mardi 21 juin 2016

SSSSnake

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Sssssss" de Bernard L. Kowalski. 1973. U.S.A. 1h39. Avec Strother Martin, Dirk Benedict, Heather Menzies-Urich, Richard B. Shull, Tim O'connor.

Sortie salles France: 8 Mai 1974

FILMOGRAPHIE: Bernard L. Kowalski est un réalisateur et producteur américain, né le 2 Août 1929 à Brownsville, Texas, décédé le 26 Octobre 2007 à Los Angeles, Californie. 1958: Hot car girl. 1958: Night of the Blood Beast. 1959: Attack of the Giant Leeches. 1959: Blood and Steel. 1961: Las Vegas Beat. 1968: Krakatoa à l'est de Java. 1969: Stiletto. 1970: Macho Callahan. 1971: Panique en plein ciel (télé-film). 1971: Black Noon (télé-film). 1972: Women in chains (télé-film). 1972: Two for the Money (télé-film). 1972: The New Healers (télé-film). 1972: The Woman Hunter (télé-film). 1973: SSSnake. 1975: The Supercops (télé-film). 1976: Risko. 1977: Flight to holocaust (télé-film). 1978: The Nativity (télé-film). 1979: Marciano (télé-film). 1980: Nick and the Dobermans (télé-film). 1980: Turnover Smith (télé-film). 1980: Patrouille de nuit à Los-Angeles (télé-film). 1983: Johnny Blue (télé-film). 1988: Miracle at Beekman's Place (télé-film). 1989: Nashville Beat (télé-film).

                                            

Autrefois inédit en Vhs et mais diffusé à l'époque sur la chaîne TV6 au coeur des années 80, SSSSnake marqua une génération de téléspectateurs pour ceux ayant eu l'opportunité de le découvrir un dimanche soir. Réalisateur prolifique ayant aussi bien oeuvré au cinéma qu'à la TV (on lui doit des épisodes de Magnum, K2000, Supercopter, Tonnerre de Feu, Mike Hammer, Simon et Simon, les Petits génies, Chips, Barreta, etc...), Bernard L. Kowalski réalise en 1973 une série B horrifique plutôt efficace par son rythme soutenu largement rehaussé du réalisme documenté imparti aux reptiles. Car comme le souligne son avertissement liminaire, tous les serpents sont bel et bien d'authentiques spécimens ramenés de Bangkok (les Cobras royaux) et de Singapour (le Python) et non de vulgaires effets spéciaux façonnés à base de prothèses et latex. 155 étaient d'ailleurs présents sur le tournage dont la moitié venimeux ! Quant à la métamorphose de David en reptile humain, si les effets cheap peuvent timidement prêter à sourire, le réalisme imparti à sa souffrance physique (râles d'agonie à l'appui !) finit rapidement par provoquer l'effroi avec une empathie teintée de désespoir. Certaines séquences fortement dérangeantes insufflant d'ailleurs un climat résolument malsain, tant pour la déchéance humaine des sujets (le héros en mutabilité puis celui exposé dans un cirque !) que du combat réalisé sans trucage entre une mangouste et un cobra royal ! Ainsi, en fustigeant la moralité du cinéaste, on peut donc se scandaliser de cette éventuelle maltraitance animale !

                                         

Prenant pour thème le savant fou délibéré ici à expérimenter du venin reptilien sur un cobaye humain au profit de notre survie (c'est à dire s'immuniser contre la pollution, les fléaux, la famine et l'holocaust), SSSnake emprunte le schéma classique d'une série B horrifique à l'aura de souffre perméable. De par ces quelques situations et clichés éculées (le rival aux gros bras molestant la tranquillité du couple avant une riposte punitive) et ses séquences chocs censées provoquer l'effroi (l'agression sous la douche puis celle dans la cave), SSSnake ne peut laisser indifférent l'amateur de déviance horrifique. Et en dépit de son cheminement inévitablement prévisible entrecoupé d'une situation sentimentale censée dramatiser la romance (la fille du docteur ne doit pas avoir de rapport sexuel avec David au risque d'être contaminée !), SSSSnake insuffle un suspense anxiogène quand au sort de ses amants (sobrement incarnés par Dirk Benedict et Heather Menzies-Urich) soumis à l'influence paternelle de Stoner. Ce dernier rivalisant de cynisme et sournoiserie à parfaire ses expérimentations inhumaines après avoir osé improviser une vendetta meurtrière. Tout un programme expéditif donc dénué de moralité. Strother Martin endossant avec charisme l'archétype du savant faussement affable habité d'un dessein littéralement exubérant pour notre grand bonheur de récit vrillé. Si la première partie n'apporte pas grand chose à l'évolution du récit (en dépit des enjeux humains pour l'idylle du couple), les personnages s'avèrent suffisamment attachants et la mise en scène assez adroite, notamment lorsqu'elle s'efforce de crédibiliser numéros d'exhibition et expérimentations avec les reptiles. Mais c'est lors de son second acte que SSSSnake renchérit dans l'effroi viscéral avec la condition torturée de David réduit à l'état de Cobra royal ! La encore, les effets spéciaux artisanaux parviennent sobrement à transcender l'improbable en insistant sur la dimension humaine de la créature soumise. Le final franchement malsain et audacieux s'avérant par ailleurs d'une grande cruauté dans son refus de compromis, sachant que l'image se fige sur un hurlement insoutenable.

                                           

En dépit de son aspect télévisuel (non dénué de charme) et du manque d'ambition d'un concept aussi saugrenu que débridé (Bernard L. Kowalski survole à mon sens le potentiel de son intrigue), SSSSnake parvient sans peine à fasciner, terrifier, révulser et impressionner par son climat malsain où (l'omniprésence) de réels reptiles se prêtent à la complicité des comédiens avec troublante hostilité ! A l'instar du combat final imparti entre le savant et le cobra domestique. Une authentique perle culte donc rehaussée d'une aura de soufre toujours plus tangible (la dernière demi-heure est immanquable) si bien qu'il m'a aujourd'hui beaucoup plus impressionné que lors de sa diffusion TV dans les années 80. 

