samedi 9 mai 2015

KINGSMAN: SERVICES SECRETS

                                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmosphere.com 

"Kingsman: The Secret Service" de Matthew Vaughn. 2014. Angleterre/U.S.A. 2h08. Avec Taron Egerton, Colin Firth, Samuel L. Jackson, Mark Strong, Michael Caine, Sophie Cookson.

Sortie salles France: 18 Février 2015. U.S: 13 Février 2015

FILMOGRAPHIE: Matthew Vaughn est un réalisateur, scénariste et producteur anglais, né le 7 Mars 1971 à Londres.
2004: Layer Cake. 2007: Stardust, le mystère de l'étoile. 2010: Kick-Ass. 2011: X Men, le commencement. 2014: Kingsman: services secrets. 


Réalisateur anglais célébré par Kick-Ass, c'est durant ce tournage que Matthew Vaughn eut à nouveau l'idée de transposer à l'écran un autre Comic Book, The Secret Service. Sous l'impulsion d'un jeune acteur novice en tête d'affiche (Taron Egerton s'en sort aisément dans sa stature pugnace de jeune loup en apprentissage !) et d'une poignée d'acteurs renommés (Samuel L. Kackson, Michael Caine, Colin Firth), Kingsman: services secrets nous cuisine un savoureux cocktail d'action, d'aventures et de cocasserie dans un esprit décomplexé où pointe le politiquement incorrect. Clairement pensé comme une parodie de James Bond et un hommage aux "vieux" classiques du cinéma noble, l'intrigue allie espionnage industriel outre-mesure (que Samuel L. Jackson se prend malin plaisir à comploter dans une posture de grand benêt !), et action homérique cultivant le goût du gore cartoonesque (même si certains effets numériques ratés viennent désamorcer leur impact spectaculaire).


Scindé en deux parties, Kingsman privilégie de prime abord l'entraînement intensif de jeunes recrues se disputant le poste du prochain "Lancelot" au sein de la prestigieuse agence, Kingsman. Ce dernier, parti en mission, ayant été lâchement exécuté par l'acolyte d'un magnat utopiste prêt à parfaire un complot meurtrier contre l'humanité. Par le biais de cette conjuration ciblant Internet et les Smartphones, Matthew Vaughn en profite pour se railler de la société de consommation (Mac-Donald notamment dont Richmond Valentine s'en porte garant !), de ces appareils modernes toujours plus performants afin de nous inciter à repasser au tiroir-caisse. Qui plus est, la religion est également mise au pilori lors d'un stratagème expérimental, un carnage festif au sein d'une église intégriste. La seconde partie mise ensuite l'accent sur les stratégies d'attaque et de défense que nos héros vont tenter de transcender sous la houlette de l'agent Merlin. Quand bien même Valentine est sur le point de lobotomiser la population mondiale en meurtriers désaxés sous l'impulsion d'une carte Sim ! Si le film parvient habilement à amuser et à solliciter notre attention, il le doit également aux ressorts dramatiques qui interfèrent durant le cheminement incertain du héros en quête paternelle et identitaire (une manière de relancer l'intensité des enjeux d'un point de vue vindicatif et de le tester à l'épreuve de la riposte !), et à son intrigue en chute libre traversée de frénésie incontrôlée ! A l'instar du final orgasmique, délire assumé de gags sardoniques, subterfuges à répétition, gun-fights stylisés et corps à corps chorégraphiés. Qui plus est, la galerie de personnages extravagants s'en donnent à coeur joie d'afficher leurs bravoures fantaisistes par le biais de gadgets insolents conçus pour épicer les confrontations belliqueuses !


Avec son esthétisme vintage combiné dans une facture high-tech d'anticipation, à l'instar de la défroque excentrique de ces espions au tailleur impeccable, Kingsman parvient à renouveler le genre d'espionnage grâce à l'esprit décomplexé de l'action bourrine et de la cocasserie cartoonesque. Un divertissement survitaminé tirant donc parti de sa fougue par son refus infaillible de prétention. James Bond n'a qu'à bien s'tenir et continuer à faire grise mine ! 

