)



de Júlíus Kemp. 2010. Islande. 1H25. Avec Pihla Viitala, Nae, Terence Anderson, Miranda Hennessy, Gunnar Hansen.

En 2 mots:
Un sympathique slasher qui ne restera pas dans les annales mais qui est suffisament bien troussé, rythmé et sanglant pour y trouver son compte de spectateur égayé du samedi soir.

KABOOM

                                                     (avis subjectif d'un puriste amateur)


de Gregg Araki. 2010. U.S.A/FRANCE. 1H26. Avec Thomas Dekker, Haley Bennett, Chris Zylka, Roxane Mesquida, Juno Temple, Andy Fischer-Price, Nicole LaLiberte, Jason Olive, James Duval, Brennan Mejia...

Date de Sortie: France, 06 octobre 2010

FILMOGRAPHIE: Gregg Araki est un réalisateur, scénariste, monteur, producteur de cinéma et directeur de la photographie américain, né le 17 décembre 1959 à Los Angeles (États-Unis).
1987:Three Bewildered People in the Night, 1989:The Long Weekend (O'Despair), 1992: The Living End, 1993: Totally F***ed Up, 1995: The Doom Generation, 1997: Nowhere, 1999: Splendeur (Splendor), 2004: Mysterious Skin, 2007: Smiley Face, 2010: Kaboom.

En 2 mots:
Désolé, j'adore le cinéaste et sa poésie débridée dépeignant comme personne une jeunesse déboussolée mais là pour le coup je n'ai pas accroché.
Et les histoires gays au cinéma, ça me laisse indifférent.

Mon point positif: des dialogues croquignolets proprement jubilatoires !



A.I (Inteligence Artificielle)

                                  

de Steven Spielberg. 2001. U.S.A. 2H26. Avec Haley Joel Osment, Frances O'Connor, Sam Robards, Jake Thomas, Jude Law, William Hurt, Ken Leung, Clark Gregg, Kevin Sussman, Tom Gallop, Eugene Osment...

Date de Sortie:  France. 24 octobre 2001   U.S.A. 29 juin 2001

FILMOGRAPHIE: Steven Allan Spielberg, Chevalier de l'Ordre national de la Légion d'honneur est un réalisateur, producteur, scénariste, producteur exécutif, producteur délégué et créateur américain, né le 18 décembre 1946 à Cincinnati (Ohio, États-Unis).
1971: Duel , 1974: Sugarland Express, 1975: Les Dents de la mer, 1977: Rencontres du troisième type, 1979: 19411981: les Aventuriers de l'Arche Perdue, 1982: E.T. l'extra-terrestre , 1983: La Quatrième Dimension (2è épisode), 1984: Indiana Jones et le Temple maudit, 1985: La Couleur pourpre, 1987: Empire du soleil, 1989: Indiana Jones et la Dernière Croisade, Always,  1991: Hook, 1993: Jurassic Park, La Liste de Schindler, 1997: Le Monde Perdu, Amistad, 1998: Il faut sauver le soldat Ryan Saving Private Ryan, 2001: A.I., 2002: Minority Report,  Arrête-moi si tu peux, 2004: Le Terminal , 2005: La Guerre des Mondes, 2006: Munich, 2008: Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal, 2011: Les Aventures de Tintin, cheval de guerre. 

                

2001, L'ODYSSEE DE LA VIE.
Trois ans après son inoubliable expérience sensorielle sur les horreurs de la seconde guerre mondiale octroyées à l'introspection viscérale des combattants au front du débarquement de Normandie dans Il faut sauver le soldat Ryan, Steven Spielberg revient en 2001 à la science-fiction intimiste inscrite dans la pudeur. Un délicat et émouvant conte de fée moderne sur la nature fragile de l'existence et la quête éternelle de l'amour, tributaire de notre condition de vie terrestre.

