vendredi 16 novembre 2018

Fog. Prix de la Critique, Avoriaz 1980.

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site telerama.fr

"The Fog" de John Carpenter. 1980. 1h29. Avec Adrienne Barbeau, Jamie Lee Curtis, Janet Leigh, John Houseman, Tom Atkins, James Canning, Charles Cyphers, Nancy Kyes, Ty Mitchell, Hal Holbrook, John F. Goff.

Sortie salles France: 19 Mars 1980. U.S: 8 Février 1980

FILMOGRAPHIEJohn Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis). 1974 : Dark Star 1976 : Assaut 1978 : Halloween, la nuit des masques 1980 : Fog 1981 : New York 1997 1982 :The Thing 1983 : Christine 1984 : Starman 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles 1992 : Les Aventures d'un homme invisible, 1995 : L'Antre de la folie 1995 : Le Village des damnés 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward

                                       

"Tout ce que nous voyons ou croyons voir n'est-il qu'un rêve dans un rêve ?"
Edgar Allan Poe

Hormis son Prix de la critique à Avoriaz en 1980 et un succès commercial (dont 947 944 entrées rien qu'en France), Fog reçu un accueil timoré du côté de la critique. D'autre part, insatisfait du premier montage, Carpenter remania 1/3 du film (ajout puis suppression de scènes) tout en modifiant la bande sonore ainsi que sa partition musicale. Antonio Bay, petite ville côtière de Californie du Nord. Une légende prédit que des fantômes tapis dans l'ombre d'un brouillard ressurgissent des flots pour assassiner six citadins et tenter de récupérer leur cargaison. Pour cause, le village fut construit grâce à l'or pillé par le prêtre Malone et ses cinq complices lorsque Blake et son équipage daignaient trouver refuge sur la rive. Attiré par la lumière d'un feu de camp, le navire s'écrasa sur un rocher et coula avec l'équipage. Cent ans plus tard, les victimes de ce traquenard sont décidées à se venger. Une gérante de radio postée à l'intérieur de son phare tente d'avertir la population qu'un étrange brouillard semble semer terreur et mort.
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A l'instar de son envoûtant préambule auquel un marin sclérosé assis autour d'un feu de camp narre auprès d'une assemblée de gamins une sombre histoire de spectres vengeurs, Fog rend ses lettres de noblesse aux mythes et légendes afin de renouer avec l'ambiance séculaire des Ghost stories d'antan. Oeuvre considérée comme mineure chez la filmo de Carpenter, d'autant plus sujette à de multiples modifications techniques et narratives en cours de montage, Fog demeure pourtant une illustration flamboyante de ce que la série B modeste peut surpasser en terme d'atmosphère ouatée, latente et crépusculaire. Tant et si bien que le spectateur s'y évade facilement pour se fondre avec délectation au coeur de l"imagerie fantastique" ! Et donc, à l'aide d'un simple argument aussi original que fascinant bâti sur le conte horrifique (avec en arrière plan une métaphore sur la fourberie du colonialisme - créer une société en éliminant les plus faibles par le sang -), John Carpenter nous livre un modèle de mise en scène de par l'utilisation judicieuse du phénomène (sur)naturel du brouillard ! Avec une belle efficacité, tant dans la gestion de l'angoisse et du suspense que du climat de mystère tantôt oppressant, tantôt anxiogène, ces spectres vengeurs (bon dieu leur look mortifère nous hypnotise le regard à chacune de leurs apparitions résolument photogéniques !) se fondent à travers le décor côtier du village d'Antonio Bay de manière littéralement alchimique. De par la maîtrise du cadre et de l'espace, et la manière irréelle dont le brouillard s'accapare de l'environnement quotidien pour emprisonner ses proies, Fog  nous suggère un cauchemar capiteux.


