mercredi 11 octobre 2017

37°2 LE MATIN

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

de Jean Jacques Beinex. 1986. France. 1h56/3h01. Avec Jean-Hugues Anglade, Béatrice Dalle, Gérard Darmon, Consuelo de Haviland, Clémentine Célarié, Jacques Mathou, Claude Aufaure.

Sortie salles France: 9 Avril 1986 (Int - de 16 ans)

FILMOGRAPHIE: Jean-Jacques Beineix, né le 8 octobre 1946 à Paris est un réalisateur, dialoguiste, scénariste et producteur de cinéma français. 1977 : Le Chien de M. Michel (court-métrage). 1980 : Diva. 1983 : La Lune dans le caniveau. 1986 : 37°2 le matin. 1989 : Roselyne et les Lions. 1992 : IP5 : L'île aux pachydermes. 2001 : Mortel transfert


Film culte de la génération 80 ayant rassemblé plus de 3,6 millions de spectateurs en salles, 37°2 le Matin demeure aujourd'hui une légende cinéma français sous l'impulsion d'un couple d'acteurs au diapason (alors qu'il s'agit de la toute première apparition de Béatrice Dalle du haut de ses 22 ans !) et d'un réalisateur aussi bien ambitieux, qu'inventif et audacieux à retranscrire sa fureur de vivre contemporaine. Ce dernier nous d'illustrant avec une fulgurance onirique et un parti-pris baroque la tragédie romantique de Zorg et Betty communément épris de passion dévorante dans une désinvolture outrancière (et donc sans modération !) au point d'y perdre la raison. Betty, trop jeune et instable, émotive et si fragile sombrant peu à peu Spoil ! dans une démence irrécupérable à la suite d'un tragique incident maternel Fin du Spoil. Comédie bipolaire dans sa palette d'émotions dichotomiques oscillant drôleries décalées et dramaturgie impermanente, 37°2 le Matin distille un vent de fraîcheur et de liberté sémillants au travers des escapades sentimentales de Zorg et Betty livrés à nu (aussi bien d'un ordre corporel que moral) face à une caméra elle-même gagnée par l'ivresse de leurs désirs !


D'un réalisme cru auprès des sautes d'humeur, caprices et crises d'hystérie que Béatrice Dalle insuffle avec instinct viscéral et névralgie troubles, le climat sensiblement ombrageux régi autour du couple dérange et fascine de manière sensitive si bien que l'actrice habitée par son rôle anxiogène nous immerge en interne de ses intimes contrariétés avec une acuité à la limite du supportable (du moins chez le public le plus fragile, son interdiction aux moins de 16 ans étant à mon sens justifiée lors de sa sortie). Outre la prestance écorchée vive des acteurs plus vrais que natures et souvent filmés dans leur plus simple appareil au sein de leur quotidienneté oisive et insouciante (et ce sans se livrer à un voyeurisme complaisant !), 37°2 le Matin fait voler en éclat les codes du genres avec un brio auteurisant adepte des ruptures de ton. Celui de la maîtrise de Jean Jacques Beinex extrêmement scrupuleux et inspiré à contempler l'évolution du couple fusionnel et de nous chavirer à travers leurs ébats aussi torrides que pétulants lors d'un maelstrom d'émotions dont la mise en scène folingue et énergique semble animée par la même fougue passionnelle de ces amants maudits.


La légende de Zorg et Betty
Furieusement érotique, drôle et décalé, voir par moments hilarant (notamment au niveau des personnages secondaires particulièrement exubérants - explosif boute-en-train Gérard Darmon ! - ), débridé et truffé d'insolence (noire), puis cédant en alternance et de manière progressive à une dramaturgie susceptible sans se prêter à une caricature prévisible, 37° 2 le Matin est touché par la grâce de Jean-Hugues Anglade (même s'il s'avère un chouilla moins convaincant lors des passages les plus graves) et surtout de la divine Béatrice Dalle littéralement ensorcelante de naturel, de pureté et de beauté fringante; et ce avant de nous anéantir la raison lors de sa déliquescence mentale en perdition. Du grand cinéma fantasque et poétique aussi bien épuré que burné car nous transfigurant une romance vitriolée à fleur de peau sous l'impulsion d'un des plus beaux couples du cinéma marginal ! Inoubliable et terriblement éprouvant au point de le vivre comme un traumatisme personnel.    

A Aurélie.
Bruno Dussart.
4èx

Récompenses:
Festival des films du monde de Montréal 1986 : Grand Prix des Amériques et prix du film le plus populaire du festival
Césars 1987 : meilleure affiche pour Christian Blondel, avec un portrait de Béatrice Dalle, réalisé par le photographe Rémi Loca
Prix 1987 de la société des critiques de Boston : meilleur film en langue étrangère
Festival international du film de Seattle 1992 : prix Golden Space Needle du meilleur réalisateur (également décerné pour IP5)

mardi 10 octobre 2017

LA PLANETE DES SINGES: SUPREMATIE

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site allocine.fr

"War for the Planet of the Apes" de Matt Reeves. 2017. U.S.A. 2h20. Avec Andy Serkis, Woody Harrelson, Judy Greer, Karin Konoval, Steve Zahn, Toby Kebbell.

Sortie salles France: 2 Août 2017. U.S: 14 Juillet 2017

FILMOGRAPHIE: Matt Reeves est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 27 Avril 1966 à Rockville Centre (Etats-Unis). 1993: Future Shock (segment "Mr. Petrified Forrest"). 1996: Le Porteur. 2008: Cloverfield. 2010: Laisse moi entrer. 2014: La Planète des Singes: l'Affrontement.


Dernier chapitre de la seconde franchise de la Planète des Singes, La Planète des singes: Suprématie relate, comme le laissait supposer la conclusion de sa 2è partie, l'épineux conflit que vont se disputer à nouveau un groupe d'humains et les singes repliés dans une immense forêt. A savoir César et ses fidèles acolytes rapidement pris à parti contre le despotisme du colonel McCullough à la tête d'une armée belliqueuse dénuée de vergogne. Toujours réalisé par Matt Reeves (responsable du second volet), celui-ci adopte aujourd'hui une mise en scène plus posée et autrement ambitieuse dans son souci circonspect de mettre en place l'intrigue et ses personnages sous le pilier d'une densité psychologique aussi intense que poignante. Tant auprès de la caractérisation fébrile mais aussi fragile de César en proie à la soumission et au venin de la haine (au point d'en faire une vengeance personnelle et de se résoudre à la solitude afin de préserver les siens !), que du colonel McCullough avide d'éradiquer les singes et donc d'asseoir sa réputation notable auprès de ses sbires impliqués dans un contexte (extrêmement précaire) de survie d'humanité.


Prenant son temps à planifier les bases de son intrigue à travers un cheminement d'errance que César et quelques comparses sillonnent de prime abord au coeur d'une nature réfrigérante (les images photogéniques distillent un dépaysement onirique parmi de vastes étendues enneigées et d'un panorama montagneux), Matt Reeves crédibilise son univers dystopique et ses héros de chair et de sang avec une émotion poignante d'une sobriété épurée (les singes numérisés sont encore plus criants d'expression humaine qu'autrefois et la fillette rescapée qu'ils entraînent avec eux ne manque pas de maturité à travers son regard enfantin découvrant compassion et différence de l'autre !). Le film adoptant par son aspect dépouillé et grave un réalisme blafard au sein du paysage formaté du blockbuster grand public. Car à travers cet inépuisable enjeu de survie que se compromettent singes et humains, La Planète des singes: suprématie surprend par son climat sombre et cafardeux d'où pointe un sentiment de désespoir sous-jacent (mais toujours plus perméable, notamment à travers l'ambiguïté de César luttant contre sa dichotomie de la haine et de l'indulgence !). Tant et si bien que le récit âpre et tendu (notamment sa seconde partie plus cruelle quant à l'asservissement des singes faisant naître ensuite une stratégie d'évasion) ne fait qu'énoncer l'éternelle déchéance morale des guerres mondiales entraînant inévitablement dans leur déchéance criminelle des instincts de suprématie, d'intolérance, de haine et de racisme (notamment sous couvert de la loi du plus fort).


