vendredi 26 octobre 2018

LES FEMMES DE STEPFORD

Photo empruntée sur Google, appartenant au site bloody-disgusting.com

"The Stepford Wives/Le Mystère Stepford" de Bryan Forbes. 1974. U.S.A. 1h54. Avec Katharine Ross , Paula Prentiss, Peter Masterson, Nanette Newman, Tina Louise, Carol Eve Rossen, William Prince, Carole Mallory, Toni Reid, Judith Baldwin.

Date de sortie: 12 février 1975 (USA)

FILMOGRAPHIE: Bryan Forbes est un réalisateur de cinéma britannique, également acteur, producteur et scénariste, né John Theobald Clark à Londres le 22 juillet 1926. 1961 : Whistle Down the Wind , 1962 : La Chambre indiscrète,1964 : Le Rideau de brume,1964 : L'Ange pervers,1965 : Un caïd, 1966 : Un mort en pleine forme,1967 : Les Chuchoteurs,1968 : Le chat croque les diamants,  1969 : La Folle de Chaillot, 1971 : The Raging Moon, 1975 : Les Femmes de Stepford, 1976 : The Slipper and the Rose, 1978 : Sarah,1980 : Les Séducteurs   1982 : Ménage à trois, 1984 : The Naked Face, 1990 : The Endless Game (tv)


"Desperate Housewives"
Adapté d'un roman de Ira Levin (Rosemary's Baby), Les Femmes de Stepford se décline comme une diabolique satire caustique sur le sexisme. Un tableau saugrenu de la phallocratie évoquée à travers une anticipation horrifique d'une franche singularité. D'ailleurs, son potentiel misogyne engendra une pléthore de séquelles parmi lesquelles The Revenge of the Stepford Wives (téléfilm de 1980), The Stepford ChildrenThe Stepford Husbands, ou encore le remake aseptique de Frank Oz réalisé en 2004. Un couple vient s'installer dans la bourgade bucolique de Stepford, village situé dans le Connecticut où il fait bon vivre calme et sérénité. Joanna se lie d'amitié avec les voisines du quartier, particulièrement Bobby, jeune femme extravertie et affranchie n'hésitant pas à gloser la posture atone de certaines de ses collègues. Au fil des semaines, notre duo ne tarde pas à s'inquiéter du comportement non-sensique de ces dernières dénuées de caractère et et personnalité. Précurseur du génial Get out (autrement singé en satire anti-raciste), Bryan Forbes surprend autant qu'il ébranle à travers cette vision vitriolée de la guerre des sexes. Passée sa vénéneuse et trouble première partie ne laissant rien supposer de la montée en puissance du cauchemar domestique, Les Femmes de Stepford  amorce sensiblement une ambiance anxiogène délicatement diffuse à travers une banalité quotidienne étrangement épanouissante. Ces divers portraits de femmes de ménage à la fois obéissantes et dociles symbolisant la "famille modèle" avec un réalisme dérangeant feutré.


Qui plus est, et sans céder au grand-guignol de comptoir, Bryan Forbes recourt au pitch machiavélique inscrit dans l'irrationalité (irrésolue) pour mieux déranger le spectateur impliqué dans le désarroi et l'impuissance face au cauchemar domestique qui se dessine face à lui. Incroyablement maîtrisé donc au niveau de sa science d'un suspense studieux que n'aurait renié Sir Alfred HitchcockBryan Frobes recourt à la puissance de suggestion subtilement vénéneuse afin d'y dénoncer la place de la femme "objet" au sein du foyer conjugal lors d'une époque en mutation sociale (l'émancipation féminine à l'orée des Seventies). La charge satirique très féroce ciblant ouvertement le machisme du bourgeois sans vergogne afin de satisfaire son appétence sexuelle et son ego de supériorité. Authentique cauchemar cérébral établit du point de vue d'une héroïne frondeuse en proie à l'incompréhension la plus démunie puis en quête d'ultime vérité lors d'un point d'orgue à la fois oppressant, jusqu'au boutiste et extrêmement amer, les Femmes de Stepford vire à l'horreur la plus lâchement cruelle. Quand bien même le scénario initial envisagé par William Goldman était encore plus horrifiant ! Pour autant, à travers ses postures féminines statiques profondément troubles et dérangeantes; l'intensité de leur étude comportementale donne lieu à des moments d'anthologie parfois très impressionnants (Spoil ! à l'instar de l'amie décérébrée de Joanna blessée d'un coup de poignard dans sa cuisine Fin du Spoil). Outre un casting charismatique irréprochable (tant auprès des hommes virils que des femmes soumises), les Femmes de Stepford ne serait pas aussi "authentique" sans le talent viscéral de Katharine Ross ! D'un charisme lestement sensuel et pleine de maturité, notamment auprès de l'intensité de son regard noir naviguant entre douceur et contrariété, Katharine Ross idéalise avec force de caractère une ambitieuse photographe peu à peu envenimée par l'appréhension d'une psychose ingérable au point d'en bouleverser sa destinée programmée ! 


"Sois belle et tais-toi." 
Chef-d'oeuvre d'étrangeté horrifique au climat insidieux aussi claustro que glaçant, Les Femmes de Stepford empoisonne progressivement le spectateur dans un délire cauchemardesque où l'effroi gagne du terrain de par son suspense exponentiel à la dramaturgie escarpée. Sa conclusion sardonique, limite traumatisante, provoquant une éprouvante aigreur chez les plus empathiques d'entre nous. Pastiche corrosif sur l'émancipation féminine durant la révolution des Seventies, les Femmes de Stepford demeure hélas tristement actuel au sein de notre société ultra conservatrice où les discordes homme / femme n'auront jamais été perçues aussi intolérantes et répressives. A redécouvrir d'urgence !

* Bruno
26.10.18. 3èx
11.01.11. (231 vues)

jeudi 25 octobre 2018

LA NUIT DE LA METAMORPHOSE. Licorne d'Or au Rex de Paris.

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

"Izbavitelj / The Rat Savior" de Krsto Papic. 1976. Yougoslavie. 1h16. Avec Ivica Vidovic, Mirjana Majurec, Relja Basic, Fabijan Sovagovic, Ilija Ivezic.

FILMOGRAPHIEKrsto Papic est un metteur en scène yougoslave né le 7 décembre 1933 attitré d'un palmarès de 22 longs-métrages réalisés entre 1967 et 2003 ! En France, La nuit de la métamorphose eut l'opportunité de sortir en salles seulement 5 ans plus tard, précisément le 21 Janvier 1981.


Le pitch: En 1930, un jeune romancier, auteur d'un récit fantastique que personne ne souhaite éditer, est expulsé de son domicile faute de payer son loyer. Livré à lui même et sans le sou il parvient néanmoins à se réfugier dans les souterrains d'une banque désaffectée avec l'appui d'une ancienne connaissance. C'est alors qu'il devient témoin d'une étrange confrérie se livrant sans complexe aux orgies culinaires et lubriques !

