lundi 15 juin 2015

L'Incroyable Alligator

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site imgsoup.com

"Alligator" de Lewis Teague. 1980. U.S.A. 1h31. Avec Robert Forster, Robin Riker, Michael V. Gazzo, Dean Jagger, Sydney Lassick, Jack Carter, Perry Lang, Henry Silva.

Sortie salles France: 16 Juin 1982. U.S: 2 Juillet 1980

FILMOGRAPHIE: Lewis Teague (né le 8 mars 1938 à Brooklyn, New-York, Etats-Unis) est un réalisateur, monteur, acteur et directeur de la photographie américain. 1974: Dirty O'Neil. 1979: The Lady in red. 1980: L'Incroyable Alligator. 1982: Fighting Back. 1983:Cujo. 1985: Cat's Eye. 1985: Le Diamant du Nil. 1989: Collision Course. 1990: Navy Seals: les meilleurs. 1991: Wedlock.


Un formidable B movie parvenant avec des moyens modestes à nous faire croire à l'improbable en la présence incongrue d'un alligator géant ! 
Dans la lignée de C.H.U.D et d'Epouvante sur New-York réalisés quelques années plus tard et d'une poignée de séries Z (Killer Crocodile, Alligator, Crocodile), L'incroyable Alligator exploite le filon du gigantisme animalier lorsqu'un croco devient la victime d'une mutation génétique à la suite d'un produit toxique déversé dans les égouts par des scientifiques peu scrupuleux. Confiné dans les canalisations, il hante les lieux à la quête de proies humaines. Après la découverte de cadavres déchiquetés, les médias s'emparent de l'affaire et créent un vent de panique alors que l'inspecteur David Madison est chargé de l'enquête. Inspiré des Dents de la mer pour reprendre son concept horrifico-catastrophiste, l'Incroyable Alligator se porte également héritier des classiques alarmistes des années 50 parmi lesquels Des monstres attaquent la ville ou la Chose surgie des ténèbres. Dénonçant en filigrane les dérives illégales de la vivisection lorsque des scientifiques sans vergogne ont décidé d'expérimenter un produit chimique (un dérivé de la testostérone) sur des animaux de labo, Lewis Teague aborde les dangers de la pollution en guise d'agroalimentaire. Outre sa volonté militante de fustiger les dérives de la science sans toutefois en châtier ses responsables, l'intrigue met surtout en pratique l'investigation ardue d'un détective et d'une charmante scientifique afin de débusquer l'alligator.


Arpentant sans succès les égouts parmi une escorte de spécialistes, David Madison est également compromis par l'accueil impromptu d'un chasseur mégalo avant de se réconforter dans les bras de sa collègue. Si sa structure narrative conventionnelle (massacres, enquête, idylle amoureuse, traque en règle) fait preuve de paresse pour renouveler son concept horrifique, la bonhomie attachante du couple de héros formé par Robert Foster et Robin Riker, et l'aspect fascinant de la créature disproportionnée cultivent une constante efficacité à l'ensemble purement divertissant. Notamment par le biais de deux séquences aussi spectaculaires qu'audacieuses dans leur schéma catastrophique, témoignage de masse d'une population en panique à l'appui ! L'alligator ayant parvenu à rejoindre les ruelles de la ville, particulièrement celle où une réception bat son plein parmi l'élite d'invités mondains. Avec modestie, et afin de renforcer son degré de réalisme, le cinéaste combine astucieusement la qualité d'effets mécaniques avec l'authenticité d'un saurien déambulant autour de maquettes très réussies. Ainsi, en dépit de son aspect bricolé pour autant pétri de charme, ses séquences jouissives parviennent autant à amuser qu'à provoquer frisson et fascination, effets gores soignés en sus.


Si l'Incroyable Alligator pâti d'un manque de densité à travers sa structure narrative et d'une absence de psychologie du point de vue de nos héros bonnards, la décontraction amusée de l'excellent Robert Foster, ses seconds rôles tous aussi charismatiques (Henry Silva en tête !), ses touches d'humour fantaisistes (l'intrusion grotesque du poseur de bombe dans le commissariat, le merchandising autour de la célébrité de l'alligator), son savoir-faire technique, comme le souligne la présence surdimensionnée du caïman, parviennent à élever cette attrayante série B au rang de classique du Monster movie.

*Bruno Matéï
11/03/22.
4èx.

vendredi 12 juin 2015

Les Monstres de la Mer

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site boblarkin.blogspot.com

"Humanoids from the deep/Monster" de Barbara Peeters. 1980. U.S.A. 1h20. Avec Doug McClure, Ann Turkel, Vic Morrow, Cindy Weintraub, Anthony Penya, Denise Galik-Furey, Lynn Theel.

Sortie salles : 28 Août 1980

FILMOGRAPHIE: Barbara Peeters est une réalisatrice, scénariste, actrice et productrice américaine. 1970: Je suis une hard-girl. 1972: Bury me an Angel. 1974: Summer School Teachers. 1978: Starhops. 1980: Les Monstres de la Mer.


Produit par Roger Corman, juste avant qu'il ne se consacre à d'autres projets aussi débridés (La Galaxie de la Terreur et Mutants), Les Monstres de la mer peut sans conteste rejoindre le duo gagnant précité tant il est conçu avec autant d'intention intègre que de maladresse. Cette contradiction engendrant un divertissement d'une dérision irrésistible à travers ces ressorts dramatiques que la réalisatrice aborde grièvement à l'aide d'un montage sporadique pour autant efficace. Bourré de clichés et de personnages stéréotypés, Barbara Peeters en abuse sans complexe pour divertir un public complice venu frissonner le sourire aux lèvres. Dominé par d'aimables trognes de seconde zone bien connues des amateurs (Doug McClure et le regretté Vic Morrow !), Les Monstres de la mer s'édifie en concentré d'horreur bisseuse uniquement voué au plaisir innocent du samedi soir. Ciblant pour thème la pollution par le biais du DNA 5, produit conçu pour stimuler l'hormone de croissance des saumons génétiquement modifiés afin de tirer profit de l'agroalimentaire, l'intrigue n'est qu'un prétexte à émailler à intervalles réguliers agressions sanglantes d'amphibies humanoïdes, étreintes sexuelles de jeunes touristes en rut et stratégies d'attaques du point de vue des résidents d'un port ! Mais pour en revenir aux saumons mutants, c'est après avoir dévoré ses derniers que les coelacantes (groupe de poissons crossoptérygiens) ont fini par adopter une mutation génétique semblable à l'homme-poisson.