Bruno Matéï

vendredi 8 mai 2015

The King of New-York

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Silverferox

d'Abel Ferrara. 1990. Italie/Angleterre/U.S.A. 1h43. Avec Christopher Walken, David Caruso, Laurence Fishburne, Victor Argo, Wesley Snipes, Janet Julian, Joey Chin, Steve Buscemi.

Sortie salles France: 18 Juillet 1990. U.S: 28 Septembre 1990

Récompense: 1991: MysFest -"Best Direction" (Abel Ferrara) Prix du meilleur réalisateur

FILMOGRAPHIE: Abel Ferrara est un réalisateur et scénariste américain né le 19 Juillet 1951 dans le Bronx, New-York. Il est parfois crédité sous le pseudo Jimmy Boy L ou Jimmy Laine.
1976: Nine Lives of a Wet Pussy (Jimmy Boy L). 1979: Driller Killer. 1981: l'Ange de la Vengeance. 1984: New-York, 2h du matin. 1987: China Girl. 1989: Cat Chaser. 1990: The King of New-York. 1992: Bad Lieutenant. 1993: Body Snatchers. Snake Eyes. 1995: The Addiction. 1996: Nos Funérailles. 1997: The Blackout. 1998: New Rose Hotel. 2001: Christmas. 2005: Mary. 2007: Go go Tales. 2008: Chelsea on the Rocks. 2009: Napoli, Napoli, Napoli. 2010: Mulberry St. 2011: 4:44 - Last Day on Earth. 2014: Welcome to New-York. 2014: Pasolini.


Deux ans avant son chef-d'oeuvre Bad Lieutenant, Abel Ferrara nous eut déjà estomaqué avec le fulgurant King of New-York. Hormis son échec commercial à sa sortie et des critiques parfois mitigées, le film finit au fil des années par se tailler une réputation culte auprès d'une frange de cinéphiles jamais remis d'une expérience aussi opaque et frénétique. Une fresque mafieuse inscrite dans le nihilisme, notamment pour son portrait imparti à la déliquescence morale d'antagonistes convergeant inévitablement vers l'impasse. Transcendé de la présence ensorcelante de Christopher Walken dans l'un de ses meilleurs rôles, The King of New-York hypnotise les sens du spectateur de par sa faculté immersive à nous plonger dans l'univers du gangstérisme parmi l'obédience d'un caïd à peine libéré de prison. Le pitchDélibéré à reprendre le contrôle de sa ville et peut-être postuler pour la place de Maire, Frank White est malencontreusement contraint de livrer une bataille sans merci contre le cartel pour se disputer l'enjeu de la drogue. Soutenu par quelques avocats corrompus, sa manoeuvre triviale a également pour but de financer la reconstruction d'un hôpital afin de venir en aide aux plus démunis et pour se racheter une bonne conscience. Mais une poignée de flics réactionnaires ont décidé de transgresser leur règle pour mieux alpaguer celui que l'on surnomme: le Roi de New-York. 


Polar ultra violent à travers ses éclairs de brutalité acérés déployant règlements de compte entre bandes rivales ainsi qu'une poursuite automobile effrénée au coeur de l'enfer new-yorkais, The King of New-York est l'un des films les plus envoûtants (score lancinant à l'appui !) que l'on ait pu inscrire sur pellicule. Un polar d'une noirceur abyssale, une virée cauchemardesque dans les tréfonds d'une métropole agonisante où gangsters et flics se provoquent mutuellement avec un entêtement suicidaire. Nanti d'un esthétisme crépusculaire et d'une mise en scène stylisée où le luxe est également mis en contraste afin de mettre en exergue l'addiction que peut insuffler une existence aussi faste que celle de Frank et ses sbires, The King of New-York reproduit le même effet de fascination que pouvait l'être le personnage de Tony Montana dans Scarface. Ce même attrait pour le goût de l'argent et des résidences luxueuses auquel la compagnie de jeunes filles en lingerie fine se récurent le nez avant de passer à l'étreinte ou à l'affront (elles font également usage des flingues pour protéger leur baron). Peinture nihiliste d'une société dégingandée engluée dans la corruption de l'argent et l'affluence de la drogue face à la pression d'une criminalité incontrôlable, Abel Ferrara cristallise l'idée du chaos avec un réalisme proprement crépusculaire. Ainsi, par le biais du personnage iconique de Frank White, il provoque une empathie ambivalente pour sa posture héroïque de gangster intouchable et son absolution d'y financer un Hôpital tout en continuant d'exercer ses exactions sanglantes auprès de parrains impliqués dans les trafics d'être humains et l'exploitation sexuelle de mineurs. S'efforçant d'incarner une sorte de Robin des Bois des temps modernes en quête de rédemption, Frank White n'en reste pas moins un ange exterminateur tributaire de son idéologie mégalo à travers ses pulsions irréfragables de haine et de violence.  