Ovationné par la Licorne d'or et le prix du Meilleur Scénario au festival du film fantastique de Paris au Rex et récompensé du Grand Prix au festival de Trieste, La Nuit de la Métamorphose est un ovni rare et précieux parvenant sans esbroufe ni fioriture à rendre crédible un argument fantastique inusité ! A savoir qu'une ligue de rats parvient ici à adopter une apparence humaine lors d'un contexte de crise sociale. Et ce dans le simple but de nous asservir après nous avoir réduit au chômage et à la famine. Et donc derrière l'alibi de cette menace animale d'un genre nouveau s'y profile une allégorie sur la cupidité bureaucrate et les régimes fascisants à l'aube du Nazisme d'Hitler (pour rappel, l'action se déroule en 1930). Au-delà de son suspense lattent franchement accrocheur, la densité de l'intrigue est bien entendu de parvenir à nous convaincre de cette suprématie animale par le biais de sobres trucages pour autant très convaincants. L'oeuvre éclairée d'une superbe photo sépia se déroulant à travers une reconstitution historique hyper réaliste, aussi modeste soit sa scénographie urbaine constamment insalubre et clairsemée.


Ainsi, durant tout le récit, nous allons suivre l'obscure investigation de cet écrivain frondeur témoin d'une découverte macabre lors d'un banquet tenu secret. Tant et si bien qu'il décidera un peu plus tard de s'affilier auprès d'un éminent chimiste ayant parvenu à façonner un sérum afin d'éradiquer ses rats mutants contagieux. Particulièrement cibler le "sauveur" d'entre eux destiné à exterminer notre race ! Une lutte sans merci et désespérée s'engagera donc entre notre duo érudit et les rats humains davantage menacés mais tout bonnement insidieux pour se fondre à travers la population humaine.  L'intrigue constamment sombre et inquiétante diluant à merveille une prégnante ambiance mortifère où plane un sentiment d'insécurité sous-jacent, notamment si je me réfère au sort précaire du romancier et de la fille du professeur en étreinte amoureuse. Outre le caractère haletant puis davantage horrifique de sa dernière demi-heure (notamment pour la condition mutante de détenus humains "traités" dans une géôle infestée de rats carnassiers !), la Nuit de la Métamorphose n'hésite pas à renchérir dans la cruauté et l'amertume à travers une conclusion en demi-teinte car ambiguë pour la remise en question morale de l'écrivain en proie au doute, à la psychose et au remord. Le spectateur s'interrogeant avec gravité sur le sens optimiste ou pessimiste de sa dernière image aux destinées incertaines. Pour en revenir en 2 mots aux maquillages aussi concis que très réussis, on reste impressionné par l'apparence fétide des rats humains, de par leur défroque ténébreuse, leurs petits yeux viciés, leurs traits de visage discrètement velues et leur commissure parfois contrastée au centre de deux dents de belette.


De par son pouvoir de fascination hypnotique à travers la puissance atmosphérique de son imagerie crépusculaire, La Nuit de la Métamorphose offre ses lettres de noblesse au cinéma Fantastique yougoslave avec un réalisme étonnamment percutant. Fable à la fois inquiétante et passionnante sur la cupidité de notables affamés de pouvoir, ce chef-d'oeuvre maudit bénéficie en outre d'une étonnante distribution méconnue du public français s'identifiant d'autant mieux à leur caractérisation suspicieuse. Ce qui n'enlève en rien à leur charisme saillant pour la plupart d'entre eux ! Du grand art ! 

* Bruno
25.10.18 4èx
05.08.10 (208 vues)

. Licorne d'or et du Prix du Meilleur Scénario au festival du film fantastique de Paris au grand Rex.
Grand Prix du festival du film fantastique de Trieste

mercredi 24 octobre 2018

BlacKkKlansman - J'ai infiltré le Ku Klux Klan. Grand Prix, Cannes 2018

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Spike Lee. 2018. U.S.A. 2h15. Avec John David Washington, Adam Driver, Laura Harrier, Topher Grace, Corey Hawkins, Jasper Pääkkönen, Paul Walter Hauser, Ryan Eggold

Sortie salles France: 22 Août 2018. U.S: 10 Août 2018

FILMOGRAPHIESpike Lee de son vrai nom Shelton Jackson Lee, né le 20 mars 1957 à Atlanta (Géorgie, États-Unis), est un scénariste, réalisateur et producteur américain.1983 : Joe's Bed-Stuy Barbershop: We Cut Heads. 1986 : Nola Darling n'en fait qu'à sa tête. 1988 : School Daze. 1989 : Do the Right Thing. 1990 : Mo' Better Blues. 1991 : Jungle Fever. 1992 : Malcolm X. 1994 : Crooklyn. 1995 : Clockers. 1996 : Girl 6. 1996 : Get on the Bus. 1998 : He Got Game. 1999 : Summer of Sam. 2000 : The Very Black Show. 2002 : La 25e Heure. 2004 : She Hate Me. 2006 : Inside Man. 2008 : Miracle à Santa Anna. 2012 : Red Hook Summer. 2013 : Old Boy. 2014 : Da Sweet Blood of Jesus. 2015 : Chi-Raq. 2018 : BlacK.


Hormis une première partie un peu trop laborieuse selon mon jugement de valeur, Blackkklansman se décline comme une percutante diatribe anti-raciste à travers le spectre du Ku Klux Klan tristement actuel. Tant et si bien que Spike Lee, plus que jamais inspiré (réal chiadée émaillée de splendides cadrages alambiqués, photo rutilante, humour corrosif, casting aux p'tits oignons, reconstitution fidèle des Seventies, BO gracile), conclue leur fanatisme suprémaciste à l'aide de terrifiantes images d'archive d'une violence insupportable. Et ce en pointant ouvertement du doigt la politique arbitraire de Trump excusant de manière résolument triviale la haine (monomane) de ces néo-nazis.

Récompenses: Festival de Cannes 2018 : Grand prix
Festival international du film de Locarno 2018 : prix du public

Box Office Français: 1 240 181 entrées

mardi 23 octobre 2018

DEUX HEURES MOINS LE QUART AVANT JESUS CHRIST

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site ekladata.com

de Jean Yanne. 1982. France. 1h37. Avec Coluche, Michel Serrault, Jean Yanne, Michel Auclair, Françoise Fabian, Mimi Coutelier, Darry Cowl, Paul Préboist, Daniel Emilfork, André Pousse, Michel Constantin, Philippe Clay, José Artur, Yves Mourousi, Léon Zitrone, Valérie Mairesse.

Sortie salles France : 6 octobre 1982

FILMOGRAPHIE: Jean Yanne (Jean Gouyé) est un acteur, humoriste, écrivain, réalisateur, chanteur, producteur et compositeur français, né le 18 juillet 1933 aux Lilas et mort le 23 mai 2003 à Morsains. 1972 : Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. 1973 : Moi y'en a vouloir des sous. 1974 : Les Chinois à Paris. 1975 : Chobizenesse. 1978 : Je te tiens, tu me tiens par la barbichette. 1982 : Deux heures moins le quart avant Jésus-Christ. 1984 : Liberté, égalité, choucroute.


