jeudi 9 novembre 2017

TARZAN, L'HOMME SINGE

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site cineclap.free.fr

"Tarzan the Ape Man" de W. S. Van Dyke. 1932. U.S.A. 1h40. Avec Johnny Weissmuller, Maureen O'Sullivan, C. Aubrey Smith, Neil Hamilton, Doris Lloyd

Sortie salles France: 19 Août 1932. U.S: 2 Avril 1932

FILMOGRAPHIE PARTIELLE: W. S. Van Dyke ou Woodbridge Strong Van Dyke II est un réalisateur américain, né le 21 mars 1889 à San Diego, en Californie, et mort par suicide le 5 février 1943 à Brentwood, en Californie (États-Unis).1917 : The Land of Long Shadows. 1922 : Forget Me Not. 1925 : Le Hors-la-loi. 1927 : Les Écumeurs du Sud. 1928 : Wyoming. 1928 : Ombres blanches. 1929 : Chanson païenne. 1931 : Trader Horn. 1931 : Rumba d'amour. 1932 : Tarzan, l'homme singe. 1933 : Penthouse. 1936 : Au seuil de la vie. 1936 : Loufoque et Cie. 1936 : Nick, gentleman détective. 1937 : Valet de cœur. 1937 : On lui donna un fusil. 1937 : Rosalie. 1938 : Marie-Antoinette. 1938 : Amants. 1940 : Monsieur Wilson perd la tête . 1940 : Chante mon amour . 1941 : La Proie du mort . 1941 : The Feminine Touch. 1941 : Rendez-vous avec la mort . 1942 : Ma femme est un ange . 1942 : Cairo. 1942 : Journey for Margaret.


Film mythique s'il en est, Tarzan l'homme singe est parvenu à redorer le cinéma d'aventures avec un souffle épique et romanesque surprenant pour l'époque ! Si bien que les affrontements entre animaux sauvages (remarquablement dressés !) et Tarzan reste encore aujourd'hui bluffants, notamment lors du final homérique (la charge des éléphants contre les pygmées) aux cimes de l'épouvante (les otages blancs préalablement offerts en sacrifice face à un gorille monstrueux que l'on croirait issu d'un labo expérimental !). Divertissement familial de 7 à 77 ans, Tarzan l'homme singe est surtout illuminé par le duo proverbial Johnny Weissmuller / Maureen O'Sullivan formant un couple singulier à l'écran avec un naturel confondant. Littéralement habité par son rôle primitif,  Johnny Weissmuller insuffle un charisme inégalé dans celui de l'homme sauvage souvent mutique mais pour autant expressif (voir ensorcelant par son regard interrogatif sur le qui-vive) lorsqu'il tente de saisir le dialecte de sa compagne que Maureen O'Sullivan communique avec une délicate innocence, et ce avant de succomber à son charme animal.


D'une grande simplicité, l'intrigue se concentre sur leurs rapports tendus puis amoureux après que Tarzan eut sauvagement kidnappé l'inconnue, de par son mode de vie primal qu'il s'inculqua parmi de fidèles animaux (principalement des chimpanzés, gorilles et éléphants). En intermittence, et en guise de victuaille, il doit quotidiennement affronter à mains nues tigres, lions et crocodiles lors de morceaux de bravoure vertigineux. Quand bien même, le père de Jane et son équipe s'enfoncent dans la jungle pour la retrouver avant de poursuivre leur quête du cimetière des éléphants. Si certains trucages et décors en carton pâte font un peu tache et que sa naïveté narrative prête parfois à sourire (notamment lorsque Jane et Tarzan batifolent dans l'eau avec une innocence infantile), le pouvoir d'émerveillement qui émane des nombreuses péripéties et la synergie du couple romanesque nous replongent dans notre enfance avec une intensité formelle singulière. W. S. Van Dyke exploitant de fond en comble les décors naturels de la jungle sauvage à l'instar d'un dédale hostile et par le truchement d'une photo monochrome saillante.


Ludique, dépaysant en diable, fantasmatique et truffé de charme exaltant, Tarzan l'homme singe reste quelques décennies plus tard un spectacle enchanteur endémique. De par son réalisme envoûtant institué au coeur d'une jungle périlleuse photogénique et le caractère altruiste du couple glamour WeissmullerO'Sullivan entré dans la légende du 7è art. Une splendide réussite donc, parangon du film de jungle si bien que ce 1er opus payant se prolongea avec 11 déclinaisons plus ou moins divertissantes. 

B-D
3èx

mercredi 8 novembre 2017

DUELLISTES. Prix de la première oeuvre, Cannes 77.

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site dvdclassik.com

"The Duellists" de Ridley Scott. 1977. Angleterre. 1h40. Avec Harvey Keitel, Keith Carradine, Albert Finney, Edward Fox, Cristina Raines, Robert Stephens, Pete Postlethwaite.

Sortie salles France: 31 Août 1977. Angleterre: Décembre 1977

FILMOGRAPHIE: Ridley Scott est un réalisateur et producteur britannique né le 30 Novembre 1937 à South Shields. 1977: Duellistes. 1979: Alien. 1982: Blade Runner. 1985: Legend. 1987: Traquée. 1989: Black Rain. 1991: Thelma et Louise. 1992: 1492: Christophe Colomb. 1995: Lame de fond. 1997: A Armes Egales. 2000: Gladiator. 2001: Hannibal. 2002: La Chute du faucon noir. 2003: Les Associés. 2005: Kingdom of heaven. 2006: Une Grande Année. 2007: American Gangster. 2008: Mensonges d'Etat. 2010: Robin des Bois. 2012: Prometheus. 2017: Alien Covenant.


Avant de nous pondre son chef-d'oeuvre séminal Alien, précurseur de l'horreur stellaire (même si la Planète des Vampires imposa préalablement sa signature "vintage"), Ridley Scott réalise un coup de maître pour une première oeuvre récompensée à Cannes l'année même de sa sortie. Inspiré d'une histoire vraie assez ubuesque, voire improbable lorsqu'un lieutenant et un brigadier-général n'auront de cesse de se provoquer en duel sur une période longiligne de 15 ans (20 ans selon les faits historiques dixit Wikipedia !), Duellistes est la rencontre au sommet de deux éminents acteurs, Harvey Keitel / Keith Carradine. Ces derniers formant à l'écran un duo fébrile d'officiers opiniâtres, faute de l'entêtement de l'un d'eux furieusement féru de rancoeur, caprice et orgueil autour de sa question d'honneur. Car mécontent de se retrouver aux arrêts d'après le prompt avertissement d'Hubert, Féraud provoque sur le champ celui-ci en duel par esprit de supériorité.


