lundi 25 juillet 2011

LE SANG DES TEMPLIERS (Ironclad)


de Jonathan English. 2011. Angleterre/U.S.A/Allemagne. 2h01. Avec James Purefoy, Brian Cox, Derek Jacobi, Kate Mara, Paul Giamatti, Charles Dance, Mackenzie Crook…
Sortie en salles France le 20 Juillet 2011. U.S.A le 26 Juillet 2011.

FILMOGRAPHIE: Jonathan English est un réalisateur, scénariste et producteur anglais.
2002: Nailing Vienna. 2006: Minotaur. 2011: Le Sang des Templiers

                                         

Basé sur de véritables faits historiques, Jonathan English nous narre pour son troisième long-métrage la révolte des barons anglais contre le roi Jean sans Terre, héroïquement retranchés dans son château afin de repousser les belligérants toujours plus nombreux. En 1215, le roi d'Angleterre, Jean sans Terre est contraint de signer la Magna Carta, une charte libertaire rédigée en faveur du peuple. Sévèrement dépité, celui-ci va revenir sur sa décision et tenter de reprendre ses terres et sa souveraineté avec la collaboration de mercenaires. Sur le point d'atteindre Londres, un obstacle de taille l'empêche de subvenir à ses ambitions égotistes. Son propre château de Rochester est occupé par le baron Albany ainsi qu'une poignée d'insurgés gouvernés par le chevalier templier. La bataille sera rude et sans répit !

                                              

A feu et à sang ! C'est ce que l'on retient de prime abord après avoir assisté à ce spectacle de série B d'une barbarie inouïe ! En narrant un fait divers du 13è siècle auquel une poignée de barons anglais affiliés à des rebelles volontaires tenirent tête à toute une armée de mercenaires, Le Sang des Templiers demeure une agréable surprise. Si le film, humble dans ses intentions historiques, est très loin d'égaler les grands classiques tels Braveheart, le Dernier des Mohicans ou Rob Roy, et qu'il manque une certaine densité dramatique chez le jeu modeste des interprètes, la manière dont Jonathan English nous retranscrit l'époque moyenâgeuse privilégie un crédit d'authenticité qui fait plaisir à voir. Epaulé d'une photographie désaturée, les décors naturels et surtout les monuments historiques disloqués par la violence des combats sont mis en valeur dans une facture insalubre auquel le sang et la poussière se fondent au milieu du fracas des armes. Les uniformes impurs des guerriers intrépides et leurs lourdes armures maculés de sang participent à l'esthétisme rugueux de la mise en scène régie en plein coeur des combats. La force et l'intérêt de l'intrigue émanent des enjeux dramatiques octroyés aux deux clans pour la préservation du château et de leur liberté prescrite par la Magna Carta. Les nombreuses séquences d'action qui émaillent le récit sont au service de l'histoire, à l'inverse de surenchérir comme de coutume.

                                            

De surcroît, ses scènes guerrières très spectaculaires, nerveuses mais lisibles, se révèlent d'une violence cinglante, parfois même malsaine. Un degré de sauvagerie rarement atteint dans le genre médiéval. Ses péripéties ultra sanglantes se permettent donc d'abondantes giclées de sang quant aux plaies entaillées, tranchages de membres (dont une langue sectionnée façon La Marque du Diable !), décapitation, viscères étripées et même un corps coupé dans le sens de la longueur (remember Amazonia de Deodato en effet inversé !). Le tout superbement réalisé sans jamais céder à la débauche gratuite et à contrario du sympathique Centurion de Neil Marshall, la présence des CGI ne nuit jamais à la crédibilité des scènes gores exposées. C'est donc ce cachet authentique, son réalisme acéré et la vigueur psychologique de sa narration transcendant l'honneur des preux guerriers qui rendent Le Sang des Templiers à la fois accessible, ludique, et enthousiasmant. Une série B symbolisant avec humilité un bel hommage à cette poignée de militants anglais qui auront réussi à tenir tête à l'antagoniste au péril de leur vie et pour le sens du sacrifice !

                                         

En tant que série B confectionnée sans prétention, Le Sang des Templiers est une bonne surprise pour l'amateur chevronné d'épopée épique et barbare. Hormis une interprétation dépouillée qui aurait gagné à être plus ambitieuse et étoffée, ce spectacle très sanglant prend son sujet au premier degré, sans fioriture, avec les moyens techniques adéquats mis à disposition. Sans être follement passionnant et intense, le rythme soutenu et le réalisme cru qui ressort de cette oeuvre immersive fait plaisir à voir.

25.07.11
Bruno Matéï.

samedi 23 juillet 2011

THE WOMAN


de Lucky McKee. 2011. U.S.A. 1h47. Avec Angela Bettis, Pollyanna McIntosh, Sean Bridgers. Sélectionné au Festival de Sundance 2011.

FILMOGRAPHIELucky McKee est un réalisateur, scénariste et acteur américain né le 1er Novembre 1975 à Jenny Lind (Californie). 2002: All Cheerleaders Die (Dtv, co-réalisateur), May. 2006: Master of Horror (1 épisode), The Woods. 2008: Red, Blue Like You. 2011: The Woman

                                      

ATTENTION ! IL EST PREFERABLE D'AVOIR VU LE FILM AVANT DE LIRE CE QUI SA SUIVRE !Après un bouleversant coup de maître sublimant le portrait chétif d'une jeune schizophrène (May) et un conte onirique inspiré par Suspiria mais inachevé de par ces ambitieuses intentions (The Woods),  Lucky McKee nous revient avec un nouveau métrage sulfureux si bien qu'il secoua une partie du public durant sa projection sélectionnée à Sundance. Réputé pour son extrême violence, The Woman est une collaboration avec le romancier Jack Ketchum (The Host) traitant des rapports conjugaux, de la place de la femme au sein de notre société machiste évoluant ici dans un climat tendu hautement malsain. Christopher Cleek est un avocat marié à une épouse modèle et père de trois enfants. Un jour, alors qu'il part à la chasse, il rencontre une femme subsistant à l'état primitif en plein coeur d'une forêt sauvage. Il décide de la kidnapper pour la ramener à la maison et l'éduquer à sa manière.