Flingué par la critique de l'époque malgré ses 4 601 239 entrées (3è au box-office après E.T et l'As des As !), 2 heures moins le quart avant Jésus-Christ parodie l'histoire romaine à l'aide d'un pitch uchronique finissant par lasser si je me réfère à ses multiples références politiques, publicitaires et audiovisuelles, et à sa poussive dernière partie lorsque Ben-Hur Marcel (endossé par un Coluche  aussi peu motivé que mal exploité) se confronte aux enjeux sportifs. Ainsi, hormis quelques rares bons gags, des seconds-rôles assez cocasses (Paul Bréboist en géôlier sarcastique) et surtout le numéro d'acteur emphatique de Michel Serrault en empereur gay, 2 heures moins le quart avant Jésus-Christ flirte avec la médiocrité (pour ne pas dire la nullité lors de ces gags les plus lourdingues et du jeu parfois insupportable de Mimi Coutelier en Cléopâtre versatile). Bref, ce grand n'importe nawak terriblement daté est représentatif de sa scénographie en carton pâte si bien que l'on a connu Jean Yanne autrement plus inspiré devant et derrière la caméra, et ce même si ses intentions satiriques étaient louables (se railler de la condescendance de nos exécutifs rupins).

* Bruno
2èx

lundi 22 octobre 2018

VOUS N'AUREZ PAS L'ALSACE ET LA LORRAINE

                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site ekladata.com

de Coluche. 1977. France/Belgique. 1h32. Avec Coluche, Dominique Lavanant, Gérard Lanvin, Olivier Constantin, Anémone, Martin Lamotte, Michel Blanc, Philippe Bruneau.

Sortie salle France: 19 Octobre 1977

FILMOGRAPHIE: Michel Colucci, dit Coluche, est un humoriste, comédien et réalisateur français, né le 28 octobre 1944 à Paris, décédé le 19 juin 1986 à Opio (Alpes-Maritimes).


En dépit de plusieurs gags lourdingues et d'une réalisation dilettante, l'unique mise en scène de Coluche est un divertissement bonnard se raillant de l'histoire de France (et de ces snobinards !) avec une bonne humeur décomplexée. Car au-delà d'une intrigue étique prétexte à gags, actions et quiproquos (un roi déchu tente de reprendre sa couronne avec l'aide de sa cousine et d'un chevalier blanc chansonnier - interprété par un Gérard Lanvin étonnamment à l'aise ! -), Vous n'aurez pas l'Alsace et la Lorraine parvient à nous arracher quelques rires et plusieurs sourires sous l'impulsion de têtes d'affiches issues de l'équipe du Spendid (même si Balasko manque à l'appel) et du café de la gare. Ainsi, grâce à leur spontanéité expansive, le spectacle parodique volontiers trivial parvient à amuser aussi zédifiante soit l'entreprise de Coluche plutôt mal à l'aise derrière la caméra. D'ailleurs, déçu du résultat, il ne réitéra pas l'expérience en dépit de ses 810 839 entrées (un maigre score si bien qu'en 1977 le film se classe en 44è position). Pour autant, sa prestation parfois hilarante en roi couard et obséquieux permet à chacune de ses interventions souveraines (et déplacements héroïques) de diluer un charme innocent au fil d'une aventure bondissante semblable à une BD mal élevée. A redécouvrir d'un oeil distrait.

* Bruno
2èx

vendredi 19 octobre 2018

LE MAITRE D'ECOLE

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site ekladata.com

de Claude Berri. 1981. France. 1h35. Avec Coluche, Josiane Balasko, Jacques Debary, Charlotte de Turckheim, Roland Giraud, André Chaumeau, Jean Champion.

Sortie salle France: 28 Octobre 1981

FILMOGRAPHIE: Claude Langmann, dit Claude Berri, est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur français, né le 1er juillet 1934, décédé le 12 janvier 2009. 1964: Les Baisers (segment « Baiser de 16 ans »). La Chance et l'amour (segment « La Chance du guerrier »). 1966: Le Vieil homme et l'enfant. 1968 Mazel Tov ou le Mariage. 1969: Le Pistonné . 1970: Le Cinéma de papa. 1972: Sex-shop. 1975: Le Mâle du siècle. 1976: La Première fois. 1977: Un moment d'égarement. 1980: Je vous aime. 1981: Le Maître d'école. 1983: Tchao Pantin. 1986: Jean de Florette. Manon des sources. 1990: Uranus. 1993: Germinal. 1996: Lucie Aubrac. 1999: La débandade. 2001: Une femme de ménage. 2004: L'Un reste, l'autre part. 2006: Ensemble, c'est tout. 2009: Trésor.


Comédie scolaire pleine de légèreté, de cocasserie et d'humanisme sous l'impulsion d'enfants turbulents et d'un instituteur suppléant s'efforçant de les éduquer avec un amateurisme payant, le Maître d'école parvient à séduire notamment grâce au talent de son auteur Claude Berri. Ce dernier dirigeant les marmots (anti têtes à claque !) avec souci de réalisme documenté eu égard du jeu expressif car criant de naturel des comédiens infantiles. On peut d'ailleurs s'interroger sur l'éventuelle improvisation de certaines séquences scolaires tant les enfants parviennent communément à communiquer leurs émotions avec une candeur dépouillée. Quant à la présence notoire de Coluche  (bordel, comme tu nous manques !), il se fond admirablement dans le corps enseignant avec une attachante maladresse à travers son désir d'éveiller l'esprit des enfants ("les inciter à réfléchir par eux mêmes" évoqueront le directeur ainsi qu'un conseiller pédagogue). L'acteur particulièrement complice auprès d'eux militant pour la révérence, la compréhension, le discernement, la tolérance afin de parfaire patiemment leur éducation.


Au-delà de son climat à la fois tendre et pittoresque, le film aborde en filigrane des thèmes majeurs de l'époque, telle la signification de l'homosexualité ("ce n'est pas une maladie" s'exclamera Coluche aux enfants en proie à l'incompréhension !) et la question de la peine de mort et du syndicat au moment même où l'école traverse une crise socio-politique de par son manque d'effectif à trouver un remplaçant après la dépression d'une enseignante (fraîchement incarnée par une Josiane Balasko  juvénile au bord de la crise de nerf). Et si l'intrigue assez routinière et peu surprenante pâtie de substantialité, le Maître d'école est transcendé par le touchant parcours initiatique du suppléant en proie à l'ambition pédagogue auprès d'une génération infantile en formation cérébrale. Témoignage nostalgique de cette génération 80 déjà soucieuse de la progression du chômage et de la haine du racisme. Pour autant, et dans son parti-pris assumé de nous divertir avec simplicité (notamment à travers les récurrentes batailles de nourriture à la cantine et chahuts dans les cours), Claude Berri compose le plus sincèrement quelques séquences assez drôles ou cocasses lors de confrontations entre élèves et instituteurs, et ce avant de nous susciter un sourire jovial de bambin autour (du bouquet final) d'un mariage festoyant. Les élèves invités à la réception se confondant aux adultes lors d'une danse frétillante que Richard Gotainer compose à travers un tube décalé. Pour ma part une vraie séquence anthologique dans son alliage si expansif de bonne humeur, d'insouciance et de ferveur communicatives que les acteurs insufflent avec une décontraction en roue libre ! Les spectateurs de l'époque y ont d'ailleurs été conquis puisque le Maître d'école cumula plus de 3 105 596 entrées !

* Bruno
3èx

jeudi 18 octobre 2018

ERREMENTARI. Prix du Public, San Sebastian, 2017.

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Le forgeron et le diable" de Paul Urkijo. 2017. France/Espagne. 1h39. Avec Kandido Uranga, Uma Bracaglia, Eneko Sagardoy, Ramón Aguirre, José Ramón Argoitia, Josean Bengoetxea, Gotzon Sanchez.