"Tout pouvoir est violence"
Grand spectacle épique à l'émotion aussi bien contenue que fragile (son final mélancolique laisse extraire un afflux émotionnel bouleversant !), La Planète des singes: Suprématie surprend par son parti-pris modeste et adulte (les scènes d'action impressionnantes ne se destinent pas à renchérir bêtement dans la gratuité car dépendantes des motivations des personnages) à mettre en exergue une bataille aussi bien physique que morale entre un colonel couard (au final honteux de son statut de "perdant" et de dictateur !) et un primate fourbu par la violence (contagieuse) d'un monde d'inégalité qu'il peine au final à en saisir le sens. De ce message de tolérance désespérée émane donc une conclusion fragile emprunte de lyrisme si bien qu'elle  laisse derrière nous un sentiment d'amertume d'une vibrante émotion quant à l'avenir indécis (pour ne pas dire insoluble de l'homme). Reste enfin en mémoire le visage meurtri (et flegme) de son porte-parole, une icone contemplative, un symbole humanitaire rongé par la peine: César.

Eric Binford

La chronique des 2 précédents volets:
Planète des singes, les origines: http://brunomatei.blogspot.com/2011/08/la-planete-des-singes-les-origines-rise.html
Planète des Singes: l'affrontement (l'): http://brunomatei.blogspot.fr/2014/08/la-planete-des-singes-laffrontement.html

lundi 9 octobre 2017

MA FEMME S'APPELLE REVIENS

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site cineclap.free.fr

de Patrice Leconte. 1982. 1h25. France. Avec Michel Blanc, Anémone, Xavier Saint-Macary, Christophe Malavoy, Catherine Gandois, Pascale Rocard, Michel Rivard.

Sortie salles France: 27 Janvier 1982

FILMOGRAPHIE: Patrice Leconte est un réalisateur, scénariste et metteur en scène français né le 12 novembre 1947 à Paris. 1971 : Blanche de Walerian Borowczyk (assistant réalisateur). 1976 : Les Vécés étaient fermés de l'intérieur. 1978 : Les Bronzés. 1979 : Les bronzés font du ski. 1981 : Viens chez moi, j'habite chez une copine. 1982 : Ma femme s'appelle reviens. 1983 : Circulez y a rien à voir. 1985 : Les Spécialistes. 1987 : Tandem. 1989 : Monsieur Hire. 1990 : Le Mari de la coiffeuse. 1991 : Contre l'oubli. 1993 : Tango. 1994 : Le Parfum d'Yvonne. 1995 : Lumière et Compagnie. 1996 : Ridicule. 1996 : Les Grands Ducs. 1998 : Une chance sur deux. 1999 : La Fille sur le pont. 2000 : La Veuve de Saint-Pierre. 2001 : Félix et Lola. 2002 : Rue des plaisirs. 2002 : L'Homme du train. 2004 : Confidences trop intimes. 2004 : Dogora : Ouvrons les yeux. 2006 : Les Bronzés 3. 2006 : Mon meilleur ami. 2008 : La Guerre des miss. 2011 : Voir la mer. 2012 : Le Magasin des suicides. 2014 : Une promesse. 2014 : Une heure de tranquillité.


Très loin de rivaliser avec ses précédentes réussites que formaient fougueusement Les Vécés étaient fermés de l'intérieur, Les Bronzés, Les bronzés font du ski et Viens chez moi, j'habite chez une copine; Ma femme s'appelle reviens est une comédie terriblement plate, bâclée et sans surprise, faute d'un scénario indigent qui ne raconte rien (ou pas grand chose). Le pitch s'étirant sur seule ligne: épris d'amitié, un jeune médecin et une photographe s'épaulent mutuellement à la suite de leur rupture conjugale difficilement gérable. Se rapprochant amoureusement, le couple finit toutefois par renoncer depuis le retour de l'ex amant de cette dernière. Rarement, voir jamais drôle (quelques scènes nous arrachent plutôt les sourires) et privilégiant un climat sentimental folichon, Ma Femme s'appelle reviens se repose essentiellement sur les épaules de Michel Blanc et d'Anémone formant spontanément un couple empoté aussi charmant qu'attendrissant. Et donc chez les nostalgiques des années 80, la comédie amiteuse reste pour autant agréable à suivre d'un oeil distrait.


Bruno Matéï

vendredi 6 octobre 2017

LA TRAVERSEE DE PARIS

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

de Claude Autant Lara. 1956. France/Italie. 1h20. Avec Jean Gabin, Bourvil, Louis de Funès, Jeannette Batti, Jacques Marin, Robert Arnoux, Georgette Anys.

Sortie salles France: 26 Octobre 1956

FILMOGRAPHIE: Claude Autant-Lara, ou Claude Autant, est un réalisateur français, né le 5 août 1901 à Luzarches et mort le 5 février 2000 à Antibes. 1931 : Buster se marie. 1931 : Le Plombier amoureux. 1932 : L'Athlète incomplet. 1933 : Ciboulette. 1937 : L'Affaire du courrier de Lyon (coréal). 1938 : Le Ruisseau (coréal). 1939 : Fric-Frac (coréal). 1940 : The Mysterious Mr Davis. 1941 : Le Mariage de Chiffon. 1942 : Lettres d'amour. 1943 : Douce. 1946 : Sylvie et le Fantôme. 1947 : Le Diable au corps. 1949 : Occupe-toi d'Amélie. 1951 : L'Auberge rouge. 1952 : Les 7 péchés capitaux. 1953 : Le Bon Dieu sans confession. 1954 : Le Blé en herbe. 1954 : Le Rouge et le Noir. 1955 : Marguerite de la nuit. 1956 : La Traversée de Paris. 1958 : Le Joueur. 1958 : En cas de malheur. 1959 : La Jument verte. 1960 : Les Régates de San Francisco. 1960 : Le Bois des amants. 1961 : Tu ne tueras point. 1961 : Le Comte de Monte-Cristo. 1961 : Vive Henri IV, vive l'amour. 1963 : Le Meurtrier. 1963 : Le Magot de Josefa. 1965 : Humour noir. 1965 : Journal d'une femme en blanc. 1966 : Nouveau journal d'une femme en blanc. 1967 : Le Plus Vieux Métier du monde. 1968 : Le Franciscain de Bourges. 1969 : Les Patates. 1973 : Lucien Leuwen (Serie TV). 1977 : Gloria.