                                           

Après moults rumeurs sur sa violence réputée extrême et son caractère misogyne décrié par certains,  The Woman aura réussi à provoquer un véritable buzz. Relativisons tout de même auprès de cette violence si diffamée au festival de Sundance car si son réalisme s'avère aussi rigoureux, il est avant tout d'ordre psychologique par le biais des mentalités refoulées. En l'occurrence, nous sommes loin d'être face à un tortur' porn mercantile célébré par Saw et consorts afin de contenter un public d'ados avide de surenchère. Lucky McKee, plus furibard que jamais, souhaitant choquer et provoquer le malaise auprès des portraits fébriles de ces personnages en proie à des décisions morales à la fois drastiques, épineuses, équivoques. En prenant comme idée de départ le kidnapping incongru d'une sauvageonne vivant recluse dans une nature sauvage, le réalisateur décrit son ravisseur comme un aimable avocat d'apparence tolérant et respectable en dépit de l'audace insensée de son rapt. Destituée de sa liberté la victime se retrouve vulgairement enchaînée au fond d'une cave, tel un animal de foire que l'avocat va tenter de dompter avec virile autorité. Durant cet endoctrinement à la soumission et à la sagesse, Lucky McKee ausculte de façon aussi bien réaliste que saugrenue le portrait interne d'une cellule familiale orthodoxe. Mais en y regardant de plus près, cette famille modèle si idéalisée à travers leur société puritaine va être en proie à un règlement de compte moral, notamment auprès de leur fille aînée introvertie, du frère interlope (dans son voyeurisme pervers) et de la mère en instance de rébellion.

                                      

Ce tableau à la fois macabre et caustique de ce système dysfonctionnel culmine ensuite vers un déchaînement de violence sanglante à la limite du supportable. Parce que le sentiment haineux de l'injustice trop longtemps intériorisée (la fille, le frère, la mère) va exploser de façon frontale, jusqu'au-boutiste, afin d'extérioriser leur révolte auprès du sur-ego de l'homme tributaire de sa doctrine bien pensante. Niveau casting, on peut saluer la performance de l'impressionnante Pollyanna McIntosh, saisissante d'instinct bestial dans sa posture ombrageuse rehaussée d'une carrure robuste en tant que virago. Son regard sombre et insidieux à la rage contenue par la claustration magnétisant l'esprit du spectateur. Celui-ci déstabilisé s'éprend malgré tout d'empathie à sa fonction soumise puisque réduite à l'état d'esclave pour le compte d'un père de famille misogyne. Sean Bridgers  endosse le patriarche à travers une déliquescence morale dans son mépris pour la gente féminine. Un personnage perfide sidérant d'autorité sadienne auquel son jeune fils influant semble également suivre la même déviance pathologique.

                                         

Portrait craché d'une famille modèle
Dans un climat malsain probant résolument dérangeant, The Woman demeure un éprouvant  pamphlet contre une bourgeoisie patriarcale rattachée aux valeurs conventionnelles de l'Amérique. Satire incisive sur cette société bien pensante nous démontrant ici avec force et réalisme que l'être le plus primitif s'avère finalement plus autonome et intègre que l'homme érudit assoiffé de luxe dans son goût matérialiste. Lucky McKee illustrant également avec sensibilité le malaise filial qui en émane faute de cette démission parentale à l'instinct pervers. Scandé d'une BO rock alternative, The Woman constitue un grand film malade sur l'implosion de cette cellule familiale à travers l'inégalité des sexes et le voyeurisme d'une progéniture livrée à sa fascination pour une violence punitive. 

* Bruno
24.07.11

vendredi 22 juillet 2011

LA CIBLE HURLANTE (Sitting Target)

     

de Douglas Hickox. 1972. U.S.A/Angleterre.1h33. Avec Oliver Reed, Jill St. John, Ian McShane, Edward Woodward, Frank Finlay, Freddie Jones, Jill Townsend, Robert Beatty, Tony Beckley, Mike Pratt, Robert Russell.

Sortie salles U.S.A. le 19 Juin 1972

FILMOGRAPHIE: Douglas Hickox est un réalisateur britannique, né le 10 Janvier 1929 à Londres, décédé le 25 Juillet 1988.
1959: Behemoth the sea Monster (coréalisé avec Eugène Lourié), 1963: It's All Over Town, 1964: Just for you, 1969: Les Bicyclettes de Belsize, 1970: Le Frère, la soeur et l'autre, 1972: La Cible Hurlante, 1973: Théâtre de sang, 1975: Brannigan, 1976: Intervention Delta, 1979: Zulu Dawn, 1983: Le Chien des Baskervilles (télé-film), 1984: The Master of Ballantrae (télé-film), 1985: Blackout.

                        
Hommage subjectif d'un puriste amateur de polar.
Vétéran du cinéma de genre adulé par des fans de tous bords, Douglas Hickox nous aura offert au moins trois réussites distinctes durant sa brève carrière éclectique. Théâtre de Sang, Zulu Dawn et enfin le titre qui nous intéresse ici, La cible Hurlante, dont je vais m'efforcer de rendre hommage avec le plus de respect méritoire. Polar majeur des années 70 honteusement ignoré de nos jours, cette oeuvre fondamentale du genre policier, superbement interprétée et passionnante, baigne continuellement dans un nihilisme prégnant sans aucune échappatoire.

Harry est emprisonné dans une prison anglaise depuis plus de 10 ans. Dans le parloir, durant une discussion avec sa femme, celle-ci lui avoue envisager de le quitter depuis qu'elle est enceinte d'un quidam qu'elle a rencontré durant sa longue absence. Fou de rage, Harry brise la vitre du parloir pour assaillir son épouse et l'étrangler sauvagement. Rapidement maîtrisé par les gardiens, il repart en cellule d'isolement en guise de blâme. Après avoir mûrement réfléchi, aidé de deux comparses, le mari haineux de jalousie est déterminé à s'évader du pénitencier pour jurer d'assassiner sa femme.