Cocaïne
Chef-d'oeuvre du polar noir d'une intensité viscérale électrisante, The King of New-York reste l'un des plus fascinants films de gangsters jamais réalisés. En ange de la mort, Frank White faisant office de légende criminelle pour ses ambitions disproportionnées à dompter une ville en chute libre. Il en émane une fresque de décadence d'un pessimisme absolu auquel son pouvoir vénéneux s'avère aussi étrangement stimulant que profondément malsain quant à sa peinture baroque du vice, du stupre et du luxe. 

Dédicace à Daniel Aprin
Bruno Matéï
6èx

jeudi 7 mai 2015

New-York, 2 heures du Matin

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site backtothemovieposters.blogspot.com

"Fear City" de Abel Ferrara. 1984. U.S.A. 1h36. Avec Tom Berenger, Melanie Griffith, Billy Dee Williams, Jack Scalia, Rossano Brazzi, Rae Dawn Chong, John Foster.

Sortie salles France: 18 Juillet 1984. U.S: 16 Février 1985.

FILMOGRAPHIE: Abel Ferrara est un réalisateur et scénariste américain né le 19 Juillet 1951 dans le Bronx, New-York. Il est parfois crédité sous le pseudo Jimmy Boy L ou Jimmy Laine. 1976: Nine Lives of a Wet Pussy (Jimmy Boy L). 1979: Driller Killer. 1981: l'Ange de la Vengeance. 1984: New-York, 2h du matin. 1987: China Girl. 1989: Cat Chaser. 1990: The King of New-York. 1992: Bad Lieutenant. 1993: Body Snatchers. Snake Eyes. 1995: The Addiction. 1996: Nos Funérailles. 1997: The Blackout. 1998: New Rose Hotel. 2001: Christmas. 2005: Mary. 2007: Go go Tales. 2008: Chelsea on the Rocks. 2009: Napoli, Napoli, Napoli. 2010: Mulberry St. 2011: 4:44 - Last Day on Earth. 2014: Welcome to New-York. 2014: Pasolini.


Trois ans après l'Ange de la Vengeance, Abel Ferrara renoue avec les ambiances nocturnes de la métropole new-yorkaise soumise ici aux exactions d'un serial-killer expert en arts-martiaux. 
Le pitch: Matty, ancien boxeur aujourd'hui associé à un club de strip-tease assiste impuissant au déclin de son buziness depuis les agressions sanglantes commises sur ses effeuilleuses. Rongé par le remord d'avoir tué un de ses adversaires en plein match de boxe, il se retrouve dans une impasse à tenter d'appréhender le mystérieux tueur. Jusqu'au jour où son comparse et sa petite amie deviennent les nouvelles cibles de l'assassin. Entièrement filmé de nuit au sein des quartiers miteux de Manhattan,  New-York, 2 heures du matin s'édifie en fascinante plongée dans le cadre d'une boite de strip-tease prise à parti avec un maniaque dont nous ne connaîtrons jamais le mobile. L'intérêt résidant plutôt dans le portrait de cet ancien boxeur hanté par sa culpabilité depuis un homicide involontaire. En quête de rédemption, et c'est là où l'intrigue distille un parfum de souffre particulièrement vénéneux, ce dernier s'efforce de s'opposer à la violence jusqu'au jour où il est contraint de s'y adonner depuis un concours de circonstances toujours plus préjudiciables. 


