lundi 10 avril 2017

NEMESIS (Sam was here). Mention spéciale du jury, Utopiales 2016.

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site trollombrerobot.wordpress.com

de Christophe Deroo. 2016. U.S.A/France. 1h12. Avec Rusty Joiner, Sigrid La Chapelle, Rhoda Pell, Hassan Galedary.

Sortie Dtv France: 30 Mars 2016 (Interdit aux - de 12 ans)

FILMOGRAPHIE: Christophe Deroo est un réalisateur et producteur français. 2016: Nemesis.


Exercice de style réalisé par le débutant Christophe Deroo, Nemesis emprunte la démarche d'un suspense horrifique par le biais d'une intrigue hermétique restée en suspens. A l'instar d'un épisode long format de la 4è Dimension, la trame suit les pérégrinations esseulées d'un colporteur au coeur d'un désert californien. Destitué d'habitants, Sam Cobritz finit par se lasser de son exercice professionnel au moment même où un tueur sévit dans la région et qu'une étrange lumière rouge s'immobilise dans le ciel. Rapidement, il devient la cible d'individus masqués résignés à l'assassiner en guise de vengeance quand bien même il tente à moult reprises d'avertir sa femme qu'il est sur le chemin du retour.


D'une durée concise d'1h09 si on épargne son générique final, Nemesis tire parti de son efficacité grâce à la maîtrise de sa mise en scène sublimant l'atmosphère solaire d'un désert photogénique (format scope à l'appui) et à ses nombreuses péripéties inexpliquées que le héros tente de contrecarrer avec une déveine inépuisable. Scandé du score électro de Christine n'ayant rien à envier au mélodies cinétiques du cinéma de Carpenter, Nemesis s'inspire de ce dernier avec l'évidente volonté d'envoûter le spectateur par le biais d'un contexte insécuritaire à la lisière du fantastique. Outre ses références empruntées à Carpenter (à l'instar de ces silhouettes nocturnes d'individus figés comme des zombies si bien qu'on les croiraient sortis d'Assaut ou de Prince des Ténèbres !), le film peut également prêter un croisement entre U-Turn (pour l'infortune sarcastique du héros et le cadre de l'environnement clairsemé dans lequel il évolue), Terreur extra-terrestre (pour la chasse à l'homme commanditée par un éventuel E.T) et Hitcher (pour la traque criminelle inlassable que le conducteur et les chasseurs se disputent sur bitume). Inquiétant et particulièrement prenant lorsque Sam s'efforce désespérément d'échapper régulièrement à la mort par le biais de sauvages affrontements que le réalisateur chorégraphie avec intensité, Nemesis aurait été encore plus original et détonnant s'il était un peu plus explicatif quant aux motifs imbitables de ses agresseurs en potentielle relation avec une origine extra-terrestre.


Assez captivant par son atmosphère envoûtante et l'intensité de son suspense progressif, Nemesis respecte ses aînés dans sa conception avisée de façonner un film d'ambiance horrifique hérité du cinéma des années 80. De par sa violence rugueuse, son style musical métronomique et le jeu expressif d'une victime à la fois pugnace et désorientée, Nemesis cultive un style percutant sous le pilier d'un road movie laconique, et ce avant de céder à la facilité d'une conclusion en demi-teinte plutôt déconcertante et moins convaincante. 

Bruno Matéï

vendredi 7 avril 2017

THE GIRL NEXT DOOR

                                                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com 

de Gregory M. Wilson. 2007. U.S.A. 1h35. Avec William Atherton, Blythe Auffarth, Madeline Taylor, Blanche Baker, Kevin Chamberlin.

Sortie Dvd France: 4 Décembre 2007. Salles U.S: 3 Octobre 2007.

FILMOGRAPHIE: Gregory M. Wilson est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur américain. 2012: Ghoul (TV Movie). 2007 The Girl Next Door. 2001 Home Invaders.


