vendredi 8 avril 2016

LE MANOIR MAUDIT

                                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Ecranlarge.com

"Metempsyco"de Antonio Boccaci. 1963. Italie. 1h28. Avec Annie Alberti, Marco Mariani, Adriano Micantoni, Flora Carosello

Sortie salles France: 12 Novembre 1963

FILMOGRAPHIE: Antonio Boccaci est un réalisateur, scénariste et acteur italien. 1963: Le Manoir Maudit.


Ne tournons pas autour du pot, l'unique réalisation d'Antonio Boccaci est un nanar transalpin d'un intérêt limité. Le Manoir Maudit se contentant avec le minimum syndical de distiller inquiétude latente et expectative autour d'une machination parasitée d'incohérences. Tout du moins, faute d'une narration prémâchée (montage déstructuré à l'appui) et du comportement équivoque et elliptique de protagonistes ne cessant de déambuler dans les recoins du château avec une appréhension risible. Pour tenter d'impressionner le spectateur et le rassurer du spectacle horrifique, Antonio Boccaci compte sur les apparitions spectrales d'une comtesse et les exactions sordides d'un monstre de foire confiné dans une crypte. Sous l'impulsion barbare de ce dernier, on peut d'ailleurs relever l'audace graphique d'une séquence d'agression particulièrement brutale.


Le docteur Darnell et sa fille Anna viennent s'installer dans le manoir d'un aristocrate hindou autrefois épris d'amour pour sa comtesse Irène. Cette dernière ayant subitement disparue depuis 20 ans, il se réconforte auprès de la nouvelle présence d'Anna ressemblant à s'y méprendre à son ancienne maîtresse. La nuit, hantée par ses cauchemars et son somnambulisme, Anna tente de découvrir l'horrible vérité sur Irène avec le soutien de son fantôme. Mais au sous-sol du manoir, un valet au visage difforme veille dans une salle de tortures avant de kidnapper ses hôtes. Ce pitch fourre tout, Antonio Boccaci l'exploite avec beaucoup de maladresses, tant par sa mise en scène dégingandée que la prestance involontairement grotesque des comédiens cabotins s'efforçant d'exprimer leur angoisse ou terreur face aux diverses menaces (le fantôme et le monstre), quand bien même la police veille parfois à proximité pour débusquer un éventuel coupable. Dépourvu de tout ressort à suspense, l'intrigue peine à préserver l'attention tant nos personnages ne cessent d'aller et venir dans les chambres et couloirs avec une apathie rébarbative. Et pour éviter de se morfondre vers la somnolence, on se raccroche comme on peut sur la beauté de sa photo monochrome et le gothisme de quelques décors poussiéreux pour se rassurer d'une intrigue improbable étirée en longueurs. Qui plus est, sa partition dissonante irrite parfois les tympans dans ses tonalités inopinément joviales alors qu'il aurait mieux valu préconiser une sombre mélodie entêtante comme savent si bien les parfaire nos maestros italiens.


Uniquement destiné aux inconditionnels de raretés au rabais, le Manoir Maudit constitue une curiosité obsolète à découvrir d'un oeil distrait si vous êtes aptes à redoubler d'indulgence. 
Nota: VO absente de l'édition Artus Films.

jeudi 7 avril 2016

INFECTES

                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site scifi-movies.com

"Carriers" d'Àlex et David Pastor. 2009. U.S.A. 1h24. Avec Lou Taylor Pucci, Chris Pine, Piper Perabo, Emily VanCamp, Christopher Meloni, Kiernan Shipka.

Sortie salles France: 26 Mai 2010. U.S: 4 Septembre 2009.

FILMOGRAPHIE: Àlex Pastor, né le 13 mars 1981 à Barcelone, Catalogne, est un scénariste, réalisateur et producteur espagnol. David Pastor, né le 25 juillet 1978 à Barcelone, Catalogne, est un scénariste et réalisateur espagnol. Il est le frère d'Alex Pastor.
2009: Infectés (Carriers). 2013 : Les Derniers Jours (Los últimos días).