Car au risque de sombrer dans la faillite professionnelle et s'attirant la colère de ces rivaux pour leur entreprise en chute libre, Matt finit par sombrer dans l'obsession d'appréhender coûte que coûte le responsable de ses ennuis et de ses névroses. Ce qui culminera vers un final redoutablement âpre lorsqu'il usera à nouveau de ses poings pour éradiquer un adversaire adepte en arts-martiaux. Outre l'efficacité de l'intrigue oscillant les rebondissements horrifiques et les rapports de force entre associés véreux (notamment la filature infructueuse d'une police réactionnaire) et membres mafieux (que notre anti-héros côtoie depuis un contexte sanglant de son enfance), New-York, deux heures du matin tire-parti de son pouvoir de fascination par son climat d'authenticité régi au sein d'une jungle urbaine à laquelle une faune marginale se complaît au voyeurisme. En dépit des rôles secondaires criants de vérité dans leur stature machiste ou burinée (à l'instar de l'intervention mafieuse d'un parrain), le film est transcendé de la carrure inflexible de Tom Berenger portant le film à bout de bras de sa stature proscrite. Ce dernier endossant dans une attitude à la fois flegme et renfrognée un macro au coeur tendre assailli par la culpabilité de son instinct meurtrier. Il y émane un saisissant portrait sans concession car à double-tranchant, ce dernier étant contraint de réveiller sa tendance destructrice pour la survie de sa compagne et afin d'inhumer son passé galvaudé. 


D'une violence percutante et d'une morale ambiguë, New-York, deux heures du matin n'a rien perdu de sa puissance d'évocation de par l'illustration sordide de sa jungle urbaine subordonnée à la perversion et au crime gratuit. Taillé sur-mesure dans une intrigue solide terriblement magnétique, ce redoutable psycho-killer exploite notamment avec beaucoup d'efficacité le caractère oppressant du contexte horrifique parmi la facture psychologique d'un anti-héros condamné à l'impasse après avoir ranimer ses pulsions meurtrières. A ne pas rater. 

*Bruno Matéï
14.05.22. 5èx

mercredi 6 mai 2015

L'AME DES GUERRIERS. Meilleur Premier Film, Mostra de Venise, 1994

                                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site soundtrackcollector.com

"Once Were Warriors" de Lee Thamahori. 1994. Nouvelle-Zélande. 1h42. Avec Rena Owen, Temuera Morrison, Mamaengaroa Kerr-Bell, Julian Arahanga, Taungaroa Emile, Rachael Morris Jr, Joseph Kairau.

Récompense: Meilleur premier film, Mostra de Venise, 1994

Sortie salles France: 10 Janvier 1994

FILMOGRAPHIE: Lee Tamahori est un réalisateur néo-zélandais, né le 17 Juin 1950 à Wellington. 
1994: L'âme des Guerriers. 1996: Les Hommes de l'Ombre. 1997: A couteaux tirés. 2001: Le Masque de l'Araignée. 2002: Meurs un autre jour. 2004: XXX 2. 2007: Next. 2011: The Devil's Double. 2015: Emperor.


Uppercut émotionnel comme on en voit rarement à l'écran, l'Ame des Guerriers dépeint avec réalisme à couper au rasoir la descente aux enfers d'une famille de Maoris, faute de l'autorité castratrice d'un père de couleur noir rongé par l'alcool et blasé par l'esclavage de ces ancêtres. Epaulé d'une photo ocre afin d'accentuer le climat irrespirable d'un environnement insalubre, ce premier film laisse une cicatrice indélébile dans l'esprit du spectateur peu habitué à s'incliner devant une expérience aussi brutale ! 


Prenant pour cadre la banlieue déshéritée d'Auckland en Nouvelle-Zélande, Lee Tamahori aborde les thèmes du chômage, de la délinquance, de la violence conjugale et de la démission parentale, la cellule familiale volant ici en éclat, du point de vue d'une misère sociale sans repères. Les enfants livrés à eux-même, car témoins de la déliquescence parentale, trinquant inévitablement pour se réfugier vers la drogue et la marginalité. Notamment parmi le repère influent d'une bande de guerriers juvéniles grimés de tatouages tribaux à l'instar de leurs ancêtres Maoris. Par le biais de la figure paternelle en déchéance morale, faute de son alcoolisme et de son refus d'assumer son rôle paternel, Lee Tamahori nous assène de plein fouet des discordes conjugales d'une brutalité à la limite du soutenable. Si l'épreuve de force de l'âme des Guerriers s'avère si oppressante par son intensité névralgique, c'est qu'il parvient à distiller un malaise proche du marasme pour la condition déplorable impartie à la femme battue. Humiliée, menacée de mort et molestée sous les coups d'un phallocrate dépendant de sa musculature, de sa lâcheté et de sa médiocrité, cette dernière persévère néanmoins à lui tenir tête avec une dignité féminine. Observant leur condition miséreuse où les orgies d'alcool sont monnaie courante lors de soirées entre amis peu fréquentables, l'âme des guerriers transcende le portrait de cette mère de famille gagnée par la rage de vaincre la tyrannie machiste après avoir assumé son inadvertance maternelle, passée une tragédie inconsolable.   