Les Enfants du Mal
D'après le roman éponyme de Jack Ketchum, The Girl next door s'est taillé au fil des années et d'un bouche à oreille (surtout dans l'hexagone où il fut notamment proscrit de nos salles !) une réputation de film d'horreur insoutenable dans son lot de tortures et sévices sexuels infligés sur une victime adolescente. Basé sur l'histoire vraie du meurtre de Sylvia Likens perpétré au cours des années 60, The Girl next door demeure un uppercut émotionnel si bien qu'il est impossible d'en sortir indemne. Sorte de Stand by me au vitriol par son ambiance nostalgique faussement sereine, anti-tortur'porn par excellence, Gregory M. Wilson n'a pas ici pour ambition de divertir et de surenchérir une violence sardonique ou cartoonesque (ce que la saga Saw s'est rapidement tolérée au fil de ces opus mercantiles) mais au contraire de provoquer malaise et dégoût lorsqu'une mégère psychotique parvient à endoctriner chez son entourage infantile l'enseignement du châtiment punitif auprès de sa jeune nièce un peu trop arrogante. Cette dernière embrigadée et attachée dans une cave devenant le souffre-douleur de leurs exactions putassières, et ce jusqu'à ce que mort s'ensuive. D'ailleurs, l'affaire authentique fut autrefois nommée dans les journaux comme "pire crime perpétré contre une personne dans l'histoire de l'Indiana".


Si The Girl next door parvient autant à éprouver et déranger de manière aussi viscérale que cérébrale, il le doit à son réalisme cru jamais complaisant (le réal privilégiant la suggestion en se focalisant surtout sur les hurlements et gémissements insupportables que la victime endure) et aux profils éhontés des agresseurs infantiles impliqués dans une connivence depuis l'influence d'une matriarche leur prodiguant la haine contre la gente féminine. Traitant frontalement de l'instinct pervers enfoui dès notre plus jeune âge et d'une pédagogie maternelle fondée sur le machisme et la misogynie, The Girl next door provoque l'affliction face à notre témoignage démuni de spectateur voyeur contraint d'observer les pires humiliations et souffrances corporelles exercées (la plupart du temps) par des mioches fascinés par la souffrance. D'où notre sentiment extrême de malaise diffus face à leur complicité phallocrate inscrite dans un jeu de débauche et de soumission. Bouleversant jusqu'aux larmes quant à la fragilité de la victime épuisée par la douleur et terriblement étouffant par son climat irrespirable, The Girl next door renvoie à notre image spectrale tapie dans l'ombre. Dans le sens où un monstre enfoui en chacun de nous peut s'y extraire à l'occasion d'une dynamique de groupe prête à expérimenter l'interdit en laissant libre court à leurs pulsions immorales.


Un électro-choc hautement éprouvant jusqu'aux larmes de la délivrance
En dépit de son aspect télé-film, The Girl next door constitue une épreuve de force morale d'une intensité horrifico-dramatique à la limite du supportable quant aux séquences les plus scabreuses (à l'instar du frère cadet suppliant sa mère de lui laisser violer sa propre soeur !). Le chemin de croix d'une ado martyr sacrifiée par sa communauté à la fois familiale et amicale quand bien même la perte de l'innocence les mènera jusqu'au bout des ténèbres. Un film monstre au sens étymologique laissant derrière nous de profondes cicatrices morales après visionnage. 
Pour public averti.

P.S: A découvrir impérativement en VOSTFR, l'impact n'en sera que beaucoup plus rigoureux !

Bruno Dussart.
2èx

jeudi 6 avril 2017

THE FULL MONTY

                                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Peter Cattaneo. 1997. Angleterre. 1h30. Avec Robert Carlyle, Tom Wilkinson, Mark Addy, William Snape, Steve Huison, Paul Barber, Hugo Speer

Sortie salles France: 22 Octobre 1997. Angleterre: 29 Août 1997

FILMOGRAPHIEPeter Cattaneo est un réalisateur, scénariste, producteur et monteur britannique, , né le 30 novembre 1964 à Twickenham (Grand Londres) en Angleterre. 1990 : Dear Rosie. 1992 : Say Hello to the Real Dr Snide (TV). 1993 : Teenage Health Freak. 1995 : Loved Up (TV). 1997 : The Full Monty. 2001 : Lucky Break. 2005 : Le Secret de Kelly-Anne. 2008: The Rocker.