*Bruno
02.11.22
21.06.16

"Tous les reptiles montrés dans ce film sont réels. Les cobras royaux ont été importé de Bangkok, le python de Singapour. Nous souhaitons remercier l'équipe et les acteurs pour leur courage... car ils ont été exposés à des conditions très dangereuses."

jeudi 16 juin 2016

EMPRISE. Prix du Meilleur Film, Horror Guild Awards, 2003

                                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

"Frailty" de Bill Paxton. 2002. U.S.A. 1h39. Avec Bill Paxton, Matthew McConaughey, Levi Kreis, Powers Boothe, Matt O'Leary, Jeremy Sumpter

Sortie salles France: 15 Mai 2012. U.S: 12 Avril 2002

FILMOGRAPHIE: Bill Paxton est un acteur et réalisateur américain, né le 17 mai 1955 à Fort Worth (Texas). 1982: Fish Heads (court métrage). 2002: Emprise. 2005: Un parcours de légende.


Premier et avant-dernier métrage de l'acteur Bill Paxton, Emprise aborde les thématiques de la superstition et du fanatisme religieux avec une ambiguïté dérangeante. Spoil ! A l'instar de son final révélateur à contre emploi de tout ce que le réalisateur semblait nous dénoncer ! Par ce revirement inopiné, le film adopte dès lors une tournure beaucoup plus effrayante pour mettre en exergue une réflexion sur l'existence du Mal et la foi catholique depuis une injonction divine. Fin du Spoil ! Profondément malsain par son climat étouffant souvent régi en vase clos, par son idéologie religieuse rappelant un célèbre précepte de la bible (la tâche d'Abraham et son fils) et la barbarie qui émane des sacrifices humains (même si le hors-champs est louablement prescrit !), Emprise nous immerge dans la mission divine d'un père persuadé de sacrifier des quidams depuis une vision angélique. Selon une liste ciblée de personnes, il est contraint de les assassiner à la hache depuis que les démons les habitent. Dans son délire mystique, il s'efforce d'endoctriner ses deux fils vers l'initiation criminelle afin de contenter la parole de Dieu.


Remarquablement interprété, tant par la prestance parano de Bill Paxton en paternel castrateur, le  flegme rassurant de Matthew McConaughey en narrateur que par le duo infantile que forment spontanément Jeremy Sumpter et (surtout) Matt O'Leary, Emprise honore le genre horrifique sous le pilier du drame psychologique. D'une intensité cruelle, l'intrigue ne cesse de nous déstabiliser lorsque ces enfants candides témoignent impuissants à la gratuité d'une série de crimes sauvages. Ce sentiment anxiogène de fragilité et de perplexité qu'ils nous insufflent se traduit surtout en la présence de Fenton persuadé que son père n'est qu'un charlatan depuis ses exactions barbares. Multipliant vainement les tentatives d'évasion et de révolte alors que son frère cadet se conforte à l'emprise du père, Fenton provoque une digne empathie quant à sa pugnacité et son courage juvéniles (notamment son épreuve de force endurée dans le cachot). Outre ses moments horrifiques où le suspense ne cesse de rebondir quant aux tentatives désespérées de Fenton à s'extraire de la folie homicide (notamment lorsque son père lui ordonne de tuer un otage), Emprise se permet en prime de parachever cette sordide affaire familiale par le biais d'un thriller perfide quant aux tenants et aboutissants des personnages. Sa conclusion délétère s'avérant aussi salvatrice que perturbante !


La Nuit du Chasseur
Onirique (les allers-retours dans le jardin des roses, la reconversion de Fenton au travers de plans chimériques), dérangeant et machiavélique pour son final retors où Bien et Mal se contredisent, et d'une densité psychologique éprouvante quant à la condition soumise d'enfants innocents, Emprise transcende l'horreur réaliste en oscillant les composantes du drame, du fantastique et du thriller. Fort d'un scénario solide bâti sur le sens du sacrifice et la fraternité familiale, il en émane un manifeste (équivoque) sur la foi religieuse et notre conviction morale à tolérer l'obédience divine. 

Récompenses: Prix du meilleur film, lors des International Horror Guild Awards en 2003.
Prix Bram Stoker du meilleur scénario en 2003.

mercredi 15 juin 2016

LES ARDENNES

                                                          Photo empruntée sur Imdb.com, appartenant au site Google

de Robin Pront. 2015. Belgique/Hollande. 1h32. Avec Jeroen Perceval, Kevin Janssens, Veerle Baetens, Jan Bijvoet, Sam Louwyck, Viviane De Muynck

Sortie salles France: 13 Avril 2016. Belgique: 14 Octobre 2015.

FILMOGRAPHIE: Robin Pront est un réalisateur et scénariste belge. 2015: Les Ardennes.


Drame psychologique sur fond de film noir, Les Ardennes relate la relation conflictuelle d'un trio d'amants maudits. Alors que Dave vient d'échapper à une peine de prison pour braquage, son frère Kenny écope de 7 ans de réclusion après avoir été alpagué. Quatre ans plus tard, il retrouve sa liberté mais sa fiancée Sylvie a décidé de rompre leur relation depuis qu'elle entretient une liaison avec Dave. Sévèrement contrarié, Kenny accumule les sautes d'humeur au moment même où le couple s'efforce de lui avouer la vérité.


Une trame convenue que Robin Pront parvient à transcender avec intensité psychologique pour les rapports insidieux du trio d'amants, quand bien même à mi-parcours le réalisateur relance l'intrigue par le biais d'un revirement inopiné. Si la première partie préfigure donc un drame de la jalousie, le second acte adopte une tournure beaucoup plus sordide quant aux règlements de compte en roue libre où les coups les plus couards y seront tolérés. Brossant avec réalisme et sans romantisme le tableau dérisoire de deux marginaux en quête impossible de rédemption, Robin Pront y dénonce l'influence du frère aîné ayant perpétuellement entraîné sa compagne et son frère vers la grande délinquance. Les Ardennes dressant sans concession les conséquences dramatiques de ce personnage aussi influent que perfide si bien que le frère cadet s'efforce désespérément de s'extirper de son emprise. Outre le soin de la mise en scène que le novice Robin Pront maîtrise avec brio, le jeu naturel des comédiens (trognes burinées en sus !) et la justesse des dialogues parviennent à nous familiariser à travers un jeu de massacre où la rigueur dramatique ira crescendo. Ce dernier multipliant rebondissements et situations insolites (seconds rôles excentriques à l'appui !) avec une inventivité insolente.