Au milieu du 21è siècle, la quasi totalité de la terre a été inondée par la fonte des calottes glaciaires dû à l'effet de serre.
La civilisation est obligée de vivre dans des villes flottantes et ne doit enfanter qu'un seul enfant par foyer, sauf si les individus désirent adopter un androïde en guise de second rejeton.
Après maintes expérimentations scientifiques sur la technologie mécatronique, un savant ambitieux a réussi à créer un nouveau prototype d'androïde ayant la faculté d'acquérir des sentiments humains !
Monica et Henry Swinton qui viennent de perdre leur fille (avant d'être cryogénisée) décident d'adopter ce nouveau modèle robotique aussi vrai que nature qu'un enfant structuré de chair et d'os.
Ce garçon nommé David désire plus que tout au monde éprouver de l'amour pour ses nouveaux parents et trouver une raison équitable à donner un sens à sa nouvelle vie. Mais à la suite d'incidents majeurs tendancieux, les parents adoptifs décident de se débarrasser de David.

                   

Sous-estimé à sa sortie, voir conspué par une majorité de la critique bien pensante, A.I est un bouleversant drame humaniste d'une sensibilité clairsemée, véritable hymne à l'existence terrestre par le biais d'un androïde chétif capable d'éprouver des émotions humaines.
A travers l'exploration futuriste d'un nouveau monde déprécié de civilité par une population illégitime dans sa moralité présomptueuse, Steven Spielberg nous narre le parcours flexible de David, nouvel automate technologique voué à apprivoiser la magie de la vie terrestre dans ses émotions décuplées par le pouvoir de l'amour maternel.
Adopté par une famille d'un statut social aisé pour être ensuite lâchement dénigré et furtivement abandonné dans la nature par la cause illégitime d'accidents répétés ayant involontairement mis en danger la vie de leur propre fils bonimenteur, David va découvrir de manière craintive un monde hostile dérangé par la peur d'une technologie en constante mutation, davantage expansive et révolutionnaire.
En compagnie d'un androïde livré racolage sexuel (superbement incarné par Jude Law) et d'un ours en peluche doué de vie artificielle (nombre de scènes révélant sa présence ludique mettent en émoi le spectateur désorienté et troublé !), le jeune garçon va tenter de survivre dans un monde obscur qu'il ne connait pas et délibérément reconquérir l'absence d'une mère déchue de son rôle pédagogique et protecteur.

                  

Le jeune surdoué Haley Joel Osment était inné pour interpréter le rôle majeur de cet androïde néophyte débarquant sur terre avec stupeur, tel un extra-terrestre égaré au milieu d'une civilisation xénophobe et orgueilleuse. Des êtres humains égoïstes et lâches de leur intolérance à approuver, accepter la cohabitation de ces robots ludiques hébétés, tributaires de leur défaillance technique et leur condition d'esclave soumis quand ils sont rejetés par la société. Des humanoïdes manipulés contre leur gré par notre ambition condescendante à s'octroyer le droit de les subtiliser dans des nouveaux jeux de cirque primaires mais des êtres angoissés, préoccupés et inquiets car humanisés par leur conscience frivolement révoltée quand ils se voient contraints au sacrifice face à une population dévergondée, avide de spectacle barbare.
A travers l'expression de son intense regard illuminé par l'intensité de ces yeux bleus, Haley Joel Osment dégage beaucoup d'empathie, d'émotion fébrile véhiculée par sa quête suprême de bienséance et d'amour auprès d'une mère qui l'a lâchement abandonné. Dès lors, son destin est de retrouver coûte que coûte la sagesse enchanteresse d'une fée bleue. Un personnage fictif qu'il aura lu avec contemplation à travers le célèbre conte Pinocchio qui voyait la transformation exaucée d'un pantin de bois en véritable enfant de chair et de sang. David, obsédé à l'idée que cette histoire pourrait également lui accorder cette faveur s'acharne à retrouver sa mère pour qu'elle puisse enfin lui accorder sa reconnaissance et son affection cathartique. 