L'ironie de cet affrontement aussi insolent, c'est que son adversaire, de prime abord pacifiste, loyal et indulgent, finit pour une éthique d'honneur et de dignité par céder à l'influence vindicative de Féraud après s'être à nouveau provoqués lors d'un sanglant duel. Multipliant les points de rencontres au sein d'une campagne aphone afin de parfaire leurs joutes à l'épée mais aussi à l'arme à feu, Féraud et d'Hubert se laissent dériver vers une révolte suicidaire alors que ce dernier impuissant à calmer les tensions ne peut que se résigner à affronter une ultime fois son partenaire. Les combats extrêmement violents, voir parfois mêmes barbares, insufflant un réalisme acéré auprès des chorégraphies épiques que Scott filme au plus près des corps estropiés, caméra agressive à l'épaule en sus ! Transcendé par ce jeu d'acteurs intense aux trognes minées par le désagrément, l'égoïsme, la peur et la haine, Duellistes se permet sous leur impulsion fielleuse et victorieuse d'y transfigurer le cadre historique auquel ils évoluent (communément et indépendamment !). De par le stylisme d'une nature sensitive et des postures (parfois) statiques des figurants que l'on croirait extraits de fresques picturales. La mise en scène épurée soucieuse du détail formel structurant autour des faits et gestes des personnages un florilège de toiles avec un art consommé de l'architecture.


Baignant dans une atmosphère ouateuse de plénitude champêtre où le crépuscule cède parfois place à une horizon funeste, Duelliste tire-parti de sa vigueur en l'expression forcenée de deux acteurs soumis à la violence des armes car empiétés dans la machine infernale de règlements de comptes infondés. Outre l'aspect aussi bien épique que romanesque d'une intrigue laissant aussi libre court aux accointances sentimentales (on est d'autant plus sensible à la mélodie timorée et sensuelle du score d'Howard Blake), Duellistes esquisse les corps meurtris autour d'une scénographie naturelle d'une fulgurance onirique à damner un saint. Une des plus belles réussites de son auteur. 

Eric Binford
3èx

mardi 7 novembre 2017

LES AVENTURES DE ROBIN DES BOIS

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Adventures of Robin Hood" de Michael Curtiz et William Keighley. 1938. U.S.A. 1h42. Avec Errol Flynn, Olivia de Havilland, Basil Rathbone, Claude Rains, Patric Knowles, Eugene Pallette, Alan Hale, Herbert Mundin.

Sortie salles France: 7 Septembre (ou 24 Novembre) 1938. U.S: 14 Mai 1938

FILMOGRAPHIE PARTIELLEMichael Curtiz, de son vrai nom Manó Kertész Kaminer, est un réalisateur américain d'origine hongroise, né le 24 décembre 1886 à Budapest (Hongrie) et mort le 10 avril 1962 (à 75 ans) à Hollywood. 1935 : Capitaine Blood. 1936 : Le Mort qui marche. 1936 : La Charge de la brigade légère. 1937 : Stolen Holiday. 1937 : Justice des montagnes. 1937 : Le Dernier combat. 1937 : Un homme a disparu. 1938 : La Bataille de l'or. 1938 : Les Aventures de Robin des Bois. 1938 : Quatre au paradis. 1938 : Rêves de jeunesse. 1938 : Les Anges aux figures sales. 1940 : La Caravane héroïque. 1940 : L'Aigle des mers. 1940 : La Piste de Santa Fe. 1941 : Le Vaisseau fantôme. 1942 : Les Chevaliers du ciel. 1942 : Casablanca. 1947 : Le crime était presque parfait. 1950 : La Femme aux chimères. 1953 : Un homme pas comme les autres. 1954 : L'Homme des plaines. 1958 : Le Fier Rebelle. 1958 : Bagarres au King Créole. 1959 : Le Bourreau du Nevada. 1961 : Les Comancheros.


Chef-d'oeuvre du film d'aventures familial si bien que tous les cinéphiles s'accordent à dire qu'il s'agit de la meilleure version de la légende de Robin, les Aventures de Robin des Bois resplendit de 1000 feux sous l'impulsion du couple glamour: Errol Flynn / Olivia de Havilland. Le couple insufflant avec un naturel ébouriffant un charme romantique au cime de la féerie ! Notamment par le biais du regard à la fois charnel et candide qu'Olivia procure à l'écran dans une palette de sentiments timorés eu égard de l'impudence de son amant bravant la légalité au profit des démunis. Alors que le roi Richard Coeur de Lion part pour les croisades, son frère en profite pour s'emparer du trône parmi la complicité de Sir Guy de Gisbourne. Mais un archer intrépide surnommé Robin de Locksley va tout mettre en oeuvre pour déjouer ces traîtres avec l'aide de ses fidèles compagnons de la forêt de Sherwood. 



Baignant dans un technicolor flamboyant sous la mainmise de l'éminent Michael Curtiz structurant une aventure échevelée sans temps morts, les Aventures de Robin des Bois pérennise son pouvoir enchanteur avec un panache aussi bien exaltant qu'exubérant. De par l'énergie et la vélocité que chaque protagoniste insuffle dans leur dimension héroïque ou hostile (le duel final à l'épée entre Robin et Charles de Gisbourne est un moment d'anthologie époustouflant d'agilité dans la chorégraphie du maniement des armes !) et la mise en scène très efficace de Curtiz assortie d'un montage dynamique allant droit à l'essentiel. Au-delà de l'aspect épique de sa réalisation extrêmement inspirée et alignant à rythme métronomique une habile succession de rebondissements autour du duo gagnant Robin / Marianne (ces derniers se portant secours l'un pour l'autre entre une étreinte sentimental), les Aventures de Robin des Bois est scandé par la prestance symbolique d'Errol Flynn littéralement transi d'émotions dans sa fougue contestataire. Ce dernier insufflant avec une dérision badin un souffle passionnel tant auprès de ses nobles sentiments pour Marianne que de ses exploits arrogants à brimer ses ennemis par l'épée ou par l'arc. Bondissant et escaladant escaliers et remparts pour leur échapper, Errol Flynn dégage une ferveur rusée avec l'appui de son charisme fringant.


Chef-d'oeuvre du film d'aventures d'avant-guerre prônant les valeurs nobles de la justice, de l'héroïsme et de la répartition équitable des richesses, les Aventures de Robin des Bois idéalise le divertissement intelligible avec un sens féerique aussi intègre que sans fard. 

B.D
3èx

Récompenses: Oscar de la meilleure musique (Erich Wolfgang Korngold), meilleurs décors (Carl Jules Weyl), meilleur montage (Ralph Dawson).

lundi 6 novembre 2017

La Main du Diable

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Maurice Tourneur. 1943. France. 1h20. Avec Pierre Fresnay, Josseline Gaël, Noël Roquevert, Guillaume de Sax, Palau, Pierre Larquey, André Gabriello, Antoine Balpêtré.