Prenant pour cadre la Belgique profonde avant de nous confiner dans la moiteur crépusculaire des vallées ardennaises, les Ardennes juxtapose film noir (on peut aussi songer à l'univers sardonique des frères Cohen !) et drame social pour mettre en exergue la déliquescence morale de deux frères incapables de s'extirper de leur médiocrité. Baroque, glauque et poignant, les Ardennes nous laisse dans une impression amère de déchéance criminelle depuis la déroute d'une réinsertion sociale.  

Dédicace à Mylène Lam

mardi 14 juin 2016

Saturn 3

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site saturn3makingof.com

de Stanley Donen. 1980. Angleterre. 1h28. Avec Farrah Fawcett, Kirk Douglas, Harvey Keitel, Ed Bishop, Roy Dotrice.

Sortie salles France: 28 Mai 1980. U.S: 15 Février 1980.

FILMOGRAPHIE: Stanley Donen est un réalisateur américain, né le 13 avril 1924 à Columbia (Caroline du Sud).1949 : Un jour à New York (On the Town). 1951 : Mariage royal. 1952 : Love Is Better Than Ever. 1952 : Chantons sous la pluie . 1952 : L'Intrépide. 1954 : Donnez-lui une chance. 1954 : Les Sept Femmes de Barbe-Rousse. 1954 : Au fond de mon cœur. 1955 : Beau fixe sur New York. 1955 : Kismet (non-credité au générique). 1957 : Drôle de frimousse. 1957 : Pique-nique en pyjama. 1957 : Embrasse-la pour moi. 1958 : Indiscret. 1958 : Cette satanée Lola. 1960 : Chérie recommençons. 1960 : Un cadeau pour le patron. 1960 : Ailleurs l'herbe est plus verte. 1963 : Charade. 1966 : Arabesque. 1967 : Voyage à deux. 1967 : Fantasmes. 1969 : L'Escalier. 1974 : Le Petit Prince. 1975 : Les Aventuriers du Lucky Lady. 1978 : Folie Folie. 1980 : Saturn 3. 1984 : La Faute à Rio.


Quand on pense que derrière Saturn 3 se planque le réalisateur de Chantons sous la Pluie, on peine à le croire tant le spectacle kitchissime s'érige en série B du Samedi soir. De par son intrigue aussi futile que niaise, du jeu cabotin d'acteurs notoires mais attachants et de décors high-tech étonnamment soignées pour l'époque (merci John Barry, décorateur de la Guerre des Etoiles et de Superman alors qu'il quitta ici précipitamment les commandes de la réalisation après seulement 1 semaine de tournage !), Saturn 3 fait office d'ovni saugrenu. A mi-chemin entre l'épigone trivial d'Alien et du précurseur "docile" de Terminator. Visez un peu le pitch d'après un concept de John Barry himself ! Un capitaine sans vergogne s'est invité dans la station de recherche écolo d'Adam et Axelle afin de tester la technologie d'un androïde téléguidé par transmission de pensée. Bien évidemment, le robot finit par échapper à son contrôle et sème le zouc auprès du duo agronome. Diffusé un lundi soir dans le cadre de l'émission culte l'Avenir du FuturSaturn 3 fit son p'tit effet ludique lors de sa diffusion au début des années 80. 


Aujourd'hui encore, et malgré son caractère naïf et obsolète, le film parvient à divertir aimablement d'après son lot de courses poursuites censées susciter l'angoisse depuis que nos deux survivants tentent de contredire l'arrogance d'Hector le robot. Malgré l'aspect redondant de sa narration faiblarde en soubresauts, Saturn 3 nous tient en éveil sous l'impulsion complice (et également improbable !) de Kirk Douglas et Farrah Fawcet. Un couple en étreinte amoureuse que le capitaine James s'efforce de nuire en guise de jalousie et d'érotomanie. Harvey Keitel incarnant à merveille ce rôle antipathique à l'aide d'une gouaille détestable. D'autre part, grâce à l'aspect immersif du décorum futuriste faisant office de cocon domestique et grâce à la posture quelque peu fascinante d'Hector là aussi convaincant de par son anatomie humanoïde truffée de détails techniques, Saturn 3 amuse gentiment avec une fantaisie parfois débridée. Les déplacements atones de celui-ci cultivant un certain charisme hostile à daigner nuire à autrui sous la mainmise de son créateur dénué de vergogne. Le score aux accents horrifiques d'Elmer Bernstein renforçant notamment l'aspect menaçant de la créature de métal lors de ces affrontements bellicistes. On apprécie enfin en guise de cerise sur le gâteau l'intrusion (toutefois) concise d'effets gores assez réussis (le cadavre déchiqueté par les câbles lors du prologue, une main sectionnée ainsi que la tête humaine implantée sur la tête d'Hector !).


Dans l'espace, Hector joue au phallocrate !
Série B relativement plaisante, un tantinet sexy (les tenues frivoles de Farraw, le cul nu de Douglas !) et atmosphérique, Saturn 3 compte sur l'autorité altruiste du vétéran Kirk Douglas, le sex-appeal de Farraw Fawcett et le charisme hiératique d'Hector pour nous divertir sans prétention. Quelque peu loufoque mais aussi fascinant grâce à son esthétisme formel immersif, Saturn 3 saura encore contenter les amateurs de plaisir innocent en prime d'y distraire les passéistes de l'Avenir du Futur marqués à jamais par cette prod hybride, aussi mineur soit son contenu prévisible (à l'instar de son final pas aussi spectaculaire que prévu mais néanmoins avenant). 

*Eric Binford.
14.06.16
07.10.21

lundi 13 juin 2016

THE QUIET

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Jamie Babbit. 2005. U.S.A. 1h34. Avec Elisha Cuthbert, Camilla Belle, Edie Falco, Martin Donovan, Shawn Ashmore, Katy Mixon :

Sortie salles: 1er Septembre 2006

FILMOGRAPHIEJamie Babbit, née le 16 novembre 1970 à Shaker Heights dans l'Ohio, est une réalisatrice américaine. 1999 : But I'm a Cheerleader. 2005 : The Quiet. 2007 : Itty Bitty Titty Committee. 2013 : Breaking the Girls. 2014 : Untitled Riddle/Salahuddin Project (téléfilm)
2015 : Addicted to Fresno.