Gros succès public et critique à travers le monde comme le souligne notamment sa pléthore de récompenses (voir en fin d'article), Full Monty demeure un miracle de comédie anglaise par sa grande simplicité à exploiter les thématiques du courage, de la camaraderie et de la gagne sous le pivot d'un spectacle de streap tease. Séparé de sa femme et s'efforçant de préserver l'amitié avec son fils, Gaz va tenter en dernier ressort de monter un spectacle de chipendales avec sa troupe d'acolytes communément frappés par la crise du chômage. Au fil d'un cheminement indécis, car partagés entre le doute et la crainte de l'échec, l'espoir et le désir de réussite, ils s'entraînent à danser au sein des hangars abandonnés dans un élan de fraternité. 


Hymne au goût du risque, au dépassement de soi et à la cristallisation de nos rêves les plus improbables, Full Monty alterne drôlerie et tendresse avec une belle homogénéité sous l'impulsion de protagonistes très attachants car humainement aussi fragiles que modestes. Victimes de la routine du chômage au sein de leur bourgade sinistrée et plombés par le pessimisme, ces derniers vont pour autant tenter de récupérer leur dignité et leur confiance grâce à l'utopie de leur leader gagné par une ambition saugrenue. Le but de ce dernier étant notamment de façonner ce show érotique afin de regagner l'assurance de son fils ballotté par la séparation conjugale. Truffé de séquences intimistes autour des tensions entre couples et de l'amour parental, Full Monty cultive l'empathie sous l'impulsion de situations cocasses constamment irrésistibles. De par le talent des interprètes criants de naturel dans leur fonction novice de streapteseur s'en donnant à coeur joie dans les postures décomplexées, et par l'invention des gags où le ridicule du contexte n'a pas lieu d'être lorsque ces derniers parviennent à transcender leur timidité ! Regorgeant de tubes entraînants aussi frais que sémillants durant leurs danses chorégraphiques, Full Monty distille bouffées d'air frais et énergie positive auprès de ses prolétaires en voie d'affirmation.


Un merveille de tendresse et de cocasserie comme seuls les anglais ont le secret si bien que 20 ans plus tard Full Monty a gagné son galon de classique du genre avec l'appui de son mémorable final riche en émotions. 

Dédicace à Célina trinci.
Eric Binford.
3èx

Récompenses: Festival du film britannique de Dinard 1997: Hitchcock d'or et Prix du public
Prix du cinéma européen 1997 : People's Choice Award du meilleur film européen
BAFTA Awards 1998: Meilleur film. Meilleur acteur pour Robert Carlyle. Meilleur acteur dans un second rôle pour Tom Wilkinson.
Brit Awards 1998 : meilleure bande originale
David di Donatello 1998 : meilleur film étranger
Empire Awards 1998 : meilleur film britannique
Prix Goya 1998 : meilleur film européen
Oscars 1998 : meilleure musique de film pour Anne Dudley
Screen Actors Guild Awards 1998 : meilleure distribution

mardi 4 avril 2017

MELODIE POUR UN MEURTRE

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

"Sea of Love" de Harold Becker. 1989. 1h53. Avec Al Pacino, ,Ellen Barkin, John Goodman, Michael Rooker, Richard Jenkins, John Spencer, Paul Calderon, William Hickey.

Sortie salles France: 10 janvier 1990. U.S : 15 septembre 1989.

FILMOGRAPHIE: Harold Becker est un réalisateur et producteur américain né le 25 septembre 1928 à New York, dans l'État de New York (États-Unis). 1972 : The Ragman's Daughter. 1979: Tueurs de flics. 1980 : The Black Marble. 1981: Taps. 1985: Vision Quest. 1987: La Gagne. 1988: État de choc. 1989: Mélodie pour un meurtre. 1993: Malice. 1996: City Hall. 1998: Code Mercury. 2001: L'Intrus.