                                 

Ca démarre sur les chapeaux de roue avec une violente rixe parmi un couple en implosion au coeur d'un parloir entre détenus pour ensuite suivre l'évasion spectaculaire de trois prisonniers qui auront consciencieusement préparer leur fuite. Un morceau d'intense suspense, réalisé avec précision et minutie alors que quelques incidents aléatoires scrupuleusement plausibles, notamment favorisés par la détermination sans faille des personnages, vont culminer leur objectif dans un point d'orgue vertigineux à couper le souffle !
Après cette évasion réussie, Harry s'investit immédiatement dans sa mission à haut risque d'assassiner sa propre femme devenue infidèle. Avec son complice Birdy, les deux hommes vont être mêlés à un concours de circonstances rarement favorables pour leur quête personnelle et cette folle liberté tant escomptée.

                                  

Dans une photographie blafarde au coeur de l'urbanisation d'une cité industrielle en décrépitude, Douglas Hickox nous entraîne dans un polar brutal implacable. Une traque saugrenue entrepris par notre anti-héros rongé par la trahison conjugale dont le scénario à peine probable dans les exactions encourues relèvent facilement du suicide implicite.
Dominé par l'orageuse prestance de Oliver Reed en taulard fou amoureux mais empli de haine et de violence contre sa dulcinée, son cheminement funèbre va malencontreusement laissé derrière sa carrure robuste quelques cadavres sans qu'un quelconque état d'âme ne vienne le rappeler à la raison. Inflexible, austère et dénué d'une quelconque absolution, l'acteur inné pour ce rôle irascible hypnotise l'écran de sa posture râblée. Alors qu'il laisse finalement transparaître au moment opportun une certaine lamentation, une amertume désespérée face à l'échec de son idylle mécréante.
Avec l'assistance de son acolyte Birdy Williams, formidablement interprété par le charismatique Ian McShane, nos deux malfrats chevronnés n'ont donc aucune éthique ni repentance pour commettre leur méfaits meurtriers auquel quelques innocentes victimes feront les frais de leur acerbe motivation.
Marginaux véreux, gardiens corrompus, putes effrontées et mesquines, gangsters égotistes s'agencent et se fondent dans un récit âpre et violent, haletant et impondérable, d'où pointe de façon sous-jacente le désespoir d'un amour insoluble et déchu.
On sera tout aussi estomaqué de suivre son point d'orgue jusqu'au-boutiste avec un coup de théâtre perfide que personne n'aura vu venir. Tandis que l'épilogue cruellement cathartique va enfoncer un peu plus le clou et achever cette love story galvaudée dans une mélancolie condamnée.

                                   

Superbement maîtrisé dans une réalisation rigoureuse et dominé par des interprètes notables aux gueules burinées criant de charisme viril, La Cible Hurlante est un modèle du polar brut ne relâchant jamais d'une seconde sa tension latente. Remarquablement construit dans sa narration indocile, rythmé de trépidantes scènes d'actions acérées et bénéficiant d'un score jazzy aux accents transalpins de Stanley Myers, cette oeuvre opaque nous plaque au fauteuil avec une audacieuse subversion.

22.07.11
Bruno Matéï.




jeudi 21 juillet 2011

Red Hill


de Patrick Hughes. 2010. Australie. 1h33. Avec Ryan Kwanten, Tommy Lewis, Claire Van Der Boom, Kevin Harrington, Steve Bisley.

FILMOGRAPHIE: Patrick Hughes est un réalisateur australien. 2000: The Director (court-métrage). 2001: The Lighter (court-métrage). 2008: Signs (court-métrage). 2010: Red Hill.

                               

Produit par le réalisateur de Wolf Creek et Solitaire (Greg McLean), ce premier long-métrage de Patrick Hughes tente d'affilier le western ancré dans notre époque contemporaine avec le thriller tendance horrifique parmi la présence d'un tueur méthodique et spectral.

Synopsis: Shane Cooper est un jeune flic débarqué dans une petite contrée de l'Australie, Red Hill, parmi la compagnie de sa femme enceinte. Après avoir rencontré le shérif local, quinquagénaire robuste en lisse électorale, Shane apprend par un adjoint la fuite d'un dangereux détenu, Jimmy Conway, coupable de l'assassinat de sa femme. Une traque sauvage est alors engagée par les forces de l'ordre épaulées de quelques citadins justiciers.

                               

Tourné en à peine un mois de manière indépendante, Red Hill est une série B peu ordinaire dans son alliage des genres western + thriller. Car en dépit d'un scénario classiquement structuré et facilement prévisible, cette histoire de vengeance réussit malgré tout à surprendre dans sa manière d'y façonner son récit pour rendre hommage au western classique situé dans notre époque contemporaine. Avec en prime cette ambition insolite d'y inclure un personnage iconique interlope, véritable exterminateur inflexible. D'ailleurs, sa première apparition à l'écran se révèle l'une des scènes les plus impressionnantes du film tant sa posture buriné d'aborigène patibulaire au visage à demi brûlé renvoie à l'icône horrifique tout droit sorti d'un slasher autoritaire ! De prime abord, ce tueur glacial semble s'être échappé uniquement pour décimer tous les flics de la région si bien qu'il laissera la vie sauve à un couple de retraité en préambule de ces actes criminels. Shane, jeune flic novice, courageux et déterminé, est sur le point de l'appréhender mais son rival impassible réussit à l'intimider d'un simple regard létal.

                               

Le scénario convenu est donc loin d'être le pari gagnant d'une histoire éculée traitée à foison dans les classiques du genre. Mais pour une première réalisation, Patrick Hughes réussit honorablement à apporter suffisamment de densité pour le profil de notre preux héros tributaire de ces supérieurs véreux en y calibrant adroitement des scènes d'action violentes et spectaculaires. Quand bien même l'esthétisme crépusculaire des images poétiques d'une beauté opaque sensuelle participe beaucoup au climat insolite, clairsemé qui en découle. De surcroît, la photographie désaturée  amplifie ce sentiment fantasmagorique auquel même à deux reprises une panthère noire s'aventurera auprès de nos antagonistes. Comme si ce félin hostile eut prophétisé la revanche d'un fantôme meurtri par la haine de la violence et de la xénophobie.