Grand classique de la comédie française ayant cumulé à sa sortie plus de 4 893 174 entrées, La Traversée de Paris est l'occasion de réunir 3 monstres sacrés du cinéma d'après-guerre parmi lesquels Louis de Funès (dans un rôle éloquent mais assez discret il faut avouer), Bourvil et surtout Jean Gabin formant tous deux un duo impromptu aux caractères bien trempés. Tourné dans un noir et blanc étrangement expressionniste et envoûtant (on se croirait d'ailleurs parfois dans un vieux film d'épouvante de l'âge d'or !), l'action se situe durant l'occupation allemande en plein Paris (bien que la plupart des scènes furent tournées en studio !). Sous la houlette de l'épicier Jambier, Martin exerce un travail au noir, à savoir achalander de la viande chez un revendeur, de la rue Poliveau à la rue Lepic. Contraint de collaborer avec Grandgil, un inconnu abordé dans un café du coin, ils vont arpenter Paris la nuit avec sous leurs bras 4 valises contenant chacune de la viande de cochon. Entre prises de bec et échanges amicaux, un périple haletant s'ouvre à eux si bien que la police française et l'armée allemande opèrent en intermittence quelques rondes.


Comédie caustique traitant de l'illégalité du marché noir dans grave contexte de guerre mondiale, la Traversée de Paris empreinte le schéma du road movie "à pied" sous l'impulsion galvanisante de deux personnages que tout oppose. Bourvil endossant le faire-valoir avec crainte et contrariété, excès d'orgueil et de colère afin de tenter d'intimider son complice que l'impressionnant Jean Gabin incarne avec un tempérament volcanique. De par sa forte voix éraillée et sa corpulence aussi bien virile que râblée, ce dernier cumule brimades et jeux de manipulation entre son partenaire (et le fourbe Jambier) afin d'évaluer leur courage et leur force morale. Alternant les séquences burlesques par le biais d'affrontements psychologiques exubérants que se disputent fertilement Martin et Grandjil, avec d'autres moments plus sombres (notamment ce final soudainement alarmiste présageant le spectre d'exécutions sommaires), La Traversée de Paris affiche une facture atypique au sein du paysage français de la comédie des années 50. Claude Autant Lara parvenant intelligemment à gérer une structure narrative étonnante car d'autant plus subtile et finaude qu'elle n'y parait (notamment à travers le personnage si badin et manipulateur de Grandjil non exempt d'empathie envers son compère).


Dénonçant en filigrane l'hypocrisie, le profit et la lâcheté de certains "pauvres" dans un contexte de survie d'occupation allemande, ("ses salauds de pauvres" s'exprimera ironiquement à deux reprises Grandjil !), la Traversée de Paris utilise de manière aussi couillue qu'inopinée le ressort burlesque au sein d'un climat de peur, d'inquiétude et de tension sous-jacentes (ou autrement tangibles). Spoil ! Et ce juste avant de nous libérer de cette éventuelle charge dramatique pour y vanter les mérites d'une retrouvaille amicale aussi inventive que sémillante Fin du Spoil.

Bruno Dussart.
2èx

jeudi 5 octobre 2017

TANDEM

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Cinemapassions

de Patrice Leconte. 1987. France. 1h30. Avec Gérard Jugnot, Jean Rochefort, Sylvie Granotier, Julie Jézéquel, Jean-Claude Dreyfus, Ged Marlon, Marie Pillet, Albert Delpy.

Sortie salles France: 17 Juin 1987

FILMOGRAPHIE: Patrice Leconte est un réalisateur, scénariste et metteur en scène français né le 12 novembre 1947 à Paris. 1971 : Blanche de Walerian Borowczyk (assistant réalisateur). 1976 : Les Vécés étaient fermés de l'intérieur. 1978 : Les Bronzés. 1979 : Les bronzés font du ski. 1981 : Viens chez moi, j'habite chez une copine. 1982 : Ma femme s'appelle reviens. 1983 : Circulez y a rien à voir. 1985 : Les Spécialistes. 1987 : Tandem. 1989 : Monsieur Hire. 1990 : Le Mari de la coiffeuse. 1991 : Contre l'oubli. 1993 : Tango. 1994 : Le Parfum d'Yvonne. 1995 : Lumière et Compagnie. 1996 : Ridicule. 1996 : Les Grands Ducs. 1998 : Une chance sur deux. 1999 : La Fille sur le pont. 2000 : La Veuve de Saint-Pierre. 2001 : Félix et Lola. 2002 : Rue des plaisirs. 2002 : L'Homme du train. 2004 : Confidences trop intimes. 2004 : Dogora : Ouvrons les yeux. 2006 : Les Bronzés 3. 2006 : Mon meilleur ami. 2008 : La Guerre des miss. 2011 : Voir la mer. 2012 : Le Magasin des suicides. 2014 : Une promesse. 2014 : Une heure de tranquillité.


Comédie dramatique sur fond de road movie à la fois caustique et insolite au sein d'une campagne grisonnante, Tandem relate le déclin d'un animateur radio, Michel Mortez, et de son ingénieur du son, Rivetot, après avoir été communément licenciés de leur émission populaire (celle-ci réunissant 3 millions de fidèles depuis plus de 20 ans !). Surpris par cette décision fortuite, Rivetot décide de cacher la vérité à Michel trop susceptible d'encaisser pareille défaite. Réunissant à l'écran deux talents hors pair sous la houlette de l'éminent Patrice Leconte, Tandem souffle le chaud et le froid dans sa palette d'émotions fougueuses et dépressives. De par la prestance empathique d'un Jean Rochefort prodigieusement fringant, altier et exubérant mais dévoilant peu à peu son désagrément au fil de son introspection morale que le réalisateur exacerbe avec pudeur contenue (notamment par le biais du jeu de miroir et de sa solitude). On est d'ailleurs dubitatif à son statut de célibat endurci au point que ce dernier aurait-il préconisé une orientation homosexuelle faute de sa grande timidité envers les femmes ? La question reste à mon sens posée car le réalisateur joue sur cette ambiguité sexuelle lors de plusieurs échanges intimes qu'il approche auprès d'une inconnue et d'une connaissance "gay" qu'il décide ce soir là de repousser. Alors qu'un peu plus tard, lors d'une conversation téléphonique fantôme, son ami Rivetot sera témoin de la supercherie d'une vie conjugale inexistante ! Dans celui de l'adjoint prévenant, faire-valoir inépuisable, Gérard Jugnot lui partage ses services et son amitié avec une tendresse introvertie si bien que celui-ci s'efforce de préserver la célébrité de son ascendant avec une attention émue.


La rage de vivre chez une France profonde en discrédit. 
Hommage aussi bien sensible que mélancolique aux losers et à ces émissions populaires qu'une France profonde idolâtre en lieu et place d'ennui et de divertissement, Tandem y dresse au final le douloureux portrait d'une star déchue consciente d'avoir occulté une carrière autrement plus substantielle et méritante (Rivetot stupéfié d'apercevoir au domicile de Michel des centaines de livres ornant chaque pièce de l'appartement !). Sans jamais juger ce duo passionnel réputé comme obsolète, Patrice Leconte en sublime leurs portraits avec une fragilité démunie, et ce avant que la dignité et la tendresse d'une vibrante amitié ne s'y consolide en guise d'au-revoir. Soutenu par l'inoubliable tube Il Mio Rifugio de Richard Cocciante (spécialement écrit pour le film), Tandem développe une émotion bipolaire déroutante et rigoureuse (notamment de par sa mise en scène auteurisante qu'on a un peu de mal au départ à apprivoiser) au gré du cheminement initiatique de ces deux paumés avides d'amour, de réussite, de liberté et surtout de reconnaissance.