Si l'on songe naturellement au Continent des hommes Poissons de Martino, leur anatomie visqueuse prête autant allusion à la créature du lac noir de Jack Arnold. Et si les créatures quasi omniprésentes prêtent à sourire dans leur apparence grand-guignolesque et leur posture tantôt meurtrière tantôt lubrique (elles n'hésitent pas à dénuder et violer les filles en bikini exposées au bord de la plage afin de parachever leur évolution !), la qualité des maquillages parviennent néanmoins à fasciner de par leur aspect étonnamment réaliste ! On est en tous cas loin de la défroque caoutchouteuse des Kaiju japonais issus de la Toho ! Délibéré à façonner un produit d'exploitation dédié à la vigueur trépidante, Barbara Peeters ne perd d'ailleurs pas de temps à embrayer dès les premières minutes avec deux rebondissements tragiques et avant que n'intervienne une hilarante séquence de baston de rue où les coups de poing affluent parmi le témoignage de la foule d'un bal populaire. L'intrigue se focalisant ensuite sur les rapports houleux entretenus entre un pêcheur raciste (Vic Morrow), très remonté contre la défiance d'un aimable indien, et un pêcheur pacifiste (Doug McClure) venu prêter main forte à ce dernier avant de découvrir les origines des humanoïdes parmi l'appui d'une scientifique ! Pour parachever et reprendre le traditionnel concept catastrophiste initié par les Dents de la Mer, Les monstres de la mer surenchérit l'action avec la fête annuelle de la station balnéaire où les monstres réunis en masse vont ébranler la tranquillité des invités ! Une scène de panique anthologique car fertile en rebondissements sanglants et explosions, quand bien même la drôlerie involontaire de la plupart des affrontements émane autant de la frénésie risible des monstres que celle des protagonistes surjouant leur condition épeurée !


Débordant de générosité à travers son lot d'action homérique, de sexe polisson et d'effusions de gore parfois très spectaculaires, les Monstres de la Mer alterne cocasserie et fascination par le biais d'amphibies avides de rancoeur meurtrière et par la prestance cabotine de comédiens de seconde zone sobrement impliqués dans leur héroïsme en herbe. Il y émane une savoureuse série B bonnard aussi grotesque que jouissive, fréquemment rehaussée du grand-guignol d'FX adroits et de gore cracra. 

*Eric Binford.
Clin d'oeil à Jean-Pierre Putters.
23/09/21. 3èx. 

La Chronique de Mutanthttp://brunomatei.blogspot.com/2012/01/mutant-forbidden-world-grand-prix-du.html
La chronique de la Galaxie de la Terreur (la): http://brunomatei.blogspot.fr/…/la-galaxie-de-la-terreur.ht…

La critique de Mathias Chaput:
Produit par Roger Corman en pleine apogée des films fantastiques et d'horreur qui fleurissaient outre Atlantique et qui remplissaient les drive-in et les salles obscures, il faut être honnête et reconnaitre que ce "MONSTRES DE LA MER" est un véritable régal, un petit bijou du genre...

Le film s'apparente sans difficultés aux « pop corn movies » qui firent le bonheur des aficionados puis bien après des vidéastes, friands de films gore de monstres, pimentés par un soupçon d'érotisme et un sens de l'action inné, qui fit l'apanage et la marque de fabrique du père Corman, qui rencontra un gros succès grâce à cette recette parfaitement huilée et à l'efficacité inaltérable et inaltérée...
Doug Mac Clure (l'inoubliable acteur des films de Kevin Connorsur les continents oubliés, "LE SIXIEME CONTINENT", "LE CONTINENT OUBLIE" et consorts) tient une composition honnête dans son rôle de redresseur de torts bourru et forçant la sympathie et les autres comédiens sont parfaitement impliqués, amplifiant la crédibilité du métrage qui pousse même le détail sur une origine de l'apparition des monstres parfaitement concevable et identifiable pour le spectateur...

Il y a une logique à tout cela, les « monstres » issus de mutations génétiques ne tombent pas là comme un cheveu dans la soupe, leur présence est la résultante de faits bien précis !
La réalisation est soignée, les effets gore font mouche (notamment dans la scène de l'attaque lors de la foire, qui vire à la pantalonnade !) jusqu'à un dénouement particulièrement graveleux et cradingue, à réserver aux plus aguerris d'entre nous...

Une bonne histoire, un bon scénario, des moyens conséquents, tout cela fait prendre la mayonnaise correctement et l'ensemble s'avère convaincant et particulièrement réussi !
Un petit bijou, témoignage d'une époque révolue, où naïveté se conjuguait avec imagination via un postulat délirant certes, mais qui tient parfaitement la route !
Excellent ! 8,5/10




jeudi 11 juin 2015

2000 Maniacs

                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site horrorsociety.com

Two Thousand Maniacs d'Herschell Gordon Lewis. 1964. U.S.A. 1h16. Avec William Kerwin, Connie Mason, Jeffrey Allen, Ben Moore, Gary Bakeman, Jerome Eden.

Sorti uniquement en video en France. Sortie salles U.S: 20 Mars 1964

FILMOGRAPHIE: Herschell Gordon Lewis est un réalisateur, scénariste, producteur, directeur de photographie, acteur et compositeur américain, né le 15 Juin 1926 à Pittsburgh, Pennsylvanie (Etats-Unis). 1963: Blood Feast. 1964: 2000 Maniacs. 1965: Monster a go-go. 1965: Color me blood red. 1967: A taste of blood. 1970: The Wizard of Gore. 1972: The gore gore girls. 2002: Blood Feast 2.


Un an après avoir révolutionné le cinéma d'horreur avec Blood Feast, premier film gore de l'histoire, le néophyte Herschell Gordon Lewis continue d'exploiter son filon commercial avec 2000 Maniacs considéré à juste titre comme son film le plus ludique. Partant d'un concept aussi original qu'ubuesque, 2000 Maniacs relate les épreuves de loisir qu'endureront trois couples de touristes au sein de la petite ville de Pleasant Valley après avoir franchi un mauvais détour. Accueilli en grande pompe par le maire et sa population sudiste, ses derniers n'ont comme seul dessein de sacrifier ces jeunes yankees afin de fêter dignement le centenaire de la guerre de sécession. Spoil ! Si bien que revenus hanter les lieux après 100 ans de léthargie, nos 2000 maniaques ont planifié leur vengeance depuis le massacre de leur village perpétré par des ancêtres nordistes. Fin du Spoil


Dépourvu de toute substance psychologique quant à la fonction superficielle des comédiens amateurs et réalisé avec les moyens du bord d'un budget précaire, 2000 Maniacs compte sur l'inventivité des meurtres sanglants et l'euphorie communicative d'une population férue de festivité pour nous divertir. Sur ce point, et avec quelques décennies d'avance, Herschell Gordon Lewis peut également se targuer d'avoir initié le "Tortur'porn" tant les crimes incongrus redoublent de cruauté face au témoignage de masse d'une foule hystérisée ! Tant auprès du supplice des chevaux, du massacre à la hache, de l'épreuve du tonneau clouté ou de celle du rocher, les scènes-chocs planifiées au sein d'une kermesse champêtre font preuve de cocasserie morbide malgré l'aspect dérisoire des maquillages. Herschell Gordon Lewis insistant surtout sur les gros plans graphiques de plaies entaillées, membres sectionnés ou déchiquetés par le biais criard d'un sang visqueux ! Et cela fonctionne plutôt bien si j'ose dire tant le sang dégoulinant fait son petit effet de répulsion. Dénué de suspense où de ressort dramatique quant à la destinée des touristes, l'intrigue finit tout de même par accorder le bénéfice du doute du point de vue du dernier couple en stratégie de fugue. 