Diffusé sur Netflix le 17 Octobre 2018. Sortie salles Gerardmer: 3 Février 2018.

FILMOGRAPHIEPaul Urkijo Alijo est un réalisateur, scénariste et producteur espagnol, né le 22 Juin 1984. 2017: Errementari.


"Comptez les pois chiches !"
Ovni ibérique passé par la lucarne Netflix, Errementari est une expérience visuelle hors du commun, un choc esthétique démonial à la lisière du cinéma gothique de Mario Bava et du conte de fée occulte initié par Ridley Scott depuis Legend. C'est simple, depuis cette oeuvre culte (perfectible et maladroite mais visuellement tant gracile) on n'avait pas reluqué au cinéma un Belzébuth aussi expressif, rutilant et persifleur dans sa posture contrairement soumise si bien que le néophyte Paul Urkijo (il s'agit de sa toute 1ère réal !) se permet en outre d'illustrer en point d'orgue son cocon familial comme si vous y étiez !!! Car il faut savoir qu'à travers cette fulgurance esthétique littéralement picturale nous avions affaire à la plus belle vision de l'enfer depuis les expérimentations métaphysiques de Ken Russel (Au-delà du Réel), José Mojica Marins (l'Eveil de la Bête) ou encore de Riccardo Freda (Maciste en Enfer dans un domaine autrement kitch et bisseux). Quant au pitch à la fois loufoque, inquiétant, insolent et décomplexé, il demeure un concentré d'émotions hybrides (pour ne pas dire génialement contradictoires !) si bien que le spectateur éminemment ensorcelé par sa facture ténébreuse renoue avec son âme d'enfant avec des yeux d'émerveillement ! (du moins chez tous les férus de conte de fée au goût délicieusement frelaté de cauchemar gothique). Paul Urkijo, infiniment très inspiré et jamais à court d'inventions (cartoonesques) et retournements de situations, ne cessant de nous surprendre et donner le tournis à travers une scénographie d'une puissance enchanteresse hyper réaliste !


Notamment de par sa photo léchée ultra contrastée (éclairée de gélatines rouges, ocres et azur) et ses décors naturels d'une fulgurance onirique à damner le saint le plus timoré ! Mais pour en revenir à l'histoire inspirée d'une illustre légende (et produite par Alex de la Iglesias, excusez du peu !), la voici brièvement condensée: Après avoir voué un pacte avec le diable afin de rester en vie pour retrouver sa femme après la guerre (carliste) de 1835, un forgeron parvient à le kidnapper au sein de sa forge customisée en forteresse. 8 ans plus tard, et de manière résolument aléatoire, il se lie d'amitié avec une orpheline dans un concours de circonstances fureteuses et hostiles, notamment eu égard d'un mystérieux ministre et des villageois résignés à se débarrasser de lui depuis sa sinistre réputation criminelle.  L'art suprême du cinéma chimérique, c'est parvenir avec passion, intégrité, goût du réalisme et ambition singulière à nous faire croire à l'improbable ! Parvenir à travers une temporalité minimaliste (comptez ici 1h38, générique compris, bon dieu que le temps s'épuise vite !) à nous évader au coeur d'un univers de fantasy où fantastique, gothisme, horreur et humour macabre se télescopent avec une fluidité insoupçonnée. Car si Errementari parvient autant à fasciner, amuser et attiser notre curiosité, il le doit autant au développement indécis de sa narration plus intelligente et tendre qu'elle n'y parait (notamment auprès des valeurs familiales que le duo cultive incidemment et du sens du sacrifice pour l'enjeu d'une rédemption) et à ces personnages complètement décalés et au caractère bien trempé que le cinéaste imprime sur pellicule dans un esprit bonnard étonnamment débridé, héroïque et sardonique. Imaginez simplement de parcourir en images, les yeux pleins d'étoiles, une destinée inusité, une guerre aussi improbable qu'impitoyable entre un simple forgeron et un diablotin cabotin ! Pire encore, imaginez ce même forgeron arpenter à l'aide d'une immense cloche or massif l'antre de l'enfer à l'instar d'un Maciste sclérosé pour autant mastard !


Patxi en Enfer
Bref, arrêtons nous là, j'en ai déjà trop dit, ruez vous le plus naturellement du monde sur cette pépite hispanique après avoir déboursé votre ticket pour l'enfer, quitte à ne plus jamais y revenir. Où plutôt avec la volonté irrépressible d'y retourner afin de savourer (sans modération) les tribulations génialement grotesques, infernales et jouissives de Patxi et Usue ! Sans compter que Paul Urkijo vient d'estampiller sur sa bobine novice (et de manière impromptue !) le plus grand héros lambda de tous les temps ! 

* Bruno

Récompense: Prix du Public du 28e Festival du Cinema Fantastique et de Terreur de San Sebastian, an 2017

THE HAUNTING OF HILL HOUSE

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Mike Flanagan. 2018. U.S.A. 10 x 55'. Avec Michiel Huisman, Carla Gugino, Henry Thomas, Elizabeth Reaser, Oliver Jackson-Cohen, Kate Siegel, Victoria Pedretti, Lulu Wilson, Mckenna Grace, Paxton Singleton, Julian Hilliard, Violet McGraw, Timothy Hutton.

Diffusé sur Netflix le 12 Octobre 2018 

FILMOGRAPHIE: Mike Flanagan, né en 20 mai 1978 à Salem (Massachusetts), est un cinéaste américain. 2000 : Makebelieve. 2001 : Still Life. 2003 : Ghosts of Hamilton Street. 2006 : Oculus: Chapter 3 - The Man with the Plan. 2011 : Absentia. 2013 : The Mirror (Oculus). 2016 : Pas un bruit (Hush). 2016 : Before I Wake. 2016 : Ouija : les origines. 2017 : Jessie (Gerald's Game). 2018: The Haunting of Hill house (TV). 2020: Dr Sleep.


THE HAUNTING OF HILL HOUSE ou la série qui fit de Mike Flaganan un grand nom de l'épouvante !

Quand on y repense a posteriori du visionnage de la série, "The Haunting of Hill House" n'avait finalement pas beaucoup d'arguments originaux pour attiser notre curiosité. Son statut d'anthologie horrifique ? Face au succès, les séries de ce type prolifèrent ces dernières années, Netflix se devait seulement d'avoir la sienne pour surfer sur la vague. Une histoire de maison hantée ? À part quelques exceptions, le cinéma d'épouvante mainstream US tourne en rond sur le sujet en répétant inlassablement les mêmes jumpscares jusqu'à l'overdose et, à la télévision, récemment, seule la première saison de "American Horror Story" a marqué les esprits avec ce sujet et ce format mais en bousculant les règles afin de créer son propre ton si particulier qui a fait sa renommée. Une nouvelle adaptation du roman de Shirley Jackson ? Malgré son casting de luxe, la dernière en date, l'insipide "Hantise" de Jan de Bont, n'a pas laissé un souvenir impérissable.
Non, en fait, à bien y repenser, il n'y avait décidément pas beaucoup d'arguments pour justifier l'enthousiasme autour d'un tel projet... excepté peut-être un nom, celui de Mike Flanagan.
Pour les amateurs de (bon) cinéma de genre, la seule évocation de ce cinéaste a suffit à faire de "The Haunting of Hill House" un projet suscitant les plus vives attentes. Réalisateur touche-à-tout dans le domaine de l'épouvante, Mike Flanagan est devenue un nom incontournable avec une filmographie en constante progression qualitative où les excellents faits d'armes ne cessent d'enchaîner. Dernièrement, il a d'ailleurs miraculeusement signé une suite potable au catastrophique "Ouija" (une ovation rien que pour ça) et une des meilleures adaptations d'un roman de Stephen King, "Jessie", avant de prochainement rempiler avec une autre très attendue, "Dr Sleep". Autant dire qu'avec tout ça, le bonhomme était déjà considéré comme un grand en devenir... "The Haunting of Hill House" va tout simplement nous démontrer qu'il en est désormais un.