Ainsi donc, il fallait oser assigner le rôle majeur à cette nappe diffuse y éclipsant à l'intérieur des morts-vivants afin de mieux véhiculer une menace anxiogène en proie au surnaturel le plus opaque. De par son aura indicible, cet élément naturel avili par une vengeance morbide nous ensorcelle avec un réalisme diaphane. Si bien que la manière habile dont Carpenter exploite l'apparence sépulcrale des spectres est souvent suggérée par des silhouettes noires tapies dans l'ombre, et ce avant d'ébranler brutalement la victime à l'aide d'une serpe ou d'un crochet rubigineux. Et pour revenir à son intrigue minimaliste mais pour autant efficace, elle dépend de plusieurs destins, parmi lesquels deux couples de survivants prochainement contraints à se réunir dans la chapelle d'un prêtre grâce à la sollicitation d'une émettrice de radio bientôt en instance de survie ! Et pour intensifier la situation alarmiste, le rejeton de cette dernière réfugié dans la demeure d'une septuagénaire aura fort affaire avec une expérience épeurante depuis que Blake et ses complices le désigneront comme potentielle nouvelle cible. Emaillé de séquences horrifiques habilement suggérées parmi l'entité du brouillard éthéré,  Fog oscille angoisse, (douce) terreur et effet de surprise auprès des attaques cinglantes de nos lépreux putréfiés. A l'aide d'un accord musical à la fois entêtant et envoûtant confectionné par le maître himself, Fog diffuse enfin un rythme haletant pour culminer vers le huis-clos restreint d'une église véreuse. Et pour renchérir le sentiment de danger létal, Carpenter y inclus en parallèle une seconde séquence de siège lorsque l'animatrice radio poursuivie par les revenants est contrainte de se blottir sur le toit de son phare !


Derrière la brume... l'horreur !
D'une beauté surnaturelle affinée que Carpenter transfigure grâce à son amour immodéré du Fantastique, et parfaitement convaincant auprès du charisme d'attachants seconds couteaux familiers du genre (Hal HolbrrokJamie Lee CurtisJanet Leigh,Tom Atkins et surtout Adrienne Barbeau dans le rôle le plus substantiel), Fog constitue une série B d'angoisse formellement envoûtante et singulière. Si bien que son concept horrifique audacieux (qui aurait pu sombrer dans la gaudriole Z chez un tâcheron) laisse plutôt libre court à l'imagination du spectateur (exit donc toute trace de gore !) enivré par un conte moderne inspiré de ses ancêtres écrivains (Edgar Poe en ligne de mire). 

* Bruno
16.11.18. 6èx
15.06.12. (96 v)

jeudi 15 novembre 2018

Mission Impossible : Fallout

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Christopher McQuarrie. 2018. U.S.A. 2h28. Avec Tom Cruise, Henry Cavill, Ving Rhames, Simon Pegg, Rebecca Ferguson, Sean Harris, Michelle Monaghan, Angela Bassett.

Sortie salles France: 1er Août 2018. U.S: 27 Juillet 2018

FILMOGRAPHIE: Christopher McQuarrie est un réalisateur et scénariste américain, né en 1968 à Princeton, New Jersey. 2000: Way of the Gun. 2012: Jack Reacher. 2015: Mission Impossible: Rogue Nation. 2018: Mission Impossible: Fallout.


Monstrueux, apocalyptique, galvanisant, tétanisant, vertigineux, à couper le souffle ! Mes éloges subjectives ont beau paraître outrancière, Mission Impossible : Fallout m'a cloué au fauteuil 2h20 durant (en épargnant les 8 mns de générique de fin), à l'instar du tout aussi révolutionnaire Mad-Max Fury Road ! Car oui, Mission Impossible : Fallout dépasse tous ses opus antécédents pour carrément réinventer l'actionner bourrin (comme je déteste cette locution tant ici l'action déployée dépend intelligemment d'une narration retorse !) par le biais de morceaux de bravoure jamais vus au préalable ! Quand bien même la 1ère heure nous mettait déjà KO par sa frénésie formelle (épaulé du montage ultra dynamique), l'heure vingt suivante nous hypnotise les sens avant de nous combler auprès d'un point d'orgue de 45 minutes instaurées au creux de montagnes enneigées ! Notamment en alternant à deux endroits distinctes deux actions discontinues que le spectateur déboussolé savoure avec une appréhension aussi oppressante ! Et donc même si nous avons affaire à un pur divertissement en roue libre, l'invraisemblance des scènes d'action a beau paraître outrée, on y croit sans sourciller, on s'accroche à son fauteuil en renouant avec un sourire de gosse, notamment en se laissant séduire par l'implication spontanée des personnages stoïques bravant le danger avec un dynamisme si communicatif (Tom Cruise crevant une fois de plus l'écran en héros strié à la force d'expression).