Curiosité vintage de série Z où l'intrigue impayable se désolidarise d'intensité dans les enjeux de survie, 2000 Maniacs demeure toutefois aussi bien plaisant que délirant en prime d'y avoir imprimé une date dans l'histoire du ciné gore. De par l'élaboration audacieuse des meurtres crapuleux, la verve génialement pittoresque des rednecks incultes et l'ambiance estivale de leur kermesse chantonnée au rythme du banjo, 2000 maniacs mérite d'être vu et revu avec un égal plaisir sardonique.

*Bruno
26.08.19. 5èx

mercredi 10 juin 2015

LES PREDATEURS (The Hunger)

                                                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site pixshark.com

de Tony Scott. 1983. U.S.A./Angleterre. 1h36. Avec Catherine Deneuve, David Bowie, Susan Sarandon, Cliff De Young, Beth Ehlers, Dan Hedaya, Rufus Collins, Suzanne Bertish, James Aubrey, Ann Magnuson... 

Sortie salles France13 juillet 1983   U.S.A: 29 avril 1983

FILMOGRAPHIE: Tony Scott (né le 21 juillet 1944 à Stockton-on-Tees, Royaume-Uni - ) est un réalisateur, producteur, producteur délégué, directeur de la photographie, monteur et acteur britannique. 1983 : Les Prédateurs1986 : Top Gun, 1987 : Le Flic de Beverly Hills 2, 1990 : Vengeance,1990 : Jours de tonnerre, 1991 : Le Dernier Samaritain,1993 : True Romance, 1995 : USS Alabama,1996 : Le Fan,1998 : Ennemi d'État, 2001 : Spy Game, 2004 : Man on Fire,   2005 : Domino, 2006 : Déjà Vu, 2009 : L'Attaque du métro 123, 2010 : Unstoppable.


Premier essai derrière la caméra de Tony ScottLes Prédateurs marqua toute une génération de spectateurs, principalement grâce à son épure formelle scandant un requiem d'amour et de mort autour de l'avarice du vampire avide d'éternelle jeunesse. Novateur s'il en est dans son refus hétérodoxe du thème éculé, Tony Scott ose également confronter à l'écran deux illustres stars du cinéma que le duo inopiné David Bowie / Catherine Deneuve transfigure avec une dimension romanesque élégiaque. A New-York, John et Myriam sont des vampires vivant communément d'un amour passionnel depuis des millénaires. Jusqu'au jour ou celui-ci est atteint d'une étrange maladie (peut-être la progéria !) l'incitant à vieillir prématurément. Condamné à une mort certaine, Myriam accepte difficilement ce fardeau avant de se réconforter auprès de Sarah, une doctoresse spécialisée dans la recherche sur la longévité que John eut contacté en désespoir de cause.


La vie, l'amour, le néant.
Echec public lors de sa sortie, peut-être à cause de son rythme languissant entièrement dédié à la beauté d'images graciles et à la caractérisation fragile des personnages en perdition, Les Prédateurs constitue une oeuvre atypique dans le paysage vampirique. Ce que souligne illico son prologue musical, clip new-wave appliqué dans une boite punk où John et Myriam, affublés de pantalon en cuir et lunettes noires, surveillent leur proie pour les attirer dans leur appartement en guise d'étreinte macabre. Une séquence vertigineuse que le célèbre tube Bela Lugosi's Dead de Bauhaus intensifie parmi la variation d'exactions sanglantes. A titre de singularité et de provocations, Tony Scott alterne 2 séquences en montage parallèle: la sauvagerie d'un singe dévorant son compagnon dans sa cage et les échanges sexuels que John et Myriam pratiquent avant leur sacrifice humain. Ces derniers utilisant un Ankh (pendentif égyptien) dissimulant une petite lame afin d'égorger leurs victimes. Passé cet interlude expérimental, brusque revirement de ton avec l'entrée en scène d'une mélodie classique afin de nous immerger dans l'appartement victorien du duo d'amants. La première partie, anxiogène et véritablement poignante, nous retrace avec rigueur la lente dégénérescence de John dans son état de vieillissement prématuré. A ce titre, les maquillages hyper réalistes de Dick Smith méritent toutes les ovations pour son talent perfectionniste à décatir Bowie dans de multiples étapes de vieillissement graduel, quand bien même les macchabées du dénouement macabre nous saisissent de stupeur dans leur morphologie putrescente. C'est dans une salle d'attente du cabinet médical de Sarah que John s'aperçoit subitement de sa pathologie déclinante. Spoil ! Confiné ensuite dans la quiétude de son pavillon familier, puisque conscient de sa mort prochaine, c'est là qu'il décide de rendre l'âme pour agoniser dans les bras de sa dulcinée qui lui avait pourtant promis un pacte amoureux pour l'éternité. Fin du Spoil ! Ces séquences intimes de poésie prude provoquent une émouvante empathie pour la condition meurtrie du vampire sclérosé. Il en émane une émotion particulièrement élégiaque dans l'impuissance des amants de braver la mort et dans leur dernière étreinte d'adieu que Tony Scott transcende avec souci d'esthétisme épuré !


A la manière d'un opéra funèbre, les Prédateurs met donc en exergue la fatalité de la mort sous couvert de l'injustice du temps s'effritant inexorablement jusqu'à ce que notre cadavre redevienne poussière. Mais du point de vue du vampire, pas de repos éternel ni de rédemption par leur condition damnée, ces derniers étant contraints de survivre dans l'opacité du néant avec comme seuls soutiens des ancêtres parcheminés pleurant leur condition d'immortel. La seconde partie se focalise ensuite vers l'attirance que Sarah éprouve pour Myriam lors d'une expérience saphique, cette dernière l'ayant choisi comme nouvelle héritière conjugale. De par leurs ébats amoureux s'y dégage un érotisme lascif dans l'environnement douillet d'un appartement orné de sculptures, linceuls et draps de soie afin que Sarah se laisse mieux attendrir par sa vénéneuse compagne ! Ce qui l'amènera à suppléer l'amant de Myriam dans sa nouvelle fonction de vampire gagné par le remord et la perplexité. En ce qui concerne nos têtes d'affiche, qui aurait pu prétendre qu'une de nos illustres stars françaises de l'époque aurait pu partager l'écran avec un chanteur/acteur américain dans un film dit de genre fantastique ? Avec pudeur, fourberie et aplomb, Catherine Deneuve endosse la fonction distinguée d'une vampire de charme briseuse de rêves (elle accumule les amants depuis des millénaires !) car délaissée depuis l'usure de leur vieillesse. David Bowie lui prête la vedette avec une intensité parfois bouleversante dans sa posture moribonde de vampire en phase terminale s'efforçant contre toute attente de se raccrocher au fil de sa vie avant de sacrifier une dernière victime ! Enfin, Susan Sarandon parvient autant à s'affirmer pour prendre la relève de la postérité malgré sa fonction indécise de vampire en quête éperdue de rédemption !