Premier long des frères Pastor, Infectés aborde le thème de la dystopie sous l'alibi d'un virus mortel extrêmement contagieux. Amorçant sa mise en scène à l'instar d'un Teen movie conventionnel, l'intrigue dévie rapidement de sa trajectoire lorsque que 2 jeunes couples en véhicule se refusent à prêter main forte à un automobiliste depuis l'infection de sa petite fille. Sillonnant les contrées désertiques du sud-ouest des Etats-Unis, ces derniers tentent de rejoindre une plage afin de s'isoler de présence humaine et se prémunir de la pandémie. Durant leur cheminement, ils vont côtoyer d'autres rescapés tous aussi désespérés et égoïstes à l'idée de survivre dans leur no man's land. 


Saturé d'une photographie ocre contrastant avec un climat solaire écrasant, Infectés distille une atmosphère putride toujours plus tangible au fil des pérégrinations urbaines de nos survivants en instance de survie. De par la découverte de macchabées décharnés ou de malades moribonds, et l'attitude davantage sournoise de nos comparses terrifiés à l'idée de rejoindre la liste des infectés. Le moindre contact tactile avec le sang du malade ou de leur respiration leur assurant la transmission d'une maladie incurable. Road Movie vitriolé dans son parti pris de démasquer l'esprit de lâcheté et d'individualisme de l'homme prêt à braver sa moralité au prix de sa survie, Infectés instaure un sentiment de désespoir en crescendo. Sous l'impulsion d'une dynamique de groupe, la fraternité familiale, l'esprit de camaraderie et les sentiments amoureux volent en éclat depuis qu'un virus mortel aura décidé de les éradiquer. Outre son pessimisme radical émanant de l'environnement de décrépitude, cette aura de déréliction se renforce de la caractérisation sournoise des protagonistes évoluant dans une déchéance immorale, faute d'un concours de circonstances miséreuses. Les réalisateurs ne nous épargnant rien de leurs agissements couards et exactions perfides à daigner sauver leur peau au mépris de la solidarité.   


Sous ses allures de série B mainstream survolant au premier abord le stéréotype de jeunes survivants faussement affables, Infectés s'extirpe de la conformité grâce à leur caractérisation fielleuse mise à nu au sein d'un cadre suffocant de dystopie. Dur et sans concession, l'intrigue improvisée insufflant une émotion aigre quant à la destinée précaire de ces anti-héros partagés entre une parcelle de remord et la rage de subsister. De ce maelström de corruption émane un constat aussi pessimiste que terrifiant sur la nature humaine. Et vous, que feriez-vous en pareille occasion ?

07.04.16. 3èx
16.03.11

mercredi 6 avril 2016

THE TROLL HUNTER

                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

d'André Øvredal. 2010. Norvège. 1h43. Avec Otto Jespersen, Glenn Erland Tosterud, Johanna Mørck, Tomas Alf Larsen, Hans Morten Hansen.

Sortie salles France: 27 Juillet 2011. Norvège: 29 Octobre 2010

FILMOGRAPHIE: André Øvredal est un scénariste, producteur et réalisateur norvégien né en 1973. 2000: Future Murder. 2004: Bushmann. 2010: The Troll Hunter.


Récoltant plus de 4 160 000 $ de recettes à travers le monde (pour un budget de 3.5 millions), The Troll Hunter fut principalement un succès commercial dans son pays natal alors que le public français le découvrit pour la première fois durant la sélection du Festival de Gérardmer en 2011. S'il repartit bredouille dans l'hexagone, la Norvège lui décerna lors des prix Amanda, le Prix du Public et des Meilleurs effets visuels, quand bien même le Festival de Neuchâtel lui attribua le Prix H.R. Giger Narcisse du Meilleur film, le Méliès d'argent du meilleur film fantastique européen ainsi que le Prix du Public. Adoptant le principe du documenteur, plus familièrement nommé aujourd'hui Found Footage, The Troll Hunter tente avec le plus grand sérieux de nous convaincre de l'existence de Trolls à travers l'Europe du Nord, et plus précisément à l'ouest de la péninsule scandinave. Préparant un reportage sur la chasse à l'ours, trois étudiants norvégiens s'épanchent sur la réputation notoire du braconnier Hans. Durant une chasse nocturne, ses derniers le suivent pour devenir témoin d'une incroyable révélation ! Un gigantesque troll affublé de trois têtes les pourchassent sans relâchent à travers bois, quand bien même Hans s'efforce de l'éradiquer à l'aide d'un projecteur incandescent. Un principe routinier afin de putréfier le monstre. C'est le début d'une longue investigation que vont vaillamment pratiquer nos héros à travers les montagnes et forêts enneigées. 