Tourné en pleine vogue du thriller érotique initié par Liaison Fatale, Mélodie pour un meurtre demeure aussi intense et captivant sous l'impulsion galvanisante du duo Al Pacino/Ellen Barkin. L'intrigue à suspense tournant autour de leur étreinte passionnelle avec une efficacité parfaitement huilée. Après avoir répondu à une annonce de rencontres, deux hommes sont retrouvés sauvagement assassinés dans leur chambre dans une posture soumise. Fraîchement divorcé, l'inspecteur Frank Keller se fait passer pour un coeur à prendre par le biais des annonces locales afin d'appréhender la potentielle misandre. Alternant suspense et romance passionnelle avec une alchimie infaillible, Mélodie pour un meurtre est un jubilatoire jeu de dupe et de manipulation lorsqu'un flic alcoolique tente d'alpaguer l'assassin après s'être laissé séduire par la présumée coupable. Gaffeur et littéralement compromis par l'amour de ses sentiments, Frank Keller ne sait plus où donner de la tête dans sa paranoïa progressive à déceler l'intégrité ou la culpabilité de sa partenaire par l'entremise d'indices préjudiciables !


Jouant sur l'éventuelle responsabilité de cette ardente aguicheuse, l'intrigue parvient jusque dans sa dernière partie à nous faire douter de sa véritable identité au rythme d'une mélodie entêtante. Et pour renforcer la crédibilité de ce couple fusionnel, le réalisateur aura pris soin de nous familiariser à leur interaction sentimentale du point de vue dubitatif du flic contrarié tentant à moult reprises de se racheter une conduite après ses vaines appréhensions. Totalement impliqué dans son rôle de faux dragueur en filature, Al Pacino porte le film sur ses épaules avec une spontanéité indéfectible si bien que sa présence magnétique crève l'écran à chaque seconde parmi la maladresse de ses sentiments contradictoires. Quand bien même l'électrisante Ellen Barkin lui dispute la vedette avec une force d'esprit et un raffinement lubrique ensorcelants. A l'instar de leurs deux étreintes charnelles qu'Harold Becker filme lestement avec une sensualité audacieusement sulfureuse ! Outre sa passionnante étude de caractères que transfigurent respectivement Pacino / Barkin envoûtés par leur rôle, Mélodie pour un meurtre ne manque jamais d'humour pour détendre l'atmosphère anxiogène. Et ce sans la gratuité de situations convenues et en instaurant une tension latente autour de leurs échanges sentimentaux. Les situations irrésistiblement cocasses s'enchaînant souvent au profit de la posture angoissée de Frank parvenant difficilement à brider ses émotions lorsqu'il pense se mesurer à l'assassin !


Sous couvert de thriller à suspense solidement mis en scène et interprété, Mélodie pour un meurtre se permet d'y greffer une histoire d'amour intense où passion, paranoïa, suspicion, trahison et jalousie n'auront de cesse de ballotter le couple en perdition avant d'y démasquer le véritable coupable. Un des meilleurs thriller des années 80 qui aura notamment permis de relancer la carrière du monstre sacré Pacino !

Bruno Dussart
3èx 

lundi 3 avril 2017

CUBE. Grand Prix Gérardmer, 1999.

                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Vincenzo Natali. 1997. Canada. 1h30. Avec David Hewlett, Julian Richings, Maurice Dean Wint,
Nicole de Boer, Nicky Guadagni, Andrew Miller.

Sortie salles France: 28 avril 1999.

FILMOGRAPHIE: Vincenzo Natali est un réalisateur, scénariste et producteur canadien, né le 6 janvier 1969 à Détroit, dans l'État du Michigan aux États-Unis. 1997: Cube. 2002: Cypher. 2003: Nothing. 2009: Splice. 2013: Haunter.


Honoré chez Gérardmer avec trois récompenses dont celui du prestigieux Grand Prix, Cube est une petite série B bougrement efficace n'ayant rien à envier à un épisode de la 4è Dimension. Emprisonnés dans de grands cubes mobiles pour une raison méconnue, 6 personnes au profil distinct s'interrogent sur leur sort avant de tenter de s'y extraire avec courage, détermination et perspicacité. Un pitch simpliste mais bougrement original que Vincenzo Natali parvient à mettre en boite avec autant d'astuces narratives que de soin formel. Ce dernier relançant l'action et les enjeux de survie dans de multiples directions que nos survivants arpentent sous les consignes d'une éminente mathématicienne. Car dans Cube, il faut faire preuve de sens déductif pour tenter de s'extirper de la prison dont les chiffres inscrits sur chaque porte d'entrée ont une importance capitale afin de contrecarrer les éventuelles chausses-trappes !