Christopher McQuarrie ayant en prime l'astuce d'y injecter une bonne rasade d'humour à travers leurs répliques décomplexées. Une manière fantaisiste de détendre l'atmosphère débridée et ainsi rappeler que nous sommes au cinéma, alors que le spectateur s'implique comme jamais dans la tourmente d'une folle course contre la mort à grande échelle (l'enjeu humain de la démographie de l'Inde, du Pakistan et de la Chine). Modèle de mise en scène (de par sa fluidité, l'exigence maniaque du travail technique) et d'ultra efficacité sous la mainmise d'un Christopher McQuarrie furieusement animé d'ambition démesurée (alors qu'il était déjà signataire du précédent volet), Mission Impossible : Fallout tire parti de son attrait ultra jouissif grâce à une intrigue à suspense à la fois tendue et infiniment haletante. En gros, il s'agit pour l'équipe d'Ethan Hunt de récupérer en un temps furtif 3 bombes de plutonium en échange de livrer un ancien terroriste (celui entrevu dans le précédent opus) auprès de la "veuve". Truffé de rebondissements, péripéties de survie, revirements et faux semblants à travers une poignée d'acolytes, de maîtres chanteurs, d'espions et de dissidents, Mission Impossible... cumule à rythme métronome des bastonnades martiales (celle dans les WC est mémorablement chorégraphiée !) et courses-poursuites ahurissantes de réalisme (tant en moto, qu'en voiture, en fourgon, en hélico ou en parachute). Quand bien même nos personnages héroïques (jamais superficiels !) font preuve de sentiments à travers leur humanisme solidaire, notamment sous l'impulsion nostalgique de l'ex femme d'Ethan Hunt permettant à l'intrigue annexe de nous scander une superbe histoire d'amour pleine de pudeur et de dignité. Bref, rien ici n'est laissé au hasard pour caresser dans le bon sens le grand public en faisant fi d'esbroufe ou d'effets de manche disgracieux trop coutumiers du genre bêtement bourrin.


D'une intensité émotionnelle exponentielle, Mission Impossible : Fallout relève la difficile gageure de réanimer la fibre du vrai cinéma d'action sous sa forme la plus authentique et intègre comme le furent plus tôt Rambo, Mad-Max 2, Piège de Cristal, True Lies, A toute Epreuve, Une journée en Enfer ou encore Speed. Généreux en diable et follement vrillé au fil d'une action substantielle jamais rébarbative, Mission Impossible... renoue avec la chimère du Cinéma. Celle du gout du rêve, de l'évasion et de l'adrénaline appuyé d'un brio technique aussi millimétré qu'infaillible. Et c'est franchement à couper le souffle ! 

* Bruno  

Box Office France: 3 010 246 entrées

mercredi 14 novembre 2018

Natty Gann. Prix du Meilleur espoir féminin pour Meredith Salenger, Young Artist Award.

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Journey of Natty Gann" de Jeremy Kagan. 1985. U.S.A. 1h42. Avec Meredith Salenger, John Cusack, Ray Wise, Lainie Kazan, Scatman Crothers, Verna Bloom, Barry Miller.

Sortie salles France: 5 Février 1986. U.S: 27 Septembre 1985

FILMOGRAPHIEJeremy Kagan est un réalisateur américain né le 14 décembre 1945. 1972 : Columbo - Le grain de sable (TV). 1974 : Unwed Father (TV). 1974 : Judge Dee and the Monastery Murders (TV). 1975 : Katherine (TV). 1977 : Scott Joplin. 1977 : Héros. 1978 : La Grande Triche. 1981 : L'Élu. 1983 : L'Arnaque 2. 1985 : Natty Gann. 1986 : Seule contre la drogue (Courage) (TV). 1987 : Conspiracy: The Trial of the Chicago 8 (TV). 1989 : Big Man on Campus. 1990 : Descending Angel (TV). 1991 : Par l'épée. 1994 : Roswell, le mystère (TV). 1997 : Color of Justice (TV). 1997 : Cœur à louer (TV). 2001 : La Ballade de Lucy Whipple (TV).2002 : Bobbie's Girl (TV). 2004 : Crown Heights (TV). 2007 : Golda's Balcony.