Avec son parti-pris d'authentifier une légende de notre enfance sous le principe d'une caméra amateur, André Øvredal redouble d'ambition et d'inventivité à mettre en image une trépidante chasse aux Trolls. Regorgeant de situations aussi farfelues que débridées lorsque nos journalistes en herbe assistent impuissants à l'investigation ardue du braconnier, The Troll Hunter renouvelle l'action en exploitant les cadres naturels de sa contrée sauvage (les repères tentaculaires des montagnes et forêts) et en multipliant les confrontations animales parmi la diversité de trolls protéiformes. Hyper documenté comme le soulignent les interviews de divers scientifiques participant sobrement au jeu de questions/réponses, l'intrigue s'évertue à crédibiliser son contexte improbable avec souci du détail scientifique (pour quelle raison épidermique tel troll sera putréfié alors qu'un autre éclatera sous les éclats de lumière ?). Notamment du point de vue autoritaire de Hans, chasseur aguerri connaissant les combines pour se prémunir d'une attaque en masquant l'odeur de sa transpiration par des excréments de Troll. Quand bien même il n'omet pas d'enseigner à ses cameramans que le "catholique" reste la proie humaine la plus identifiable chez l'intuition du monstre (le christianisme ayant diabolisé la croyance du Troll jusqu'au 19è siècle, ceci explique cela !). Provoquant les éclats de rire nerveux comme en témoigne la séquence où ce dernier affublé d'une armure guerrière tente d'approcher un spécimen pour lui pratiquer une prise de sang (seringue géante à l'appui !), The Troll Hunter relance l'action parmi ses missions suicidaires. Peu avare à mettre en exergue les apparitions dantesques des créatures hybrides, André Øvredal s'appuie également sur la performance d'effets spéciaux numériques sidérant de réalisme. A l'instar de son final épique culminant avec l'apparition disproportionnée du Jotnar atteint par la rage !


Aventure aussi hilarante que jubilatoire dans son lot d'actions exubérantes et de situations folingues que nos héros déjouent vaillamment caméra à l'épaule, The Troll Hunter tire parti de son efficacité par son dosage de cocasseries extériorisées par la sobriété de comédiens subtilement ironiques. Farce impayable instituée en mode documenteur, cet immense défouloir s'avère beaucoup plus réjouissant, inventif et percutant que n'importe quel opus de Jurassic Park !  

mardi 5 avril 2016

PERE NOEL ORIGINES

                                                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site imdb.com

"Rare Exports: A Christmas Tale" de Jalmari Helander. 2010. Finlande-France-Norvège-Suède. 1h22. Avec Per Christian Ellefsen, Peeter Jakobi, Tommi Korpela, Jorma Tommila, Onni Tommila.

Sortie salles France: 14 Décembre 2011. Norvège: 3 Décembre 2010.

FILMOGRAPHIEJalmari Helander est un réalisateur et un scénariste finlandais né le 21 juillet 1976. 2010: Père Noël Origines. 2014: Big Game (également coscénariste).