Fascinant, de par son décorum insolite particulièrement immersif et par la diversité des cages de métal aux éclairages fluctuants, Vincenzo Natali parvient aisément à nous égarer dans son univers hermétique aux confins de la science-fiction. Car jouant sur ce dépaysement inédit surgi de nulle part et sur l'aspect abyssal d'une vue externe, Cube interroge le spectateur quant à son origine et l'identité de ses créateurs tirant les ficelles avec une diabolique machination. Le film n'hésitant pas en prime à recourir à une violence cruelle quant aux affrontements psychologiques et musclés que se disputent les détenus au lieu de préconiser la concertation. D'où un sentiment d'insécurité permanent émanant de leur dissension morale et de leurs risques à tester des épreuves diaboliques fondées sur la dialectique des nombres premiers et des facteurs. Conçu comme un jeu macabre pour la survie, l'intrigue n'est donc qu'un prétexte pour à nouveau vilipender l'individualisme de l'homme compromis par la peur et la panique de trépasser. En l'occurrence, c'est par la cause d'un flic aussi sournois que sans vergogne que le groupe va peu à peu se dissoudre avec une déveine opiniâtre. Le réalisateur clôturant notamment son intrigue par une conclusion à la fois pessimiste et équivoque, et ce sans nous dévoiler les tenants et aboutissants de cette conspiration sans visage.


Par l'entremise de son climat anxiogène perméable instauré au coeur d'un huis-clos cauchemardesque et grâce au jeu convaincant des comédiens de seconde zone au caractère bien trempé, Cube insuffle fascination et dérision sardonique au rythme de rebondissements habiles faisant appel à l'intelligence des compétiteurs. 

Eric Binford.
3èx

Récompenses: Festival international du film de Toronto 1997 : Prix du Meilleur Premier Film Canadien.
Festival de Gérardmer Fantastic'Arts 1999 : Grand Prix, Prix de la Critique et le Prix du Public

dimanche 2 avril 2017

THIS IS US


de John Requa, Glenn Ficarra, Ken Olin, George Tillman, Craig Zisk, Silas Howard, Sarah Pia Anderson, Uta Briesewitz, Helen Hunt, Aurin Squire, Chris Koch, George Tillman Jr., Wendey Stanzler.
Distribution : Milo Ventimiglia, Mandy Moore, Sterling K. Brown, Chrissy Metz, Justin Hartley, Susan Kelechi Watson, Chris Sullivan, Ron Cephas Jones, Jon Huertas, Sam Trammell, Denis O’Hare…
Genre : Drame/Comédie. 2016.
Diffusion en France : Canal + Séries
Nombre d’épisodes : 18
Note: 5/5

Le Pitch :
Il y a dans le monde environ 18 millions d’êtres humains qui partagent la même date d’anniversaire. Des personnes comme Jack, Kate, Kevin et Randall, qui, entre New York et Los Angeles, mènent leur existence en tentant de faire les bons choix, malgré les difficultés qui peuvent s’imposer. Jack et Rebecca s’apprêtent à devenir parents de triplés. De son côté, Kevin tente de donner une nouvelle direction à sa carrière de comédien, tandis que sa sœur Kate, l’aide du mieux qu’elle peut, tout en se débattant avec des problèmes personnels qui l’empêchent de pleinement s’épanouir. Randall pour sa part, père d’une famille en apparence parfaite, part à la recherche de ses origines…

                                 
                                                   Une chronique de Gilles Rolland

LA CRITIQUE DE LA SAISON 1 DE THIS IS US :
Portée par Dan Fogelman, un fidèle des studios Disney ayant notamment bossé sur les scripts de Raiponce et de Cars, This Is Us a également pu compter, dès le début de son développement, sur les réalisateurs John Requa et Glenn Ficarra, quant à eux célèbres pour avoir emballé l’excellent Crazy, Stupid, Love. Une série dont la première saison ne devait compter que 13 épisodes. Un nombre revu à la hausse très rapidement, après la diffusion sur NBC du pilote, qui augura d’un succès qui ne s’est par la suite jamais démenti, encourageant même les producteurs à renouveler le show pour une seconde et une troisième saison. Une excellente nouvelle puisque autant dire qu’on parle ici de l’une des meilleures séries de ces dernières années…