Sortie salles France: 21 Avril 1943

FILMOGRAPHIE: Maurice Thomas, dit Maurice Tourneur, est un réalisateur français, né le 2 février 1876 à Paris 17e, mort le 4 août 1961. 1930 : Accusée, levez-vous ! 1931 : Maison de danses ; Partir. 1932 : Au nom de la loi ; Les Gaietés de l'escadron ; Lidoire. 1933 : Les Deux Orphelines ; L'Homme mystérieux (Obsession). 1933 : Le Voleur. 1935 : Justin de Marseille ; Kœnigsmark. 1936 : Samson ; Avec le sourire. 1938 : Le Patriote ; Katia. 1941 : Volpone. 1941 : Péchés de jeunesse ; Mam'zelle Bonaparte. 1942 : La Main du diable. 1943 : Le Val d'enfer. 1944 : Cécile est morte. 1948 : Après l'amour. 1948 : Impasse des Deux-Anges.


D'après une nouvelle de Gérard de Nerval, La Main du Diable est considérée (à raison) comme l'une des rares réussites françaises du cinéma Fantastique. Natif des années 40, ce divertissement fort bien mené par Maurice Tourneur et réalisé dans un noir et blanc parfois onirique (notamment pour ses éclairages expressionnistes) emprunte le mythe de Faust (s'épauler du diable pour contredire un destin malchanceux) avec une jolie efficacité. De par la condition désoeuvrée de la victime nantie d'un don maudit (celle d'avoir acheté une main afin d'obtenir succès professionnel et amour) car toujours plus contrainte de rembourser une dette outre-mesure au diable afin de ne pas lui céder son âme. Dans le rôle de la victime infortunée prise à parti avec ses  sentiments contradictoires de perdurer ou d'endiguer l'offrande surnaturelle, Pierre Fresnay parvient à intensifier l'intrigue grâce à sa caractérisation enflammée. L'acteur laissant s'exprimer son inquiétude, ses remords et son angoisse exponentielle avec une force de caractère irascible si bien que son entourage amical peine à l'épauler lors de ses démarches confuses, voir s'interroge même parfois sur son état mental comme le rapporte sa détestable épouse égotiste (que campe avec éloquence Josseline Gaël). Au gré d'un cheminement narratif oppressant émaillé de quelques rebondissements et revirements inattendus faisant intervenir le fantastique par le biais de personnages iconiques, Maurice Tourneur opte pour un Fantastique poétique, notamment parmi l'intervention des victimes de la main issues d'époques vétustes. Teinté de dérision auprès du personnage du malin que Pierre Palau endosse avec une (attractive) ferveur aussi bien badine que gouailleuse, La Main du diable fascine sous le pilier d'une intrigue machiavélique que le héros ne cesse de déjouer avec fébrile constance.


De par l'originalité de son scénario faisant intervenir les forces du Bien et du Mal avec une fantaisie insolite, son esthétisme monochrome contrasté (voir parfois envoûtant !) et l'intensité du jeu spontané de Pierre Fresnay, La Main du diable exploite lestement le genre fantastique parmi la sincérité de son auteur méticuleux dans l'art d'y conter son récit. 

Eric Binford.
3èx

vendredi 3 novembre 2017

FREAKS, LA MONSTRUEUSE PARADE.

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site festival-playitagain.com

"Freaks" de Tod Browning. 1932. U.S.A. 1h02. Avec Wallace Ford, Leila Hyams, Olga Baclanova, Roscoe Ates, Henry Victor, Harry Earles.

Sortie salles France: 7 Octobre 1932 (Int - 18 ans). U.S: 20 Février 1932

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Charles Albert « Tod » Browning est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain né le 12 juillet 1880 à Louisville dans le Kentucky et mort le 6 octobre 1962 à Malibu en Californie.1925 : Dollar Down. 1926 : L'Oiseau noir. 1926 : La Route de Mandalay. 1927 : L'Inconnu. 1927 : Londres après minuit. 1927 : La Morsure. 1928 : À l'ouest de Zanzibar. 1928 : Le Loup de soie noire. 1929 : Loin vers l'est. 1929 : The Thirteenth Chair. 1930 : Les Révoltés. 1931 : Dracula. 1931 : L'Homme de fer. 1932 : La Monstrueuse Parade. 1933 : Fast Workers. 1935 : La Marque du vampire. 1936 : Les Poupées du diable. 1939 : Miracles à vendre.


Appâté par un juteux gain, la trapéziste cléo courtise le nain Hans afin de lui soutirer son héritage. Avec l'aide du tout aussi fourbe et sournois Hercule, ils complotent d'empoisonner leur larbin. Frieda, fiancée de Hans, tente désespérément de l'avertir du machiavélisme de cette mégère ne reculant devant rien pour parvenir à ses desseins. Chef-d'oeuvre absolu de l'horreur moderne (pour ne pas dire "singulière" !) alors qu'il fut confectionné pour concurrencer le futur succès de Frankenstein, la Monstrueuse Parade est une bouleversante histoire d'amour d'une cruauté inouïe si je me réfère à l'afflux de son intensité dramatique confinant au malaise cérébral. Tod Browning nous faisant pénétrer dans l'univers des Freaks d'un cirque ambulant avec un réalisme aussi trouble que perturbant. A point tel que la fiction s'évapore insidieusement derrière la (discrète et prude) caractérisation d'authentiques monstres de foire s'imposant acteurs amateurs (pour la plupart sans doute) avec un sens de l'improvisation translucide.


Sans pour autant se complaire dans un voyeurisme racoleur et avec le parti-pris d'honorer intelligemment le genre horrifique comme jamais au préalable, Browning filme ses personnages estropiés avec dignité tant et si bien qu'ils parviennent à se fondre dans l'intrigue parmi leur expressivité aussi bien naturelle qu'inquiétante (notamment auprès de leur nature dysmorphique). Sachant que son dénouement cauchemardesque va renchérir un climat malsain ténébreux lorsque ces derniers vont céder à une violence punitive, aussi pour tenir lieu de baroud d'honneur. Car communément témoins des cruelles exactions du couple obséquieux d'apparence docile mais étroitement liés à la complicité criminelle (Olga Baclanova s'avérant à ce titre absolument détestable de vilenie dans son instinct pervers et son regard reptilien !), nos freaks vont finalement laisser extraire leur instinct belliqueux après de vives moqueries humiliantes bâties sur la bassesse.  Eprouvant, subtilement vénéneux, voir même choquant, de par son acuité psychologique émanant des sentiments de trahison qu'éprouvent la communauté des monstres et surtout Hanz et Frieda (l'infidélité de leurs rapports déclinants confinant au désespoir !), et par l'impitoyable cruauté qu'endosse le couple de "Thénardier" d'une monstruosité morale, La Monstrueuse Parade fait tomber les masques sous l'impulsion d'émotions destructrices. 


Vibrant plaidoyer pour le droit à la différence au sein d'une société anachronique d'intolérance, Freaks laisse des cicatrices dans l'encéphale sitôt le générique bouclé. De par sa facture monochrome étrangement magnétique, son climat vicié toujours plus inquiétant et déstabilisant et la morphologie impressionnante des Freaks d'une innocence ambiguë (en me référant bien évidemment à la tournure tragique de l'intrigue cédant aux règlements de compte), la Monstrueuse Parade scande un romantisme désespéré autour d'un couple de nains violés par la monstruosité humaine. A revoir d'urgence d'autant plus que l'émotion éprouvante fait naître un malaise indicible indécrottable bien au-delà de la projection !