Jusqu'à ce que la mort affronte le néant. 
Réflexion sur l'hérédité de la vieillesse engendrant un trépas inéquitable et sur l'usure du temps estompant les souvenirs, quand bien même l'amour éternel est ici détourné au profit de la désillusion du maléfice, Les Prédateurs s'édifie en poème funèbre où l'obscurité du néant s'avère l'unique échappatoire. Parmi sa fulgurance d'une photo picturale inscrite dans un classicisme sophistiqué et le score électro baroque de Rubini et Jaeger, ce chef-d'oeuvre sur le dépit amoureux distille une aura aussi trouble que gracieuse en la présence déchue des couples Deneuve/Bowie, Deneuve/Sarandon.

Bruno Matéï
09.01.11. 4èX. (137 vues)
10.06.14. 5èx


                                     

vendredi 5 juin 2015

PSYCHOSE

                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site emkafilms7.over-blog.com

Psycho d'Alfred Hitchcock. 1960. U.S.A. 1h49. Avec Anthony Perkins, Vera Miles, Janet Leigh, John Gavin, Martin Balsam, John McIntire, Simon Oakland, Patricia Hitchcock.

Sortie salles France: 2 Novembre 1960. U.S: 16 Juin 1960

FILMOGRAPHIE: Alfred Hitchcock est un réalisateur, producteur et scénariste anglo américain, né le 13 Août 1899, décédé le 29 Avril 1980.
1935: Les 39 Marches. 1936: Quatre de l'Espionnage. Agent Secret. 1937: Jeune et Innocent. 1938: Une Femme Disparait. 1939: La Taverne de la Jamaique. 1940: Rebecca. Correspondant 17. 1941: Soupçons. 1942: La 5è Colonne. 1943: l'Ombre d'un Doute. 1944: Lifeboat. 1945: La Maison du Dr Edward. 1946: Les Enchainés. 1947: Le Procès Paradine. 1948: La Corde. 1949: Les Amants du Capricorne. 1950: Le Grand Alibi. 1951: L'Inconnu du Nord-Express. 1953: La Loi du Silence. 1954: Le Crime était presque parfait. Fenêtre sur cour. 1955: La Main au Collet. Mais qui a tué Harry ? 1956: l'Homme qui en savait trop. Le Faux Coupable. 1958: Sueurs Froides. 1959: La Mort aux Trousses. 1960: Psychose. 1963: Les Oiseaux. 1964: Pas de Printemps pour Marnie. 1966: Le Rideau Déchiré. 1969: l'Etau. 1972: Frenzy. 1976: Complot de Famille.


Précurseur du psycho-killer, chef-d'oeuvre du 7è art classé 18è sur les 100 meilleurs films américains et 1er sur les 100 meilleurs thrillers par l'American Film Institute, Psychose révolutionna le cinéma d'horreur au moment même où il révéla au public le jeune acteur Anthony Perkins. Littéralement habité par son rôle démoniaque, ce dernier parvenant à magnétiser l'esprit du spectateur dans ses échanges de regard mêlés de fourberie et de perversité. L'intensité ensorcelante qui émane de sa prestance s'avère si subtile qu'on jurerait avoir affaire à un authentique serial-killer, quand bien même le spectateur s'ébranlera de stupeur sur l'origine de sa pathologie impartie au dédoublement de personnalité. Solitaire vivant reclus dans un motel et hanté par la mort de sa mère au point de se travestir en elle, Norman Bates caractérise le tueur désaxé dans sa plus terrifiante définition ! Dans le sens du repli sur soi et d'une perte de contact avec la réalité, Norman étant obsédé par l'amour maternel, la jalousie et l'infidélité !


Modèle de suspense à la tension exponentielle où l'horreur gothique vient s'infiltrer autour d'une étrange bâtisse résidée par une rombière, Psychose allie crime passionnel et investigation policière sous l'autorité d'un détective privé et d'un couple à la recherche d'une disparue. Marion Crane ayant osé dérober 40 000 dollars à son patron afin de fuir son état pour s'exiler avec son amant. Sur sa route, une pluie battante la contraint de séjourner vers un motel le temps d'une nuit de sommeil. La suite, les millions de fans continuent d'applaudir le tour de force technique alloué à sa mise à mort ! Un homicide gratuit aussi brutal que suggéré, quand bien même les spectateurs de l'époque ne se remirent jamais d'un rebondissement aussi couillu ! A savoir supprimer l'héroïne au bout de 47 minutes de métrage alors que le public lui vouait une indéniable empathie malgré son indignité ! Du jamais vu pour l'époque ! Ce meurtre anthologique perpétré sous la douche valut d'ailleurs à son auteur 7 jours de tournage pour 45 secondes de plans ! Outre la virtuosité de cette séquence choc dont un prochain meurtre aussi percutant viendra confirmer l'agissement méthodique du coupable, Psychose cultive une puissance de fascination par l'élaboration d'un suspense implacable et par la direction hors-pair de comédiens suscitant la tourmente. Par le biais des rapports de force entretenus entre nos protagonistes et Bates, Alfred Hitchcock joue avec leur esprit de suspicion qu'ils éprouvent dans l'inimitié afin d'éclaircir ou de taire la disparition inexpliquée. Bates cumulant au fil de ses interrogatoires les contradictions malgré son flegme faussement avenant, une maladresse qui éveillera la curiosité des investigateurs avides de preuves. Côté horreur oppressante, le cinéaste transfigure l'esthétisme gothique d'une demeure imposante, véritable personnage du film, alors que Madame Bates suggère de temps à autre sa silhouette derrière la fenêtre de sa chambre ! Le sentiment d'insécurité perçu chez nos inquisiteurs sillonnant la demeure, leur inquiétude grandissante de découvrir l'identité d'une mégère (potentiellement décédée !) et la posture instable de Norman Bates insufflant au fil de leur vaillance une angoisse tangible qui s'acheminera vers un climax cauchemardesque !