La première grande force de la série est de s'éloigner intelligemment de l'histoire d'origine (après tout, comment faire mieux que la version de Robert Wise en terme d'adaptation ?) pour n'en garder que l'essence de maison hantée pernicieuse et quelques noms bien connus. Le contexte surnaturel est donc bel est bien là mais il n'est ici que l'instrument métaphorique servant à dérégler un récit se focalisant avant tout sur une famille rongée par les non-dits d'une tragédie. Éclaté principalement sur deux époques, "The Haunting of Hill House" nous raconte en parallèle les événements engendrés par l'influence de la mystérieuse demeure qui ont conduit à la mort de la mère et leurs ravages des années plus tard sur les cinq enfants portant encore plus ou moins consciemment cette cicatrice à jamais inexpliquée. Le drame humain qui se joue est véritablement le coeur de la série, sa construction le traduit d'ailleurs sans peine. Les premiers épisodes se fixent ainsi sur chacun des enfants pour renvoyer sans cesse leurs souffrances présentes à des fragments de cette période vécue par chacun dans la maison et, surtout, la série va s'articuler autour de deux points-clés, deux "nuits" dont on ne sait rien : le drame premier de leur mère, celui les ayant séparé et devenant clairement le brouillard à dissiper afin de comprendre tous les tenants et aboutissants en bout de course, et un malheur contemporain qui va les pousser à se réunir, à enfin confronter leurs tourments existentiels les dévorant depuis leur jeunesse à jamais traumatisée.
Le passage de ces enfants insouciants dans la flippante Hill House aura donné naissance à Steven, un auteur ayant trahi la confiance des siens en racontant un récit auquel il ne croit même pas, Shirley, une entrepreneuse de pompes funèbres psychorigide, Luke, un toxicomane au comportement aussi destructeur pour lui que pour son entourage, Theodora, une psychologue se sentant obligée de s'isoler à cause d'une malédiction qui lui est propre et Nell, une jeune femme poursuivie par des apparitions de sa jeunesse...


Les maux du présent des enfants de la famille Crain sont donc bien issus de portes non refermées sur leur passé par le lien qu'ils entretiennent plus ou moins explicitement avec lui. Celui de Nell est le plus évident et la première moitié de saison va s'articuler autour de ce mystère/fil rouge pour déboucher sur un extraordinaire cinquième épisode, petit chef-d'oeuvre à lui tout seul avec ses dernières minutes laissant bouche bée de surprise et mini-conclusion en quelque sorte à une longue période de déchirements des personnages amenés désormais à se réunir par la force du destin. Les retrouvailles ne se feront pas sans heurts mais la nécessité de lever le voile sur cette période de leur vie qui les poursuit sera la plus forte et mettre un terme à des décennies d'ombres dans leur vie passera forcément par la fin du silence de leur père...
"The Haunting of Hill House" est donc d'abord l'histoire d'un drame familial habité par des personnages passionnants dont les portraits travaillés par des ricochets passé/présent jamais aléatoires ne cessent de renforcer notre attachement envers eux grâce à une écriture confinant à la perfection. On ne vous en dira pas plus mais sachez juste que la reconstruction difficile de cette cellule familiale dissoute à la fois par l'impossibilité du deuil, par l'irrationalité d'un passé qu'elle ne peut/veut reconnaître et par le sacrifice d'un père croyant bien faire pour épargner la vérité d'une tragédie à ses enfants se conclura de la manière la plus brillante qu'il soit en faisant monter la justesse des émotions qui habitent le propos à son paroxysme...


Mais "The Haunting of House Hill" se devait bien sûr aussi de faire sérieusement monter la jauge du trouilllomètre pour ne pas faillir à la réputation de l'oeuvre dont elle s'inspire. Mike Flanagan l'a bien compris et, au cours des dix épisodes qu'il réalise intégralement (chose rare), le réalisateur va revenir à la base d'un surnaturel dont on croit tout connaître pour être en adéquation totale avec le réalisme du drame et de ses personnages.
Là où un James Wan ne sait plus quoi dire et est parti vers d'autres horizons en confiant les clés de son univers "Conjuring" à d'autres dans l'espoir qu'ils le renouvellent, Mike Flanagan, lui, paraît n'en être qu'au début de son potentiel dans le domaine au vu de l'inventivité constante dont il fait preuve. Même s'il utilise quelques incontournables du genre (il y a bien des jumpscares mais, utilisés avec parcimonie et sans abus, ils ne sont qu'un instrument parmi tant d'autres pour véhiculer la peur), le cinéaste mise avant tout sur l'atmosphère de la fameuse maison hantée qui, à l'instar des personnages, nous enveloppe pour ne plus nous lâcher. En jouant avec les codes de l'épouvante par une mise en scène habile qui ne tombe jamais dans le surplus artificiel d'apparitions, chaque pièce sombre de la demeure tout aussi sinistre que magnifique (elle est un personnage à part entière) devient susceptible d'abriter une menace surnaturelle, nous mettant dans une tension permanente à guetter chacune des manifestations étranges qu'elles peuvent receler (celles-ci sont d'ailleurs parfois dissimulées furtivement en arrière-plan dans le but de renforcer le trouble sur ce que vient de voir le spectateur). Et puis, la grande majorité des occupants fantômes de la maison sont de vrais réussites, chacun empruntant quelque chose de viscéralement primaire aux terreurs qu'ils cherchent à exprimer (l'homme à la canne rappelle presque un dessin d'enfant dans sa représentation par exemple), ne faisant que renforcer leur impact dès qu'ils surgissent à l'écran.
Cette variété d'êtres paranormaux couplée à la réalisation subtile et toujours en recherche du meilleur moyen d'insuffler de la peur d'un Flanagan en état de grâce font de "The Haunting of Hill House" un summum d'ambiance de l'épouvante comme on en n'avait plus connu depuis longtemps, le fait que cela provienne du format si particulier d'une série en est d'autant plus impressionnant.


Enfin, impossible de ne pas souligner une distribution d'acteurs tous au diapason de la qualité de l'ensemble. Que cela soit les enfants (les déjà presque vétérantes McKenna Grace et Lulu Wilson sont bluffantes mais les interprètes des petits jumeaux ne sont pas en reste) ou les adultes joués par des têtes bien connues du cinéma de Flanagan (son épouse Kate Siegel, Elizabeth Reaser, Henry Thomas, ...), l'ensemble du casting semble conscient de la partition parfaite qu'il lui est offert et s'en empare à sa juste mesure. On s'arrêtera aussi plus particulièrement sur les prestations démentes de celles qui sont au coeur des deux événements centraux de la série : la révélation Victoria Pedretti dans le rôle de Nell adulte (ce n'est que son premier rôle, punaise !) et la confirmation Carla Gugino, actrice trop souvent cantonnée à des seconds rôles mais au talent indéniable que Flanagan met en avant depuis "Jessie".