Comédie fantastique finlando-franco-norvégio-suédoise, Pere Noel Origines fit sensation dans les festivals où il fut projeté, à l'instar du public de Gérardmer qui lui accorda un accueil des plus enthousiastes malgré son absence de récompense. Inspiré à l'origine par deux courts-métrages que Jalmari Helander réalisa en 2003 et 2005, Pere Noel Origines tire parti de son efficacité et de sa truculence grâce à l'originalité d'un scénario hétérodoxe. Digne d'une production Amblin des années 80, l'intrigue met en valeur un héros en culotte courte de manière aléatoire si bien que le jeune acteur endossé par Onni Tommila parvient remarquablement à s'initier au redresseur de tort avec un humanisme aussi attendri que stoïque, eu égard des rapports conflictuels compromis avec son père. Alors que des chercheurs américains auraient découvert l'origine du véritable père-noël fossilisé depuis des siècles au coeur de la montagne Korvatunturi, une troupe de villageois s'inquiètent du massacre de rennes perpétrés près de la station archéologique. Le jeune Pietari et son père découvrent ensuite un mystérieux individu grièvement blessé dans un piège à loup. A moitié nu et mutique, ce dernier épouse un comportement aussi placide qu'inopinément violent.


Jouant sur l'attente d'un suspense anxiogène quant au comportement équivoque de cet étrange vieillard, Pere Noël Origines distille de prime abord un mystère sous-jacent si bien que l'ambiance insidieusement horrifique laisse suggérer un danger létal. Cette première partie subtilement fallacieuse amorce ensuite un virage fortuit pour laisser place à une série d'incidents et de revirements toujours plus réjouissants, de par son lot d'idées débridées mettant en valeur le père-Noel de manière aussi couillue que salace ! On peut d'ailleurs prêter une certaine allusion à la pédophilie lorsque l'inconnu sclérosé adopte une attention ambiguë face à la présence juvénile de Pietari, Spoil ! et lorsque ces complices entièrement nus s'efforcent de courser dans la neige une cargaison de marmots suspendus à un hélico afin de les châtier de leur turbulence parentale Fin du Spoil. A travers l'existence chimérique du fameux Santa claus, Pere-Noël Origines offre donc un savoureux pied de nez à la légende avec une dérision gentiment sarcastique. Outre l'aspect trépidant d'un cheminement narratif imprévisible, le charisme saillant des père-noël fouettards et la caractérisation fraternelle des villageois sont rehaussés de la posture brusquement martiale du jeune Pietari s'improvisant en meneur avec une conviction inébranlable !


Animé d'un humour espiègle subtilement inventif au sein d'une narration exubérante, Pere Noël Origines repose autant sur la cohésion attachante des protagonistes jouant les redresseurs de tort avec une volonté capitaliste plaisamment gouailleuse. Ovni féerique où le conte de noël est diablement détourné au profit d'un climat vénéneux, Pere-Noël Origines fait preuve d'une insolence rafraîchissante pour élever le divertissement fantastique au stade adulte. 

Récompense: Prix de la meilleure réalisation, 9e Festival du film d’horreur de Wales, mars 2010.

lundi 4 avril 2016

LE FILS DE SAUL. Grand Prix Cannes 2015. Oscar du Meilleur film Etranger, 2015.

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"Saul fia" de László Nemes. 2015. Hongrie. 1h47. Avec Géza Röhrig, Levente Molnár, Urs Rechn, Todd Charmont, Sándor Zsótér, Uwe Lauer, Björn Freiberg

Sortie salles France: 4 novembre 2015. Hongrie: 11 juin 2015

FILMOGRAPHIELászló Nemes, né à Budapest (Hongrie) le 18 février 1977, est un réalisateur et scénariste hongrois. 2015: Le Fils de Saul.


Malgré ses longueurs récurrentes et un climat austère pesant, un très beau film sur la dignité du deuil infantile durant l'holocauste nazi.