Hypnotique et glaçant dans sa science affûtée d'un suspense à couper au rasoir, Psychose s'édifie en leçon de mise en scène par le brio machiavélique de son auteur, la percussion stridente de Bernard Hermann et l'impulsion diabolique d'Anthony Perkins. Jouant subtilement avec l'inquiétude et l'angoisse de situations indécises, l'oppression et la terreur d'oser percer un secret mortifère, Psychose cumule les morceaux d'anthologie avec une régularité jubilatoire.

La Chronique de Psychose 2: http://brunomatei.blogspot.fr/2014/05/psychose-2-psycho-2.html

                            Psychose 3: http://brunomatei.blogspot.fr/2016/08/psychose-3.html
Bruno Matéï
5èx

jeudi 4 juin 2015

THE SMELL OF US

                                                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site aufeminin.com

de Larry Clark. 2015. France. 1h28. Avec Lukas Ionesco, Diane Rouxel, Théo Cholbi, Hugo Behar-Rhinières, Rayan Ben Yaiche, Maxime Terin, Adrien Binh Doan.

Sortie salles France: 14 Janvier 2015. Interdit au - de 16 ans.

FILMOGRAPHIELarry Clark est un réalisateur, photographe, directeur de la photographie, né le 19 Janvier 1943 à Tulsa dans l'Oklahoma.
1995: Kids. 1998: Another Day in Paradise. 2001: Bully. 2002: Teenage Caveman (télé-film). 2002: Ken Park. 2004: Wassup Rockers. 2006: Destricted (segment Impaled). 2012: Marfa Girl (uniquement dispo sur le net). 2015: The Smell of us.


« Larry a perdu le contrôle, il est devenu barge ! Je suis sorti de cette expérience lessivé et abattu. » Lukas Ionesco.

Pour son nouveau long-métrage, Larry Clark continue de s'épancher sur le malaise adolescent, principalement du point de vue de l'homosexualité d'un couple en perdition dont l'un est contraint de se livrer à la prostitution pour subvenir à ses besoins. Nouvelle descente aux enfers de la déshumanisation sociétale à renfort de séquences scabreuses alternant le fétichisme, l'hébéphilie et l'inceste, The Smell of Us provoque un malaise viscéral par notre fonction voyeuriste à observer ces ados avides de défonce et de sexe, ultime échappatoire d'une morne existence destituée de tendresse parentale. C'est donc leur quotidienneté blafarde que nous subissons inlassablement avec souci de réalisme extrêmement dérangeant, certains ébats sexuels ou situations obscènes n'hésitant pas flirter avec la pornographie, quand bien même la posture décomplexée de certains adultes s'avère aussi compromise à la déchéance. Mis en scène avec maîtrise et personnalité, Larry Clark possède un talent singulier à filmer la pudeur des corps en quête extatique, ce parti-pris sensitif de nous confondre dans leur peau en mal de sensations et d'expériences de tous bords. A l'instar de leur pratiques sexuelles échangées avec des sexagénaires tout aussi démunis d'affection, faute de leur âge décati. Ces derniers n'hésitant pas à s'autoriser de consommer une jeunesse impassible afin d'effleurer un semblant de compensation à leur solitude. Par le biais de ces protagonistes en perdition, on peut saluer la prestance pleine d'aplomb des jeunes comédiens en roue libre n'hésitant pas à se mettre à nu devant la caméra dans des situations parfois glauques (les attouchements pervers du sexagénaire dans la boite de nuit) ou immorales (l'inceste forcé d'une mère en ébriété auprès de son fils).


Les enfants du chaos
Constat alarmiste d'une génération abdiquée de ligue parentale et assujetti aux outils de communication modernes (internet et les smartphones incitant la jeunesse à fréquenter la pornographie mainstream), The Smell of Us arbore le documentaire scrupuleux dans son parti-pris de ne nous faire échanger la déchéance morale d'adolescents frigides déconnectés d'humanité. Il en émane une oeuvre aussi austère et désespérée qu'antipathique, d'autant plus difficilement accessible dans sa manière clinique de cumuler les séquences-chocs jusqu'à la gêne viscérale. Que l'on adhère ou que l'on rejette en bloc, l'épreuve laisse des traces pour rester difficilement digérable. 

Pour public averti.

Bruno Matéï 

mercredi 3 juin 2015

Communion Sanglante / Alice sweet Alice / Holly Terror / Communion / Alice douce Alice

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Horreur.net.

d'Alfred Sole. 1976. 1h50. Avec Linda Miller, Paula Sheppard, Brooke Shields, Louisa Horton Hill, Antonio Rocca, Lillian Roth.

Sortie salles U.S: 13 Novembre 1976

FILMOGRAPHIE: Alfred Sole est un réalisateur, scénariste et chef décorateur américain, né le 2 Juillet 1943 à Paterson, New-Jersey. 1972: Deep Sleep. 1976: Alice, sweet Alice. 1980: Tanya's Island. 1982: Pandemonium.


Inédit en salles en France, discrédité d'audience commerciale et relativement passé inaperçu lors de sa sortie Vhs retitrée Communion Sanglante, Alice sweet Alice ne trouva les faveurs des cinéphiles et des critiques qu'après revisionnage(s). Prenant pour thèmes la religion, l'adultère, le trouble psychologique, l'engagement parental et la vengeance, ce slasher malsain par son ambiance diaphane, son climat étouffant et sa violence rugueuse (le premier homicide dans l'église s'avère d'une audace effroyable !) parvient à captiver par le biais d'exactions meurtrières d'une silhouette enfantine. Après le meurtre de la petite Karen au sein d'un presbytère, sa soeur aînée Alice est suspectée par l'entourage familial et la police d'en être la potentielle responsable. Quelques jours plus tard, c'est au tour de sa tante d'être sauvagement agressée par un individu affublé d'un imperméable jaune et d'un masque sur le visage (le même accoutrement que portait Karen quelques heures avant son décès !). Témoin de l'agression, Alice persuade la police qu'il s'agit de sa soeur préalablement décédée. Déclarée perturbée pour ses penchants cruels et coupable après s'être soumise au détecteur de mensonge, elle est envoyée dans un institut spécialisé. 