                

Le final mélancolique qui voit le petit David embarquer dans un engin volant substitué pour rejoindre la ville engloutie de Manhattan se révèle l'un des moments les plus intenses et émouvants dans sa quête désespérée de retrouver la fée prodige salvatrice afin d'accomplir son rêve de toujours.
Mais il aura fallu attendre 2000 ans d'un monde inerte devenu sinistré pour que l'enfant artificiel acquiert son voeux exaucé le temps d'une mémorable journée romantique en compagnie de sa mère chérissant.
ATTENTION SPOILER !!!
La dernière séquence qui voit le garçonnet amoureux s'assoupir dans un lit pour l'éternité aux côtés de sa maman inerte se révèle déchirant de poésie ingénue. Alors qu'assis au bord du lit, un ours en peluche robotisé qui aura permis de telles retrouvailles inespérées observe docilement l'amour fusionné de ces deux êtres renoués dans les cimes de l'au-dela. FIN DU SPOILER.

L'ENFANT MIROIR.
Soutenu par l'affinée partition musicale de John Williams orchestrée toute en discrétion et de l'incroyable prestance instinctive de Haley Joel Osment, A.I est un magnifique poème désenchanté, profondément trouble et vulnérable dans son acuité de sensibilité dédiée à la faculté des sentiments. Un florilège d'émotions humanisées déversées dans une valeur désillusionnée pour ce monde définitivement corrompu à l'intolérance.
Désenchanté, inquiétant, voir pessimiste parce que notre terre est résolue à l'apocalypse ATTENTION SPOILER !!! (tandis que l'enfant réconforté de sa présence maternelle meurt pour rejoindre parmi elle ses rêves escomptés) FIN DU SPOILER, A.I bouleverse, intrigue et nous questionne sur notre rapport au phénomène miraculeux de notre existence subjective liée aux cinq sens accordés.
En effleurant l'idée récurrente du thème scientifique que la technologie futuriste pourrait un jour nous asservir et dominer, A.I dépeint avant tout l'histoire d'un enfant inculte esseulé, désorienté de sa situation précaire mais curieux et ébloui par la magie de la réalité existentielle, totalement voué à enlacer l'amour éperdu de sa mère fuyante.
A.I serait alors simplement un immense cri de douleur pour l'enfance martyrisée de son absence parentale.

Dédicace à Alexandre Poncet.

27.02.11. 2

THE HORSEMAN

(avis subjectif d'un puriste amateur)



de Steven Kastrissios. 2008. Australie. 1H38. Avec Peter Marshall, Caroline Marohasy, Brad McMurray, Jack Henry, Evert McQueen, Christopher Sommers.

BIOGRAPHIE: Steven Kastrissios est un réalisateur et scénariste australien. The Horseman est son premier long-métrage.


FOLIE MEURTRIERE.
Dans la lignée des Vigilantes movie et autres Justiciers dans la Ville célébrés par Charles Bronson, The Horseman empreinte cette voie du film de vengeance avec un souci de réalisme mis en exergue dans une crudité brut de décoffrage !
L'ambiance antipathique, structurée sans aucune fioriture est vouée à un affrontement ultra violent, rugueux, malsain, baignant continuellement dans une atmosphère poisseuse. Une mise en image blafarde accentuée par une photo monochrome désaturée et renforcer ainsi la nuance rouge du sang s'évacuant des plaies tuméfiées.

Parce que sa fille fugueuse aura succombé à une overdose après avoir tourné dans un film pornographique underground, son père, Christian ne va pas supporter la mort subite de sa propre chair et décide contre toute morale d'entamer une vengeance implacable sans foi ni loi dans un déchainement de violence virant à l'hécatombe.


Ce qui surprend irrémédiablement à la vu de ce nouvel électrochoc extrêmement austère et lugubre vient de son côté réaliste, filmé à la manière d'un reportage, en accentuant les réactions anxiogènes des personnages par un emploi récurrent de gros plans filmés sur les visages ensanglantés suintant la sueur froide.
De manière machinale, le spectateur est entrainé dans la descente aux enfers d'un père rendu fou furieux du décès de sa fille pour commettre une série de crimes d'une sauvagerie inouïe. Des meurtres commis le plus souvent à l'arme blanche (batte de base-ball, couteau, marteau, massue, barre de fer, etc...) ciblant chaque protagoniste plus ou moins impliqué et/ou coupable d'avoir laissé entrainer une fille paumée sur un tournage X.