Bruno Matéï

mercredi 4 octobre 2017

VIENS CHEZ MOI J'HABITE CHEZ UNE COPINE

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinecomedies.com

de Patrice Leconte. 1981. France. 1h25. Avec Michel Blanc, Bernard Giraudeau, Thérèse Liotard,
Anémone, Sylvie Granotier, Marie-Anne Chazel, Béatrice Costantini, Gaëlle Legrand.

Sortie salles France: 28 Janvier 1981

FILMOGRAPHIE: Patrice Leconte est un réalisateur, scénariste et metteur en scène français né le 12 novembre 1947 à Paris. 1971 : Blanche de Walerian Borowczyk (assistant réalisateur). 1976 : Les Vécés étaient fermés de l'intérieur. 1978 : Les Bronzés. 1979 : Les bronzés font du ski. 1981 : Viens chez moi, j'habite chez une copine. 1982 : Ma femme s'appelle reviens. 1983 : Circulez y a rien à voir. 1985 : Les Spécialistes. 1987 : Tandem. 1989 : Monsieur Hire. 1990 : Le Mari de la coiffeuse. 1991 : Contre l'oubli. 1993 : Tango. 1994 : Le Parfum d'Yvonne. 1995 : Lumière et Compagnie. 1996 : Ridicule. 1996 : Les Grands Ducs. 1998 : Une chance sur deux. 1999 : La Fille sur le pont. 2000 : La Veuve de Saint-Pierre. 2001 : Félix et Lola. 2002 : Rue des plaisirs. 2002 : L'Homme du train. 2004 : Confidences trop intimes. 2004 : Dogora : Ouvrons les yeux. 2006 : Les Bronzés 3. 2006 : Mon meilleur ami. 2008 : La Guerre des miss. 2011 : Voir la mer. 2012 : Le Magasin des suicides. 2014 : Une promesse. 2014 : Une heure de tranquillité.


A peine remis des succès successifs des Bronzés et des Bronzés font du ski, le maître (néophyte) de la comédie populaire Patrice Leconte enchaîne en 1981 avec Viens chez moi j'habite chez une copine. Un vaudeville taillé sur mesure sous l'impulsion musicale du chanteur Renaud et d'un trio d'acteurs (de la vieille école si j'ose dire) au diapason ! Et le public de se ruer à nouveau en masse pour applaudir la colocation amiteuse entre un joyeux drille et un couple éminemment débonnaire. Amis de longue date, Daniel accepte d'héberger Guy dans son appartement après que ce dernier fut expulsé de son emploi de pompiste faute de vol. Impertinent et encombrant, Guy finit par semer la zizanie au sein du couple que menaient harmonieusement Daniel et Françoise. 


Un pitch simpliste, supra léger, que Patrice Leconte maîtrise pourtant avec un infaillible savoir-faire et une redoutable efficacité si bien que quelques décennies plus tard ce divertissement typiquement franchouillard n'a pas pris une mini ride ! De par la multitude de quiproquos et déconvenues que Guy enchaîne sans modération par son esprit de camaraderie taillé dans la désinvolture et la maladresse, et des instants de tendresse découlant au final de ces rapports houleux entre Daniel et Françoise. Michel Blanc crevant l'écran à chaque seconde dans celui de l'acolyte influençable aussi bien flâneur que fripon et donc redoublant de culot pour subvenir à sa survie et d'enchaîner par la même occasion les conquêtes sexuelles d'un soir (on notera sur son carnet de rencontres l'apparition hilarante de la comédienne Anémone en artiste de cirque égrillarde !). Quant au couple de prime abord adéquat que représentent Daniel et Françoise, l'excellent et regretté Bernard Giraudeau et la non mais séduisante (et beaucoup trop rare) Thérèse Liotard insufflent à l'écran une fraîcheur, une candeur et une spontanéité naturellement saillantes. Autant dire que ce trio pétri d'humanisme et de fourberie, d'esprit de solidarité et d'amitié déclenchent sourires, rires et bonne humeur au gré de mésaventures urbaines que Guy influence parmi la fâcheuse conséquence du larcin.


Oasis de fantaisie, de drôlerie et de cocasserie en roue libre (les minutes défilent à une vitesse d'omnibus au rythme de dialogues incisifs !), Viens chez moi j'habite chez une copine affiche un ton libertaire aussi bien tendre que charmant autour des conséquences du chômage et de la colocation, de l'amitié et de l'amour, de l'infidélité et la réconciliation. A revoir d'urgence pour témoigner notamment à nouveau de son irrésistible pouvoir de séduction que suscitent communément l'habileté de sa mise en scène ainsi que son sémillant casting ! (il s'agit d'ailleurs peut-être même du meilleur rôle de Michel Blanc ! ). Un vrai film "d'acteurs" en somme issus du café théâtre ! 

Bruno Dussart
2èx

mardi 3 octobre 2017

CA VA COGNER

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"Any Which Way You Can" de Buddy Van Horn. 1980. U.S.A. 1h55. Avec Clint Eastwood, Sondra Locke, Geoffrey Lewis, Ruth Gordon, John Quade, Roy Jenson, Bill McKinney, William O'Connell.

Sortie salles France: 25 Mars 1981. U.S: 17 Décembre 1980

FILMOGRAPHIEBuddy Van Horn est un cascadeur et réalisateur américain né le 20 août 1929. 1980 : Ça va cogner. 1988 : L'inspecteur Harry est la dernière cible. 1989 : Pink Cadillac.


"Signale, à droite !"

Reprenant les mêmes ingrédients que son modèle sous la houlette de Buddy Van Horn (James Fargo  ayant céder sa place), Ca va cogner ne déçoit pas si bien qu'il s'avère aussi réussi, voir même un chouilla plus drôle lorsqu'il s'agit de brocarder à nouveau la bande des motards férus de vengeance à appréhender leur ennemi juré, Philo. Comédie d'action aussi bien généreuse que tendre mais un peu moins bâtie sur le road trip, Ca va cogner continue de prôner les valeur de la camaraderie et l'entrain de la baston auprès de nos itinérants Philo et Lynn (rabibochés le temps d'une brève explication et d'une étreinte dans une grange !), Orville (Geoffrey Lewis, charismatique et plus vrai que nature en acolyte de longue date !), Sénovia (irrésistible Ruth Gordon en mémé bourrue !) et l'impayable orang-outang, Clyde. Victime d'un chantage auprès d'un combat de rue qu'il hésite à acquiescer alors que ses amis lui conjurent d'y renoncer, Philo est d'autant plus indécis lorsqu'il se lie d'amitié avec son rival, Elmo (campé par William O'Connell, inoubliable Falconetti de la série TV Le Riche et le Pauvre !). Un homme d'affaire réputé pour être un cogneur inégalable mais pour autant quelque peu réfractaire lorsqu'il s'agit de s'opposer à égal de soi. L'intrigue se clôturant par leur rencontre au sommet au gré d'un pugilat aussi violent qu'interminable, et ce sans trop ébranler les spectateurs les plus jeunes impliqué dans une aventure bonnard pétrie de simplicité et de sentiments.


Divertissement familial sans prétention donc car inscrit dans la décontraction, la réconciliation (celle des motards, de Lynn et d'Elmo auprès de Philo) et la bonhomie (en dépit d'une fortuite séquence de snuf animalier, affrontement complaisant entre un furet et un crotale !), Ca va cogner laisse comme empreinte une série B à la fois attendrissante et (gentiment) cocasse sous l'impulsion de comédiens fringants se prêtant au jeu de la déconnade dans une sérénité libertaire. 