Eric Binford
3èx 

jeudi 2 novembre 2017

DANGER : DIABOLIK !

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Diabolik" de Mario Bava. 1968. Italie/France. 1h40. Avec John Phillip Law, Marisa Mell, Michel Piccoli, Adolfo Celi, Claudio Gora, Mario Donen, Terry-Thomas.

Sortie salles France: 12 Avril 1968. Italie: 24 Janvier 1968

FILMOGRAPHIEMario Bava est un réalisateur, directeur de la photographie et scénariste italien, né le 31 juillet 1914 à Sanremo, et décédé d'un infarctus du myocarde le 27 avril 1980 à Rome (Italie). Il est considéré comme le maître du cinéma fantastique italien et le créateur du genre dit giallo. 1946 : L'orecchio, 1947 : Santa notte, 1947 : Legenda sinfonica, 1947 : Anfiteatro Flavio, 1949 : Variazioni sinfoniche, 1954 : Ulysse (non crédité),1956 : Les Vampires (non crédité),1959 : Caltiki, le monstre immortel (non crédité),1959 : La Bataille de Marathon (non crédité),1960 : Le Masque du démon,1961 : Le Dernier des Vikings (non crédité),1961 : Les Mille et Une Nuits,1961 : Hercule contre les vampires,1961 : La Ruée des Vikings, 1963 : La Fille qui en savait trop,1963 : Les Trois Visages de la peur, 1963 : Le Corps et le Fouet, 1964 : Six femmes pour l'assassin, 1964 : La strada per Fort Alamo, 1965 : La Planète des vampires, 1966 : Les Dollars du Nebraska (non cédité), 1966 : Duel au couteau,1966 : Opération peur 1966 : L'Espion qui venait du surgelé, 1968 : Danger : Diabolik ! , 1970 : L'Île de l'épouvante ,1970 : Une hache pour la lune de miel ,1970 : Roy Colt e Winchester Jack, 1971 : La Baie sanglante, 1972 : Baron vampire  , 1972 : Quante volte... quella notte, 1973 : La Maison de l'exorcisme, 1974 : Les Chiens enragés,1977 : Les Démons de la nuit (Schock),1979 : La Venere di Ille (TV).


Film culte méconnu car si peu diffusé à la TV alors que derrière la caméra s'y cache discrètement un des maîtres du cinéma de genre italien, Danger Diabolik constitue un divertissement de premier choix sous la houlette de Mario Bava. Mixture parodique de James Bond et Fantomas  parmi l'influence des fumetti (bande-dessinée italienne), Danger Diabolik aligne sans fléchir péripéties rocambolesques et revirements badins sous l'impulsion d'un couple glamour mutuellement transis d'extase. Le film insufflant une charge érotique résolument capiteuse lors de leurs étreintes charnelles qu'accompagne un score fantasmatique (mélodies sensuelles de voix féminines langoureuses) composé par Ennio Moricone. Avec l'aide de sa tendre compagne, Diabolik multiplie les maraudes outre-mesure en se raillant de la police, particulièrement auprès de l'inspecteur Ginko avide de l'appréhender mais incessamment battu à chacune de ses diaboliques stratégies. Pendant ce temps, un ponte du cartel négocie avec la complicité de Ginko sa capture en prenant en otage la dulcinée de Diabolik. Mais c'est sans compter sur l'esprit affûtée de notre bandit aux yeux bleus prêt à extirper sa princesse des griffes de Valmont. 


Cocktail fantaisiste d'action et d'aventures en roue libre sous l'autorité du plus insolent criminel de la planète (si j'ose dire !), Danger: Diabolik ! est un savoureux pastiche combinant efficacement ses composantes susmentionnées avec un esprit sarcastique jubilatoire. Le "méchant" incarné par l'étrangement séducteur John Phillip Law s'en donnant à coeur joie à arborer son costume de cuir noir en ridiculisant ses rivaux avec une subversion démoniaque. Ce dernier n'hésitant pas d'autre part à éliminer quelque "gentils" dans une démarche politiquement incorrecte assez audacieuse surtout si je me réfère à l'époque auquel il appartient. Outre l'aspect improbable des situations constamment exubérantes et déjantées, Mario Bava parvient pour autant à crédibiliser ses stratagèmes de cambriolages et d'évasion, de par les moyens techniques dont dispose secrètement Diabolik (notamment son immense repère domestique infiltré dans une grotte) et sa perspicacité cérébrale à duper ses ennemis par le biais de gadgets sophistiqués. Multipliant subterfuges et déguisements avec l'appui indéfectible de sa compagne Eva (qu'endosse la blonde ultra sexy Marisa Mell, décédée à l'âge de 53 ans d'un cancer de la gorge), Diabolik amuse et fascine à la fois au sein d'une scénographie kitch et psychédélique que Bava esthétise à souhait dans son inspiration onirique.


Oasis d'humour, d'invention et d'action par le truchement d'une intrigue volontairement linéaire car référentielle et tous publics, Danger : diabolik ! transcende les décennies, entre bonne humeur galvanisante et charme exaltant du couple proverbial Diabolik / Eva communément engagés dans la passion pour l'or et (surtout) l'amour !  

Bruno Matéï
2èx

mardi 31 octobre 2017

LA CHASSE DU COMTE ZAROFF

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site ecranlarge.com

"The Most Dangerous Game" de Ernest B. Schoedsack et Irving Pichel. 1932. U.S.A. 1h03. Avec Joel McCrea, Fay Wray, Leslie Banks, Robert Armstrong, Noble Johnson

Sortie salles France: 16 Novembre 1934. U.S: 20 Septembre 1932

FILMOGRAPHIE: Ernest Beaumont Schoedsack est un réalisateur, directeur de photo, producteur, monteur, acteur et scénariste américain, né le 8 Juin 1893 à Council Bluffs (Iowa), décédé le 23 Décembre 1979 dans le Comté de Los Angeles. 1925: Grass: a nation's battle for life.1927: Chang. 1929: Les 4 plumes blanches. 1931: Rango. 1932: Les Chasses du comte Zaroff. 1933: King Kong. 1933: The Monkey's Paw. 1933: Blind Adventure. 1933: Le Fils de Kong. 1934: Long Lost Father. 1935: Les Derniers jours de Pompéï. 1937: Trouble in Morocco. 1937: Outlaws of the Orient. 1940: Dr Cyclop. 1949: Monsieur Joe. 1952: The is Cinerama.


"La chasse a toujours été la distraction favorite des hommes de guerre en temps de paix, c'est-à-dire dans les périodes plus ou moins brèves où la chasse à l'homme n'est pas ouverte."