ESPRIT DE FAMILLE
Le premier épisode de This Is Us repose sur un concept aussi simple qu’efficace. Voilà l’idée : dans le monde, plusieurs personnes partagent la même date d’anniversaire… C’est le cas de Jack, Kevin, Randall et Kate, qui évoluent dans des milieux différents et se débattent tous avec des problèmes qui nous permettent presque dès les premières minutes de nous identifier. Un pilote relativement incroyable, parfaitement écrit et ô combien touchant, qui donne non seulement le ton, mais impose aussi une virtuosité qui ne fera jamais défaut à la série pour ce qui est des épisodes suivants. Difficile de ne pas succomber. Tout s’imbrique parfaitement et on a beau avoir déjà vu mille fois ce genre d’histoire qu’on ne peut qu’être surpris par la fraîcheur que dégage This Is Us en une petite heure, posant les bases de quelque chose de très ambitieux mais aussi de profondément honnête et finalement universel. Difficile d’en dire plus sans déflorer l’intrigue. Ce qui serait dommage, même si on n’est pas chez Shyamalan non plus. Le truc, c’est qu’il faut se laisser porter par les personnages et leur histoire. Se laisser porter et se prendre une émotion à fleur de peau en pleine poire pour au final ressortir secoué et heureux. On serait au cinéma, le terme pourtant galvaudé feel good movie ne serait pas de trop, mais nous sommes à la télé et force est de reconnaître au showrunner et aux metteurs en scène Requa et Ficarra d’avoir su réussir leur entrée. Sans trop en faire, avec une sensibilité incroyable, forts d’un concept merveilleusement exploité.


C’EST LA VIE
La première saison de This Is Us parle tout simplement de la vie. Voilà qui ne nous avance pas vraiment hein ? Le problème encore une fois, est qu’ici, mieux vaut avancer à vue. Pour mieux se faire cueillir. Une chose est sûre : il y avait une éternité qu’un show télé estampillé comédie dramatique, n’avait pas réussi avec autant de pertinence et de respect pour ses téléspectateurs et ses personnages à imposer une osmose et une tonalité comme celle dont This Is Us fait preuve. À des millions de kilomètres des dramas fourrés à la guimauve et aux bons sentiments, la série de Fogelman trouve le ton juste pour aborder des sujets plus ou moins graves. Preuve que la qualité de l’écriture change tout. Peu importe les thématiques qu’on souhaite aborder, l’important est de savoir le faire sans céder à la facilité ni à l’excès. L’exercice est périlleux et chaque épisode de This Is Us apporte la preuve d’un réel génie, qui jamais ne déraille. Franchement, c’est éblouissant du début à la fin. On passe du rire aux larmes en un clin d’œil, on réfléchit, on s’attache… Immersive, l’histoire est de plus remarquablement construite, n’hésitant pas à jouer sur les flash-backs et autres astuces scénaristiques pour offrir aux protagonistes de solides backgrounds, mais toujours avec ce sens de la mesure en l’occurrence porté par une volonté de bien faire.
Au final, au terme de ces 18 incroyables épisodes, un constat s’impose : This Is Us fait souffler un vent de fraîcheur sur un genre qui ne demandait que ça.