Une production Disney écolo et sociétale sous sa période la plus déférente.
Produit par Disney au milieu des années 80, Natty Gan est un récit d'aventures à la fois exaltant et haletant, l'épopée humaine d'une ado débrouillarde en initiation de survie, faute d'un contexte de crise sociale des années 30. Parce que son père dû précipitamment l'abandonner pour décrocher un emploi à 3000 kms de leur bercail, Natty s'enfuit du foyer d'une mégère surveillante afin de tenter de le retrouver. Constamment ballottée d'un train de marchandise à un autre, ses pérégrinations l'amènent à fréquenter des citadins intolérants et tantôt avenants, une police et une milice drastiques ainsi que de jeunes marginaux aussi désoeuvrés qu'elle. Quand bien même durant son itinéraire forestier elle se lie d'amitié avec un loup entraîné aux combats de chiens. Hymne à la nature et à l'amour du loup livré comme l'héroïne à la solitude, à l'autonomie et à l'exil, Natty Gann fait naître une sincère émotion au fil de leur parcours d'endurance semée de rencontres hostiles mais aussi amiteuses. Sans céder aux sirènes de la mièvrerie (suffit de prendre comme exemple les rapports timidement sentimentaux de Natty avec l'itinérant Harry et de s'émouvoir sans fard Spoil ! de leurs adieux sur le quai fin du Spoil), Jeremy Kagan  s'extirpe honorablement du produit imberbe de par son intégrité à illustrer une solide histoire d'amour et d'amitié nullement racoleuse. Celle envers la nature (véritable bouffée d'air frais), envers la faune et envers l'homme le plus loyal.


Tant auprès du loup protecteur humanisé par sa maîtresse, de l'étranger Harry en quête d'un toit, que du père, leader syndical rongé par le remord, le désagrément et l'affres de l'incertitude depuis la disparition inexpliquée de sa fille. Emaillé de péripéties, bévues, accalmies et rebondissements parfois étonnamment spectaculaires (le saut à haut risque pour accéder à un des wagons, l'emploi vertigineux du père de Natty enrôlé bûcheron dans des chantiers forestiers), Natty Gan fait vibrer la corde sensible sans se complaire dans le pathos ou une facilité lacrymale. Et lorsque les larmes tombent lors d'un final binaire à la fois émouvant et rédempteur, on reste accroché à la dignité, notamment grâce à la prestance dépouillée des comédiens. Particulièrement Meredith Salenger étonnamment simple, fraîche et naturelle en héroïne en herbe animée par l'espoir et sa tendresse pour son père. Magnifiquement photographié dans des paysages naturels édéniques alors que sa fidèle reconstitution historique nous remémore un dramatique épisode de crise sociale, Natty Gann se permet avec un réalisme parfois douloureux de rendre hommage à ces chômeurs démunis d'autant plus chassés de leur foyer sous une dictature bien-pensante (notamment auprès d'une milice sans vergogne).


Beau, simple et vibrant d'humanité à travers un périple bucolique flirtant avec le conte (prod Disney oblige sous sa période la plus révérencieuse !), Natty Gann se décline comme un superbe récit initiatique. Une leçon de tolérance tant auprès du domptage de l'animal sauvage que du prolétaire exploité comme du bétail lors d'un contexte historique de "grande dépression".  

* Bruno
2èx

mardi 13 novembre 2018

Outlaw King: le roi hors la loi

                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de David Mackenzie. 2018. U.S.A. 2h02. Avec Chris Pine, Aaron Taylor-Johnson, Florence Pugh, Stephen Dillane, Billy Howle, Tony Curran

Diffusé sur Netflix le 9 Novembre 2018 

FILMOGRAPHIE: David McKenzzie est un réalisateur anglais, né le 10 Mai 1966 à Corbridge.
2002: The Last Great Wilderness. 2003: Young Adam. 2005: Asylum. 2008: My name is Hallam. 2009: Toy Boy. 2010: Perfect Sense. 2011: Rock'n'Love. 2014: Les Poings contre les murs. 2016: Comancheria. 2018: Outlaws King.