                              

Nanti d'une mise en scène plutôt soignée (même si perfectible) et de dialogues assez balisés, Red Hill est une étonnante découverte parvenant dans sa forme à offrir un western classique dans un moule inhabituel de mystère sous-jacent et d'insolite palpable. La prestance frugale d'honnêtes comédiens et surtout la caractérisation funèbre du personnage patibulaire féru de vengeance privilégient une dimension horrifique prégnante au sein de ce western moderne à la personnalité propre. En prime, son final révélateur, escompté mais cependant audacieux, se révèle intense et poignant en réussissant à provoquer une émotion empathique sans l'ombre du pathos. Un ultime acte décisif mis en suspension avant que la véritable victime est à deux doigts de plonger dans les ténèbres. 

*Bruno
21.07.11

mercredi 20 juillet 2011

LIMITLESS


de Neil Burger. 2011. U.S.A. 1h45. Avec Abbie Cornish, Andrew Howard, Anna Friel, Bradley Cooper, Johnny Whitworth, Robert De Niro, Robert John Burke, Tomas Arana.

Sortie en salles US: 18 Mars 2011, France: 8 Juin 2011.

FILMOGRAPHIE: Neil Burger est un réalisateur et scénariste, né en 1964 dans le Connecticut.
2002: Interview with the Assassin
2006: L'Illusionniste
2008: The Lucky Ones
2011: Limitless

                              

Hommage subjectif d'un puriste amateur (high-tech).
Trois ans après le méconnu The Lucky Ones, sympathique road movie émouvant et attachant, Neil Burger s'inspire d'un roman d'Alan Glynn, The Dark Fields, publié en 2001, pour façonner son nouveau long-métrage traitant de la réussite professionnelle par l'entremise d'une drogue synthétique atypique.

Eddie Mora est un jeune écrivain sur le déclin, faute d'une ambition desservie par son caractère ombrageux et d'une idylle fuyante. Après la rencontre fortuite avec son ex beau-frère, celui-ci lui offre gracieusement un comprimé, le NZT, une drogue surpuissante capable de décupler de 20% de l'utilisation de notre cerveau à 100 % pour combler nos facultés intellectuelles.
Rapidement, Eddie devient omniscient, loquace, érudit, apprend à une vitesse furtive et accède enfin à la notoriété en exerçant diverses stratégies spéculatives afin de devenir un leader sur le marché de la finance à Wall Street. Son rival, Carl Van Loon, un puissant homme d'affaire inflexible reste fasciné par l'intelligence hors normes du jeune écrivain. Mais une bande de tueurs attirés pas les effets prodigieux du NZT reste à ses trousses alors que des effets secondaires ne vont pas tarder à se manifester pour le sujet devenu fatalement addict.

                           

D'une idée de départ passionnante et savoureusement utopique, Limitless mise plus sur la forme d'un  thriller high-tech aux effets techniques clinquants et imaginatifs plutôt que le fond dénué d'ambition conceptuelle. Comme ce plan séquence virtuose entièrement tourné en CGI en guise de générique introductif. Une maîtrise bluffante que Neil Burger va régulièrement exploiter à bon (voir mauvais !) escient pour enjôler et accentuer les effets visuels fantasmatiques de la drogue décuplant notre intelligence à sa quintessence.
La première partie du film nous illustrant l'ascension d'un nouveau prodige de la finance, via l'entremise d'une drogue dépendante, amuse et fascine le spectateur, s'imaginant lui même dans cette situation héroïque où tout serait alors envisageable et imaginable afin d'exaucer ses ambitions personnelles pour devenir nanti. La thématique de l'accoutumance à la drogue illusoire peut-être facilement comparée à un produit illicite substantiel et notoire, la cocaïne. Une drogue chic et bon genre que le milieu indocile de la bourgeoisie et du showbizz connaissent bien pour mieux chiader leur potentiel artistique au détriment de la peur et la timidité. Mais à quel prix ?
Après que notre héros ait pris conscience du danger létal du NZT par ses crises de dépendances, son entourage tributaire de ses dons intellectuels va rapidement le rappeler à la raison pour lui permettre de continuer sur sa lancée révolutionnaire et ainsi façonner leur ambitieux projet.
Alors qu'un puissant homme d'affaire va progressivement s'affilier avec Eddie, des tueurs sont déterminés à le faire chanter pour s'accaparer et produire ce nouveau remède miracle en quantité illimitée. Contraint de ne pouvoirs endiguer sa prise quotidienne de NZT beaucoup trop fructueuse pour son quotient intellectuel, sa nouvelle devise sera d'affronter et combattre ses criminels tout en essayant de devancer son supérieur, le puissant Carl Van Loon. Voilà pour le scénario classiquement convenu juste avant un point d'orgue déroutant (équivoque ?) assez audacieux.

                            

La nouvelle star montante Bradley Cooper doit énormément au caractère sympathique et ludique du film qui en découle. Sa prestance spontanée, son regard bleu scintillant d'esprit lucide et sa personnalité incisive pleine d'aplomb renforcent largement le côté attachant et haletant de ses exactions professionnelles insensées. Notre monstre sacré Robert De Niro apporte pour sa part une discrète et sobre contribution dans celui du magnat fortuné difficilement domptable dans les négociations financières. Modeste et mesuré, l'acteur notable ne fait que transparaître un personnage fascinant et téméraire.

                         

Hormis un scénario mal exploité qui ne fait que survoler une idée astucieuse, Limitless est un bon divertissement agréablement mené, même si la seconde partie révèle bien peu de surprises avant son épilogue cynique inopinément amoral. La présence magnétique de l'excellent Bradley Cooper, le score musical en connivence avec l'ambiance high-tech hallucinogène et la forme esthétique exploitée de façon inventive permettent d'apprécier un spectacle ludique gentiment naïf.