                                        

FAMILY VALUES
Les acteurs tiennent forcément une grande part de responsabilité dans la flamboyante réussite de la série. Qu’ils soient connus, comme Mandy Moore (Entourage), Sterling K. Brown (American Crime Story), Chris Sullivan (The Knick, Stranger Things) ou Milo Ventimiglia (Heroes, Rocky Balboa), ou plus confidentiels comme Chrissy Metz, Justin Hartley, Susan Kelechi Watson, tous œuvrent pour la bonne marche d’un récit au sein duquel ils trouvent de multiples occasions de briller. This Is Us est une œuvre chorale. Un peu dans le ton d’un Love Actually, mais sur la longueur d’une vie entière car non centrée sur un événement en particulier. Si le point de départ est l’anniversaire de plusieurs des personnages clés du récit, la suite va plus loin et explore des thématiques fortes. Combien de séries TV ont-elle par exemple abordé avec autant de justesse et de pudeur l’obésité ? Cherchez bien, vous n’en trouverez pas beaucoup. Dans un paysage télévisuel où règnent toujours des canons de beauté persistants hérités des années 80, This Is Us ose aller plus loin et mettre en avant des problématiques que le petit écran réserve habituellement au show à sensations de la télé-réalité. Pareil quand la série parle de l’adoption, de la maternité, de la paternité, du couple ou des rapports parfois difficiles entre frères et sœurs. La somme des sujets traités est au moins aussi impressionnante que la réussite dont le scénario fait preuve quant il s’agit de retranscrire des émotions dans lesquelles il est facile de se reconnaître, faisant in fine de This Is Us une œuvre très galvanisante et bienfaisante.
Il est aussi fou de voir à quel point celle-ci parvient à émouvoir en quelques images, avec une poignée de mots bien choisis, grâce au jeu sans faille des comédiens. Un seau de larmes par épisode, c’est un peu le deal que la chaîne NBC a passé avec son audience sans le prononcer tout haut. Le tout sans que This Is Us ne force le trait où ne tombe dans une mièvrerie opportuniste, c’est important de le souligner. En plus c’est passionnant ! Du début à la fin, à l’image d’œuvres comme Urgences qui sous couvert de concepts identifiables, se payait le luxe d’aller plus loin dans l’observation des rapports humains. De la première à la dernière minute, on ne cesse d’être surpris, même quand l’histoire est bien installée et qu’on pense en avoir saisi les ressors. Sans cesse en mouvement, cette série parfaite, fait plus que remplir son office. C’est une ode à la vie, à l’amour, à l’amitié et à toutes ces choses qui font que la vie mérite d’être vécue.


En Bref…
Véritable miracle télévisuel, This Is Us commence très fort avec une première saison en forme de K.O. pur et simple. Maîtrisé sur le fond et la forme, ce show surprenant jouit en outre de l’apport d’un casting en or massif, qui finit de l’imposer d’ores et déjà comme l’une des meilleures choses qui soient arrivées au petit monde des séries TV. Si les saisons suivantes sont du même acabit, nous ne sommes pas au bout de nos émotions.

@ Gilles Rolland

Bruno Matéï: Une diatribe contre la concurrence financière, une leçon de vie d'une rare pudeur et subtilité, une purification spirituelle, une subtile méditation sur l'acceptation du deuil, un apprentissage à la sagesse et à l'acceptation de soi qui peuvent transfigurer notre vision des choses et notre mentalité si on s'y donne les moyens. Une ode à l'amour conjugal et à sa grande fragilité si nous nous laissons menés par nos sentiments, un hymne à la famille et à la fraternité pour l'une des plus belles et déchirantes séries dramatiques au monde ! Les larmes coulant naturellement, souvent sans prévenir, et ce du second épisode jusqu'à l'ultime conclusion laissée en suspens. Un chef-d'oeuvre télévisuel touché par la grâce qui unifie les coeurs sous l'impulsion plus vraie que nature d'un casting au diapason. Croyez moi sur parole, et à l'instar de Six Feet Under (dont les thèmes sont assez similaires), vous n'oublierez jamais de votre existence This Is Us ! C'est dire les enseignements existentiels que cette série antidépressive nous rappelle avec une sensibilité "éthérée" à fleur de peau.