Inédit en salles en France, The Quiet emprunte la thématique de la famille dysfonctionnelle par le biais de l'inceste. Depuis la récente mort de son père, Dot part se réfugier chez son oncle en se faisant passer pour une sourde et muette. Nina, jeune adolescente au physique de poupon est victime d'abus sexuels par ce dernier alors que sa mère dépressive préfère l'ignorer. Si au départ Dot devient le souffre douleur de Nina lors d'incessantes brimades scolaires, une amitié commence à s'instaurer entre elles au fil de confidences tenues secrètes.


Drame psychologique à l'ambiance aussi trouble que vénéneuse, The Quiet a de quoi surprendre sous son aspect ludique de thriller (faussement) commercial. La réalisatrice parvenant à structurer une intensité dramatique au fil d'un cheminement criminel où le suspense latent se télescope avec les apartés des deux ados perturbées. Sans céder à la facilité d'une mécanique à suspense éculée (l'expectative du meurtre), Jamie Babbit préfère souligner les rapports ambigus impartis aux deux ados en quête d'exutoire. Dot endossant depuis la mort de ses parents le rôle d'une sourde/muette afin de se faire oublier alors que Nina tente de tolérer ses pulsions d'amour/répulsion avec son père en humiliant cette dernière. Abordant la sexualité adolescente (tant du point de vue de Dot et de Nina que celui introverti de Connor), The Quiet dérange par son atmosphère malsaine où la déviance morale d'un père va finalement permettre de consolider une étrange histoire d'amitié. Dot et Nina se rapprochant toujours un peu plus au fil de confidences où la haine ose préméditer une stratégie criminelle. Cette ambiance trouble de malaise existentiel, de perversité sexuelle et de désir morbide est renforcé du jeu sobre des comédiennes insufflant de la spontanéité dans leur fonction torturée.


Captivant et dérangeant au fil d'une intrigue criminelle censée provoquer la rédemption, The Quiet surprend par son parti-pris de souligner les rapports fragiles de deux ados perturbées par leur éveil sexuel plutôt que d'afficher un thriller convenu. Une étonnante découverte donc dont l'ambiance hermétique et parfois envoûtante nous laisse un goût amer dans la bouche. 

vendredi 10 juin 2016

SHOTGUN STORIES

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site ecranlarge.com  

de Jeff Nichols. 2007. U.S.A. 1h31. Michael Shannon, Douglas Ligon, Barlow Jacobs, Natalie Canerday, Glenda Pannel, Lynnsee Provense, Michael Abbott Jr.

Sortie salles France: 2 Janvier 2008

FILMOGRAPHIE: Jeff Nichols est un réalisateur et scénariste américain né le 7 Décembre 1978 à Little Rock, Arkansas (Etats-Unis).
2007: Shotgun Stories. 2011: Take Shelter. 2012: Mud. 2016: Midnight Special. 2016: Loving.


Considéré aujourd'hui comme un nouveau maître du cinéma américain, Jeff Nichols avait déjà  amorcé son talent personnel à travers Shotgun Stories réalisé en 2007. A mi-chemin entre le cinéma de James Foley (pour les thèmes et le lyrisme hérités de Comme un chien enragé) et celui de Terence Mallick pour sa manière sensitive de filmer une nature sereine, Shotgun Stories empreinte le schéma du film de vengeance avec une rare intelligence. De par son parti-pris à réfuter une violence démonstrative au profit de l'identité psychologique d'une famille désoeuvrée au sein d'une Amérique profonde. 


Abandonnés par leur père dès leur plus jeune âge et délaissés par la mère, trois frères tentent de survivre en s'épaulant mutuellement. A la suite du décès du patriarche, une rivalité entre eux et les demi-frères éclate lors des funérailles. Communément trop fiers de céder aux intimidations, leur discorde morale va entraîner un règlement de compte meurtrier. Drame psychologique d'une intensité dramatique inscrite dans la pudeur et le non-dit, Shotgun Stories aborde l'exclusion d'une délinquance juvénile depuis l'abandon parental. Réflexion sur l'engrenage de la violence sous la bannière d'une rancune intraitable, cette dérive criminelle dresse le constat social d'une jeunesse laissée pour compte où le chômage, l'incommunicabilité et l'absence d'amour vont extérioriser chez eux un sentiment de révolte destructrice. Fort d'une distribution criante de vérité humaine, les trois acteurs composant la fratrie portent le film sur leurs épaules avec une humilité poignante. Leur présence naturelle étant renforcée par un jeu de regards oscillant l'amertume et la tendresse timorée. En frère aîné hanté par la colère et l'injustice, Michael Shannon (Bug, Take Shalter, Midnight Special) livre à nouveau une prestance compacte pour se glisser dans la peau d'un leader protecteur avec un charisme placide. Au sein d'une nature paisible auquel ils évoluent depuis leur enfance, Jeff Nichols met en contraste leur solitude existentielle avec un onirisme nonchalant (mélodie élégiaque en sus durant tout leur cheminement !). 


"Le chemin qui mène à la sagesse est long, tortueux et semé d'obstacles".
Affichant un climat réaliste de poésie existentielle sous l'impulsion d'acteurs en posture sentencieuse , Shotgun Stories renouvelle le drame familial avec pudeur et sobriété afin de scruter les âmes torturées d'une fratrie noyée de solitude et de mal-être depuis l'abandon parental. 

jeudi 9 juin 2016

EVENT HORIZON: LE VAISSEAU DE L'AU-DELA. Prix du public, Bruxelles 98.

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Paul W. S. Anderson. 1997. 1h36. Avec Laurence Fishburne, Sam Neill, Kathleen Quinlan, Joely Richardson, Richard T. Jones, Jack Noseworthy, Jason Isaacs.

Sortie salles France: 6 Mai 1998. U.S: 15 Août 1997

FILMOGRAPHIE: Paul William Scott Anderson, né le 4 mars 1965 à Newcastle upon Tyne est un producteur, réalisateur et scénariste britannique. 1994 : Shopping. 1995 : Mortal Kombat. 1997 : Event Horizon, le vaisseau de l'au-delà. 1998 : Soldier. 2000 : The Sight. 2002 : Resident Evil. 2004 : Alien vs Predator. 2008: Death Race. 2010 : Resident Evil: Afterlife. 2011 : Les Trois Mousquetaires 3D. 2012 : Resident Evil : Retribution 3D. 2014 : Pompéi. 2016 : Resident Evil : Chapitre final.