Chef-d'oeuvre absolu du film d'horreur moderne alors que celui-ci découle des années 30, la Chasse du comte Zaroff perdure son pouvoir de fascination avec une alchimie quasi ineffable ! Car outre l'habile variété de ses décors gothiques et de sa végétation naturelle, l'originalité de sa trame d'un sadisme incongru et l'interprétation hallucinée de l'immense Leslie Banks en Zaroff aux yeux pervers écarquillés (avec un oeil plus étroit que l'autre et une cicatrice au front de manière à appuyer sa posture patibulaire), la Chasse du Comte Zaroff nous plaque au siège par la puissance de ces images oniriques. On peut notamment compter sur l'authenticité de sa superbe photo noir et blanc formant un saisissant contraste auprès de ces décors funèbres, notamment lorsque nos 2 héros impitoyablement traqués de nuit s'enfoncent dans une jungle à la photogénie tentaculaire.


Bref, tout dans la Chasse du Comte Zaroff n'est qu'attraction, magnétisme et envoûtement sous l'impulsion d'un récit d'aventures à la fois haletant mais aussi psychologique (notamment auprès de sa première partie lorsque les convives de Zaroff commencent à s'interroger sur sa véritable identité après s'être laissé séduire par son hospitalité hautaine, sa passion pour la chasse et son talent musical). Outre la prestance symbolique de Leslie Banks (sans doute l'un des plus raffinés portraits de psychopathe vu sur écran !), La Chasse... est notamment rehaussé de la complémentarité du duo Joel McCrea / Fay Wray formant un couple solidaire partagé entre désarroi et frayeur d'un concept aussi sournois que cruel et l'instinct de survie de s'extraire des pulsions morbides du chasseur entièrement soumis à sa pathologie déviante (traquer puis tuer sa proie afin de ressentir l'extase du crime !). Au passage, et par ces principes immoraux, on notera le réquisitoire imputé au loisir de la chasse lorsque Robert (autrefois chasseur) énoncera à sa compagne avec regain de conscience et en guise d'épuisement: "tous ces animaux que j'ai traqué, je sais ce qu'ils ont ressenti !". Tout est dit en cette seule réplique !


Tourné économiquement la même année que King-Kong dans les mêmes décors, avec le même réalisateur et la même actrice, La Chasse du Comte Zaroff est parvenu à transcender son budget low-cost grâce au brio des deux cinéastes scrupuleusement inspirés à immortaliser leur réaliste cauchemar avec une intensité formelle hypnotique. Il y émane un des survivals les plus fascinants et cruels que l'on est vu au cinéma, tout en cultivant en filigrane une réflexion lucide sur la perversité (ascensionnelle) de la cynégétique que les chasseurs perdurent depuis des siècles avec une vile lâcheté. 

Bruno Dussart
4èx  

lundi 30 octobre 2017

HALLOWEEN 4

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"Halloween 4: The Return of Michael Myers". de Dwight H. Little. 1988. U.S.A. 1h29. Avec Donald Pleasence,  Ellie Cornell, Danielle Harris, George P. Wilbur, Michael Pataki, Beau Starr, Kathleen Kinmont.

Sortie salles France: 9 Mai 1990. U.S: 21 Octobre 1988

FILMOGRAPHIE: Dwight Hubbard Little est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 13 janvier 1956 à Cleveland, Ohio (États-Unis).1986 : Getting Even. 1986 : KGB: la guerre secrète. 1988 : Bloodstone. 1988 : Halloween 4. 1989 : Le Fantôme de l'opéra. 1990 : Désigné pour mourir. 1992 : Rapid Fire. 1995 : Sauvez Willy 2 : La Nouvelle Aventure. 1997 : Meurtre à la Maison-Blanche. 2001 : Deep Blue. 2004 : Anacondas : À la poursuite de l'orchidée de sang. 2009 : Tekken.


Une suite aussi poussive qu'inutile, faute d'un scénario inexistant et de situations rebattues dénuées de tout suspense et d'intensité, et ce en dépit d'une dernière demi-heure timidement spectaculaire mais pour autant avare en terme de surprises et revirement (si on épargne son grotesque épilogue). Même Donald Pleasance plutôt apathique (bien qu'il eut des problèmes de santé à l'époque du tournage) semble s'ennuyer dans son sempiternel rôle de traqueur franc-tireur.

Les bons points:
- Une jolie photo
- Le jeu intense, étonnamment naturel de la petite Danielle Harris


Eric Binford.
3èx

vendredi 27 octobre 2017

LE TOBOGGAN DE LA MORT

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemotions.com

"Rollercoaster" de James Goldstone. 1977. U.S.A. 1h58. Avec George Segal, Richard Widmark, Timothy Bottoms, Henry Fonda, Harry Guardino, Susan Strasberg, Helen Hunt.

Sortie salles France: 28 Décembre 1977. U.S: 10 Juin 1977

FILMOGRAPHIE: James Goldstone est un réalisateur et producteur américain né le 8 juin 1931 à Los Angeles et décédé le 5 novembre 1999 à Shaftsbury. 1968: Les Complices. 1969 : Virages. 1969 : A Man Called Gannon. 1970 : A Clear and Present Danger (en) (TV). 1971 : Brother John. 1971 : Red Sky at Morning. 1971 : The Gang That Couldn't Shoot Straight. 1972 : They Only Kill Their Masters. 1974 : Cry Panic (TV). 1974 : Dr. Max (TV). 1974 : Things in Their Season (TV). 1975 : Journey from Darkness (TV). 1975 : Eric (TV). 1976 : Le Pirate des Caraïbes. 1977 : Le Toboggan de la Mort. 1980 : Le Jour de la fin du monde. 1981 : Kent State (TV). 1982 : Charles & amp; Diana: A Royal Love Story (TV). 1983 : Rita Hayworth: The Love Goddess (TV). 1984 : Calamity Jane (TV). 1984 : Voyage sentimental (TV). 1984 : Le soleil se lève aussi (TV). 1986 : Dreams of Gold: The Mel Fisher Story (TV). 1988 : Les Voyageurs de l'infini (TV). 1990 : Mariage en noir(TV).


Plutôt oublié de nos jours en dépit de sa récente sortie commerciale en Blu-ray, Le Toboggan de la Mort est un excellent film catastrophe mené sur un rythme haletant si bien qu'il ne laisse que peu de répit au spectateur observant sans réserve les stratégies terroristes d'un dangereux maître chanteur spécialiste en explosif dans les manèges à sensations. Son attraction de prédilection, le Rollercoaster, montagne russe vertigineuse d'une envergure assez impressionnante si je la compare à nos manèges français un peu plus modérés. Sans jamais s'embarrasser de séquences inutiles conforme au schéma du genre catastrophe (la caractérisation d'une foule de protagonistes stéréotypés en 1er lieu), James Goldstone démarre sur les chapeaux de roue avec l'unique séquence catastrophe, l'explosion d'un rollercoaster lors d'une nuit bondée de touristes. Une séquence spectaculaire d'une violence assez impressionnante même si l'on parvient à discerner quelques mannequins lorsque les wagons détachés viennent se projeter sur des stands ou se retourner avant d'écraser chaque passager sur le sol. La suite du récit se focalise ensuite sur le chantage du tueur exigeant une rançon d'un million de dollars, auquel cas il poursuivra une deuxième action terroriste auprès d'un autre rollercoaster.