Eric Binford.
2èx

lundi 2 octobre 2017

GERALD'S GAME

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site en.wikipedia.org

de Mike Flanagan. 2017. U.S.A. 1h43. Avec Carla Gugino , Bruce Greenwood, Carel Struycken, Henry Thomas, Kate Siegel.

Sortie TV Netflix: 29 septembre 2017

FILMOGRAPHIEMike Flanagan, né en 20 mai 1978 à Salem (Massachusetts), est un cinéaste américain. 2000 : Makebelieve. 2001 : Still Life. 2003 : Ghosts of Hamilton Street. 2006 : Oculus: Chapter 3 - The Man with the Plan. 2011 : Absentia. 2013 : The Mirror (Oculus). 2016 : Pas un bruit (Hush). 2016 : Before I Wake. 2016 : Ouija : les origines. 2017 : Jessie (Gerald's Game).


Thriller psychologique singulier de par son contexte de survie tout en intimité et son traitement surréaliste réservé aux états d'âmes de l'héroïne en proie aux hallucinations, Gerald's Game est un superbe portrait de femme que Mike Flanagan traite avec autant de dignité que de réalisme. La banalité du quotidien s'exprimant ici à travers une étouffante situation de claustration au sein du cadre exigu d'une chambre tamisée. Réunis dans un chalet le temps d'un week-end, un couple en perdition tente d'offrir un second souffle à leur déconvenue sexuelle. Menottée au lit en guise de jeu lubrique, Jessie éprouve rapidement un malaise quant au comportement ambigu, pour ne pas dire sado-maso  de son époux. Mais suite à un malaise cardiaque, celui-ci succombe laissant Jessie complètement démunie depuis l'entrave de ses menottes. Attiré par le sang du cadavre tombé sur le sol, un chien errant pénètre dans la chambre. 


Abordant le drame psychologique sous couvert de thriller horrifique émaillé de quelques séquences gores (les exactions du chien cerbère et surtout un acte sacrificiel à la limite du supportable) ou angoissantes assez éprouvantes (notamment l'apparition de - l'éventuelle - "faucheuse"), Gerald's Game traite du traumatisme infantile avec une émotion rigoureuse. Car traitant des thèmes sulfureux de la pédophilie et de l'inceste au sein d'une famille dysfonctionnelle, la réminiscence que nous relate l'héroïne hantée de culpabilité extériorise un climat malsain plutôt déroutant et dérangeant. De par la froideur de sa mise en scène privilégiant un ton austère (voir aussi onirique au gré d'une éclipse lunaire) sous l'impulsion d'un jeu d'acteurs très convaincant. D'ailleurs, habituée aux seconds-rôles durant la majorité de sa carrière, Carla Gugino porte le récit sur ses épaules avec une dimension humaine souffreteuse. De par sa situation de survie d'extrême urgence auquel les minutes sont comptées et ces hallucinations récurrentes laissant planer un soupçon de folie contagieuse. Entièrement dédié à sa caractérisation fébrile et désorientée, le récit aride met en image ses pensées morales par le principe des fantômes de son esprit. Son défunt mari apparaissant régulièrement pour tenter de l'aiguiller ou de la contredire face à ses doutes et erreurs, quand bien même le double d'elle même tente de la rappeler au raisonnement d'un secret infantile préjudiciable.


C'est donc une initiation au courage et à la constance, une thérapie interne que nous relate singulièrement Mike Flanagan par le biais d'un récit de Stephen King aussi captivant que d'une âpre cruauté. L'héroïne en chute libre corporelle (voire aussi morale) parvenant in extremis par son épreuve à châtier ses démons afin d'accepter le deuil d'un inceste. Une excellente adaptation d'une belle dignité humaine parvenant avec maîtrise à élever le thriller à une dimension autrement plus substantielle pour le traitement de ses personnages torturés. 

Eric Binford.

vendredi 29 septembre 2017

DOUX, DUR ET DINGUE

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site mauvais-genres.com

"Every Which Way But Loose" de James Fargo. 1978. U.S.A. 1h54. Avec Clint Eastwood, Sondra Locke, Geoffrey Lewis, Beverly D'Angelo, Walter Barnes, Roy Jenson, James McEachin

Sortie salles France: 4 Avril 1979. U.S: 20 Décembre 1978

FILMOGRAPHIE: James Fargo, né le 14 août 1938 à Republic, Washington, États-Unis, est un réalisateur et producteur américain. 1976 : L'inspecteur ne renonce jamais. 1978 : Caravans. 1978 : Doux, dur et dingue. 1979 : Le Putsch des mercenaires. 1982 : L'Exécuteur de Hong Kong.


Comédie d'aventures menée tambour battant au travers d'un road trip bucolique, Doux, dur et dingue surfe sur les films de bastons bonnards initiés par Bud Spencer et Terence Hill. Si bien qu'ici les gags enfantins et les pugilats de rue (et de saloon !) s'enchaînent de manière métronomique au rythme d'une country-music que Sondra Locke chantonne dans les cabarets face à une clientèle prolétaire. Sans doute afin de casser son image de flic fasciste dans la série des Inspecteur Harry, Clint Eastwood se moque ici de lui même avec une décontraction (inévitablement) attachante dans la peau d'un marginal au grand coeur (il tombe naïvement amoureux d'une allumeuse au point de la poursuivre durant son périple national) pratiquant les combats clandestins avec une réputation indétrônable. Epaulé d'un orang-outan badin, de son acolyte Orville et d'Echo, l'amie de ce dernier rencontrée sur une aire de marché, nos héros sans peur ni reproches sillonnent les contrées du Colorado en se confrontant notamment aux moult provocations de deux flics revanchards et d'une bande de motards à la limite de la déficience mentale. Au-delà de cette galerie de francs-tireurs excentriques aussi bien provocateurs qu'entêtés, on peut également noter l'apparition survitaminée de l'illustre Ruth Gordon (Harold et Maud, Rosemary's Baby) dans celle d'une mémé renfrognée plutôt irascible à daigner imposer son identité d'un âge avancé. Bien évidemment, et de manière parfaitement assumée, Doux, dur et dingue ne vole pas bien haut dans son alliage de gags et bastons d'un intérêt purement récréatif quand bien même la bonhomie de nos héros au grand coeur et le tempérament survolté de leurs rivaux opiniâtres nous enseignent une bonne humeur expansive entre deux étreintes amoureuses.


Dépaysant (magnifiques paysages ruraux du Colorado) généreux et terriblement sincère dans son florilège de péripéties saugrenues, poursuites et altercations musclées, Doux, dur et dingue enflamme la comédie populaire (en dépit de la violence aride de certains combats qu'Eastwood transcende en héros viril) avec une extrême simplicité à la fois exubérante et attendrissante. A revoir avec une vibrante nostalgie et à savourer entre potes du samedi soir affublés de packs de bières généreuses en mousse !

Bruno Dussart
2èx 

jeudi 28 septembre 2017

SEVEN SISTERS

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"What Happened to Monday" de Tommy Wirkola. 2017. Belgique/U.S.A/France/Angleterre. 2h04. Avec Noomi Rapace, Willem Dafoe, Glenn Close, Marwan Kenzari, Pål Sverre Hagen, Adetomiwa Edun.

Sortie salles France: 30 Août 2017 (Int - 12 ans). U.S: 18 Août 2017

FILMOGRAPHIE: Tommy Wirkola est un réalisateur, scénariste et producteur de cinéma norvégien, né le 6 décembre 1979 à Alta dans le comté de Finnmark. 2007 : Kill Buljo : ze film. 2009: Dead Snow. 2010 : Kurt Josef Wagle og legenden om fjordheksa. 2013 : Hansel et Gretel : Witch Hunters. 2014 : Dead Snow 2. 2017 : Seven Sisters.