Avec "The Haunting of the Hill House", Mike Flanagan ridiculise tout simplement un nombre inquantifiable de produits formatés d'un certain cinéma d'épouvante US qui ne sait plus comment effrayer le spectateur autrement qu'en empilant des jumpscares risibles. En mettant le drame humain à hauteur égale avec le surnaturel, le cinéaste a tout simplement réussi un miracle d'équilibre entre la peur et les larmes et ce, sur la durée incroyable de dix heures sans jamais faillir. Bref, vous l'aurez compris, "The Haunting of Hill House" est probablement une des (la ?) meilleures anthologies d'épouvante jamais réalisées et qui consacre son créateur comme un des très grands noms du genre pour les années à venir. Un bijou de la première à la dernière minute qu'il est interdit de manquer....

Frederic Serbource.

mercredi 17 octobre 2018

LA FEMME DE MON POTE

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site ekladata.com

de Bertrand Blier. 1983. France. 1h40. Avec Coluche, Thierry Lhermitte, Isabelle Hupert, François Perrot, Daniel Colas, Frédérique Michot, Farid Chopel.

Sortie salles France: 31 Août 1983.

FILMOGRAPHIE: Bertrand Blier est un réalisateur, scénariste et écrivain français, né le 14 mars 1939 à Boulogne-Billancourt.1967 : Si j'étais un espion. 1974 : Les Valseuses. 1976 : Calmos. 1978 : Préparez vos mouchoirs. 1979 : Buffet froid. 1981 : Beau-père. 1983 : La Femme de mon pote. 1984 : Notre histoire. 1986 : Tenue de soirée. 1989 : Trop belle pour toi. 1991 : Merci la vie. 1993 : Un, deux, trois, soleil. 1996 : Mon homme. 2000 : Les Acteurs. 2003 : Les Côtelettes. 2005 : Combien tu m'aimes ? 2010 : Le Bruit des glaçons. 2019 : Convoi exceptionnel.


"Le meilleur souvenir que garde une femme d'une liaison c'est l'infidélité qu'elle lui a faite." 
Tendre comédie acide fondée sur les rapports insidieux d'un triangle amoureux en proie au doute et à la ferveur de la passion, La Femme de mon pote est servi par de formidables acteurs sous la houlette de l'auteur Bertrand Blier maîtrisant son sujet avec la personnalité corrosive qu'on lui connait (notamment à travers ses dialogues plutôt chiadés !). Alors que Pascal multiplie les conquêtes  féminines grâce à son physique plutôt avantageux, son meilleur pote Micky lui sermonne à nouveau la morale de ne plus tomber amoureux d'une inconnue depuis sa nouvelle fréquentation avec la séduisante Viviane. Or, à son tour Micky se laisse aguicher par les avances de cette dernière experte dans l'art de duper ses proies masculines. Comédie aigre douce abordant avec humanité et sensibilité les thèmes de l'infidélité et de la trahison par le biais d'une amitié indéfectible, La Femme de mon pote provoque une émotion empathique lorsque deux meilleurs amis cèdent finalement à la médiation faute du pouvoir vénéneux, pour ne pas dire irrépressible de l'amour. Bertrand Blier n'accusant jamais ses personnages à la fois fragiles, torturés et contrariés de par l'ivresse sentimentale qu'ils s'adonnent avec autant de remord et contradiction dans leur soif de chérir et d'être aimé.


Si Thierry Lhermitte et Coluche forment une complicité versatile à travers leur solide amitié subrepticement écornée par les sentiments de lâcheté et de solitude, la pétillante Isabelle Huppert  rivalise de douce exubérance en allumeuse instable pour autant affublée d'une inopinée tendresse pour ses ultimes prétendants. A travers leurs situations conjugales sensiblement cocasses et parfois cruelles, ils forment un trio masochiste en amants trompés avec l'espoir d'emporter la mise pour servir leur ego. A titre subsidiaire, on peut rappeler que le récit s'inspire d'une histoire vraie si bien que Coluche eut une liaison avec l'ex d'un de ses meilleurs amis Patrick Dewaere, décédé récemment avant la sortie du film. D'ailleurs, initialement, celui-ci et Miou Miou devaient mutuellement incarner les rôles de Pascal et Viviane, mais face à la soudaine tragédie Miou Miou réfuta le rôle quand bien même Coluche faillit également se désister du tournage avant de se raviser, à regret, si bien qu'il garde un mauvais souvenir du tournage (notamment en rapport à son addiction pour la drogue). Enfin, les critiques de l'époque ne furent guère tendres pour soutenir le nouveau Bertrand Blier (un peu moins ambitieux que ces précédentes réussites il est vrai !) alors que le public se déplaça dans les salles avec 1 485 746 entrées.


D'une surprenante et attachante tendresse mélancolique entre 2,3 verves pittoresques, La Femme de mon pote milite avant tout pour la fidélité amicale afin de se préserver des exubérances (ambivalentes) de l'amour le plus insolent et aguicheur. A revoir ne serait ce que pour le trio Lhermitte / Coluche / Huppert (plus belle que jamais !) assez impliqués dans leur posture socialement incorrecte pour autant bonnard.  

* Bruno

mardi 16 octobre 2018

LONG WEEK-END

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site fan-de-cinema.com

"Long Weekend" de Colin Egleston. 1978. Australie. 1h32. Avec John Hargreaves, Briony Behets, Mike McEwen, Roy Day, Michael Aitkens.

Sortie salles France: 30 Juillet 1980. U.S/Australie: 29 Mars 1979

FILMOGRAPHIEColin Eggleston est un réalisateur australien, né le 23 Septembre 1941 à Melbourne, décédé le 10 Août 2002 à Genève. 1977: Fantasm Comes Again (pseudo Eric Ram). 1978: Long Week-end. 1982: The Little Feller. 1984: Innocent Prey. 1986: Cassandra. 1986: Dakota Harris. 1986: Body Business (télé-film). 1987: Outback Vampires.


En 1978 sort sur les écrans un modeste film australien au budget dérisoire sous l'égide d'un metteur en scène néophyte dirigeant brillamment 2 comédiens d'autant plus méconnus. A la surprise générale les récompenses pleuvent à contrario de son accueil glacial reçu dans son pays natal ! Antenne d'Or à Avoriaz, Prix Spécial du Jury, Prix de la Critique au Rex de Paris, Meilleur Film, Meilleur Acteur pour John Hargreaves et enfin Prix du Jury à Sitges ! Rien que ça ! Quelques décennies plus tard et un remake amorcé, ce chef-d'oeuvre écolo (terriblement actuel !) garde intact son pouvoir de fascination émanant d'un environnement naturel à la fois follement anxiogène et malsain. Un jeune couple sur le déclin tente de se réconcilier en passant un long week-end dans une nature sauvage à proximité d'une plage. Après avoir planté leur tente sur un bout de terrain vierge, des évènements naturels inexpliqués se produisent et semblent intenter à leur vie ! 