Dépêché sur les lieux, Harry Calder, contrôleur de sécurité, doit lui rapporter la valise en plein coeur de la fête foraine et parmi la filature des policiers maladroitement fondus dans la foule. Remarquablement mené grâce à son rythme oppressant balisé de fausses alertes, James Goldstone réussit à rendre palpitant son suspense policier auprès d'une réalisation efficace brodant un jeu de cache-cache entre le tueur et le héros mis à rude épreuve car gentiment brimé. Quant à la seconde partie, un peu plus tendue et nerveuse pour son nouvel enjeu dramatique, elle renoue avec la menace d'une troisième attaque terroriste après que les ouvriers d'un parc d'attraction soient parvenus à désamorcer une seconde bombe en dernier ressort. Outre son suspense émoulu instauré autour d'une scénographie festive efficacement exploitée (notamment ces multiples tours de montagne russe filmés en caméra subjective afin de nous donner le vertige !), le Toboggan de la mort est également rehaussé d'un casting 3 étoiles typique de sa décennie florissante. Principalement Richard Widmark en agent de police bourru constamment sur le qui-vive à coordonner ses plans d'action afin d'appréhender le tueur, et surtout le méconnu George Segal très à l'aise dans celui d'un émissaire de fortune s'efforçant sans relâche de déjouer les plans sournois du terroriste dont il ignore l'identité. Ce dernier étant endossé par le troublant Timothy Bottoms tout à fait machiavélique dans la peau d'un terroriste assez vaniteux car d'apparence faussement rassurant, plutôt retors et déterminé dans ses lâches stratagèmes.


Constamment haletant grâce à l'ossature de son suspense inquiétant fertile en rebondissements, et rehaussé du jeu viril des comédiens d'un charisme buriné, Le Toboggan de la Mort parvient d'autant mieux à nous tenir en haleine sans jamais user de bravoure si on écarte l'inévitable scène catastrophe de son introduction criminelle. 
A noter les furtives apparitions de Steve Guttenberg, Craig Wasson (Body Double) et Helen Hunt âgée de 14 ans !

Bruno Matéï
3èx

jeudi 26 octobre 2017

LA DERNIERE MAISON SUR LA GAUCHE

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site pinterest.fr

"The Last House on the Left" de Wes Craven. 1972. U.S.A. 1h25. Avec Sandra Cassel, Lucy Grantham, David Hess, Fred J. Lincoln, Jeramie Rain, Marc Sheffler.

Inédit en salles en France. Sortie U.S: 30 Août 1972

FILMOGRAPHIE: Wesley Earl "Wes" Craven est un réalisateur, scénariste, producteur, acteur et monteur né le 2 Aout 1939 à Cleveland dans l'Ohio. 1972: La Dernière maison sur la gauche, 1977: La Colline a des yeux, 1978: The Evolution of Snuff (documentaire), 1981: La Ferme de la Terreur, 1982: La Créature du marais, 1984: Les Griffes de la nuit, 1985: La Colline a des yeux 2, 1986: l'Amie mortelle, 1988: l'Emprise des Ténèbres, 1989: Schocker, 1991: Le Sous-sol de la peur, 1994: Freddy sort de la nuit, 1995: Un Vampire à brooklyn, 1996: Scream, 1997: Scream 2, 1999: la Musique de mon coeur, 2000: Scream 3, 2005: Cursed, 2005: Red eye, 2006: Paris, je t'aime (segment), 2010: My soul to take, 2011: Scream 4.


Quintessence d'une horreur pestilentielle, un film monstre sur la nature perverse du plus redoutable des prédateurs: l'homme. 
Fer de lance du Rape and Revenge crapoteux interdit en salles en France et durant 30 ans au Royaume-Uni, La Dernière maison sur la gauche révolutionna le cinéma d'horreur, et ce bien avant que Tobe Hooper ne le marque également de son empreinte 2 ans plus tard avec l'électrisant Massacre à la Tronçonneuse. Sordide, poisseux, ultra glauque et malsain, La Dernière maison sur la gauche doit sa réputation scandaleuse grâce à l'aspect docu-vérité de sa réalisation amateuriste (il s'agit du 1er essai de Wes Craven derrière la caméra) illustrant durant sa 1ère partie (la plus réussie !) le chemin de croix de deux lycéennes prises à parti avec un quatuor de marginaux sans vergogne. Au coeur d'une forêt, et ironiquement à pied d'oeuvre de la maison des parents de l'une d'elles, elles subiront humiliations, sévices sexuels et tortures corporelles jusqu'à ce que mort s'ensuive. Sans user de débauche d'hémoglobine, Wes Craven parvient résolument à distiller un malaise à la fois psychologique et viscéral en privilégiant une violence crue d'une intensité rarement égalée au cinéma, et en optant pour une caméra à l'épaule usant parfois de gros plans sur les visages apeurés ou orduriers. Qui plus est, oscillant efficacement une bande-son dissonante, joviale et élégiaque afin de perdre nos repères, nous nous laissons emportés dans un vertige moral à la limite du malaise.


Et Wes Craven a beau introduire (maladroitement) des séquences cocasses avec l'intervention de deux flics empotés afin de désamorcer l'horreur des situations, le spectateur ne parvient pas relativiser depuis le choc des images barbares et du jeu aussi bien approximatif que convaincant des acteurs méconnus d'un charisme hallucinant de perversité ! Mentions spéciales à David Hess en raclure impérieuse éprouvant pour autant un regain de compassion après avoir commis un meurtre aussi lâche que gratuit ("Les véritables monstres ne sont jamais totalement dépourvus de sentiments. Je crois qu'en fin de compte c'est ça, et non pas leur aspect, qui les rend si effrayants" pour reprendre un aphorisme de Stephen King), et à Fred J. Lincoln (acteur porno à la carrière prolifique !) aussi dérangeant en tortionnaire sadique nanti de penchants masochistes. Parfois un chouilla complaisant (l'éviscération concise d'une des victimes, l'entaille au couteau lentement perpétrée sur le torse d'une autre martyr), La Dernière maison sur la gauche échappe pour autant au racolage, et ce en dépit de la gratuité des exactions tirées d'un fait-divers (nous précisera le post-générique) que l'on croirait tiré du "nouveau détective". Et si la seconde partie moins convaincante et percutante (notamment le peu d'empathie éprouvée auprès des parents lorsqu'ils découvrent trop rapidement leur fille moribonde près du lac !) ne possède pas cette même aura putride et ce degré de réalisme insupportable (photo granuleuse à l'appui), le climat malsain quasi irrespirable ressenti en interne du huis-clos familial (notamment auprès des postures sournoises des ploucs insalubres) et la vengeance putassière des parents redoublant d'idées saugrenues pour parvenir à leur fin perdurent une nouvelle descente aux enfers à la violence finalement paroxystique.