Blockbuster estival chaudement accueilli en France (1 356 119 entrées), Seven Sisters porte la signature du norvégien Tommy Wirkola, réalisateur des sympathiques délires gores Dead Snow 1 et 2Dans un futur proche, faute d'une surpopulation, du réchauffement climatique et des pénuries alimentaires, les autorités ont décidé de limiter le nombre de naissances à un seul enfant par foyer. Mais bravant l'interdit, une mère morte en couches donne naissance en secret à des septuplées. L'époux décide alors de les cacher dans une chambre secrète de son appartement sous couvert de conditions drastiques enseignées à ses filles. 30 ans plus tard, l'une des soeurs disparaît mystérieusement durant un rendez-vous professionnel. Au moment où ces dernières tentent de la retrouver, les agents du CAB sont sur le point de débusquer leur tanière ! Empruntant l'anticipation dystopique héritée du parangon Soleil Vert et consorts (thèmes similaires sur la surpopulation, la pollution et les pénuries alimentaires auprès d'une dictature sans vergogne), Seven Sisters constitue un formidable film d'action aussi intègre que généreux en diable.


L'action rebondissant sans cesse grâce aux multiples directions que les héroïnes parcourent ardemment afin de retrouver leur soeur et préserver leur unité familiale. Et ce sans céder à la gratuité du spectacle racoleur, de par l'efficacité d'un script structuré sublimant le portrait de 7 jumelles converties contre leur gré en fugitives aussi pugnaces que valeureuses. Sur ce point détonnant, on peut vanter la prestance (hybride) de Noomi Rapace se fondant dans les corps de 7 personnages distincts sous l'impulsion d'une palette de sentiments contradictoires. L'actrice oscillant sans rougir une émotion tantôt poignante (pour les revirements étonnamment dramatiques que le script s'adonne sans complexe), tantôt oppressante (pour les stratégies de défense à perdre haleine qu'elles doivent décupler afin de déjouer la menace permanente des agents du CAB). Outre l'attrait effréné et la lisibilité des séquences homériques fertiles en cascades et sanglants gunfights, Seven Sisters cultive une finaude audace à détourner les codes par le biais d'une dramaturgie inopinément insolente ! Car exploitant habilement le genre du survival pur et dur au sein d'un cadre urbain blafard (superbement contrasté par la morphologie d'immeubles grisonnants dressés les uns contre les autres), Tommy Wirkola crédibilise son univers futuriste étouffant où pauvreté et exclusion sont une fois de plus dépréciées par une dictature plus immorale et implacable qu'elle n'y parait.


En dépit de certaines facilités et pirouettes narratives un chouilla improbables lors de sa dernière partie aussi bien palpitante qu'émouvante (mais un peu trop vite expédiée à mon sens par ses  rebondissements en pagaille), Seven Sisters renchérit embuscades, soubresauts et péripéties vertigineuses au sein d'une dystopie insidieusement cynique. Sans jamais perdre de vue la dimension humaine de ses héroïnes implacablement molestées (d'autant plus compromises entre trahison et  sens du sacrifice), Tommy Wirkola insuffle une poignante (et cruelle) émotion pour nous impliquer dans leur épreuve de survie en chute libre. Sous le pilier du Blockbuster ludique mais intelligemment exploité, Seven Sisters demeure donc une excellente surprise dans le paysage si habituellement lisse et conventionnel de l'actionner bourrin, avec en guise d'épilogue un plaidoyer pour le libéralisme et le droit à la naissance multiple. 

Bruno Matéï

mardi 26 septembre 2017

COMTESSE DRACULA

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site anolis-film.de

"Countess Dracula" de Peter Sasdy. 1971. Angleterre. 1h34. Avec Ingrid Pitt, Nigel Green, Sandor Elès, Maurice Denham, Patience Collier, Peter Jeffrey

Sortie salles France: 7 Décembre 1972. Angleterre: 31 Janvier 1997. 

FILMOGRAPHIE: Peter Sasdy est un réalisateur anglais, né le 27 Mai 1935 à Budapest.
1970: Une Messe pour Dracula. 1971: La Fille de Jack l'Eventreur. 1971: Comtesse Dracula. 1972: Doomwatch. 1972: The Stone Tape (télé-film). 1973: Nothing but the Night. 1975: Evil Baby. 1975: King Arthur, the young Warlord. 1977: Welcome to blood City. 1983: The Lonely Lady. 1989: Ending up (télé-film). 1991: Sherlock Holmes and the leading lady (télé-film).


Réalisé par Peter Sasdy la même année que (l'autrement audacieux) La Fille Jack l'Eventreur, Comtesse Dracula est l'adaptation horrifique de la célèbre Comtesse Bathory (La Comtesse Sanglante) publiée en 1962 par Valentine Penrose. Prenant pour thèmes la jeunesse éternelle, l'inceste et le vampirisme de manière aussi bien déroutante qu'originale, Comtesse Dracula relate la déliquescence morale de cette dernière avide de retrouver sa jeunesse après avoir découvert que le sang d'une jeune domestique serait l'antidote pour lui rendre sa beauté. Eprise d'amour pour le lieutenant Imre Toth, elle multiplie les sacrifices humains afin de préserver leur liaison passionnelle. Mais leur relation est pour autant ternie par la jalousie du capitaine Dobi, complice meurtrier de la comtesse délibéré à compromettre leur futur mariage. Baignant dans une atmosphère à la fois fétide et malsaine sous l'impulsion d'une galerie de personnages sans vergogne, Comtesse Dracula distille un vénéneux parfum de séduction auprès d'une comtesse incestueuse (elle courtise son propre fils !) ne reculant devant aucun tabou pour parvenir à ses fins.


Epaulé d'une servante insidieuse et d'un capitaine fourbe et mesquin, le trio diabolique multiplie les subterfuges pour duper l'entourage et ce afin de taire l'horrible vérité sur la Comtesse. Cette dernière se faisant passer pour sa propre fille (préalablement kidnappée par un paysan russe) afin de justifier son éclatante beauté. Parfois dérangeant pour la posture licencieuse de la comtesse s'adonnant sans scrupule aux crimes gratuits au sein de décors raffinés d'un château baroque (teintes grisâtres à l'appui  formant un saisissant contraste à son architecture gothique !), Comtesse Dracula exploite efficacement le mythe du vampire avec une audacieuse modernité. Sa grande réussite émanant de ces personnages rogues cités plus haut alors qu'un lieutenant plutôt intègre va peu à peu sombrer dans la complicité malgré lui, faute d'un implacable chantage. Outre cette étude de caractères des plus sulfureuses et passionnantes (d'autant mieux servi par un solide casting de seconds-rôles !), l'actrice Ingrid Pitt dévoile son corps plantureux avec une dimension érotique éhontée. Imprégnée de vanité, d'ingratitude et de lâcheté, l'actrice se pavane avec assurance face à ses hôtes et les manipulent à sa guise parmi son emprise de séduction juvénile. Sa présence magnétique insufflant au sombre récit une intensité exponentielle au fil de ses exactions putassières quand bien même son amant préalablement innocent ne pourra se résoudre à s'extirper de son emprise après avoir découvert l'horrible supercherie.