Remarqué par Les Poings contre les Murs et ComancheriaDavid McKenzzie poursuit son bonhomme de chemin qualitatif avec Outlaw King, une production estampillée Netflix. Inspiré d'une histoire vraie, ce récit d'aventures historiques plutôt âpre et tendu s'avère rondement mené, quand bien même son brio technique imperturbable nous cloue au siège tant les séquences guerrières nous retournent le cerveau avec une intensité exponentielle ! Reconstitution hyper soignée, photo contrastée, panoramas d'un beauté sensitive ahurissante, costumes et figurants déployés en masse, chevaux trébuchants parmi les cadavres sur les champs de bataille dans un déluge de pluie, de sang et de sueur, Outlaw King constitue une claque visuelle permanente ! Et bien que prioritairement bâti sur l'aspect belliciste d'une épopée tributaire du fracas des glaives, le réalisateur parvient pour autant à structurer un solide récit sans que les enjeux humains n'y perdent de leur intérêt en cours de trajectoire de survie. A savoir l'inimitié filiale entre deux rois, l'un véreux sans vergogne, l'autre redresseur de tort qui tentera de se réapproprier sa terre écossaise.


Et si dans le rôle Robert de Brus (premier roi d’Écosse devenu hors la loi pour la bonne cause), Chris Pine manque de virilité et de force d'expression à travers ses traits de visage un poil trop imberbes, il n'en demeure pas moins assez convaincant dans sa sobre dimension humaine en ascension héroïque. Tant auprès de sa conviction morale à recruter une armée de fortune que de ses capacités physiques à repousser l'ennemi, notamment lorsque sa muse est séquestrée dans un château écossais. Bluffant de réalisme donc tout en s'efforçant de combler les attentes de l'amateur d'action à travers un souffle épique constamment rigoureux (la bataille finale peut faire office de bravoure anthologique au gré d'un montage ultra dynamique dénuée de précipitation), Outlaw King renoue avec le "plaisir de cinéma" à travers une série B de luxe dénuée de fards, de fioritures et de grandiloquence. David McKenzzie ne perdant d'autant plus jamais de vue l'humanisme fébrile de ces preux guerriers se livrant corps et âme pour le sens de la justice avec un héroïsme suicidaire. Tant et si bien que certaines séquences à l'acuité dramatique poignante confirment le potentiel émotionnel de cette épopée humaine émaillée de sobre romantisme (les rapports concis mais denses du couple en quête de délivrance). Beau, violent et furieusement excitant à la fois.

* Bruno

lundi 12 novembre 2018

Le Tueur du Vendredi

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site 411.me

"Friday the 13th, part 2" de Steve Miner. 1981. U.S.A. 1h27. Avec Amy Steel, John Furey, Adrienne King, Kirsten Baker, Stuart Charno, Warrington Gillette, Walt Gorney, Marta Kober, Tom McBride.

Sortie salles France: 13 Janvier 1982. U.S: 1er Mai 1981

FILMOGRAPHIE: Steve Miner est un réalisateur américain, né le 18 Juin 1951 à Westport, dans le Connecticut. 1981: Le Tueur du Vendredi. 1982: Meurtres en 3 dimensions. 1986: House. 1986: Soul Man. 1989: Warlock. 1991: A coeur vaillant rien d'impossible. 1992: Forever Young. 1994: Sherwood's Travels. 1994: My Father ce Héros. 1996: Le Souffre douleur. 1998: Halloween, 20 ans après. 1999: Lake Placid. 2001: The Third Degree (télé-film). 2001: Texas Rangers, la revanche des Justiciers. 2002: Home of the Brave (télé-film). 2006: Scarlett (télé-film). 2007: Day of the Dead.


Un an après l'énorme succès Vendredi 13, Steve Miner succède à son créateur Sean S. Cunningham  pour nous livrer une vaine déclinaison gentiment ludique. Cinq ans après les évènements tragiques du camp Crystal Lake, un nouveau groupe de campeurs s'installe près des environs alors qu'un tueur décime un à un ses occupants. Le début du cauchemar ne fait que recommencer ! On prend les mêmes et on recommence ! Recette inchangée et succès renoué au box-office, Le Tueur du Vendredi ne déroge pas à la règle du traditionnel slasher champêtre émaillé de meurtres sanglants à rythme cadencé. Avec une banalité éloquente, Steve Miner ne prend aucun risque pour prendre la relève à travers sa mise en scène académique assurant le minimum syndical. Passé dix minutes d'évocation des évènements antécédents vécus dans le précédent volet, le film ne perd pas de temps à nous caractériser une nouvelle clique de vacanciers venus musarder à proximité du camp Crystal Lake! En accordant peu d'intérêt à ses personnages stéréotypés et sans distiller une quelconque notion de suspense ou de tension (à l'exception de 2/3 occasions concises), Le Tueur du Vendredi compte donc aujourd'hui sur la fibre nostalgique pour satisfaire ses inconditionnels de la saga. 