Peter Marshall dans le rôle du père vindicatif à la trogne aigrie presque banale incarne avec une froide détermination dénuée de raison un personnage haineux inondé de désespoir pour son inconsolable douleur d'avoir perdu sa fille dans des conditions sordides et inhumaines. Et cela, même si l'on ne saura jamais ce qui est véritablement arrivé en ce jour fatidique alors qu'elle semblait avoir voulu participer de son plein gré à un tournage X (selon la version similaire de chaque témoin et acteur du film underground).
Le cheminement de Christian est d'autant plus hasardeux et risqué dans sa démarche de folie meurtrière qu'il ne saura jamais pour quelle raison sa propre fille ait pu accepter un telle proposition, même si elle fut volontairement droguée avant d'avoir tourné des scènes prescrites dans la violence et le sexe. 
Jusqu'au moment où Christian, fatigué de toute cette violence animale décide de laisser la vie sauve à un père de famille. En l'occurrence, il se soumet de poser les armes et partir vers une région indéterminée en compagnie d'une jeune adolescente avec qui il s'est pris d'affection. Sans se douter que les derniers responsables de la mort de sa défunte sont fermement décidés à faire payer son bain de sang commis en leur défaveur.


La qualité éloquente du douloureux The Horseman c'est qu'il ne perd jamais de vue le profil psychologique de son personnage principal, d'abord alimenté par la soif de vengeance pour ensuite s'en détacher et finir par s'en débarrasser.
Toute la narration est soumise à une succession de scènes ultra violentes qui ne prêtent cependant pas à la complaisance, aussi brutales et insupportables soient-elles.
L'extrême sobriété de la mise en scène refuse le caractère spectaculaire, le côté jouissif d'une histoire de vengeance où le héros sans peur se retrouve volontairement seul contre tous.
Il est donc dommage que son final haletant cède parfois à quelques facilités et conventions académiques dans les exactions commises entre les protagonistes. Il emprunte de petites ficelles balisées comme la clef des menottes offerte en derniers recours, en guise de survie où le fait que le père, héroïque, maintenu par quatre molosses réussira in extremis à se dégager de ses ravisseurs. La dernière séquence finale s'accommode à une tension livrée au suspense conventionnel (à savoir lequel des deux hommes réussira à sortir vainqueur de leur affrontement sauvage et sanglant). Un final tout à fait haletant et rondement mené mais un peu en retrait de tout ce qui nous avait été présenté auparavant.


A VIF.
The Horseman est un film choc qui laisse des plaies dans sa radicalité d'une mise en scène livrée au caractère réaliste de ce qu'il nous narre sans effet de style (en dehors d'un final hardcore un peu too much et orthodoxe à mon goût).
L'inverse d'un spectacle fun et jouissif qui ne prête pas à se distraire ou fantasmer d'une bonne histoire de vengeance où le héros viril décide de flinguer avec vigueur (et complicité du spectateur) tous les méchants cabotineurs.
Ce petit film venu d'Australie ne propose donc pas la soupe habituelle et ne souhaite pas plaire au spectateur avide de sensations fortes concoctées pour rendre un spectacle excitant de violence jouissive.  
The Horseman n'exprime pas de fougue et se révèle plutôt le genre de film où l'on quitte la salle sans dire un mot à son voisin. Il tire sa force dans son dévouement exhaustif au réalisme, à l'extrême, au radical, à la violence abrupte et amplifie le caractère authentique d'une vengeance sale et déguelasse. Pour livrer avec rigueur le portrait poignant et pathétique d'un homme brisé par la mort de sa fille. Un quidam n'ayant plus rien à perdre, aveuglé par l'opacité de la vengeance pour finir en derniers recours par se rétracter et fuir vers un no man's land. Un semblant de vie pour tenter d'oublier la haine et peut-être se reconstruire, avec l'aide empathique d'une nouvelle remplaçante, aimante et compatissante.

09.12.10