Récompenses: Festival de Cannes 2015 : Grand prix
Prix FIPRESCI
Prix François Chalais
Prix Vulcain de l'artiste technicien de la CST pour l'ingénieur du son Tamás Zányi
Boston Online Film Critics Association Awards 2015 : Meilleur film en langue étrangère
New York Film Critics Circle Awards 2015 : Meilleur premier film
National Board of Review Awards 2015 : Meilleur film en langue étrangère
Golden Globes 2016 : Meilleur film en langue étrangère
Oscars 2016 : Meilleur film en langue étrangère

vendredi 1 avril 2016

LA FORET D'EMERAUDE

                                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"The Emerald Forest" de John Boorman. 1985. U.S.A. 1h54. Avec Powers Boothe, Charley Boorman, Ruy Polanah, Meg Foster, Dira Paes, Eduardo Conde, William Rodriguez

Sortie salles France: 26 juin 1985. U.S: 3 juillet 1985.

FILMOGRAPHIE: John Boorman est un réalisateur, producteur, scénariste et acteur américain, né le 18 Janvier 1933 à Shepperton (Royaume-Uni).
1965: Sauve qui peut. 1967: Le Point de non-retour. 1968: Duel dans le pacifique. 1970: Leo the last. 1972: Délivrance. 1974: Zardoz. 1977: L'Exorciste 2. 1981: Excalibur. 1985: La Forêt d'Emeraude. 1987: Hope and Glory. 1990: Tout pour réussir. 1995: Rangoon. 1998: Le Général. 2001: Le Tailleur de Panama. 2003: In my Country. 2006: The Tiger's Tail.


"La forêt amazonienne disparaît au rythme de 2500 hectares par jour. 4 millions d'indiens y vivaient. Il n'en reste que 120 000. Quelques tribus n'ont eu aucun contact extérieur. Il savent encore ce que nous avons oublié." Paragraphe du générique de fin.

Gros succès commercial en France ayant réuni plus de 2,6 millions de spectateurs à sa sortie en 1985, La Forêt d'Emeraude pâti aujourd'hui d'une certaine indifférence chez nous programmateurs audiovisuels en dépit de sa notable réputation. Oeuvre écolo dénonçant la déforestation auprès de magnats sans vergogne, aventure humaine aussi exaltante que furieusement sauvage, la Forêt d'Emeraude s'inspire d'une histoire vraie lorsqu'un père de famille, ingénieur de chantier pour la fondation d'un barrage, s'efforça durant plus de 10 ans à retrouver son fils enlevé par une ethnie indienne. Choc des cultures entre la civilisation moderne et celle archaïque d'une tribu indigène, John Boorman nous dépeint scrupuleusement les us et coutumes des "Invisibles" avant que l'homme moderne ne vienne piétiner leur terre pour les chasser dans un motif pécuniaire. Par ces rapports de force déloyaux émane un saisissant contraste entre les chantiers en construction et le bout de terrain forestier que les "Invisibles" désespèrent à préserver malgré leur foi en une mère nature philanthrope.


Observant de prime abord avec souci documentaire leur condition de vie harmonieuse parmi le témoignage du père recueilli au sein leur foyer depuis une rixe contre les Féroces (un peuple amazonien autrement hostile), Boorman déclare sa flamme à la faune, la flore et à l'indien qui y réside dans un florilège d'images dantesques sublimant sa nature paradisiaque. Faisant preuve d'une réflexion mystique quant aux pouvoirs occultes d'une ethnie pacifique, La Forêt d'Emeraude prend la tournure d'un conte existentiel sous l'autorité de dame nature prête à perpétrer sa revanche contre la cupidité de notre civilisation moderne. Par le biais d'une poignante histoire d'amour entre un père et son fils, la narration finit par amorcer une tournure plus dramatique et violente lorsque le paternel, conscient de sa culpabilité vénale, finit par prendre conscience que son rejeton ne pourra jamais s'adapter à sa société de consommation fondée sur le goût du lucre, la perversion du profit et l'exploitation humaine (celle des ouvriers mais aussi la traite des blanches que les "féroces" négocieront au profit d'armes vendus par la pègre).