Si bien que caricatural auprès de ces personnages (le vieillard arriéré avertissant ses nouveaux résidents que la mort rode toujours à Crystal Lake, le bateleur friand de blagues potaches, le couple d'amoureux bravant les interdits pour investir les lieux du drame sanglant, etc...), émaillé de clichés et situations rebattues (la farce macabre contée par le leader au coin du feu, les jumpscares (dont 1 très réussi !), la voiture incapable de démarrer au moment fatal et son point d'orgue haletant où la dernière victime rusée tentera de déjouer le tueur), Le Tueur du Vendredi ne pourra donc que satisfaire les puristes ayant été bercés durant les années 80. Enfin, et pour respecter le schéma de son modèle, la dernière demi-heure affiche un rythme plus homérique pour traque entamée entre l'héroïne et Jason (affublé ici d'un sac à patate sur la tête !), alors qu'une certaine cocasserie involontaire émane parfois de cette course-poursuite cartoonesque. La survivante tentant en guise de survie de se faire passer pour la mère de Jason alors que celui-ci fait preuve de maladresses à courser sa proie en trébuchant sur le palier à plusieurs reprises !


Que reste-il aujourd'hui de cette suite triviale moins inspirée que son modèle ? Une curiosité futilement sympathique, prioritairement auprès de l'aficionado de la franchise. Deux, trois meurtres spectaculaires, le minois de quelques jolies donzelles, son cadre bucolique plaisamment estival ainsi que l'illustre partition d'Harry Manfredini nous égayent tout de même à travers son modeste charme horrifique gentiment rétro. 

* Bruno
26.01.24. 6èx
12.11.18. 
23.07.12. 82 v

vendredi 9 novembre 2018

Le Survivant d'un monde parallèle

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinematerial.com

"The Survivor" de David Hemmings. 1981. Australie. 1h27. Avec Robert Powell, Jenny Agutter, Peter Sumner, Joseph Cotten, Angela Punch McGregor.

Sortie salles France: 2 Décembre 1981

FILMOGRAPHIE: David Hemmings est un acteur, producteur et réalisateur britannique, né le 18 novembre 1941 à Guildford, Surrey, et mort d'une crise cardiaque le 3 décembre 2003 à Bucarest (Roumanie).1972 : Running Scared. 1973 : The 14. 1979 : C'est mon gigolo. 1981 : Les Bourlingueurs. 1981 : Le Survivant d'un monde parallèle. 1984 : Money Hunt: The Mystery of the Missing Link (vidéo). 1985 : Le Code Rebecca (The Key to Rebecca) (TV). 1989 : Down Delaware Road (TV). 1992 : Dark Horse. 1993 : Christmas Reunion (TV). 1993 : Passport to Murder (TV).


Sorti à la fin de l'âge d'or du Fantastique australien alors que l'acteur Robert Powell fut révélé un an plus tôt avec le singulier Harlequin (Prix du jury, Prix de la Critique et Prix du Meilleur Acteur pour celui-ci au rex de Paris), le Survivant d'un monde parallèle joue la carte d'un fantastique intègre aussi mineur soit son contenu pour autant assez original et intriguant. David Hemmings (inoubliable interprète de Blow Up et des Frissons de l'angoisse) parvenant à structurer un suspense sensiblement captivant autour de la quête de vérité du rescapé d'un crash aérien. Epaulé d'une medium témoin de la tragédie ayant causé plus de 300 morts, le commandant Keller tente de retrouver la mémoire afin d'élucider la cause de l'accident. S'agit-il d'un sabotage, d'une défaillance technique ? Pour quelle raison en est-il l'unique survivant ?