Dédicace à Caroline Masson.
21.07.11.
Bruno Matéï.
                         

mercredi 13 juillet 2011

De sang froid (The Boys Next Door)

                                          

de Peneloppe Spheeris. 1984. U.S.A. 1h30. Avec Maxwell Caulfield, Charlie Sheen, Patti d'Arbanville, Hank Garrett, C Dancer Paul, Richard Pachorek, Lesa Lee, Kenneth Cortland.

Sortie en France le 27 Mai 1987 avec mention: Interdit au moins de 18 ans.

FILMOGRAPHIE: Penelope Spheeris est une réalisatrice, scénariste, actrice, productrice, directrice de la photographie et monteuse américaine née le 2 Décembre 1945 à La Nuovelle-Orléans, Louisiane (U.S.A). Penelope Spheeris est la cousine du réalisateur gréco-français Costa-Gavras. 1968: Uncle Tom's Fairy Tales, 1972: I don't know, 1981: The Decline of western civilization, 1984: Suburbia, 1985: De Sang Froid, 1986: Hollywood Vice Squad, 1987: Dudes, 1988: The Decline of western civilization 2, 1990: Thunder and Mud, 1991: UFO Abductions (TV), Prison Stories: women on the inside (TV), 1992: Wayne's World, 1993: Danger Theatre, 1993: Les Allumés de Beverly Hills, 1994: Les Chenapans, 1996: Black Sheep, 1998: The Decline of western civilization 3, The Thing in Bob's Garage, Applewood 911 (TV), Supersens, 1999: Hollywierd, 2000: Dear Doughboy (TV), 2001: Posers, We Sold our souls for Rock'n roll, 2003: The Crooked E: The Unshredded Truth About Enron (TV), 2005: The Kid and I.

                                      

Réalisatrice prolifique de télé-films bon marché et de comédies bonnard (Wayne's World), Penelope Spherris fut signataire en 84 d'une série B glauque et subversive illustrant le portrait sordide de deux jeunes marginaux en chute libre dans leur cheminement meurtrier dénué de mobile. Le pitchRoy et Bo sont deux jeunes adolescents oisifs et paumés, en quête de liberté et d'évasion. Un jour, ils décident de quitter leur contrée pour passer un week-end à Los Angeles. Sous l'influence de Roy, ils se laissent embarquer dans une série de crimes licencieux.

                                     

Dès le générique liminaire inscrit sur fond noir, des portraits d'archive monochrome se succèdent afin d'authentifier le profil iconique d'illustres serial-killers. Sa bande-son musicale bourdonnante instaurant un sentiment anxiogène face aux crimes énoncés par deux voix-off ombrageuses. L'intrigue se focalise ensuite sur deux jeunes marginaux batifolant à dessiner l'empreinte d'un cadavre sur le sol d'une cour de lycée. Après les cours scolaires routiniers, une soirée festive est organisée par des étudiants quand bien même nos deux acolytes s'ennuient ferme et décident de plier bagage pour Los Angeles afin d'escompter une virée festive. Après une violente rixe avec un pompiste tabassé à mort, l'esprit dérangé de Roy va rapidement s'envenimer dans son désir indocile de passer à l'acte criminel. Tandis que Bo semble éprouver un plaisir surestimé à se croire supérieur devant l'autorité belliqueuse de son camarade. Durant leur séjour nocturne, une nouvelle bagarre impromptue est sur le point d'aboutir dans un bar gay. C'est après cet incident mineur que Roy va enfin pouvoir laisser libre cours à ses pulsions morbides pour envisager d'assassiner un homosexuel qui les aura naïvement entraîné dans son appartement. Du côté des forces de l'ordre, l'enquête policière piétine mais parvient néanmoins à rassembler quelques indices fiables, faute des maladresses laissées sur les lieux du crimes par les adolescents.

                                      

A travers une sombre atmosphère davantage horrifique et oppressante, Peneloppe Spheeris dépeint le portrait pathétique et terrifiant de deux délinquants juvéniles, évoluant dans une cité urbaine où la violence quotidienne demeure monnaie courante. Si la narration efficacement conduite n'évoque aucune surprise (en dehors du final cathartique), la manière crue dont la réalisatrice dépeint les exactions de nos criminels renvoie facilement aux ambiances malsaines et poisseuses des plus grands films notoires traitant du même thème. Les scènes chocs percutantes, particulièrement brutales s'avèrent d'autant plus dérangeantes qu'elles mettent en appui l'état d'esprit décervelé de nos protagonistes fascinés par la violence gratuite. Une manière putassière et immorale d'extérioriser leur haine et leur infériorité intellectuelle. Niveau cast, Maxwell Caulfield se révèle plutôt inquiétant et sournoisement cynique sous l'impulsion d'un regard sadique lattent, puis monolithique lorsqu'il se livre à ses penchants meurtriers d'une violence incontrôlée. En jeune ado inculte et infantile (sa fascination puérile face à la diffusion TV d'un manga animé préfigure l'esprit niais d'un enfant de 5 ans), Charlie Sheen livre une sobre prestance pour caractériser un gamin inconséquent finalement dépassé par les évènements morbides que son camarade perfide influence.

                                          

D'un magnétisme perturbant auprès de son atmosphère délétère dénuée de complexe, De Sang Froid créait malaise et fascination pour ce portrait réaliste d'une jeunesse désoeuvrée, métaphore d'une société urbaine désaxée où homophobie et racisme restent ancrés dans cette génération rebelle. La qualité de l'interprétation, sa violence radicale et la solide conduite du récit nous entraînant (de force) dans une spirale criminelle dénuée de mobile. D'où l'intensité de son malaise davantage prégnant au fil d'un récit immoral dépeint sans complaisance ni effet de manche. 

13.07.11.      3.
* Bruno

mardi 5 juillet 2011

FASTER


de George Tillman Jr. 2010. U.S.A. 1h38. Avec Dwayne Johnson, Billy Bob Thornton, Carla Gugino, Maggie Grace, Moon Bloodgood et Oliver Jackson-Cohen.

Sortie en salles en France le 2 mars 2011.