Avec une économie de moyens et sans aucune outrance spectaculaire, Long Week-end nous intrigue fort habilement en distillant une peur anxiogène par le truchement d'une intrigue d'une rare originalité. Un couple en dérive conjugale tente de s'offrir une seconde chance en pliant bagage vers une destination bucolique le temps d'un week-end. Après avoir planté un univers écolo déjà étrangement atmosphérique, un soin consciencieux est établi auprès de la caractérisation du couple antipathique n'assumant aucune considération pour la faune et la flore. Le mari obtus, adepte de la chasse et des loisirs du camping, passant son temps à inspecter les alentours d'une végétation florissante avant de s'exciter à décharger aussitôt quelques cartouches de fusil sur des volatiles ou mammifères errants. Sexuellement frustrée et irascible pour cause d'avortement et d'adultère, la mégère s'ennuie lamentablement tant et si bien qu'elle se contente de se dorer la pilule au soleil en lisant des magazines érotiques. Totalement impassible à la beauté naturelle du climat bucolique, elle s'avère encore plus irrévérencieuse et haïssable que son époux. Ainsi, après que ce dernier eut été agressé par un rapace, elle écrasera un oeuf fécond contre un arbre par simple rancune.


Lentement, leur rapport préalablement conflictuel s'exacerbera un peu plus faute d'évènements intrigants découlant du danger sous-jacent de bruit d'animaux tantôt affolés, tantôt éplorés. Mais après que des mammifères eurent été sacrifiés et son massif forestier violé, la nature insidieuse décidera de prendre sa revanche sur ces oppresseurs afin de leur faire payer leur impudence. Ainsi, l'intensité progressive de Long Week-end découle de cet enchevêtrement de comportements primaires perpétrées par deux quidams immatures (pour ne pas dire irresponsables) car extériorisant leur colère, leur caprice et leur ingratitude sur la nature vierge. L'ambiance anxiogène qui y émane, le climat dépressif émanant de leurs rapports péniblement houleux, le sentiment d'insécurité instauré par moult évènements imbitables nous confinant vers un climat malsain d'une puissance visuelle assez claustro. A cet égard, la dernière partie, course de survie pour le couple déboussolé, renforcera ce sentiment oppressant de menace indicible pour autant littéralement prégnante, pour ne pas dire ensorcelante. Le spectateur assistant impuissant à leur fatigue et lassitude morales sous l'impulsion d'une dramaturgie escarpée à l'humour noir abrasif. Trois séquences génialement ubuesques faisant office d'anthologie à travers leur ironie sardonique que le spectateur éprouve néanmoins avec une certaine compassion, de par la mentalité pathétique du duo en perdition. Et donc en épargnant continuellement l'esbroufe,  Colin Egleston cultive avec une rare subtilité (notamment auprès de sa puissance formelle ensorcelante, j'insiste !) un cauchemar écolo aux cimes du fantastique où le malaise palpable s'accapare de notre psyché aussi désorientée que les antagonistes.


Un crime contre nature
Scandé d'une partition ombrageuse de Michael Carlos afin de soutenir l'angoisse en crescendo et brillamment incarné par 2 comédiens méconnus jouant les troubles-fêtes avec un naturel idoine, Long Week-end festoie autour du Fantastique le plus éthéré. L'effet de suggestion amorçant de manière si vénéneuse une terreur davantage implacable au coeur d'une végétation naturelle aussi hostile que feutrée. Chef-d'oeuvre auteurisant d'autant plus atypique et formellement vertigineux, Long week-end laisse en état de transe sitôt le générique bouclé, et ce en nous interrogeant notamment sur la cause animale et dame nature vulgairement maltraitées par le plus grand prédateur que la planète eut connu: l'homme ! 

* Bruno
16.10.18. 4èx
10.01.12 (789 vues)

RécompensesPrix Spécial du JuryPrix de la critique au festival du Rex à Paris en 1979.
Antenne d'Or au Festival d'Avoriaz en 1979.
Meilleur Film, Meilleur Acteur (John Hargreaves), Prix du Jury de la critique internationale de Sitges en 1978.

lundi 15 octobre 2018

TRAUMA

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site t411.me

"Burnt Offerings" de Dan Curtis. 1976. U.S.A. 2h00. Avec Oliver Reed, Karen Black, Burgess Meredith, Bette Davis, Dub Taylor, Lee Montgomery, Eileen Heckart.

Sortie salles U.S: 25 Août 1976 (avant première). 18 Octobre 1976. Inédit en salles en France.

FILMOGRAPHIE: Dan Curtis est un producteur, scénariste et réalisateur américain, né le 12 Août 1927 à Bridgeport, Connecticut (Etats-Unis), décédé le 27 mars 2006 à Brentwood (Californie). 1966: Dark Shadows (série TV). 1970: La Fiancée du Vampire. 1971: Night of dark shadows. 1973: Dracula. 1973: The Night Strangler (télé-film). 1975: La Poupée de la Terreur. 1976: Trauma. 1977: Dead of Night. 1977: La Malédiction de la veuve noire (télé-film). 1992: Intruders (télé-film). 1996: La Poupée de la terreur 2 (télé-film).


"J'ai toujours pensé qu'il y avait dans le phénomène des pressentiments quelque chose de surnaturel qui, même, mieux observé, fournirait la preuve de l'immatérialité de l'âme."

Le pitch: Pour un coût dérisoire, un couple, leur fils et sa tante emménagent dans une vaste bâtisse durant les congés d'été. Leur seule condition et de s'occuper d'une octogénaire, propriétaire esseulée de la maison logée à une des chambres de l'étage. Peu à peu, d'étranges incidents vont ébranler la tranquillité de la famille Rolfe. 

La Maison du Diablel'Emprise, l'Enfant du Diable, les InnocentsNext of Kin, la Maison des Damnés, Shining, le Cercle Infernal... Des chefs-d'oeuvre immuables ayant tous comme particularité d'avoir su provoquer la peur de la maison hantée parmi la dextérité du pouvoir de suggestion. Retour sur un joyau du film de hantise aussi inextinguible que ces illustres homologues ! Score monocorde aux accents lourds et ombrageux, cadre bucolique d'une résidence séculaire implantée à proximité d'un bois, Trauma insuffle dès son prélude traditionnel une atmosphère d'étrangeté fiévreuse sous son climat solaire. Ainsi, en jouant la carte du mystère régi autour d'une chambre close auquel une étrange octogénaire s'y est blottie pour ne jamais en sortir, Dan Curtis conçoit le plus oppressant des cauchemars surnaturels sous l'allégeance d'une maison maudite. Sans jamais entrevoir la silhouette de cette propriétaire décatie, le réalisateur va entretenir une montée en puissance du suspense jusqu'au climax tétanisant, vision de cauchemar anthologique restée dans les annales de l'effroi ! 