Combinant les codes du slasher et ceux du giallo pour la caractérisation fétichiste du tueur masqué accoutré d'une combinaison criarde, Alice sweet Alice façonne un suspense scrupuleux au fil du cheminement psychologique d'Alice et de son entourage tout en alternant avec des séquences-chocs particulièrement âpres. De par son souci de cruauté pour les meurtres sévèrement perpétrés où l'environnement glauque d'une banlieue blafarde intensifie le malaise éprouvé (le supplice intenté dans une industrie désaffectée). Sans accorder une grande importance à démasquer l'identité de l'assassin indécelable, Alfred Sole prend avant tout parti de dénoncer l'obscurantisme au coeur d'une bourgade profondément catholique tout en remettant en cause la responsabilité parentale lorsque les enfants du divorce pâtissent d'une détresse affectueuse. La grande force du film résidant dans le développement de ces personnages torturés, déchus ou peu fréquentables (le voisin ventripotent aux tendances pédophiles vivant reclus dans un appartement insalubre) évoluant autour de la fragilité d'une fillette à tendances perverses. Par la tragédie des exactions criminelles où l'innocence paye le lourd tribut de la responsabilité des adultes, la religion se retrouve destituée d'angélisme au sein même du refuge de Dieu. Outre la sobre prestance des comédiens jusqu'aux seconds-rôles charismatiques, on peut s'attarder sur le visage mi-angélique, mi-démoniaque de Paula Sheppard symbolisant avec ambivalence la dégénérescence psychologique d'une ado réfugiée dans la perversion et la jalousie depuis sa privation de gratitude.


Glauque et malsain, trouble et cruel, Communion Sanglante (pour reprendre l'alternative du titre français plus évocateur à mon sens) renoue avec la tradition du slasher en privilégiant l'étude des caractères de ses personnages partagés entre leur foi catholique, leur culpabilité et le dysfonctionnement d'un fanatisme religieux. Sombre requiem sur l'innocence galvaudée, ce grand film schizophrène est à réhabiliter d'urgence tant son atmosphère licencieuse (score lancinant à l'appui !) nous hantent la mémoire !

*Bruno 
4èx

mardi 2 juin 2015

RE-ANIMATOR. Prix Spécial Section Peur, Avoriaz 86.

                                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site misantropey.com

de Stuart Gordon. 1985. U.S.A. 1h26. Avec Jeffrey Combs, Bruce Abbott, Barbara Crampton, David Gale, Robert Sampson, Gerry Black.

Sortie salles France: 12 Mars 1986. U.S: 18 Octobre 1985

Récompenses: Prix Spécial Section Peur, Avoriaz 1986.
Prix du Meilleur Film, Catalogne 1985.
Prix du Meilleur Film et Meilleurs Effets Spéciaux, Fantafestival 1986

FILMOGRAPHIE: Stuart Gordon est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 11 Août 1947 à Chicago (Illinois).
1979: Bleacher Bums (télé-film). 1985: Ré-Animator. 1986: Aux portes de l'au-delà. 1987: Dolls. 1988: Kid Safe (télé-film). 1990: Le Puits et le Pendule. 1990: La Fille des Ténèbres. 1990: Robojox. 1993: Fortress. 1995: Castle Freak. 1996: Space Truckers. 1998: The Wonderful ice cream suit. 2001: Dagon. 2003: King of the Ants. 2005: Edmond. 2005: Masters of Horro (le cauchemar de la sorcière - Le Chat Noir). 2007: Stuck. 2008: Fear Itself.


Film-culte de la génération 80, succès public inespéré dans l'hexagone (635 284 entrées), Re-animator est également la révélation du cinéaste néophyte Stuart Gordon avant que Brian Yuzna, attitré à la production, ne soit reconnu quatre ans plus tard avec Society. En pleine mouvance du gore burlesque, le cinéaste rivalise ici d'audace et d'inventivité pour cette variation extravagante de Frankenstein. Inspiré d'une nouvelle de Howard Phillips Lovecraft, l'intrigue se focalise sur les expérimentations d'Herbert West, étudiant en médecine ayant récemment découvert un sérum permettant de réanimer les défunts. Hébergé en colocation chez Dan Cain, il débute ses expériences avec le cadavre d'un animal, le chat fraîchement décédé de son locataire. Délibéré à passer au stade supérieur, il s'entreprend de continuer l'expérience sur un être humain. Epaulé de son équipier, ils se dirigent vers la morgue de l'hôpital afin de tester le vaccin sur un cadavre. Pendant ce temps, le professeur Hill, ennemi juré de West, à la ferme intention de s'emparer de ses travaux illégaux pour accéder à la célébrité. 


A partir de ce pitch prometteur fertile en effets chocs sanglants et gags hilarants (toutes les séquences où le surveillant de police intervient avec une indolence versatile s'avèrent d'une drôlerie irrésistible !), Stuart Gordon nous concocte un bijou d'humour noir inspiré du cartoon. Nanti d'excellents maquillages de Anthony Doublin et John Naulin, Ré-animator s'en donne à coeur joie dans les démembrements, déchiquetages et décapitations que West et son acolyte outrepassent pour la réussite d'un projet improbable, rendre la vie (impossible) à des morts (erratiques) ! Ces derniers estropiés revenants à la vie dans une furie incontrôlée ! Outre l'efficacité des quiproquos, revirements et dommages collatéraux que West et Cain accumulent maladroitement, l'intrigue est également rehaussée de la fougue impétueuse des comédiens déjantés. Jeffrey Combs iconisant son personnage contemporain de Frankenstein avec l'obsession délurée de daigner coûte que coûte révolutionner la création de la vie ("il se prend pour Dieu... Mais Dieu a horreur de la concurrence !" Dixit l'accroche publicitaire ! ). Secondé par son sympathique adjoint Dan Cain, Bruce Abbott lui partage la vedette dans la peau du médecin crédule rendu irresponsable à oser lui prêter main forte. Epaulé d'une tendre compagne plongée dans le désarroi (son père vient de subir par malchance la résurrection du sérum avant de se voir infliger une camisole psychiatrique !), Barbara Crampton n'hésite pas à dévoiler ses charmes dans son plus simple appareil avant de s'égosiller, à l'instar d'une séquence nécrophile restée dans les annales. Enfin, pour incarner l'arriviste aussi mesquin que cynique, David Gale exprime un rictus sadique dans sa posture démembrée encore plus avide à parfaire ses ambitions délétères (violer Megan par le biais de sa caboche décapitée et planifier une résurrection de masse avant l'arrivée de son concurrent !).  


Jouissif et trépidant car d'une drôlerie souvent hilarante dans sa succession de gags débridés et rebondissements sanglants, Ré-animator n'a pas volé sa réputation de chef-d'oeuvre du gore folingue que des comédiens en roue libre exacerbent à renfort d'hystérie collective !

Bruno Matéï
6èx

lundi 1 juin 2015

VENIN (Venom)

                                                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site arte.tv
                                                
de Piers Haggard. 1981. UK. 1h32. Avec Klaus Kinski, Oliver Reed, Nicol Williamson, Sarah Miles, Sterling Hayden, Cornelia Sharpe, Lance Holcomb, Susan George.
Date de sortie : 11 Juin 1981.

Sortie salles France: 20 Janvier 1982

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Piers Haggard est un réalisateur anglais né le 18 Mars 1939.
1970: La Nuit des maléfices, 1979: The Quatermass conclusion, 1980: Le Complot diabolique du Dr. Fu Manchu, 1981: Venin, 1994: La Brèche, 2006: Les pêcheurs de coquillage (Télé-film).