FILMOGRAPHIEGeorge Tillman est un réalisateur, producteur et scénariste né le 26 Janvier 1969 à Milwaukee, Wisconsin, U.S.A.
1994: Scenes for the soul, 1997: Soul Food, 2000: les Chemins de la dignité, 2009: Notorious B.I.G.

                           

Hommage subjectif d'un puriste amateur.
Le réalisateur modeste George Tillman Jr s'engage ici dans la voie du revenge movie pour illustrer une surprenante série B hargneuse à la violence sanguine, beaucoup moins superficielle et négligeable que la plupart des produits formatés pour ados turbulents. Alors que sa thématique sur la vengeance prêche intelligemment pour une repentance christianiste.

Après avoir purgé une peine de 10 ans d'emprisonnement pour une implication dans un braquage à main armé, James Cullen, dit le Driver, est fermement décidé à venger les responsables de la mort de son frère, sauvagement égorgé. Mais un inspecteur de police junkie sur le déclin et un tueur à gage méthodique sont lancés à sa trousse pour tenter de l'endiguer.

                         

A l'instar des films d'action des années 80 filmés sans prétention avec un sens de l'efficacité roublard dédié au spectaculaire pétaradant, Faster fait sacrément plaisir à voir dans le tableau orthodoxe des produits mercantiles. Il réussit sans peine à se démarquer de ses futiles concurrents facilement reconnaissables dans une abrutissante mise en forme arbitraire dénuée de fond.
Et en terme d'efficacité, Faster ne pouvait pas proposer autre chose de plus jouissif et enthousiasmant.
Si le scénario est indubitablement construit sur un canevas archi convenu, sa structure mise en place avec dextérité, l'émotion inopinée qu'il véhicule par le biais de personnages déshumanisés en quête d'exutoire et l'action incessante qui en découle nous permettent de savourer un revenge movie brutal jamais niais ou lénifiant.
Le réalisateur n'épargne toutefois pas quelques tics clippesques et artifices redondants comme certains effets de ralenti trop présents dans son premier acte. Quelques clichés sont également coutumiers au genre prescrit (le préambule dans la prison, la blonde éprise de passion amoureuse pour son tueur bellâtre, obtus d'accomplir un dernier contrat, le flic drogué voulant se racheter une conduite) mais la succession de péripéties habilement emballées réussissent sans difficulté à transcender son caractère au préalable académique.
C'est notamment la densité d'une galerie de personnages rebelles et marginaux évoluant dans une prise de conscience octroyée à la repentance qui séduit le public. Alors que l'antagoniste caractérisé par le tueur à gage arriviste semble être finalement le plus à plaindre dans son état d'esprit véreux par la quête autonome d'une victoire orgueilleuse.
La vengeance sauvage de Driver est implacable, sans concession et refus de compromis. Mais sa besogne d'exterminer implacablement chaque responsable de la mort de son frère va intelligemment le mener vers une voie cathartique par l'entremise d'une éthique religieuse.
On sera d'autant plus surpris par son final totalement impondérable culminant son point d'orgue dans un coup de théâtre délétère que personne n'aura vu arriver !

                         

Habitué aux rôles conventionnels de dur à cuire traditionnellement inexpressif,  Dwayne Johnson (The Rock) réussit enfin à se détacher des conformités pour livrer une poignante composition dans son personnage marginalisé d'anti-héros militant pour la cause de son frère. Inflexible, impassible et austère dans son impressionnante carrure de baroudeur athlétique, il s'impose frugalement à apporter une vraie dimension humaine dans sa quête de vengeance expéditive laissant augurer dans son cheminement sinistré une potentielle rédemption.

Passé inaperçu et peu valorisé par son titre sommaire lors de sa sortie, Faster est une excellente surprise vouée à distraire son spectateur dans une sincérité inespérée, car renvoyant à certains classiques (ou plaisirs coupables) des années 80 bien connus des amateurs virils (cobra, commando, Double Détente, Le Contrat, Tango et Cash, Punisher et même Terminator). Ultra violent, spectaculaire, parfois tendu et rondement mené sur une BO pop-rock endiablée, ce B movie rend honneur au genre bourrin privilégié par la caractérisation de ses personnages d'une certaine épaisseur psychologique. Tandis que sa réflexion sur la revendication vindicative allouée à une morale repentie délivre favorablement un message pacifiste inscrit sur la tolérance.

                         


05.07.11
Bruno Matéï.

dimanche 3 juillet 2011

NEVER LET ME GO

   

de Mark Romanek. 2010. Angleterre/U.S.A. 1h43. Avec Keira Knightley, Carey Mulligan, Andrew Garfield, Charlotte Rampling, Nathalie Richard, Sally Hawkins, Andrea Riseborough, Charlie Rowe, Ella Purnell.

Sortie en salles en France le 2 Mars 2011.

FILMOGRAPHIE: Mark Romanek est un réalisateur américain principalement connu pour ses clips vidéos. Il a travaillé avec : Red Hot Chili Peppers, Nine Inch Nails, Linkin Park, Michael Jackson, Janet Jackson, No Doubt, Beck, Johnny Cash, Jay-Z, Madonna, R.E.M, Lenny Kravitz.  
1985: Static,
2002: Photo Obsession,
2010: Never let me go,
2011: Locke and Key (télé-film).

Après Photo Obsession, un drame psychologique diaphane sur l'indifférence déguisé en thriller angoissant et dominé par la sobre interprétation de Robin Williams, Mark Romanek adapte avec Never let me go un roman de Kazuo Ishiguro, scénarisé par Alex Garland (28 jours plus tard).
Depuis l’enfance, Kathy, Ruth et Tommy sont les pensionnaires d’une école en apparence idyllique, une institution coupée du monde où seuls comptent leur éducation et leur bien-être. Devenus jeunes adultes, leur vie bascule : ils découvrent un inquiétant secret qui va bouleverser jusqu’à leurs amours, leur amitié, leur perception de tout ce qu’ils ont vécu jusqu’à présent.Adapté d'un roman de Kazuo Ishiguro.