Echec public et critique lors de sa discrète sortie en salles, Event Horizon constitue une oeuvre maudite si on se réfère à l'indiscutable savoir-faire de Paul Anderson particulièrement impliqué à façonner un grand huit cauchemardesque. Tant par l'efficacité de sa mise en scène cultivant une angoisse en apesanteur que de son esthétisme léché sublimant l'architecture baroque des corridors du vaisseau. A mi chemin entre Hellraiser pour la représentation d'un Enfer SM et la Maison du Diable pour son aura diabolique sous-jacente, Event Horizon parvient à nous captiver dans son enchaînement de situations hostiles où la mort insidieuse ne laissera aucun répit aux victimes.


Durant 1h30, une poignée d'astronautes va tenter de percer le mystère de l'Event Horizon depuis que les passagers de l'ancienne expédition n'avaient plus donné signe de vie. Au fil de leur découverte macabre, une présence diabolique plane sur leurs épaules si bien que un à un, ils vont sombrer dans une paranoïa collective depuis leurs hallucinations plus vraies que nature. Ce sentiment d'insécurité permanent et cette manière vénéneuse de provoquer nos protagonistes en faisant appel aux réminiscences familiales, Paul Anderson le met en exergue parmi le pouvoir de suggestion. La présence invisible mais palpable redoublant de cynisme à bizuter ces derniers avant de posséder leurs âmes. Qui plus est, en jouant sur la dimension parallèle du trou noir, une vision de l'enfer nous est suggérée sous l'impulsion d'une machine rotative et d'hallucinations hystériques de victimes écorchées vives ! Au-delà du réalisme formel imparti à sa scénographie spatiale et de son climat anxiogène, Event Horizon tire parti d'une distribution solide pour renforcer la crédibilité des enjeux humains. Particulièrement Laurence Fishburne et Sam Neill se disputant l'autorité avec sang froid et une pugnacité en chute libre. Et si sa dernière partie homérique cède un peu à la facilité de l'esbroufe (FX renversants à l'appui à base d'explosions dantesques et d'atrocités corporelles !), Paul Anderson nous avive encore l'attention par le principe d'un survival aussi nerveux qu'escarpé.


Pur divertissement de série B classieuse comme le caractérise l'excentricité des décors futuristes, Event Horizon nous propose un spectacle de haute tenue dans son format de science-fiction horrifique ne lésinant pas sur un gore vicié. A redécouvrir avec un vif intérêt si bien qu'il s'agit (de loin) du meilleur film du très inégal Paul Anderson

Récompense: Prix du Public au Festival du Film Fantastique de Bruxelles, 1998

mercredi 8 juin 2016

FIRESTARTER

                                                                      Photo empruntée sur Google, rattachée au site impawards.com

"Charlie" de Mark L. Lester. 1984. U.S.A. 1h53. Avec David Keith, Drew Barrymore, Freddie Jones, Heather Locklear, Martin Sheen, George C. Scott.

Sortie salles U.S: 11 Mai 1984 

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Mark Lester est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 26 Novembre 1946 à Cleveland, Ohio.
1971: Twilight of the Mayas. 1973: Steel Arena. 1982: Class 84. 1984: Firestarter. 1985: Commando. 1986: Armé et Dangereux. 1990: Class of 1999. 1991: Dans les Griffes du Dragon Rouge. 1996: Public Ennemies. 2000: Blowback. 2000: Sacrifice (télé-film). 2000: Guilty as Charged (télé-film). 2002: Piège sur Internet. 2003: Trahisons. 2003: Ruée vers la Blanche. 2005: Ptérodactyles.


Un an avant Commando, Mark Lester s'essaie au genre fantastique en transposant à l'écran le roman de Stephen King, Charlie. Série B dénuée de prétention malgré une distribution alléchante (on y croise David Keith, Drew Barrymore, Martin Sheen, George C. Scott), Firestarter relate dans un schéma narratif orthodoxe les vicissitudes d'un père et de sa fille pourchassés par des agents gouvernementaux depuis que cette dernière cultive des pouvoirs pyromanes. Ses dons meurtriers émanant des expériences scientifiques que ses parents ont autrefois toléré afin de servir la science. Par l'influence surnaturelle de son esprit fulminant, Charlie parvient furtivement à enflammer ses rivaux. Ce qui nous vaut des séquences d'embrasement assez réussies, à l'instar de son final particulièrement homérique dont les effets spéciaux délirants font preuve de réalisme. Avec l'aide d'un tueur professionnel, le capitaine Hollister finit par kidnapper les deux fugitifs afin d'exploiter à des fins belliqueuses le don de la petite Charlie.


Par le biais d'un cheminement narratif assez efficace, suspense et fantastique se chevauchent autour du sort précaire de Charlie et de son père, communément soudés par les liens familiaux. Mark Lester accordant beaucoup de crédit à leur relation affective alors que ces derniers seront séparément cloisonnés dans les chambres d'un institut expérimental. Grâce à la conviction d'une distribution charismatique (en particulier George C Scott, Martin Sheen et David Keith), Firestarter parvient à nous convaincre de son propos fantastique pointant du doigt la menace du nucléaire sous le ressort de la télékinésie. Qui plus est, le jeu dégourdi de Drew Barrymore s'avère assez crédible dans sa fonction candide de victime infortunée s'efforçant de canaliser ses pouvoirs depuis l'enseignement loyal de son père. Hélas, et en dépit du caractère attachant de ce duo servile, Firestarter manque sévèrement d'intensité et d'enjeux dramatiques pour immerger le spectateur dans une palpitante course contre la survie. Car si le spectacle s'avère agréable et jamais ennuyeux, il ne fait que survoler un scénario mal exploité et dénué de surprises. On se rabat alors sur la compassion que suscitent fébrilement le père et sa fille depuis leur maltraitance d'une confrérie avide de totalitarisme.


Soutenu par la partition envoûtante de Tangerine Dream, Firestarter constitue une aimable série B fantastique émaillée de séquences d'incendies parfois fulgurantes et de plages de tendresse que le couple parental endosse avec une certaine densité humaine. 

mardi 7 juin 2016

EDDIE THE EAGLE

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site sallesobscures.com

de Dexter Fletcher. 2016. Angleterre/Allemagne/U.S.A. 1h45. Avec Taron Egerton, Hugh Jackman,
Keith Allen, Jo Hartley, Iris Berben.