Pour rappel, Venin est l'adaptation du roman "Des serpents sur vos têtes" d'Alan Scholefield, publié en France dans la collection "Série Noire". Les américains s'approprient les droits quand bien même l'illustre Tobe Hooper s'attelle à la réalisation. Mais préférant s'attaquer à son nouveau projet du fameux Massacre dans le Train Fantôme, il quitte précipitamment le tournage au bout de quelques jours. Le producteur Martin Bregman invoque alors au réalisateur britannique Piers Haggard de le remplacer après seulement une dizaine de jours de préparation. A Londres, trois gangsters prennent en otage un garçon et son grand-père contre une demande de rançon. Mais ce qui devait débuter comme un banal kidnapping va vite se transformer en huis-clos cauchemardesque lorsque un Mamba noir, le serpent le plus vénimeux au monde, s'est infiltré par erreur dans la maison. La police, dépêchée sur les lieux, tente de collaborer avec les ravisseurs. 


Série B d'exploitation efficacement gérée sous l'égide de Piers Haggard, petit artisan de série B à qui l'on doit notamment l'étonnant La Nuit des Maléfices, Venin empreinte le chemin balisé du suspense policier avec ce kidnapping d'un bambin que des malfaiteurs tentent de négocier parmi l'hostilité d'un intrus infiltré parmi eux dans l'enceinte de leur refuge. C'est là où l'intrigue, aussi modeste et sans surprises soit-elle dans ces attaques cinglantes, tentative d'effraction et concertation, tire parti de son originalité avec l'icone du Mamba Noir ! Le serpent le plus vénimeux au monde qu'un enfant venait de récupérer à son domicile après l'erreur de livraison d'un zoo. A cette occasion, et pour crédibiliser sa présence, on est d'ailleurs surpris d'apprendre au générique de fin qu'un réel Mamba eut été sélectionné pour le tournage après avoir été rigoureusement dressé ! Alternant suspense latent et tension horrifique, Venin parvient à divertir et retenir l'intérêt grâce à la présence sournoise du reptile parfois établie en caméra subjective (ses errances dans les conduits d'aération), quand bien même ses altercations s'avèrent parfois impressionnantes de réalisme par leur intensité incisive. A l'instar du premier meurtre invoqué chez la domestique, l'actrice Susan George parvenant à retranscrire avec beaucoup de vérité l'impuissance de son désemparement, son marasme contre l'asphyxie, faute du poison foudroyant injecté dans son sang. Grâce à sa vigueur dramatique, on reste encore impressionné par la violence de cette cruelle mise à mort au moment scrupuleux où la victime succombe à ses blessures. Outre la sympathique distribution des seconds-rôles (Sarah Miles en doctoresse altruiste, Nicol Williamson en détective flegme, Sterling Hayden en papy débonnaire et Lance Holcomb en garçonnet fragile), Venin s'affirme un peu plus avec la prestance notable de deux monstres sacrés. Oliver Reed et Klaus Kinski se disputant violemment le pouvoir avec inimitié d'ego et insolence de la discorde.  


Sans surprise et modeste pour l'enjeu dramatique de sa prise d'otage mais constamment efficace et indéniablement attachant grâce à son suspense anxiogène, la bonhomie de sa distribution et la présence fascinante du reptile tapi dans l'ombre, Venin reste un fort sympathique huis-clos cauchemardesque que les nostalgiques des années 80 auront principalement plaisir à déguster. 

Bruno Matéï
01.06.15. 6èx 
01.01.11 5è (415 vues)

Photos ci-dessous, Lance Holcomb


 




                                         

jeudi 28 mai 2015

EDEN LAKE

                                                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site avoir-alire.com

de James Watkins. 2008. Angleterre. 1h31. Avec Kelly Reilly, Michael Fassbender, Tara Ellis, Jack O'Connell, Thomas Turgoose, Bronson Webb, Finn Atkins.

Sortie salles France: 8 Octobre 2008. Angleterre: 5 Septembre 2008

FILMOGRAPHIE: James Watkins est un réalisateur et producteur anglais, né le 20 Mai 1973 à Nottingham. 2008: Eden Lake. 2012: La Dame en Noir. 2016: Bastille Day.


Epreuve de force jusqu'au-boutiste dans sa violence nauséeuse engendrée par des délinquants juvéniles adeptes du crime gratuit, Eden Lake empreinte le cheminement du survival avec un réalisme cru à couper au rasoir. Pour une première réalisation, le réalisateur anglais James Watkins frappe fort et juste dans l'art de diluer une angoisse morale et de retrouver l'intensité dramatique, l'atmosphère putride des fleurons des années 70 tels que Délivrance, I Spit on your grave ou La Dernière maison sur la gauche. Abordant le sujet brûlant des "enfants tueurs" auquel certains d'entre eux n'hésitent pas à filmer leurs actes meurtriers par le biais du camescope ou du portable (quand bien même des sites voyeuristes tels que Ogrish répertorient leurs exactions sur un tableau de cotation !), Eden Lake met en appui le laxisme et l'incivisme de nos sociétés modernes. La perte des valeurs, la démission parentale, l'absence de repère incitant certains ados désoeuvrés à se réfugier dans une délinquance criminelle, notamment faute de l'affluence du chômage. Ces ados étant issus de milieu prolétaire, parfois même molestés par certains de leurs parents, quand bien même ces derniers reproduisent un comportement insouciant lors de leurs beuveries festives de fin de semaine.


Nanti d'un suspense cadencé et d'une tension dramatique parfois très éprouvante, Eden Lake glace le sang dans sa manière documentée, radicale, acérée à dénoncer (et non exploiter !) le comportement crapuleux, car si déloyale, d'adolescents influencés par la dynamique de groupe. A contre-emploi des séries B gores conçues pour divertir le spectateur en toute tranquillité, le film prend donc parti de déranger jusqu'au malaise émotionnel lorsqu'un couple de vacanciers se retrouve pris au piège parmi la provocation de marmots en pleine forêt. La descente aux enfers que vont parcourir Jenny et Steve, nous la subissons la peur au ventre avant que le désespoir nous rattrape pour nous saisir à la gorge, les séquences de torture et d'humiliation s'avérant d'une intensité aussi abrupte que bouleversante. Tout l'inverse donc du cinéma d'exploitation moderne relancé par les franchises Saw et Hostel, illustres précurseurs du Tortur'Porn ! La fragile empathie que nous éprouvons pour les amants s'avère d'autant plus poignante parmi la dignité humaine des comédiens. Étonnante de naturel dans sa délicatesse innocente puis sa bravoure de dernier ressort, Kelly Reilly trouve le ton juste à endosser le rôle physique d'une femme en perdition gagnée par le courage de survivre, quand bien même son partenaire se retrouve sévèrement châtié par l'injustice. Michael Fassbender insufflant une expression bouleversante dans sa posture de martyr et sa conscience éprouvée de redouter sa dernière journée ! On peut également saluer le charisme naturel des adolescents rebelles redoublant de cruauté et sadisme envers leurs boucs émissaires pour imposer leur loi du plus fort !