Kathy, Tommy et Ruth ont passé leur enfance à Hailsham, une école anglaise idyllique tenue à l'écart du monde. Alors qu'ils découvrent qu'ils ne sont que des clones dont l'unique existence est basée sur le don d'organes, ils vont être confrontés à l'amour, la jalousie et la trahison...




Adapté d'un roman de Kazuo Ishiguro, scénarisé par Alex Garland (28 jours plus tard) et transcendé par la somptueuse photo de Adam Kimmel

vendredi 1 juillet 2011

J'AURAI TA PEAU (I, the Jury)

                   

de Richard T. Heffron. 1982. U.S.A. 1h55. Avec Geoffrey Lewis, Armand Assante, Barbara Carrera, Laurene Landon, Alan King, Paul Sorvino, Judson Earney Scott, Barry Snider, Julia Barr, Jessica James.
                                                            
Sortie salle en France le 4 mai 1983. Sortie US: le 9 Octobre 1982.

FILMOGRAPHIE: Richard T. Heffron est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur américain né le 6 Octobre 1930 à Chicago, décédé le 27 août 2007 à Seattle.
1971: Prenez mon nom, ma femme, mon héritage (TV), 1972: Fillmore, Banacek (série TV), 1973: Toma (TV), Outrage (TV), 1974: The Morning After (TV), The Rockford Files (TV), Newman's Law, The California Kid (TV), Locusts (TV), 1975: The Honorable Sam Houston (TV), I will Fight no more Forever (TV), Death Scream (TV), 1976: Trackdown, Les Rescapés du Futur, 1977: Young Joe, the Forgotten Kennedy (TV), 1978: See How She Runs (TV), 1978: True Grit (TV), 1980: Rumeurs de Guerre (TV), Foolin' Around, 1981: A Whale for the Killing (TV), 1982: J'aurai ta peau, 1983: Le Crime dans le sang (TV), 1984: V, la bataille finale (série TV), Anatomy of an Illness (TV), The Mystic Warrior (TV), 1985: Nord et Sud (Série TV), 1986: Samaritain: The Mitch Snyder Story (TV), 1987: Reconnue coupable (TV), Coupable d'Innocence (TV), Napoléon and Joséphine: A love story (série TV), 1988: Broken Angel (TV), Pancho Barnes (TV), 1989: La Révolution Française (seconde partie: Les Années Terribles), 1991: Target (TV), 1995: Une petite ville bien tranquille (TV), 1996: Daniel Steel: un si grand amour (TV), Le Baron série TV).

                           

Hommage subjectif d'un puriste amateur.
Réalisateur prolifique de télé-films et séries TV lucratives, Richard T. Heffron est appelé à adapter en 1982 un célèbre roman de Michael Spillane (I'am the Jury publié en 1947), largement réactualisé sous la plume du grand Larry Cohen. C'est d'ailleurs le notoire créateur des Envahisseurs qui devait à l'origine réaliser ce projet inspiré d'un James Bond pour adultes. Viré après une semaine de tournage par les producteurs, le modeste Richard T. Heffron est alors enrôlé pour mettre en scène l'intégralité de ce polar contemporain, J'aurai ta peau.
Pour les nostalgiques de l'époque, le film fut particulièrement encensé par la célèbre revue Starfix, créé par Christophe Gans et fut notamment estampillé comme le "Choc du mois" lors de sa sortie officielle en salles françaises !

Mike Hammer apprend la mort de son meilleur ami, ancien vétéran du Vietnam retrouvé mystérieusement assassiné dans sa demeure. Épaulé par sa fidèle secrétaire blonde et pulpeuse, son enquête va le mener auprès d'un établissement thérapeutique aux méthodes très particulières, érigé par une charmante directrice, Charlotte Bennett, mais tributaire des agissements sans vergogne de la C.I.A.

                            

Avec J'aurai ta peau, on peut dire que le personnage du célèbre détective privé incarné par Mike Hammer est sacrément dépoussiéré en 1982 sous la houlette d'un réalisateur sans génie particulier.
Pourtant, ce polar parfois brutal conjuguant habilement le sexe et la violence avec une évidente efficacité s'en tire honorablement tant son récit orthodoxe peu innovant mais agréablement mené nous tient en haleine jusqu'au générique de fin.
Ce qui séduit de prime abord dans cette version adulte d'une enquête adulée d'un détective vétuste, c'est cette ambiance sulfureuse qui en émane. Dans un concentré d'érotisme charnel plutôt couillu et d'une certaine violence explicite parfois spectaculaire, J'aurai ta peau réussit sans peine à séduire et captiver son public embarqué dans un univers mafieux impliquant un drôle d'établissement médical aux méthodes thérapeutiques particulièrement lubriques. D'ailleurs, durant certaines scènes polissonnes illustrant avec sensualité le déroulement de la psychothérapie, le film joue harmonieusement avec ce climat sexuel effronté affichant une galerie de donzelles affriolantes s'exhibant langoureusement dans l'atmosphère fiévreuse de décors flamboyants. A ce titre, il y a une superbe séquence érotique révélant intégralement l'anatomie corporelle de la plantureuse comédienne Barbara Carrerra batifolant avec notre héros conquis, réunis communément dans une chambre à coucher incandescente.
A d'autres moments d'une tonalité âpre plus tendue, le polar sulfureux vire carrément au thriller horrifique dans le profil psychotique établi envers un tueur de jeunes femmes aguicheuses. Un psychopathe obsédé par une gente spécifique puisque ses victimes sont acculées de s'accoutrer d'une perruque de couleur rousse à apposer sur la tête, obligées de conjurer verbalement qu'elles idolâtrent leur tortionnaire par les mots laconiques: "je t'aime", juste avant de trépasser sauvagement poignardée !