Sortie salles France: 4 Mars 2016. U.S: 26 Février 2016

FILMOGRAPHIE: Dexter Fletcher est un acteur et réalisateur anglais, né le 31 janvier 1966. 
2011 : Wild Bill (également coscénariste). 2013: Sunshine on Leith. 2016: Eddie the Eagle.


"Le plus important aux jeux olympiques n'est pas de gagner mais de participer. L'important dans la vie ce n'est point le triomphe mais le combat."
PIERRE DE COUBERTIN, Fondateur des Jeux Olympiques, 1896. 

A l'instar du succès inattendu de Rocky, il y a encore des petits métrages débordant de générosité et de sincérité à s'approprier un concept éculé si bien que l'on oublie facilement son cheminement balisé pour se laisser à nouveau bercer par la "succes-story" d'un prodige chez une compétition sportive. Tiré d'une histoire vraie, Eddie the Eagle retrace avec une émotion vertigineuse l'incroyable destin d'Eddie Edwards, jeune britannique passionné par le saut en ski et suffisamment utopiste pour croire en son étoile. Raillé par son père, les olympiens et les administrateurs alors qu'il débuta trop tard sa discipline professionnelle, Eddie compte néanmoins participer aux jeux olympiques avec l'appui de son mentor autrefois privé de médaille pour indiscipline. Ensemble, fort d'un entraînement intensif et malgré les échecs, ils vont multiplier les exploits avant de pouvoir concourir aux jeux olympiques d'hiver de 1988. 


Véritable cantique à la passion, au courage, à l'estime de soi et à la constance, Eddie the Eagle réinvente l'ascension sportive d'un jeune loup délibéré à se transcender pour conquérir son rêve. Cette rage de vaincre tous les défis, cette force morale de braver le pessimisme et les brimades de son entourage, Eddie Edwards nous les transmet à l'écran avec un flegme prégnant. Son parcours semé d'embûches, de bévues et de surprises nous emportant dans un tourbillon d'émotions aussi fringantes que le destin de Rocky. A travers des séquences aériennes vertigineuses, on peut également saluer le brio de la mise en scène sublimant les descentes sur ski d'Eddie avant son grand saut de l'aigle ! Une désignation que lui même et ses nouveaux supporters ont acclamé depuis sa performance héroïque contre toute attente. Sous son physique ordinaire de benêt (lunettes trop larges et sourire niais), Taron Egerton (la révélation de Kingsman !) porte le film à bout de bras par son aisance naturelle à insuffler des sentiments fondés sur la loyauté, la bravoure, la passion et l'amitié. Secondé par l'autorité avisée de Bronson Peary, Hugh Jackman lui partage la vedette avec la sobriété d'un coatch amical et d'un philosophe en quête de repentance. Car c'est à travers la persévérance d'Eddie et d'une éventuelle accession victorieuse qu'il tente d'assumer son préalable échec sportif depuis son orgueil juvénile. Lors d'une séquence poignante d'une belle justesse, et toujours à travers le parcours méritoire d'Eddie, on peut enfin souligner l'apparition de Christopher Walken dans celui de l'éminent enseignant gagné par un regain d'humilité pour son ancien élève prodige.  


C'était impossible, alors il l'a fait ! 
Grand moment d'émotions aussi fortes que fragiles pour la destinée insensée d'une étoile filante, Eddie the eagle emprunte le schéma modeste de la série B pour parfaire une "success-story" à 
l'intensité lyrique (bande son tonitruante à l'appui !). Car malgré son impression de déjà vu, Dexter Fletcher parvient à renouveler le spectacle sportif et son thème inhérent de la persévérance (plutôt que celle de la victoire) sous l'impulsion naturelle d'un duo d'acteurs pétris d'humanisme (on pardonne dès lors le jeu stéréotypé de certains seconds rôles estampillés "méchants de service").  

Dédicace à Seb Lake

lundi 6 juin 2016

LA CHEVRE

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site quizz.biz

de Francis Veber. 1980. France. 1h33. Avec Pierre Richard, Gérard Depardieu, Michel Robin, André Valardy, Corynne Charbit, Pedro Armendáriz Jr., Jorge Luke .

Sortie salles France: 9 Décembre 1981

FILMOGRAPHIE: Francis Veber est un réalisateur, scénariste, dialoguiste et producteur français, né le 28 Juillet 1937 à Neuilly sur Seine. 1976: Le Jouet. 1981: La Chèvre. 1983: Les Compères. 1986: Les Fugitifs. 1989: Les 3 Fugitifs. 1992: Sur la corde raide. 1996: Le Jaguar. 1998: Le Dîner de con. 2000: Le Placard. 2002: Tais-toi ! 2006: La Doublure. 2008: L'Emmerdeur.


Enorme succès à sa sortie en France (7 079 674 entrées), La Chèvre n'a point usurpé son statut de classique de la comédie populaire tant Francis Veber est parvenu à conjuguer éclats de rire et tendresse sous l'impulsion d'un duo d'acteurs que personne n'aurait imaginé voir réunir ! Car outre sa bonne idée de départ (recruter un comptable malchanceux afin de débusquer la fille d'un PDG aussi infortunée que lui !), La Chèvre tire parti de son ressort comique grâce aux rapports conflictuels que se disputent Pierre Richard et Gérard Depardieu. Si ce dernier adopte une posture autoritaire souvent dénigrante pour se railler des bévues de son camarade, il ne manque pas non plus de susciter un regain de compassion depuis que Perrin est réduit au bouffon de service (et non comme un leader sagace comme le laissaient croire ses supérieurs).


Personnage empoté multipliant les catastrophes à un rythme fertile, Pierre Richard crève l'écran à se glisser dans la peau d'un baroudeur persuadé d'avoir le profil héroïque pour parfaire sa mission. Jouant souvent sur la pantomime avec un sérieux imperturbable, l'acteur insuffle avec son physique naturel un aplomb exubérant pour incarner un maladroit impayable. Prenant pour thème la théorie de la malchance, Francis Veber exploite donc une intrigue efficace et bien construite autour de leurs pérégrinations que Perrin tente maladroitement de diriger. Parmi un éventail de quiproquos, pugilats et rebondissements, ces derniers vont apprendre à se connaître en affrontant une pègre mafieuse puis se tolérer depuis le flair aléatoire de Perrin (ce dernier engendrant au final la chance par sa déveine !). Prenant pour cadre naturel l'état du Mexique, le réalisateur affiche également un certain souffle exotique pour nous dépayser de sa forestation que Perrin et Campana sillonnent dans un concours de circonstances folingues (l'agression avec le gorille, la piqûre de guêpe, le sable mouvant). La musique de Vladimir Cosma composée à la flute de Pan se prêtant à merveille au climat tropical quand bien même l'émotion attendrissante de sa conclusion éveille un sublime instant de poésie candide.