D'une rigueur émotionnelle parfois insupportable mais d'une dignité bouleversante pour la stature vaillante allouée à la femme battue, l'âme des Guerriers transcende ses clichés de sinistrose grâce à son réalisme tranché et à la dimension fragile de ses laissés-pour-compte reconvertis en guerriers conquérants. Un très grand film aussi furieusement épique que bouleversant dans sa dramaturgie opiniâtre, et un vibrant hommage à la communauté spirituelle des Maoris !
Pour public averti

Dédicace à Peter Hooper
Bruno Matéï
3èx

    mardi 5 mai 2015

    DEAD ZONE. Prix de la Critique, Prix du Suspense, Antenne d'Or, Avoriaz 1984.

                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site imagesetmots.fr

    "The Dead Zone" de David Cronenberg. 1983. U.S.A. 1h44. Avec Christopher Walken, Brooke Adams, Tom Skerritt, Herbert Lom, Anthony Zerbe, Colleen Dewhurst, Martin Sheen, Sean Sullivan.

    Sortie salles France: 7 Mars 1984. U.S: 21 Octobre 1983

    FILMOGRAPHIE: David Cronenberg est un réalisateur canadien, né le 15 mars 1943 à Toronto (Canada). 1969: Stereo. 1970: Crimes of the Future. 1975: Frissons. 1977: Rage,1979: Fast Company. 1979: Chromosome 3. 1981: Scanners. 1982: Videodrome. 1983: Dead Zone. 1986: La Mouche. 1988: Faux-semblants. 1991: Le Festin nu. 1993: M. Butterfly. 1996: Crash. 1999: eXistenz. 2002: Spider. 2005 : A History of Violence. 2007: Les Promesses de l'ombre. 2011: A Dangerous Method. 2012: Cosmopolis. 2014: Maps to the Stars.


    Un an après son chef-d'oeuvre visionnaire, Videodrome, David Cronenberg s'est entrepris en 1983 d'adapter à l'écran, et pour la première fois de sa carrière, un roman de Stephen King. Couronné du Prix de la Critique, du Prix du Suspense et de l'Antenne d'Or à Avoriaz, Dead Zone a notamment bénéficié des faveurs du public et de la critique après un succès commercial dignement mérité. Pourvu d'un scénario original déployant des intrigues annexes toujours plus captivantes et alarmistes quant à l'issue précaire du destin de l'humanité, ce drame psychologique d'une grande intensité est transcendé par la présence de Christopher Walken. L'acteur se fondant dans la peau du professeur infirme avec une vérité humaine proprement bouleversante par son statut fragile de medium tributaire de son don, et donc rapidement étiqueté par la population comme un charlatan, voir une bête de foire.