Excellente série B émaillée d'effusions sanglantes et d'érotisme soft au sein d'une intrigue immorale baignant dans une sensualité méphitique, Comtesse Dracula adopte une fois de plus sous l'égide de la firme une démarche couillue pour innover dans l'horreur archaïque, et ce grâce à l'intensité d'un portrait historique scabreux réactualisé dans un contexte surnaturel. 

Bruno Dussart
2èx

lundi 25 septembre 2017

L'ANGE DU MAL, REDEEMER.

                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Redeemer: son of Satan" de Constantine S.Gochis. 1978. U.S.A. 1h23. Avec Damien Knight, Jeannetta Arnette, Nick Carter, Nicki Barthen...

Sortie salles France (uniquement au Rex de Paris): Mars 1978 (Int - de 18 ans). U.S: 7 Avril 1978

FILMOGRAPHIE: Constantine S.Gochis est un réalisateur américain. 1978: L'Ange du mal.


Du plus profond de la nuit, la main du Rédempteur apparaîtra pour punir ceux qui ont vécu dans le pêché...
Distribué par Scherzo durant la sacro-sainte époque de la Vhs (les vidéophiles, fascinés par sa rutilante jaquette, s'y étaient rués pour le louer en Vostfr à l'orée des années 80 !), L'Ange du Mal / Redeemer est l'unique réalisation de l'américain Constantine S. Gochis. Résolument rare, oublié et peu connu, le film ne connut d'ailleurs sur notre territoire qu'une sortie salles durant le Festival du film Fantastique du Rex à Paris. Empruntant la voie du psycho-killer de manière peu commune, de par sa mise en scène personnelle brodant autour d'une série de crimes un climat d'étrangeté atypique, Redeemer est une fascinante curiosité pour les amateurs de relique doucereusement malsaine.


Car si le hors-champ est privilégié durant la plupart des meurtres, sa résultante, l'inventivité et la cruauté dont le tueur fait preuve nous provoquent une fascination dérangée; notamment par son caractère à la fois cru et réaliste. A l'instar de la jeune femme périssant noyée la tête dans un lavabo après de longues minutes d'agonie. Sans doute la séquence la plus extrême et éprouvante que les ablutophobes auront peine à endurer. Quant à son pitch linéaire (et parfois équivoque), il se résume au huis-clos horrifique lorsque 6 anciens camarades de lycée réunis pour l'occasion de retrouvailles se retrouvent piégés à l'intérieur d'une bâtisse par un mystérieux tueur affublé de divers déguisements. Là aussi, le réalisateur adopte un parti-pris baroque quant à la caractérisation de ce dernier plutôt emphatique lors de ses allégations intégristes, gouailleur dans son accoutrement excentrique et véloce lorsqu'il parvient toujours à piéger chacune de ses proies aux moments aléatoires. En dépit de son maigre scénario plutôt prévisible donc et d'un début languissant, Constantine S. Gochis parvient grâce à sa réalisation tantôt maladroite, tantôt ambitieuse, à maintenir l'intérêt dès que nos protagonistes pénètrent dans la propriété le temps d'une soirée cauchemardesque.


Epaulé du jeu plutôt convaincant des comédiens méconnus, notamment lorsqu'ils font face à leur peur et à la panique, d'un score électro atmosphérique, d'une étrange photo désaturée aux éclairages parfois soignés (en précisant ayant découvert le film en Blu-ray) et d'un montage parfois (volontairement ? !) désordonné, Redeemer ne ressemble à rien de connu pour élever le psycho-killer vers une dimension hermétique. Celle d'un puritanisme s'adonnant à l'expiation criminelle. 

Remerciement à feu Lupanars Visions.

Bruno Matéï
2èx

samedi 23 septembre 2017

CA

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"It" de Andrés Muschietti. 2017. U.S.A. 2h15. Avec Bill Skarsgård, Jaeden Lieberher, Jeremy Ray Taylor, Sophia Lillis, Finn Wolfhard, Wyatt Oleff, Chosen Jacobs.

Sortie salles France: 20 Septembre 2017. U.S: 8 Septembre 2017

FILMOGRAPHIEAndrés Muschietti est un scénariste et réalisateur argentin, né le 26 août 1973
2013: Mama. 2017: Ça.


« Le remake de Ça d'Andy Muschietti réussit à aller au-delà de mes attentes. Relaxez. Attendez. Et appréciez. ». Stephen King. 
Meilleur démarrage de tous les temps pour un film d'horreur (50 425 786 $ pour son premier jour d'exploitation) qui plus est renforcé de critiques élogieuses outre-atlantique, Ca est la 1ère adaptation ciné du célèbre roman de Stephen King après que Tommy Lee Wallace se soit prêté à un (sympathique) traitement télévisuel en 1990. Récit d'aventures initiatiques au sein d'une horreur cartoonesque, Ca constitue une fabuleuse pochette surprise dans son melting-pot d'action et d'épouvante en roue libre. Plongée en apnée dans le désagrément de la peur du point de vue d'ados à la fois chétifs et débrouillards, Ca exploite les thèmes du dépassement de soi, de la maturité, de la solidarité, voir aussi de l'inceste avec une efficacité permanente. Car si les séquences horrifiques scandées d'une bande-son assourdissante et d'un montage percutant ne font pas preuve de subtilité, Andrés Muschietti est suffisamment habile et talentueux pour ne pas faire sombrer le navire dans une redondance rébarbative. Et ce grâce en priorité à la prestance sardonique du clown habituellement conçu pour amuser et faire rire la galerie comme il est de coutume dans les festivités du cirque.


Détourné en l'occurrence au profit d'une horreur malsaine par ses exactions cannibales (le traitement impitoyable réservé aux ados s'avère d'autant plus rigoureux notamment lorsqu'il s'agit de dénoncer en filigrane l'inceste d'un père abusif !), ce nouvel archétype railleur constitue donc un solide alibi pour cumuler les poursuites et situations horrifiques que chaque ado endure indépendamment avant de s'allier pour mieux combattre leur cause. Le clown, maître chanteur et affabulateur, manipulant d'autant mieux leur psyché au gré d'hallucinations collectives que ceux-ci matérialisent par leur manque de confiance, leurs sentiments de crainte de l'inconnu et de la peur du noir. Des séquences chocs originales, inventives, épiques et terrifiantes sensiblement influencées par l'imagerie débridée de Evil-dead et de la saga Freddy. Toutes ces péripéties savamment coordonnées et brillamment réalisées évitent donc la gratuité (chaque ado contraint d'affronter avec un courage inouï une terreur morbide à moult visages !) pour persévérer ensuite dans la vigueur d'une épreuve de force communautaire que ces derniers vont transcender durant un second round affolant. Outre la facture (diablement) ludique de leurs vicissitudes incessamment cauchemardesques, Ca bénéficie en prime d'une étude de caractère scrupuleuse (au sein de l'époque des années 80 !) si bien que les ados à l'esprit autonome s'avèrent censés (Bill, l'aîné non dupe du stratagème de grippe-sou à se fondre dans le corps de son défunt frère !), expressifs, pugnaces (au sens viscéral !) et profondément humains dans leurs bravoures de dernier ressort ! De par leur fragilité à se mesurer à plus fort que soi (notamment ce trio de délinquants littéralement lâche et fielleux qu'ils doivent en prime contrecarrer), leur élan de solidarité et leur éveil amoureux (l'épilogue des "au-revoir" insufflant une émotion candide bouleversante auprès d'un duo en éclosion sentimentale).