Réflexion sempiternelle sur l'instinct bestial/primitif de l'homme aussi véreux que son meurtrier depuis la déchéance de ses pulsions justicières, la Dernière maison sur la Gauche perdure son pouvoir de fascination, sommet d'horreur pestilentielle d'une intensité brut de décoffrage. Et ce même si certains cinéphiles lui préfèrent aujourd'hui La Bête tue de sang froid d'Aldo Lado (beaucoup mieux maîtrisé et interprété je dois avouer), remake transalpin gagnant en estime au fil des décennies. Quoiqu'il en soit, la Dernière maison sur la gauche restera une pierre angulaire d'un genre marginal et couillu, pionnier d'une horreur documentée où l'horreur est simplement humaine. 
Pour public averti.

Bruno Dussart

mercredi 25 octobre 2017

TOOTSIE. Oscar de la Meilleure Actrice pour Jessica Lange.

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemotions.com

de Sydney Pollack. 1982. U.S.A. 1h55. Avec Dustin Hoffman, Jessica Lange, Teri Garr, Dabney Coleman, Charles Durning, Bill Murray, Sydney Pollack.

Sortie salles France: 2 mars 1983. U.S: 17 Décembre 1982

FILMOGRAPHIE: Sydney Pollack est un acteur, réalisateur et producteur américain, né le 1er juillet 1934 à Lafayette, dans l'Indiana (États-Unis) et mort à Los Angeles le 26 mai 2008. 1965: The Slender Thread. 1966 : Propriété interdite. 1968 : Les Chasseurs de scalps. 1968 : Le Plongeon de Frank Perry, terminé par Pollack non crédité. 1969 : Un château en enfer. 1969 : On achève bien les chevaux. 1972 : Jeremiah Johnson. 1973 : Nos plus belles années. 1975 : Yakuza. 1975 : Les Trois Jours du condor. 1977 : Bobby Deerfield. 1979 : Le Cavalier électrique. 1981 : Absence de malice. 1982 : Tootsie. 1985 : Out of Africa. 1990 : Havana. 1993 : La Firme. 1995 : Sabrina. 1999 : L'Ombre d'un soupçon. 2005 : L'Interprète. 2005 : Esquisses de Frank Gehry.


Gros succès international des années 80 (en France il engrange 3 840 083 entrées) si bien qu'aujourd'hui il est répertorié comme un classique du genre, Tootsie est une comédie pétillante comme on n'en voit plus (ou alors si peu) de nos jours. Acteur au chômage débordant de talent et d'ambition, Michael Dorsey risque le tout pour le tout en se fondant dans le corps d'une sexagénaire prénommée Dorothy afin de mieux convaincre les producteurs d'un soap. Et le succès inespéré de se produire si bien que ce dernier, amoureux de sa partenaire à l'écran, essaie désespérément de s'extraire de la célébrité en osant dévoiler en dernier ressort son véritable visage ! Dirigé par l'éminent Sydney Pollack se refusant à vulgariser le thème du travestissement avec subtile émotion et parmi l'humilité de ses acteurs, Tootsie est justement l'occasion de mettre en valeur une pléiade de comédiens aux tempéraments sémillants, et ce jusqu'aux seconds-rôles. Tant auprès de Dabney Coleman en metteur en scène vaniteux, de Charles Durning en veuf subitement aimant de Dorothy, de Bill Murray en acolyte conciliant, de George Gaynes en acteur sclérosé gagné par la galanterie (car lui aussi épris de Dorothy !) que de l'explosive Teri Garr dans un rôle taillé sur mesure de maîtresse infortunée.


Outre l'intensité attachante de ces derniers issus de l'ancienne école, Tootsie décuple le pouvoir attractif de sa tendre fantaisie sous l'abattage de Dustin Hoffman partagé entre l'impudence de son personnage fictif, ses réels sentiments auprès de sa tendre partenaire hors écran et ses remords à oser duper son entourage dans celle d'une actrice autoritaire au tempérament autonome. A ses côtés, lui partageant sobrement la vedette du soap, la radieuse Jessica Lange (justement récompensée de l'oscar de la meilleure actrice dans un second-rôle) illumine l'écran dans sa fonction d'aimable confidente sitôt le tournage achevé car peu à peu enivrée par le magnétisme (masculin) de sa partenaire Dorothy. Débordante de charme et d'innocence, Jessica Lange insuffle une sensuelle affection, de par ses soupçons de sentiments véhiculés par son éventuelle homosexualité qu'elle se refuse à accepter. Sa délicate relation entamée avec Dorothy prouvant par cette occasion frauduleuse que l'amour ne se commande pas lorsque les sentiments restent plus forts que la raison quelque soit notre orientation sexuelle.


A travers ce jeu de cache-cache romantique compromis au vaudeville rocambolesque (les gags arborant une cocasserie toujours révérencieuse eu égard du tendre humanisme d'Hoffman), Tootsie traite des délicats problèmes du chômage, de la gestion de la starisation, de la quête identitaire, de l'affirmation de soi et de l'émancipation féminine avec une émotion subtilement poignante. Le divertissement efficacement structuré alternant mutuellement drôlerie, charme et romance parmi la motricité d'un scénario retors et celle d'un casting en roue libre. Un excellent anxiolytique aussi frais et pétillant qu'une coupe de champagne ! 

Eric Binford
3èx

Récompenses: Oscars 1983 : meilleure actrice dans un second rôle pour Jessica Lange
Golden Globes 1983 : meilleur film musical ou de comédie, meilleur acteur dans un film musical ou une comédie pour Dustin Hoffman, meilleure actrice dans un second rôle pour Jessica Lange
British Academy Film Awards 1984 : meilleur acteur pour Dustin Hoffman, meilleurs maquillages

mardi 24 octobre 2017

WIND RIVER. Prix de la mise en scène, Cannes 2017.

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site teaser-trailer.com

de Taylor Sheridan. 2017. U.S.A. 1h50. Avec Jeremy Renner, Elizabeth Olsen, Kelsey Chow, Jon Bernthal, Graham Greene, Julia Jones, Gil Birmingham.

Sortie salles France: 30 Août 2017. U.S: 4 Août 2017

FILMOGRAPHIE: Taylor Sheridan est un acteur, scénariste et réalisateur américain, né le 21 mai 1970 à Cranfills Gap au Texas, . 2011: Vile. 2017: Wind River.


Thriller choc d'une intensité dramatique aussi bouleversante qu'impitoyable, Wind River n'a pas volé son prix de la mise en scène à Cannes alors qu'il s'agit de la seconde réalisation du néophyte Taylor Sheridan. Ce dernier parvenant à tailler un suspense anxiogène autour d'un sordide fait divers (la découverte du cadavre d'une jeune indienne) qu'une agent du FBI et un chasseur vont tenter d'élucider en plein coeur de montagnes enneigées (magnifique paysages épurés). Intense et poignant quant à l'humanisme fragile que nos protagonistes véhiculent sans fard de par leur pudeur contenue et leur non-dit, Wind River nous immerge dans leur état de désagrément et d'impuissance morale sitôt les circonstances de la mort dévoilées ainsi que le chemin de croix que cette dernière parcourut en lieu et place de survie durant 10 kms dans une nature réfrigérante à - 30° ! Un exploit héroïque tenant du surpassement de soi auquel son ectoplasme va planer sur les épaules de nos héros durant leur investigation émaillée de rencontres ombrageuses cédant parfois aux brutaux éclairs de violence d'une vibrante intensité dramatique. Cet alliage d'émotions fulgurantes suscitant le vertige au spectateur (le + sensible) impliqué dans un règlement de compte d'une folie suicidaire !