En savoir plus sur http://www.onrembobine.fr/series-tv/critique-this-is-us-saison-1/#18DEae0LY8QA8zuK.99

vendredi 31 mars 2017

LION

                                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site zickma.fr

de Garth Davis. 2016. Australie/U.S./Angleterre. 1h58. Avec Dev Patel, Rooney Mara, Nicole Kidman, David Wenham, Abhishek Bharate

Sortie salles France: 22 Février 2017. U.S: 25 Novembre 2016

FILMOGRAPHIE: Garth Davis est un réalisateur australien.
2006: Love my way (3 épisodes). 2013 : Top of the Lake (4 épisodes). 2016 : Lion


Tiré d'une histoire vraie (comme le souligne le déchirant générique de fin qui voit intervenir les principaux témoins de la famille Brierley), Lion retrace avec pudeur et retenue l'odyssée humaine de Saroo. Un enfant indien qui fut séparé de son frère dès l'âge de 5 ans après s'être assoupi dans le compartiment d'un train. Issue d'une région précaire où la misère règne en maître, son frère aîné s'était envisagé le soir de sa disparition de trouver du travail à proximité d'une ville urbaine. Seulement, sous les supplications du petit Saroo avide d'aventures et de nouvelles découvertes, il décida de l'emmener en dépit de son trop jeune âge. A partir de cette situation ardue d'abandon et de solitude où percera force et courage, Garth Davis en extrait un conte moderne d'une intensité dramatique bouleversante, et ce sans céder au misérabilisme bon marché. Illuminé par la prestance de Sunny Pawar époustouflant de naturel en force de la nature, Lion émeut durablement parmi la subtilité d'une mise en scène entièrement dédiée à son profil caractériel. Le cinéaste décrivant de prime abord ses errances urbaines à hauteur d'enfant, avec souci d'authenticité et de pudeur. Par le biais de brèves séquences psychologiquement éprouvantes mais jamais sirupeuses, il nous alerte sur la condition désoeuvrée de ces vagabonds infantiles livrés à eux mêmes dans une métropole hostile où les disparitions s'avèrent monnaie courante (80 000 par an nous énoncera le générique final). Ce qui engendre inévitablement l'exploitation des enfants à des fins cupides, sexuelles ou crapuleuses.


La seconde partie, toute aussi humaniste et pleine de fragilité, prend son temps à dépeindre la nouvelle condition morale de Saroo aujourd'hui devenu adulte. Adopté par un couple australien depuis une vingtaine d'années parmi la compagnie d'un autre enfant indien autrement instable et irascible, Saroo est toujours plus hanté par son passé meurtri en dépit de l'amour et de l'éducation que ses parents adoptifs ont su lui enseigner. Sans nouvelles de sa famille depuis le soir de sa disparition, il décide alors d'emprunter un parcours du combattant par le biais de la technologie moderne d'internet. Indécis mais aussi désespéré de ne pouvoir retrouver son foyer exilé à des milliers de kilomètres, Saroo se réfugie dans le mutisme et la solitude au mépris de l'affection de sa petite amie et de ses nouveaux parents. Si le cinéaste s'attarde longuement à dépeindre son désordre moral et sa quête investigatrice à retrouver les siens par le truchement de "Google Earth", c'est pour mieux nous familiariser avec son éprouvante attente de longue haleine (les mois et années défilant au ralenti !) avant l'éventuelle retrouvaille de la rédemption. Récompensé du Meilleur Acteur de second rôle au British Academy Film Awards, Dev Patel insuffle une prestation lestement dépouillée dans sa torture psychologique où angoisse et détresse se télescopent mutuellement avant l'entrée en matière d'un potentiel espoir. Par son regard candide plein de sagesse et d'humanité, il transmet au spectateur une émotion prude qui atteindra son apogée lors d'un épilogue d'une vive sensibilité. Quant au retour de Nicole Kidman, l'actrice insuffle une humble maturité dans sa fonction de mère adoptive où s'entremêlent pour autant les sentiments contradictoires d'optimisme et d'aigreur.


Formellement dépaysant au sein d'une nature indienne étrangement sereine, humainement fragile et sensible sous l'impulsion d'un itinérant en quête de retrouvaille familiale, Lion constitue un hommage bouleversant (pour ne pas dire déchirant quant à sa conclusion incandescente !) à ses enfants des rues sous le pivot d'une incroyable histoire d'amour entre deux frères et leur génitrice.

Bruno Dussart.

Récompenses: British Academy Film Awards 2017 :
Meilleur acteur dans un second rôle pour Dev Patel
Meilleur scénario adapté