Horror Circus
Sorte de Stand by Me au vitriol (notamment pour ses thèmes tournant autour du difficile cap de la perte de l'être cher et du passage à l'âge adulte), Ca génère émotions fortes et poignantes quant à au sort précaire de nos héros sévèrement ballottés par un clown sans vergogne. Et à cet égard, et par son regard aussi patibulaire que magnétique, la prestance charismatique de Bill Skarsgård (nouvel icone diablotin du cinéma d'horreur !) provoque un malaise persistant lors de la plupart de ses apparitions (d'une gestuelle) outrancière(s), à l'instar du prologue anthologique n'hésitant pas à recourir à une horreur inopinément démonstrative lorsqu'il s'agit d'y sacrifier l'innocence. Une séquence glaçante, terriblement dérangeante, assurément le moment le plus choc et douloureux du film. Divertissement horrifique à la fois intelligent et audacieux par son climat sombre, malsain et terrifiant évoluant dans un cadre enfantin, Ca traite enfin et surtout de l'handicap de la peur du point de vue transitoire d'une adolescence en quête d'affirmation et de respect de l'autre. Une excellente première partie donc, en escomptant un second segment autrement plus adulte et encore plus éprouvant. 

Eric Binford

La critique de Peter Hooper
NO SPOLIER !
Note : 5 / 6
// Grime story //
Ou cas ou vous maniganceriez de m’attendre tapis dans l’ombre, grossièrement accoutré en Bozo et prés a bondir dans le but de m’effrayer : je ne souffre pas de coulrophobie! Même si vos intentions s’avéraient nobles, ne mangeant pas non plus de bonbons, vous risqueriez une décharge de Taser. Vous voila a présent au courant : ne passez pas a 5000 volts !
Immunisé contre cette phobie je pouvais donc découvrir cette nouvelle version du roman éponyme de Maître King, sans peur mais également sans reproche, car je n’ai jamais caché l’attente d’une relecture modernisée de celle de Tommy Lee Wallace. Bien que (forcément) grand fan, son fort datage du début des 90 et son format téléfilmesque ouvraient quelques belles perspectivistes, surtout lorsque l’on connaît le contenu prolixe de l’œuvre de référence.
Après sa mère veilleuse fantastico/épouvantable « Mama » (2013) , séduisante mais imparfaite Bisserie, on attendait une confirmation du talent d’Andrés Muschietti, détecté a travers quelques plans. Si la scène introductive du gamin à la poursuite d’un bateau en papier achevant son voyage dans l’égout, constitue l’incontournable point d’ancrage roman/téléfilm, un nouveau traitement s’avérait forcément très piégeur. La forme originelle, auréolée d’un statut culte, pouvait suffire à démolir en cinq minutes les cent trente suivantes. Sans dévoiler quoi que se soit puisqu’elle est omniprésente dans tout les trailers, je m’avancerai juste a dire qu’il y manque un « morceau » de choix, réservé aux spectateurs en salle, et qui a lui seul permettra sûrement de « détacher » celle des 90’s de vos esprits…D’autant que l’on y découvre également le néo grippe-sou...sur lequel je reviendrai plus loin. Ce coup de maître introduit une réussite qui va s’avérer totale : nous sommes sans l’ombre d’un doute face a une œuvre charnière dans l’horreur post-moderne, je pèse mes mots.
Muschietti va respecter le background de l’histoire, mais en choisissant de la situer entièrement en 1988, le point d’arrivée du film de Wallace.
C’est la que l’on découvre le nouveau « club des ratés », un bande de jeunes dont les grossiers (et volontaires) stéréotypes vont se lisser très rapidement jusqu'à devenir la toile de fond absolument parfaite pour la mise en place de cette intrigue horrifique. Un excellent casting et une direction d’acteurs millimétrée qui vont contribuer, avec une reconstitution pertinente des années 80, à une parfaite immersion. Toute la force de la narration va reposer sur ces jeunes dont la caractérisation, entre ceux de « Stand by me » et des « Goonies », va leur donner toute légitimité pour arriver a surmonter leur peur et terrasser le « mal ». Du « petit gros » victimaire, au frère bègue du disparu en passant par le déconneur de service, sans oublier la nana de l’équipe, tous réinsufflent le parfum savoureux d’un teen movie vidéo-clubien, brillamment reconditionné pour être respiré et accepté par toutes les générations.
On sait que le roman de king, dans la première partie exploitée ici, portait sur le message du passage à l’age adulte. Muschietti va faire briller la métaphore. A ce titre le personnage de Beverly est le plus intéressant. La jolie Sophia Lillis, portrait craché de la Molly de « Breakfast club »(ce que ne manque pas de lui rappeler Richie -Finn Wolfhard- celui qui a « avalé un clown »…), est victime d’un père « très entreprenant », l’occasion de la scène la plus choquante du film ou dans une explosion d’hémoglobine très shining-ienne(…) se confondent le trouble des premières règles et la violence d’un possible viol : aussi puissamment graphique qu’incroyablement suggestif !
Et le clown dans tout « ça » ? Zut, J’allais oublier….
Exit la tenue iconique du personnage, idéale pour abuser de la confiance des enfants avec ses couleurs gaies et son air faussement amuseur. Le boogeyman maléfique est ici vêtu d’un costume défraîchi et usé lui conférant une allure théâtralisée le renvoyant au pittoresque clown blanc, sorte de Pierrot plus lunatique que lunaire. Chacune des scènes ou Grippe-sou ramène sa « fraise » on retient son souffle, surtout dans les gros plans sur son visage, sorte de mixe entre le faciès Joker-ien de Nicholson, et le regard de D'Onofrio pétant les plombs dans « Full metal jacket ». Une coquetterie dans l’œil lui confère un air définitivement effrayant. Si ce personnage est parfaitement réussit on le doit à la mise en scène de Muschietti, qui le renvoie volontiers à son statut originel de bouffon (sidérante scène ou on le voit gesticuler dans une roulotte en feu !), l’humour et les attitudes jamais très loin des putasseries d’un Freddy Krueger (clin d’œil fortement appuyé par cette affiche de « Nightmare on elm street » a l’entrée d’un ciné…). On pouvait rêver de le voir un peu plus souvent, mais le récit est si tellement intelligemment articulé autour de ces « ratés » que cela aurait probablement été néfaste pour le liant de l’histoire, et l’ensemble aurait perdu l’oxygène nécessaire pour réussir a affronter le monstre dans les égouts de la ville. Bill Skarsgård accomplit l’exploit (lui aussi…) de faire oublier Tim Curry. Son antre ou le réalisateur nous livre un bouquet final très Lovecraftien est esthétiquement époustouflante, comme pas mal d'autres plans !
Andrés Muschietti nous livre la meilleure car la plus sérieuse bobine horrifique vue depuis (très) longtemps. En réorchestrant habilement les nouveaux codes du genre a base de Jump scares ( assez rares pour fonctionner ), sans (trop) forcer sur le volume d’un sound design devenu au fil des années une simple agression auditive, sa mise en scène inspirant le respect a la fois des amoureux des fantasmes littéraires de Stephen King, des nostalgique du film de Wallace, ceux des 80’s (celle de mes années lycées) et des fétichistes de la VHS, et plus globalement celui des cinéphiles exigeants.
Avec ce Teen-horror-movie, respectueux de l’esprit originel, il échappe aux peaux de bananes de la classification PG-13 – pour une œuvre qui réussit à être aussi effrayante sur le fond qu’hypnotique sur la forme. A en devenir coulorphile : Magistral !