Sous couvert de survival horrifique extrêmement dérangeant et poisseux, James Watkins cultive le drame social pour nous alerter sur la situation inquiétante d'une génération indisciplinée livrée à la loi du plus audacieux. De par leur démarche compétitive à repousser leur peur et se défier l'initiation au meurtre, Eden Lake caractérise l'expérience extrême où la terreur est avant tout psychologique ! A l'instar de sa conclusion radicale et nihiliste puisque sans échappatoire, Eden Lake est une épreuve morale en chute libre avant de symboliser l'effroi d'une innocence monstrueuse. Euphémisme s'il en est, le terme "traumatisant" est à sceller pour qualifier le contenu de cette affliction cinégénique.  

Pour public averti.

Bruno Matéï
2èx

Récompenses:
Festival international du film de Catalogne: Prix spécial pour le long-métrage
Empire Awards: Meilleur film d'horreur, Meilleur film britannique
Prix du Cercle des critiques de film de Londres: Meilleure Performance de Jeunesse Britannique: Thomas Turgoose
Fantasporto: Meilleur Film fantastique international.



mercredi 27 mai 2015

POSSESSION. Prix d'Interprétation Féminine, Cannes 1981.

                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinebisclassics.blogspot.fr/

d'Andrzej Zulawski. 1982. France/Allemagne. 2h04. Avec Isabelle Adjani, Sam Neil, Margit Carstensen, Heinz Bennent, Johanna Hofer, Carl Duering, Shaun Lawton.

Sortie salles France: 27 Mai 1981. Allemagne: 2007

FILMOGRAPHIE: Andrzej Zulawski est un réalisateur, scénariste, écrivain, metteur en scène de théâtre polonais, né le 22 Novembre 1940 à Lwow (Lviv). 1971: La Troisième partie de la nuit. 1972: Le Diable. 1975: L'Important c'est d'aimer. 1981: Possession. 1984: La Femme Publique. 1985: L'Amour Braque. 1987: Sur le globe d'Argent. 1989: Mes Nuits sont plus belles que vos jours. 1989: Boris Godounov. 1991: La Note Bleue. 1996: Chamanka. 2000: La Fidélité. 2015: Cosmos.


« Je dois à la mystique d'Andrzej Zulawski de m'avoir révélé des choses que je ne voudrais jamais avoir découvertes... Possession, c'était un film infaisable, et ce que j'ai fait dans ce film était tout aussi infaisable. Pourtant, je l'ai fait et ce qui s'est passé sur ce film m'a coûté tellement cher... Malgré tous les prix, tous les honneurs qui me sont revenus, jamais plus un traumatisme comme celui-là, même pas... en cauchemar ! ». Isabelle Adjani.

Fable sur le communisme et le totalitarisme que symbolise à lui seul le mur de Berlin, Possession reste avant tout à mon sens un cauchemar sur pellicule à ranger dans le genre horrifique tant Zulawski pousse l'hystérie des personnages au paroxysme de leur folie meurtrière. Alors que Marc rentre de voyage pour retrouver sa famille, son épouse Anna décide de le quitter après lui avoir avouée une adultère. Incapable de tolérer la rupture et plongé dans une inexorable dépression, Marc ne cesse de la harceler jusqu'à engager un détective. Par le témoignage de ce dernier, nous apprenons qu'Anna entame en définitive une double relation si bien qu'une étrange créature tapie dans l'ombre d'une chambre est sur le point d'enfanter un double masculin ! 


Expérience avec la folie d'une intensité rarement égalée à travers le surjeu névralgique des comédiens se questionnant sur la foi spirituelle et la valeur du Bien et du Mal, Possession ensorcelle l'esprit du spectateur, notamment grâce à la performance cinglante d'une Isabelle Adjani habitée par la déchéance psychotique. A l'instar de sa crise de nerf endurée dans les couloirs d'un métro, l'actrice se délivrant corps et âme face à une caméra voyeuriste afin d'extérioriser ses pulsions incontrôlées de psychose. Provocateur en diable et n'ayant aucune pudeur à façonner un film monstre habité par l'aberration, Zulawski abuse de scènes chocs crapuleuses par le biais d'un réalisme clinique aussi éprouvant que dérangeant. Avec sa photo blafarde, sa tapisserie délabrée d'appartements insalubres et sa scénographie urbaine d'une Allemagne aphone de citadins, le cinéaste cristallise ainsi un univers anxiogène littéralement étouffant, miroir de la déliquescence morale des protagonistes en dépression. Outre l'horreur des situations et les hystéries collectives qui irriguent les pores d'une intrigue incertaine, Possession clame également le drame psychologique pour la rupture conjugale qu'un couple s'efforce d'adouber en se rejetant mutuellement la faute. C'est d'ailleurs à la suite de son propre divorce que Zulawski s'est entrepris d'entamer l'écriture de son scénario afin d'exorciser sa douloureuse expérience. De par son dépit inconsolable, ce dernier extériorisant devant une caméra rotative une fracture sentimentale de tous les excès. Une déroute amoureuse qu'un couple en crise se refuse mutuellement à assumer à travers leur sens de responsabilité et esprit d'orgueil.


Malsain et dérangeant, glauque et éprouvant, suffocant et d'une violence parfois ardue, Possession symbolise l'expérience horrifique de la démesure, au même titre que l'Exorciste de Friedkin. Dans la mesure où le film scandale de Zulawski multiplie les crises de démence avec une singularité et une intensité aussi tranchées ! Pour parachever, on peut autant saluer le travail artisanal de Carlo Rambaldi ayant parvenu à transfigurer une créature organique insaisissable, et que derrière l'horreur de la métaphore s'y cache également un chef-d'oeuvre d'une beauté nonchalante. L'avidité insatiable, désespérée, d'aimer et d'être aimé dans l'harmonie conjugale au point de perdre pied avec sa réalité ! 
Pour public averti !

Bruno Matéï
3èx

Récompenses:
Festival de Cannes 1981 : Prix d'interprétation féminine pour Isabelle Adjani (également récompensée pour Quartet).
Césars 1982 : César de la meilleure actrice pour Isabelle Adjani.
Mostra de cinéma de São Paulo : Prix de la critique pour Andrzej Żuławski.
Fantasporto : Mention spéciale du public pour Andrzej Żuławski.
Prix de la meilleure actrice pour Isabelle Adjani.