    Après un terrible accident qui lui valu 5 ans de coma et la rupture sentimentale avec sa fiancée, John Smith souffre de visions prophétiques uniquement par le contact d'une poignée de mains. Grâce à son pouvoir inexpliqué, il réussit à extirper des flammes une fillette lors d'un incendie domestique. Sa notoriété grandissante, la police lui suggère son appui pour le cas d'un serial-killer sévissant depuis quelques années au sein de Castle Rock. Plongé dans sa solitude car victime de son fardeau surnaturel, il refuse leur proposition avant de se raviser. Quand bien même il s'aperçoit finalement qu'il est non seulement capable d'entrevoir le passé et le présent mais qu'il est également apte à en modifier le futur. Plaidoyer pour le droit à la différence lorsqu'un individu victime de sa clairvoyance est contraint de se reclure, faute de l'intolérance et la curiosité des citadins avides de sensationnalisme, David Cronenberg en établit le portrait fragile d'un homme entraîné dans une dérive d'évènements aussi graves que fructueux quand à l'issue de leurs résolutions. Par le biais de son destin singulier, la déveine que John protestait dans une insupportable solitude va finalement se transformer en offrande lorsque le sort de l'humanité s'apposera entre ses mains. Par la gravité d'un contexte apocalyptique laissant présager la gestation d'une 3è guerre mondiale, David Cronenberg distille un suspense tendu tout en ironisant sur la démagogie sournoise du monde politique lorsqu'un candidat à la présidence redouble de persuasion à endoctriner son électorat à renfort de serments racoleurs. Sur ce point, l'interprétation pleine d'à-propos de Martin Sheen s'avère délectable dans sa faculté machiavélique à dompter sa population mais aussi son entourage et ses concurrents, notamment par l'intimidation du chantage. Se rattachant toujours à la dimension humaine de John partagée entre la raison d'un acte d'héroïsme et la passion des sentiments, l'intrigue accorde davantage de crédit à la déchirante histoire d'amour que ce dernier endure parmi la présence récurrente de son ancienne compagne, supporter politique de Greg Stillson !


    "Si le futur était entre vos mains, le changeriez-vous ?"
    Sous couvert d'argument fantastique accordant une réflexion sur la nature plausible du don, Dead Zone juxtapose le drame psychologique et la romance impossible du point de vue d'un medium en quête de rédemption. Dans sa fonction précaire d'invalide partagé entre la malédiction du sort et le sens du devoir, David Cronenberg en extrait un chef-d'oeuvre de sensibilité que Christopher Walken transfigure avec une émotion humaine à fleur de peau (score mélodique de Michael Kamen à l'appui).  

    Bruno Matéï
    8èx

    Récompenses:
    Saturn Award du meilleur film d'horreur, 1984
    Prix de la critique, prix du suspense et Antenne d'or au Festival international du film fantastique d'Avoriaz 1984.
    Meilleur film et prix du public au Fantafestival, 1984.

    lundi 4 mai 2015

    POLYTECHNIQUE

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmofilia.com

    de Denis Villeneuve. 2009. Canada. 1h17. Avec Karine Vanasse, Sébastien Huberdeau, Maxim Gaudette, Evelyne Brochu, Pierre-Yves Cardinal, Johanne-Marie Tremblay.

    Inédit en salles en France. 

    FILMOGRAPHIE: Denis Villeneuve est un scénariste et réalisateur québécois, né le 3 octobre 1967 à Trois-Rivières.
    1996: Cosmos. 1998: Un 32 Août sur terre. 2000: Maelström. 2009: Polytechnique. 2010: Incendies. 2013: An Enemy. 2013: Prisoners.


    Réalisateur aujourd'hui reconnu du public grâce à ces deux récentes oeuvres, Prisoners et Enemy, Dennis Villeneuve s'était intéressé en 2009 à relater les tragiques évènements de la tuerie de l'école polytechnique de Montréal survenue le 6 Décembre 1989 au Quebec. Tourné en noir et blanc, Polytechnique retransmet avec souci documentaire la journée sanglante qui eut lieu au sein de l'établissement sous l'impulsion d'un tueur misogyne, et les conséquences psychologiques de deux rescapés après le carnage. Réfutant toute forme de voyeurisme et de complaisance (d'où le parti-pris du noir et blanc afin de stériliser le caractère sanglant des séquences les plus dures), le film fait preuve d'une surprenante pudeur dans sa manière de nous reconstituer cette dérive meurtrière par le biais d'une mise en scène réfléchie. Notamment sa construction narrative infaillible où l'alternance du présent et du passé en exacerbe l'intensité des situations démunies (à l'instar de cet étudiant martelé par le remord de ne pas avoir cédé à l'héroïsme de dernier ressort pour sauver son amie !). 