Quand bien même certains membres de son entourage acculées par une étrange fillette et des cris d'enfants trouvent inexplicablement la mort à proximité des débris. Emaillé d'incidents horrifiques assez originaux dans la manière feutrée de crédibiliser un surnaturel tacite suggérant l'écho de plaintes infantiles, le Survivant d'un monde parallèle prône l'expectatif au fil d'une investigation de longue haleine que Keller et sa partenaire Hobbs (élégamment campée par Jenny Agutter - Le Loup-Garou de Londres -) persévèrent à l'aide de maigres indices disséminés en de rares occasions. Partagé entre l'incompréhension, la stupeur et l'inquiétude, le spectateur se laisse donc agréablement embarqué dans une intrigue interlope digne d'un épisode de la 4è Dimension, et ce avant de pouvoir saisir les tenants et aboutissants durant l'ultime quart-d'heure aussi limpide qu'un chouilla frustrant (tout ça pour ça dirions nous ?!).


Le charme typiquement rétro des années 80

Pour autant, grâce à son casting communément convaincant et attachant (notamment Robert Powell par son charisme hermétique), à sa photo limpide sensuelle et surtout grâce à son climat spirituel soigneusement suggéré (on croit sans sourciller à la revanche des fantômes !), le Survivant d'un monde parallèle laisse en mémoire un divertissement gentiment envoûtant. David Hemmings parvenant sans esbroufe grand-guignolesque à y imprimer sa patte personnelle par le truchement d'étonnantes séquences-chocs (notamment l'inventivité du crash d'atterrissage assez réaliste et explosif !) où des voix d'outre-tombe sont fermement décidées à démystifier une vérité éhontée. 

* Bruno
17.02.24. 4èx. Vostfr

mercredi 7 novembre 2018

Vendredi 13, Chapitre final.

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Friday the 13th: The Final Chapter" de Joseph Zito. 1984. U.S.A. 1h31. Avec Ted White, Kimberly Beck, Erich Anderson, Corey Feldman, Barbara Howard, Peter Barton

Sortie salles France: 11 Juillet 1984. U.S: 13 Avril 1984

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Joseph Zito est un réalisateur américain, né le 14 mai 1946 à New York. 1975 : Abduction. 1979 : Bloodrage. 1981 : Rosemary's Killer. 1984 : Vendredi 13 : Chapitre final. 1984 : Portés disparus. 1985 : Invasion USA. 1989 : Le Scorpion rouge. 2000 : Delta Force One: The Lost Patrol. 2003 : Power Play.


On prend les mêmes et on recommence sous la houlette du petit artisan de la série B Joseph Zito (Rosemary's Killer, Portés Disparus, Invasion U.S.A.), et ce tout en nous promettant la fin des exactions de Jason le tueur à la machette à travers un sous-titre sans équivoque. Ainsi, on a beau connaître la recette par coeur (pourquoi changer une formule aussi payante ?), Vendredi 13, Chapitre final séduit miraculeusement, aussi crétines soient ses situations éculées ! Comme de coutume, et à condition de suivre ses vicissitudes horrifiques au second degré, Vendredi 13 IV cumule à rythme métronomique les morts brutales sous l'impulsion d'un gore assez jouissif (même si trop souvent concis) concocté par l'illustre Tom Savini. Et de s'amuser entre temps des beuveries et batifolages  d'ados polissons lors de confrontations machistes (à qui tringlera le premier la plus aguicheuse du groupe ?) si bien que son érotisme timoré reste aussi inoffensif aujourd'hui.


Pour autant, par je ne sais quel miracle, ces ados décervelés gentiment attachants de par leur fraîcheur innocente (avec un brin de clémence sans doute !) parviennent à nous immerger dans leur situation anxiogène lorsque Jason tapi dans l'ombre d'une porte, d'une fenêtre ou d'un bosquet se prépare à perpétrer un nouveau massacre auprès d'une victime prise en estocade (score strident de Manfredini  au rappel !). D'autre part, à travers la photogénie de sa nature forestière, Joseph Zito parvient parfois à distiller un climat d'angoisse quelque peu perméable, notamment dans sa capacité à suggérer la présence invisible de Jason, de jour comme de nuit. Quand bien même, et pour parachever en bonne et due forme, on continue de se divertir du caractère à la fois haletant et spectaculaire de sa poursuite finale lorsque la dernière victime retranchée dans son cocon domestique parmi son frère (un féru de ciné horreur collectionnant masques et gadgets de ses monstres attitrés) tente de combattre (arme blanche à la main) le tueur tous azimuts. Ce dernier quart d'heure émotionnellement palpitant s'avérant rondement mené auprès d'un esprit cartoonesque aussi bien débridé que jouissif. Quand bien même la posture furibonde de l'ado subtilement revanchard (il se fait passer pour Jason à l'âge de sa noyade afin de mieux le duper) extériorise une aura malsaine bienvenue lors de sa folie meurtrière incontrôlée qu'une ultime image dérangeante persistera sans ambiguïté.