Périple initiatique d'un duo parental plongé dans une société primitive antimatérialiste où la nature se porte garante à préserver leur civilisation bâtie sur la tolérance, le respect d'autrui et l'amour patriarcal, La Forêt d'Emeraude nous laisse un goût d'amertume lorsque John Boorman nous dévisage de notre corruption vénale et de notre irrespect pour l'environnement. Magnifique.

jeudi 31 mars 2016

La Maison de la Terreur / La Casa con la scala nel buio / Blade in the Dark

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site wrongsideoftheart.com  

de Lamberto Bava. 1983. Italie. 1h48 (version intégrale) - 1h36 (France). Avec Andrea Occhipinti, Anny Papa, Fabiola Toledo, Michele Soavi, Valeria Cavalli, Stanko Molnar.

Sortie salles France: 23 décembre 1987. Italie: 11 mai 1983

FILMOGRAPHIE: Lamberto Bava est un réalisateur et scénariste italien, né le 3 avril 1944 à Rome.
1980: Baiser Macabre. 1983: La Maison de la Terreur. 1984: Apocalypse dans l'océan rouge. 1984: Blastfighter. 1985: Demons. 1985: Midnight Horror. 1986: Demons 2. 1991: Body Puzzle. 2006: Ghost Son.


Largement inspiré par Ténèbres d'Argento et un peu moins de Blow Up (pour la résolution de l'assassin à travers une pellicule), Lamberto Bava nous offre avec la Maison de la Terreur un sympathique ersatz du Giallo à défaut de nous passionner vers une ultime demi-heure un tantinet poussive par moments. Hormis ce léger handicap, le cinéaste parvient à instaurer un suspense soutenu au sein de son thriller typiquement transalpin, ponctué comme le veut la tradition de meurtres sanglants assez réussis pour nous impressionner en mode viscéral. Le PitchMusicien pour le cinéma, Bruno loue une résidence afin de parfaire sa dernière composition en toute tranquillité. Alors qu'une jeune voisine vient lui rendre visite pour l'accoster, cette dernière est assassinée par un mystérieux rôdeur. Inquiet par sa disparition, Bruno ne tarde pas à suspecter qu'un meurtre vient d'être commis dans sa villa. Par le biais du huis-clos domestique auquel l'ombre du tueur plane à chaque recoin, Lamberto Bava nous confectionne donc un psycho-killer anxiogène futilement atmosphérique. 


Par l'entremise d'un leitmotiv musical (parfois rébarbatif avouons-le) et d'une scénographie domestique aimablement stylisée, le cinéaste s'efforce de singer le cinéma d'Argento si bien que certains plans dans les poursuites et exactions (la position des victimes, l'aménagement du jardin de la villa) semblent avoir été calqués sur Ténèbres (notamment la tenue vestimentaire des voluptueuses actrices lascives). Sans compter ses éclairages oniriques chargés de teintes limpides et bleu-ciel afin d'agrémenter son design domestique. Pourtant, ce sentiment largement référentiel est pallié par la sincérité de Lamberto Bava soucieux d'y façonner un psycho-killer étrangement inquiétant au sein d'un dédale mortuaire. Le cinéaste transfigurant avec application permanente chaque recoin de la demeure à l'instar d'un théâtre macabre batifolant avec la mort. Qui plus est, il parvient avec assez de créativité à styliser deux meurtres dans la manière d'assassiner suivi de l'art de l'agonie morbide. Sans déflorer la résolution de l'intrigue également inspirée d'un grand classique du genre, Bava finalise sa conclusion avec une certaine habileté afin de justifier la pathologie traumatique du tueur en corrélation avec le cinéma de genre.


Hormis un jeu d'acteurs perfectible quelque peu attachant dans leur modeste sincérité et les références saillantes empruntées à Ténèbres (esthétisme limpide à l'appui au sein d'une villa harmonieuse), La Maison de la Terreur dilue un mystère latent gentiment magnétique autour de fulgurances criminelles à la fascination morbide. S'efforçant de rendre une copie de travail formellement ciselée, Lamberto Bava s'extirpe miraculeusement de la médiocrité grâce à son aimable ambition d'émuler son maître, et ce en dépit de quelques baisses de rythme (et d'intérêt) lors de sa dernière partie rehaussée d'un final crédible. 

Dédicace à Céline Trinci.

*Bruno
23/03/23. 3èx.