Un peu comme l'avait d'ailleurs magnifiquement opéré Stanley Kubrick avec Full Metal Jacket (ou Spielberg avec le soldat Ryan...) lorsque les impacts de balles perforaient les chairs des victimes en émoi ou à l'agonie. La encore j'insiste sur le caractère éprouvant, voir résolument bouleversant de cette brutalité incisive que le réalisateur parvient à mettre en exergue avec un réalisme aride, et ce sans parti-pris racoleur. Notamment en tenant compte du caractère sournois du (ou des) coupable(s) compromis à la discrimination raciale et de rendre hommage avec vibrante humilité à cette victime sacrifiée en tenant compte de son exploit surhumain. Véritable oraison funèbre auprès des familles de défuntes tentant rigoureusement de se reconstruire après une tragédie aussi inique qu'impromptue, Wind River traite des thèmes douloureux du souvenir, de la survie, de la résilience, du dépassement de la souffrance avec une pudeur à fleur de peau et une ambiguïté morale quant à l'illégalité de l'auto-justice. Car outre la subtilité de sa mise en scène à sacraliser le "thriller" par le biais d'une caractérisation psychologique fouillée (et limpide) engendrant une réflexion sur la perte de l'être aimée, la providence et la canalisation de la souffrance, Wind River est illuminé par les présences des comédiens Jeremy Renner (un regard viril chargé de cicatrices morales derrière sa carapace stoïque) et Elizabeth Olsen (poignante d'empathie auprès de la victime et de son co-équipier puis de pugnacité durant son ascension professionnelle). Ces derniers formant de manière impromptue un duo commun de justiciers solidaires impliqués dans l'instinct de vengeance et l'initiation d'une survie propre à l'héroïsme.


Un coup de poignard en plein coeur, inextinguible. 
Hommage déchirant à la communauté amérindienne du point de vue d'une jeune martyr d'une endurance physique et morale symbolique, Wind River laisse en état de mutisme sitôt le générique écoulé. Le film s'édifiant en bouleversant requiem auprès des victimes sacrifiées au moment où leur famille se résigne à se reconstruire, entre fragilité démunie et regain de résilience. De mon point de vue personnel (puisque j'en sors traumatisé et que rares sont les films où leur saillie de brutalité me bouleverse aux larmes), Wind River constitue sans doute un chef-d'oeuvre intimiste sur la gestion de la souffrance et de la déveine, faute de la lâcheté de l'homme incapable de réprimer ses bas instincts. 

Bruno Dussart.

Récompenses: Prix Un certain regard, Prix de la mise en scène, Cannes 2017
Festival international du film de Karlovy Vary 2017 : prix du public pour Taylor Sheridan, prix du président pour Jeremy Renner

vendredi 20 octobre 2017

LES VIKINGS

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site cover.box3.net

"The Vikings" de Richard Fleischer. 1958. U.S.A. 1h55. Avec Kirk Douglas, Tony Curtis, Janet Leigh, Ernest Borgnine, James Donald, Alexander Knox, Maxine Audley

Sortie salles France: 15 Décembre 1958. U.S: 28 Juin 1958

FILMOGRAPHIE: Richard Fleischer est un réalisateur américain né le 8 décembre 1916 à Brooklyn, décédé le 25 Mars 2006 de causes naturelles. 1952: l'Enigme du Chicago Express, 1954: 20 000 lieux sous les mers, 1955: les Inconnus dans la ville, 1958: les Vikings, 1962: Barabbas, 1966: le Voyage Fantastique, 1967: l'Extravagant Dr Dolittle, 1968: l'Etrangleur de Boston, 1970: Tora, tora, tora, 1971: l'Etrangleur de Rillington Place, 1972: Terreur Aveugle, les Flics ne dorment pas la nuit, 1973: Soleil Vert, 1974: Mr Majestyk, Du sang dans la Poussière, 1975: Mandingo, 1979: Ashanti, 1983: Amityville 3D, 1984: Conan le destructeur, 1985: Kalidor, la légende du talisman, 1989: Call from Space.


Grand classique hollywoodien au pouvoir de fascination trouble, de par son réalisme historique surfant dans un contexte de spectacle flamboyant,  Les Vikings est bel et bien un chef-d'oeuvre du film d'aventures au souffle épique d'une étonnante envergure. A l'instar de sa spectaculaire bataille finale déployant gros moyens techniques et moult figurants sous l'oeil avisé de Richard Fleischer en pleine possession de ses ambitions. La vigueur des combats barbares se renouvelant sans cesse grâce au dynamisme du montage véloce exploitant aussi bien décors naturels que ceux de la bastille avec un brio d'autant plus formel (sa photo sépia sublimant sans modération des images picturales que l'on croirait extrait d'un bouquin d'histoire !).


Outre ce morceau d'anthologie à la fois immersif et palpitant, le récit se permet en prime de renchérir le goût du spectacle avec une diabolique efficacité lorsque Einar et Erik iront se combattre épées à la main sur la tour de la chapelle. Là encore, Fleischer chorégraphie ce corps à corps avec une inventivité constante car multipliant les angles de vues alambiqués au sein d'un cadre exigu édifié sous haute altitude ! En prime de la qualité percutante d'un jeu d'acteurs expansifs (le toujours aussi fringant Kirk Douglas se dispute ardemment la vedette avec Tony Curtis inopinément crédible dans sa posture bourrue d'esclave en quête d'affirmation et de rébellion héroïque !), Les Vikings bénéficie d'un scénario solide autour de la rivalité de deux frères pour autant indulgents car (inconsciemment lucides de leur parenté puis) communément contraints de collaborer afin de soutirer la promise du roi anglais, Aella. Janet Leigh se glissant dans le corps ténu de la princesse Morgane avec douce fragilité, tourments et perplexité quant à sa nouvelle condition de soumise en proie au chantage des vikings complaisamment machistes et belliqueux.


Décrivant dans un premier temps avec réalisme et souci du détail, fougue passionnelle et violence incisive (même si le hors-champs est souvent préconisé) les us et coutumes des vikings et leur goût pour la guérilla (notamment leur code d'honneur de périr avec l'épée afin de gagner le repos dans l'au-delà), Richard Fleischer parvient à infiltrer un souffle à la fois épique et romantique au fil d'un récit fertile en dissension psychologique lorsque les liens du sang fraternel sont compromis par un terrible secret autour des sentiments d'une promise. Envoûtant, sauvage et d'une beauté formelle capiteuse ! 

Bruno Dussart
2èx