    La caméra fluide scrutant les lieux de l'établissement comme un dédale sans repères que les élèves apeurés tentent in extremis de s'extraire dans un élan de survie, quand bien même les états d'âme de deux rescapés nous sont évoqués avec une sensibilité dépressive lorsqu'ils essaient de se raccrocher au soutien familial ou à la progéniture. Ces séquences intimistes, parfois même poétiques dans la pudeur existentielle, renforcent l'indicible tristesse qui irrigue les tourments des survivants après avoir vécu l'horreur d'une situation impondérable. Là où la tranquillité du quotidien scolaire s'interrompait brusquement pour céder place aux exactions meurtrières d'un étudiant déclarant sa haine contre le féminisme car les accusant d'avoir ruiné sa vie ! Sur ce dernier point, Dennis Veilleneuve fait également diluer une angoisse exponentielle quant aux motivations dérangées du tueur et ces préparatifs du carnage, notamment en insistant sur la mise en attente des actes crapuleux (ce dernier, déterminé, étant néanmoins gagné par l'inquiétude et le stress avant la réaction du passage à l'acte). 


    Modèle de mise en scène et de dignité où les non-dits des protagonistes, leur posture parano et leur impuissance de contredire la mort laissent transparaître une émotion aussi fragile que bouleversante, Polytechnique dresse le puissant témoignage d'une fusillade de triste mémoire, réflexion existentielle sur une jeunesse psychotique livrée à une solitude incurable, avant de mettre en appui l'épreuve humaine du traumatisme avec candide désarroi. 

    Dédicace à Jean Marc Micciche
    Bruno Matéï

    In Memoriam:
    Geneviève Bergeron (née en 1968), étudiante en génie civil.
    Hélène Colgan (née en 1966), étudiante en génie mécanique.
    Nathalie Croteau (née en 1966), étudiante en génie mécanique.
    Barbara Daigneault (née en 1967), étudiante en génie mécanique.
    Anne-Marie Edward (née en 1968), étudiante en génie chimique.
    Maud Haviernick (née en 1960), étudiante en génie des matériaux.
    Barbara Klucznik-Widajewicz (née en 1958), étudiante infirmière.
    Maryse Laganière (née en 1964), employée au département des finances.
    Maryse Leclair (née en 1966), étudiante en génie des matériaux.
    Anne-Marie Lemay (née en 1967), étudiante en génie mécanique.
    Sonia Pelletier (née en 1961), étudiante en génie mécanique.
    Michèle Richard (née en 1968), étudiante en génie des matériaux.
    Annie St-Arneault (née en 1966), étudiante en génie mécanique.
    Annie Turcotte (née en 1969), étudiante en génie des matériaux.
    Au moins quatre personnes se sont suicidées à la suite de cet événement.

    vendredi 1 mai 2015

    28 Semaines plus tard / 28 Weeks Later

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

    de Juan Carlos Fresnadillo. 2007. Espagne/Angleterre. 1h41. Avec Robert Carlyle, Rose Byrne, Jeremy Renner, Harold Perrineau, Catherine McCormack, Idris Elba, Imogen Poots.

    Sortie salles France: 19 Septembre 2007. Angleterre/U.S: 11 Mai 2007

    FILMOGRAPHIE: Juan Carlos Fresnadillo est un réalisateur espagnol né le 5 décembre 1967 à Tenerife. 2001: Intacto. 2007: 28 Semaines plus tard. 2011: Intruders.


    L'apocalypse documenté sur écran expérimental. 
    Après 28 jours plus tard, Danny Boyle cède place au réalisateur espagnol Juan Carlos Fresnadillo (révélé par l'excellent Intacto) pour entreprendre la séquelle 28 semaines plus tard. L'action prenant pour cadre la Grande-Bretagne destituée de l'infection mais toutefois supervisée par l'armée américaine en filature. 

    SynopsisPendant l'attaque de la ferme auquel il se réfugia avec son épouse grâce à l'hospitalité de fermiers, Don est contraint de fuir depuis l'intrusion précipitée d'une horde d'infectés. Pris de panique durant les altercations sanglantes, il décide d'abandonner lâchement sa femme prise à parti avec ses agresseurs. Parvenant à rejoindre par la rivière la ville de Londres, il retrouve ses enfants sains et saufs depuis leur retour de voyage scolaire en Espagne. Mais quelques jours plus tard, l'épouse de Don refait surface en victime contaminée sans toutefois donner signe d'hostilité. Elle serait donc immunisée contre le virus et pourrait ainsi devenir l'espoir d'un vaccin. Mais le général Stone féru de vigilance ordonne à ses sbires de l'abattre. 