                          

Armand Assante (frère de Sylvester Stallone) se tire honorablement d'un rôle aussi factuel, célébré en 1958 par l'acteur Darren McGavin pour la première série TV portant le fameux homonyme du détective privé, ou encore dans celle des années 80, idolâtrée par l'illustre Stacy Keach. Facilement à l'aise et charismatique dans sa posture expéditive ou son influence sensiblement lubrique allouée à la luxure pour la gente féminine, il sait utiliser avec vigueur indocile et esprit finaud ses atouts pour appréhender ses rivaux délétères et affabulateurs. La très attrayante Laurene Landon (Maniac Cop) endosse avec une aimable conviction le rôle d'une secrétaire libertaire instinctivement sexy et attendrie pour son amant alors que la sublime Barbara Carrera envoûte et diabolise imparablement l'écran de ses talents perfides d'odieuse conspiratrice.

Rythmé, sexy, violent et nerveux, ce polar hot agréablement mené réussit haut la main à dévergonder une icône du petit écran rendue un peu trop docile dans son conformisme engagé. Et cela même si certains clichés pesants et un final extravagant dans ses péripéties débridées bondissantes sont à deux doigts de sombrer dans le ridicule.
Scandé par une partition musicale adéquate de Bill Conti, J'aurai ta peau saura largement séduire tous les amoureux de polars brut qui n'ont pas froid aux yeux, d'autant plus que l'inventivité des dialogues abondent en dérision sarcastique. 

                         

Note: Pour l'anecdote subsidiaire, c'est Clint Eastwood qui devait à l'origine endosser le rôle de Mike Hammer !

01.07.11
Bruno Matéï.

                                          

mercredi 29 juin 2011

C'est ma vie aprèstout / Whose Life Is It Anyway ?


de John Badham. 1981. U.S.A. 1h55. Avec Richard Dreyfuss, John Cassaveres, Christine Lahti, Bob Balaban, Kenneth Mc Millan, Kaki Hunter, Thomas Carter, Alba Oms, Janet Eilbert, Kathryn Grody. 

Sortie US le 2 Décembre 1981.

FILMOGRAPHIEJohn Badham est un réalisateur et producteur britannique, né le 25 Aout 1939 à Luton en Angleterre. 1976: Bingo, 1977: La Fièvre du Samedi soir, 1979: Dracula, 1981: C'est ma vie après tout, 1983: Tonnerre de feu, Wargames, 1985: Le Prix de l'exploit, 1986: Short Circuit, 1987: Etroite Surveillance, 1990: Comme un oiseau sur la branche. 1991: La Manière Forte. 1992: Nom de code: Nina. 1993: Indiscrétion Assurée. 1994: Drop Zone. 1995: Meurtre en suspens. 1997: Incognito. 1998: Road Movie.

                                   

Réalisateur éclectique notoire, John Badham livre en 1983 son oeuvre la plus bouleversante auprès du thème délicat de l'euthanasie alors que de nos jours il est hélas injustement oublié des cinéphiles aguerris. Or, sous l'impulsion d'un acteur aussi notable que Richard Dreyfuss ne s'apitoyant nullement sur son sort infortuné, C'est ma vie après tout éprouve le spectateur pour suivre le cheminement désespéré d'un patient paraplégique décidé à rompre définitivement avec la solitude de sa condition infirme. Et ce sans émotion programmée afin de nous prendre vulgairement en otage auprès de son thème aussi facilement tire-larme que des cinéastes sans crupules ont trop souvent tendance à cultiver.  Le PitchKen Harrison est un quadra épris de passion pour son métier de sculpteur, farouchement amoureux de son épouse. Un matin, en empruntant la route, il percute incidemment de plein fouet un poids lourd engagé sur la droite d'un carrefour. Transporté d'urgence à l'hôpital, John se retrouve paralysé de tous ses membres, à l'exception de l'usage de sa tête et de ses facultés cognitives.

                                       

Œuvre magistrale d'une fragilité humaine emplie d'humilité, C'est ma vie après tout nous conte avec une acuité implacable le destin galvaudé de ce sculpteur condamné à la paralysie. Si bien qu'après avoir sombré 30 jours dans le coma, Ken prend conscience que sa vie autrefois fougueuse et épanouie est aujourd'hui rompue à jamais. En l'occurrence, après avoir avoué à sa partenaire son désir de rompre leur union maritale, Ken se résigne à mourir de son plein gré. Epaulé du personnel médical, chacun d'eux tentera éperdument de le convaincre à renoncer à l'euthanasie. Ainsi, en conjuguant (intense) émotion, tendresse, humour et intelligence John Badham évoque  les thèmes de l'euthanasie et de la dépression par le biais de cet infirme saint d'esprit toutefois résolu à s'y sacrifier. Mais est-il néanmoins moralement apte à envisager de mourir afin de dissoudre sa souffrance morale ? Le cinéaste dénonçant également l'attitude du corps médical lorsque ces derniers tentent d'apaiser la souffrance morale du malade par le biais de drogues de substitution, quand bien même le système consulaire devra juger s'il faut autoriser ou non la volonté personnelle du malade voué à en finir. Sans l'ombre du pathos donc, en privilégiant une verve exubérante, Richard Dreyfus insuffle une dimension humaine extravertie dans celui du paraplégique obtus féru de blagues salaces auprès du corps infirmier à son chevet. Son parcours du combattant à daigner mourir plutôt que de renouer avec la vie bouleverse durement le spectateur témoin malgré lui de sa désillusion existentielle alors que l'on espère (par voie de rédemption) un chouilla d'espoir pour sa destinée sinistrosée.

                                        

Sublimé de la prestance à la fois fragile et spontanée de Richard Dreyfuss vibrant d'expressivité angoissée et désespérée dans une posture lunaire sciemment antinomique et d'une poignée de seconds rôles très attachants dans leur posture empathique jamais outrée (John Cassavetes, Christine Lahti, Bob Balaban, Kenneth Mc Millan, Kaki Hunter ), C'est ma vie après tout constitue un témoignage bouleversant sur le respect du patient d'accepter son choix personnel de poursuivre ou pas sa condition estropiée. Il y émane un grand moment de cinéma aussi tendre, fringant et douloureux que profondément pessimiste de par la rigueur de son élégie teintée de désillusion. 

Dédicace à Luke Mars.
29 Juin 2011. 3