Jalonné de gags, de fantaisies et d'action autour d'une intrigue animée par la poisse du gaffeur, La Chèvre se permet en outre de susciter une émotion lyrique lors d'une retrouvaille inespérée. Reste à saluer le duo légendaire que se partagent avec autant de bonne humeur que d'animosité Pierre Richard / Gérard Depardieu

vendredi 3 juin 2016

LA TARENTULE AU VENTRE NOIR

                                                          Photo empruntée sur Google, rattachée au site ecranlarge.com 

"La Tarantola dal ventre nero" de Paolo Cavara. 1971. Italie. 1h38. Avec Giancarlo Giannini, Claudine Auger, Barbara Bouchet, Rossella Falk, Silvano Tranquilli, Barbara Bach, Stephania Sandrelli.

Sortie salles Italie: 12 Août 1971

FILMOGRAPHIE: Paolo Cavara est un réalisateur et scénariste italien, né le 4 Juillet 1926 à Bologne (Italie), décédé le 7 Août 1982 à Rome. 1988: Accadde a Parma. 1981 Fregoli (TV Mini-Series). 1980 La locandiera. 1979 Atsalut pader. 1979 Sarto per signora (Téléfilm). 1976 E tanta paura. 1974 Il lumacone. 1974 Un parfum d'amour. 1973 Los amigos. 1971 La tarentule au ventre noir. 1969 La Capture. 1967 La cible dans l'oeil. 1966 Witchdoctor in Tails (Documentaire). 1964 I malamondo (Documentaire). 1963 La donna nel mondo (Documentaire. Non crédité). 1962: Mondo Cane (Documentaire).


Giallo injustement occulté et boudé en France si bien qu'en l'occurrence aucune édition numérique n'ait encore percée chez nous, La Tarentule au ventre noir ne manque pas de qualités pour émuler le genre avec sincérité et application. Non pas que la mise en scène soit un modèle du genre, loin de là, mais que le réalisateur parvient à structurer une intrigue assez prenante par son suspense latent contrebalancé de rebondissements (le détail sur la photo !) et (inévitables) fausses pistes. C'est du côté d'un institut de beauté que l'intrigue s'oriente depuis que le personnel est devenu la cible récurrente d'un tueur auquel l'adultère et la nymphomanie en sont les principaux ressorts. La première originalité du récit incombe à l'élaboration des meurtres et l'omnipotence de l'assassin lorsque ce dernier ganté préconise la paralysie de ses victimes à l'aide d'une aiguille empoisonnée (du venin de guêpe nous révélera plus tard un entomologiste !), et ce, juste avant de les assassiner. Dès lors, ces dernières, en état de conscience, subissent impuissantes aux châtiments du poignard pénétré à diverses reprises sur le bas-ventre jusqu'à ce que mort s'ensuive.


Parfois sanglants et soigneusement cadrés, ses crimes s'avèrent assez impressionnants sous l'impulsion d'un rituel atypique redoutablement pervers. La victime féminine symbolisant la soumission d'une tarentule si bien que le tueur s'inspire de la bravoure victorieuse de la "Pepsis Formosa". Une "guêpe des chemins" parvenant toujours à éliminer son rival grâce à la paralysie de son venin injecté dans l'estomac afin de libérer des larves carnivores ! C'est ensuite au niveau du profil de l'inspecteur Tellini que La Tarentule... puise son intensité psychologique, notamment parmi ses rapports intimes entretenus avec sa fiancée philanthrope. En perte de vitesse car ayant une longueur de retard sur les agissements du tueur persifleur (il filme les ébats sexuels de ce dernier et de sa compagne), Tellini se remet constamment en question sur son pragmatisme au risque d'abdiquer sa profession au profit de sa vie de famille. Outre l'efficacité des nombreux meurtres que le récit affiche avec un certain stylisme, La Tarentule... recourt aussi à une rigueur vertigineuse lors d'une course-poursuite entamée sur les toits d'un immeuble. Quant au final haletant, l'intrigue met en parallèle les situations alarmistes de deux victimes en proie à la menace meurtrière, au moment même où l'inspecteur ne s'efforce une ultime fois d'alpaguer le tortionnaire, symptomatique du misogyne.


Avec ses meurtres raffinés (inscrits dans le mutisme), le jeu sentencieux de Giancarlo Giannini, ses têtes d'affiche féminines d'une beauté éminemment lascive et la mélodie envoûtante d'Ennio Morricone, La Tarentule au ventre noir n'a pas à rougir de ses illustres ascendants pour mettre en exergue un thriller captivant. Certes un peu maladroit dans sa réalisation et le jeu perfectible de quelques seconds-rôles, mais d'une sincérité indiscutable lorsque le cinéaste s'efforce d'affilier caractérisation psychologique et suspense métronomique. 


mercredi 1 juin 2016

EXORCISME TRAGIQUE

                                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemalamorte.es

"Un Bianco Vestito Per Marailé" de Romano Scavolini. 1972. Italie. 1h28. Avec Ida Galli, Ivan Rassimov, Luigi Pistilli, Pilar Velázquez, Ezio Marano

Sortie salles France: 10 Avril 1975

FILMOGRAPHIE: Romano Scavolini est un réalisateur italien né le 17 JuiN 1940.
2007 Two Families, 2005 L'apocalisse delle scimmie, 2004 Le ultime ore del Che (documentary), 1988 Dog Tags, 1981 Cauchemars à Daytona Beach, 1980 Savage Hunt, 1973 Servo suo, 1973 Cuore, 1972 Exorcisme tragique - Les monstres se mettent à table, 1969 Entonce, 1969 L'amore breve, 1968 La prova generale, 1966 A mosca cieca


Giallo méconnu tout juste édité en galette numérique par Le Chat qui fume, Exorcisme tragique puise une certaine originalité dans sa forme gothico-baroque lorsqu'une poignée de convives sont invités dans le manoir de Marialé pour se livrer à une débauche communautaire. Quelques années au préalable, cette dernière eut été témoin des meurtres de sa mère et de son amant perpétrés par son père (une séquence onirique où la nature solaire se confond au climat macabre depuis les exactions vengeresses). Alors que la fête bat son plein, un mystérieux tueur s'empresse de les assassiner un à un. Dirigé par Romano Scavolini, auteur italien du célèbre Cauchemar à Daytona beach (sommet de gore crapoteux resté dans toutes les mémoires !), Exorcisme Tragique insuffle un climat d'étrangeté assez insolite lors de sa première partie.