    Intense, formellement très impressionnant et redoutablement spectaculaire,  Juan Carlos Fresnadillo nous dresse un survival brut de décoffrage dans son lot de péripéties frénétiques auquel un groupe de rescapés vont non seulement être contraints de déjouer la rage des infectés mais également faire face à l'armée lancée à leurs trousses depuis leur injonction d'exterminer tous civils, faute de nouvelle pandémie incontrôlée. Avec souci de véracité documentée, le réalisateur s'appuie sur la propagation furtive du virus, sa réaction en chaîne sur la population lorsqu'une victime en fut l'unique cause. 


    La lâcheté d'un père de famille, terrifié à l'idée de trépasser, étant le catalyseur de cette prochaine hécatombe. Radical et impitoyable au sens large, le film quasi expérimental démontre également par cette occasion désespérée l'immoralité de l'armée prête à sacrifier des centaines d'innocents (les enfants en sus) afin d'enrayer toute menace de virus. Ainsi, par le biais de ce scénario haletant particulièrement bien écrit, Juan Carlos Fresnadillo cultive le ressort dramatique en expansion pour le sort réservé à certains de nos survivants et la violence rigoureuses des attaques qu'ils devront incessamment déjouer. 28 semaines plus tard comptant sur la grande efficacité de rebondissements itératifs en exploitant à merveille l'urbanisation de décors restreints mais autrement vastes que nos héros vont arpenter la terreur au ventre (euphémisme). Les notions de bravoure et de courage étant rigoureusement mises en valeur à travers leur dynamique de cohésion afin d'y déjouer la mort. Ultra réaliste à l'instar d'un reportage pris sur le vif (caméra supra agressive à l'appui !) d'illustrer une métropole urbaine réduite à l'apocalypse (bombardements de Napalm en sus, on se croirait chez Coppola, toutes proportions gardées), l'intrigue se concentre à terme sur le destin d'une soeur aînée et de son frère, témoins singuliers dans leur (potentielle) faculté de s'immuniser contre le virus de par leurs gênes. Or, sous la houlette d'un sergent transfuge, d'un médecin-major et de quelques rescapés, c'est un parcours du combattant qui leur est défié afin de s'extraire de la ville pour y ratisser un nouvel asile.  


    Violemment gore et épique comme rarement, réaliste et parfois résolument terrifiant (le prologue cinglant est anthologique, sans discussion possible), 28 semaines plus tard parvient à émuler son modèle, tant en terme de jeu d'acteurs transis de hargne et d'émoi, de brio de mise en scène impliquée dans un script retors où lâcheté et bravoure ne cessent de se contredire pour le prix de la survie, que de fulgurance formelle comme si nous étions à la place des protagonistes. La densité humaine de ses personnages en perdition et son climat prégnant de désolation étant notamment rehaussés du score envoûtant de John Murphy dans toutes les mémoires. Par conséquent, en terme de film d'infectés, on a jamais fait mieux depuis 28 Jours plus tard. Indispensable pour le genre.
    *Bruno
    3èx. Vostfr

    A sa sortie les récompenses pleuvent:

    Festival international du film fantastique de Neuchâtel : Meilleur long métrage,
    Prix du cinéma indépendant britannique, Meilleur espoir, Meilleure réalisation technique
    Prix Fright Meter
    (Fright Meter Awards): Meilleur film d'horreur
    Meilleur réalisateur: Juan Carlos Fresnadillo
    Prix Rondo Hatton horreur classique
    Meilleur film
    Prix Schmoes d'or
    (Golden Schmoes Awards) : Meilleur film d'horreur de l'année
    Meilleur film de science-fiction de l'année
    La plus grande surprise de l'année
    Prix Scream du Meilleur film d'horreur
    The Ultimate Scream (Meilleur film) Meilleure suite
    Scène de l'année "Jump-From-Your-Seat"
    Distinctions 2008:
    Festival du cinéma espagnol de Malaga: Prix Eloy de la Iglesia
    Prix BET Meilleur acteur
    Prix de la bande-annonce d'or, Meilleur spot TV d'horreur, Meilleure affiche de film d'horreur
    Prix du cinéma britannique du Evening Standard, Meilleure réalisation technique
    Prix Empire du Meilleur film d'horreur