Entre-temps, Dan Curtis aura pris soin de nous radiographier la caractérisation de ses personnages lourdement éprouvés par une succession d'incidents inexpliqués ! Sans jamais avoir recours à l'esbroufe d'effets chocs gratuits ou de gore qui tâche, Trauma palpite d'efficacité dans son esprit de suggestion dédié à la psychologie contrariée des personnages. Des protagonistes parfaitement attachants de par leur solidarité familiale mais si faillibles et humainement meurtris puisque mutuellement "possédés" par l'esprit diabolique d'une maison protéiforme. Dans la mesure où cette demeure vintage semble désirer se ravitailler du fluide anxiogène de ses occupants et ainsi apprivoiser une "mère porteuse" afin de se régénérer pour la pérennité. Parmi le témoignage probant de comédiens habités de tempérament aigri, Trauma insuffle un sentiment d'insécurité permanent auprès de ces occupants au point de déteindre sur l'anxiété du spectateur. Habité par l'accablement,  Oliver Reed incarne fébrilement un paternel aimant totalement dépassé par des incidents domestiques imbitables et surtout rongé par une dépression fluctuante. Dans celui du jeune fils sévèrement molesté par ce dernier et l'entité de la demeure, Lee Montgomery endosse sobrement l'ado fragile en perte de repère paternel. L'immense Bette Davis expose un jeu volontairement sclérosé dans sa pathologie dégénérative tandis que l'inoubliable Karen Black insuffle une obsession ambivalente pour mettre en évidence sa maternité empathique partagée entre l'amour de sa famille et celui de sa nouvelle demeure. 


Derrière la porte, quelque chose vit...
En prime de nous marteler l'esprit avec des séquences chocs implacables (les apparitions du chauffeur au rictus dérangé, la mort sacrificielle de la tante, l'attaque des arbres qu'un certain Sam Raimi reprendra dans son fameux Evil-dead !), voir éprouvantes (l'agression du fils dans la piscine par Ben puis un peu plus tard l'autre tentative de noyade par une force maléfique !), Trauma culmine son intensité horrifiante auprès d'un final nihiliste à la violence escarpée. L'aura trouble et persistante émanant des pièces de la demeure, l'intensité oppressante de son climat dépressif et l'originalité audacieuse de son intrigue charpentée acheminent Trauma en référence absolue du Fantastique vintage.

* Bruno
20.08.13. 6èx (694 v)

Dédicace à Christophe Colpaert (pour l'offrande de sa précieuse vostf !)

DistinctionsPrix du meilleur film d'horreur, meilleur réalisateur et meilleur second rôle féminin pour Bette Davis, par l'Académie des films de science-fiction, fantastique et horreur en 1977.
Prix du meilleur réalisateur, meilleur acteur pour Burgess Meredith et meilleure actrice pour Karen Black, lors du Festival international du film de Catalogne en 1977.

vendredi 12 octobre 2018

La Bête tue de sang froid / Le Dernier train de la nuit / L'ultimo treno della notte

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de Aldo Lado. 1975. Italie. 1h34 (version intégrale). Avec Flavio Bucci, Laura D'Angelo, Irene Miracle, Macha Méril, Gianfranco De Grassi, Enrico Maria Salerno.

Sortie salles France: 30 Août 1978. Italie: 8 Avril 1975

FILMOGRAPHIEAldo Lado est un réalisateur italien, né le 5 décembre 1934 à Fiume (Croatie).
1971: La corta notte delle bambole di vetro. 1972: Qui l'a vue mourir ? 1972: La Drôle d'affaire. 1973 : Sepolta viva. 1974 : La cugina. 1975: La Bête tue de sang Froid. 1976 : L'ultima volta. 1978 : Il prigioniero (TV). 1979 : L'humanoïde. 1979 : Il était un musicien – Monsieur Mascagni. 1981 : La désobéissance. 1982 : La pietra di Marco Polo (TV). 1983 : La città di Miriam (TV). 1986 : I figli dell'ispettore (TV). 1987 : Sahara Heat ou Scirocco. 1990 : Rito d'amore. 1991 : La stella del parco (TV). 1992 : Alibi perfetto. 1993 : Venerdì nero. 1994 : La chance.


Ersatz italien de la Dernière Maison sur la GaucheLa Bête tue de sang froid s'est taillée au fil des décennies une réputation presque aussi notoire que le trauma infligé par Craven. Si Aldo Lado reprend le même cheminement narratif afin de réexploiter le "rape and revenge", il réussit tout de même à s'en démarquer grâce au décor confiné à l'intérieur d'un train et au portrait alloué à une bourgeoise sans scrupules. Cette dernière prétendument affable entraînant finalement un duo de marginaux dans la stupre crapuleuse. Si bien que sous son emprise retorse, ces deux délinquants issus de classe ouvrière se laisseront charmer par sa stature altière afin d'accomplir les pires exactions sur deux adolescentes. Merveilleusement campé par une Macha Méril habitée par une perversité scopophile, sa présence viciée symbolise d'une certaine manière l'avilissement de la bourgeoisie engluée dans son confort, l'ennui et la cupidité. A l'instar de ce témoin oculaire, sexagénaire d'apparence respectable mais soudainement épris de pulsions voyeuristes pour se laisser inviter au viol collectif. Tableau pathétique d'une nature humaine aux instincts barbares et pervers, La Bête tue de sang froid est un voyage au bout de l'enfer. Celui de deux jeunes étudiantes embarquées dans un train pour rejoindre leur bercail mais rapidement prises en otage par le trio diabolique.


A partir du moment où le piège se referme autour des victimes, Aldo Lado nous laisse en position de voyeur pour témoigner de leur calvaire interminable. Ce sentiment de gêne occasionné est accentué par l'enfermement du lieu clos (une cabine irrespirable) où viols et sévices leur seront infligés. L'atmosphère terriblement malsaine émanant notamment des regards obscènes que l'inspiratrice échangera avec les voyous. D'autre part, au moment crucial des actes les plus extrêmes, la lumière nocturne vire subitement aux éclairages bleutés afin de renforcer l'aspect cauchemardesque de cette baroque mascarade. Après les crimes lâchement perpétrés, Aldo Lado passe en mode revenge avec l'intervention des parents d'une des victimes. Sur ce point autrement crucial, la manière dont le trio réussit à s'infiltrer chez eux me parait un peu plus crédible que ce qu'eut envisagé Craven, alors que le jeu d'acteurs invoqué aux parents s'avère plus plausible de par leur sentiment d'angoisse et de contrariété en ascension. Tant et si bien qu'ici, face à l'insistance de la mégère blessée (une écorchure au genou), le père de la victime, éminent chirurgien, lui portera assistance et accueillera le trio au sein de son foyer. Avec une surprenante et réelle efficacité,  Aldo Lado reprend donc le mode opératoire de son modèle (vengeance expéditive abrupte) en instaurant un climat de tension qui ira crescendo. Sans chercher à se complaire dans la violence bestiale (comme l'eut souligné la première partie), il illustre avec psychologie l'aspect avilissant de la justice individuelle lorsque le père se résigne à éliminer sa dernière victime face au témoignage contradictoire de son épouse.


Une horreur nauséeuse confinant au vertige. 
D'une perversité à la fois fétide et crapuleuse, dérangeante et malsaine, La Bête tue de sang froid  demeure probablement la meilleure déclinaison du rape and revenge depuis la référence de Craven. Outre sa violence insupportable mais jamais outrancière, son caractère éprouvant est largement envenimé par la posture si vénéneuse de l'électrisante Macha Méril absolument inoubliable et d'un score indolent chuchoté à l'harmonica. 
A réserver toutefois à un public averti.

Warning ! La VF présente sur le Dvd de Neo Publishing est censurée de 15 minutes. Seule, la VOSTF comporte bien la version intégrale.

* Bruno
22.02.24. 5èx vers italienne stfr