Tant par la visite impromptue qu'entament les occupants dans les souterrains poussiéreux du château parmi les toiles d'araignées et des mannequins cadavériques, que leur orgie nocturne où alcool et exhibition érotique se chevauchent sans modération. Affublés de déguisements de carnaval et communément entraînés dans une spirale de débauche, ces derniers se pavanent devant le témoignage fragilisé de Marialé. Asservie par son mari et le majordome car contrainte par la force d'ingurgiter un traitement médicamenteux, cette dernière tente d'exorciser ses vieux démons en empruntant la robe mortifère de sa mère. Si le cheminement narratif dénué de raison à de quoi dérouter durant la première heure par son climat d'insolence en roue libre (la posture exubérante des protagonistes plongés dans un état second), le spectateur s'y laisse facilement envoûter quand bien même Romano Scavolini soigne la forme stylisée d'un esthétisme fringant. Avec souci du cadrage alambiqué magnifiant ses pièces domestiques et éclairés d'une photo flamboyante, Exorcisme Tragique flatte notre vision et l'ouïe sous le score mélodique de Fiorenzo Carpi. La seconde partie, beaucoup mieux rythmée dans sa dérive criminelle, s'écarte parfois de l'intimité du huis-clos pour filmer les extérieurs d'une nature crépusculaire inhospitalière, comme le souligne l'intervention des chiens cerbères. Si son final prévisible ne surprend pas quant à l'identité de l'assassin, la manière habile dont Romano Scavolini parachève son histoire fait preuve de dérision et d'intensité dramatique pour répéter la boucle du passé traumatique.


Sympathique slasher où érotisme, beuveries et châtiments punitifs finissent par se télescoper, Exorcisme Tragique réveille singulièrement le thème du trauma infantile sous l'impulsion d'un témoignage effronté. Une oeuvre mineure pour le genre mais assez hétérodoxe par son schéma narratif et d'une emprise de séduction assez expressive. 

mardi 31 mai 2016

LA POUPEE DIABOLIQUE

                                                Photo empruntée sur Google, rattachée au site seriebox.com

"Devil Doll" de Lindsay Shonteff. 1964. Angleterre. 1h21. Avec Bryant Haliday, William Sylvester, Yvonne Romain, Sandra Dorne, Nora Nicholson.

Sortie salles U.S: Septembre 1964

FILMOGRAPHIE: Lindsay Shonteff est un réalisateur, scénariste et producteur anglais, né le 5 Novembre 1935 à Toronto, Canada, décédé le 11 Mars 2006 en Angleterre.
2009: Angels, Devils and Men.  2004 Ice Cold in Phoenix (Video).  1992 The Running Gun. 1990 Number One Gun. 1984 Lipstick and Blood. 1984 The Killing Edge. 1982 How Sleep the Brave. 1979 Adieu canaille . 1977 No. 1 of the Secret Service . 1976 Spy Story. 1974 The Swordsman. 1973 Big Zapper. 1972 Jeux d'adultes. 1971 The Yes Girls. 1970 Clegg. 1970 Permissive . 1969 Nuit après nuit. 1967 The Million Eyes of Sumuru. 1966 Run with the Wind. 1965 Licensed to Kill. 1965 Curse of the Voodoo. 1964: Devil Doll. 1961 The Hired Gun.


Inédit en salles chez nous et tout juste exhumé de l'oubli par l'éditeur Artus Films, La Poupée Diabolique aborde le thème du ventriloque de manière plutôt originale si bien que la poupée potentiellement diabolique s'avère être ici le souffre-douleur d'un hypnotiseur doué de télépathie. A la suite d'une de ses représentations, Vorelli, ventriloque émérite, tombe sous le charme de Marianne, la compagne de Mark English. Alors qu'il défraie la chronique lorsque sa poupée parvient à marcher librement devant des spectateurs médusés, Vorelli attise la curiosité de Mark délibéré à enquêter sur son mystérieux passé. Tournée en noir et blanc, incarné par de sobres comédiens et réalisé de manière académique (sans compter une direction d'acteurs défaillante), La Poupée Diabolique parvient pourtant à entretenir une fascination trouble auprès du spectateur impliqué dans un suspense horrifique franchement inquiétant.


De par ses numéros macabres qu'exerce méthodiquement Vorelly sur ses victimes lors des représentations et la présence annexe de sa poupée faire-valoir, un climat malsain aussi lourd qu'étouffant émane des stratégies surnaturelles. Fort d'un regard impassible et d'une posture hiératique, l'acteur Bryant Haliday extériorise une emprise ensorcelante sous l'impulsion cérébrale de sa télépathie. La victime asservie étant contrainte d'obtempérer jusqu'à ce que Hugo ne prenne sa revanche après s'être humanisé dans son corps de pantin. Si le cheminement narratif s'avère linéaire mais efficacement structuré, les rapports de soumission/domination entretenus entre Vorelly et Hugo viennent apporter un sang neuf au thème du ventriloque. Celui-ci étant fréquemment réduit au rôle de victime depuis l'autorité démoniaque de sa poupée. Par le biais d'une investigation entamée par le compagnon de Marianne, l'intrigue cultive ensuite l'expectative des mobiles afin de percer le sombre secret que se disputent Vorelli et Hugo. Emaillé de séquences dérangeantes (Hugo enjambant à deux reprises, et en toute autonomie, quelques pas face à un public en émoi, puis la séquence perturbante d'un homicide perpétré en plein spectacle !), La Poupée Diabolique distille un sentiment d'insécurité permanent au fil des stratagèmes du ventriloque habité par l'orgueil, le désir de possession et la cupidité.


Surprenante série B façonnée durant l'âge d'or de l'épouvante anglaise, La Poupée Diabolique constitue une petite perle de souffre par son angoisse tangible (score dissonant à l'appui !), faute des exactions sournoises du ventriloque et de la posture étrangement humaine d'une poupée hybride hantée par son ancienne existence ! A découvrir absolument !