Sans décevoir ses aficionados, Vendredi 13, chapitre Final peut autant faire office de nanar bonnard que de série B efficacement troussée grâce au savoir-faire de Joseph Zito soignant d'autant mieux sa scénographie forestière avec comme alibis usuels les maquillages de Savini et la présence iconique du molosse à la machette plus obtus et destructeur que jamais (incarné pour le coup par Ted White mécontent du résultat final ainsi que des 3 opus antécédents !). 

* Bruno
3èx

Box Office France: 270 013 entrées

mardi 6 novembre 2018

Sicario: la guerre des cartels

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Sicario: Day of the Soldado" de Stefano Sollima. 2018. Italie/U.S.A. 2h02. Avec Benicio del Toro, Josh Brolin, Isabela Moner, Jeffrey Donovan, Manuel Garcia-Ruflo, Catherine Keener

Sortie salles France: 27 Juin 2018. U.S: 29 Juin 2018

FILMOGRAPHIE: Stefano Sollima est un cinéaste et réalisateur italien, né le 4 mai 1966 à Rome. 2012: A.C.A.B.: All Cops Are Bastards. 2015: Suburra. Séries TV: Un posto al sole - soap opera (2002), La squadra - série TV, 7 épisodes (2003 - 2007), Ho sposato un calciatore - mini série (2005), Crimini - série TV, épisodes Il covo di Teresa, Mork et Mindy et Luce del nord (2006 - 2010)
Romanzo criminale, 22 épisodes (2008 - 2010). Gomorra, 12 épisodes (2014 - 2015).


Si Denis Villeneuve n'est plus de la partie pour donner suite à Sicaire, le réalisateur italien Stefano Sollima (déjà très remarqué avec son 1er métrage A.C.A.B et surtout Suburra !) relève haut la main la gageure de surpasser son congénère avec une séquelle de haute volée. Sicario: la guerre des Cartels retraçant avec un réalisme méticuleux la mission secrète de la CIA et du sicaire Alejandro Gillick d'enlever la fille d'un parrain du cartel afin d'influencer une guerre fratricide entre clans mafieux tirant des bénéfices sur le dos des migrants à la frontière americano-mexicaine. Car depuis un attentat meurtrier dans un supermarché, les passeurs grassement payés par leur supérieur sont désignés coupables par le secrétaire de la défense d'y faire entrer des migrants potentiellement terroristes. Ainsi, alors que la CIA parvient à kidnapper leur cible, la mission doit être annulée depuis la révélation identitaire des terroristes natifs d'Amérique. Mais au mépris de ses supérieurs et de son bras droit Matt Graver, Alejandro réfute les ordres d'éliminer chaque témoin. Thriller hypnotique rondement menée car d'une précision chirurgicale auprès de sa mise en scène virtuose, Sicario: la guerre des cartels plaque au siège de par sa structure narrative captivante fertile en bravoures homériques, retournements de situations et rebondissements parfois insensés (mais chut, j'en ai déjà trop dit !). On peut d'ailleurs s'agenouiller face au dynamisme du montage rendant lisible la chorégraphie de l'action entièrement au service narratif, et ce sans jamais complexifier vainement le récit plutôt limpide et dénué de digressions.


Superbement campé par 2 acteurs en acmé, Benicio del Toro / Josh Brolin se partagent la vedette avec un charisme quasi animal, notamment auprès de leur idéologie équivoque à combattre vaillamment le crime au prix d'un sacrifice difficilement tolérable. Description aride d'une société de corruption en déliquescence morale, tant auprès des redresseurs de tort impassibles que des trafiquants ne sachant plus trop distinguer qui travaille pour qui et quel est leur véritable identité derrière l'insigne ou le treillis, Sicario se taille une carrure mature assez avilissante auprès de ces personnages véreux s'entretuant pour l'enjeu d'une otage sans défense. Tendu comme un arc auprès de sa seconde partie à couper le souffle, le suspense narratif cède place à une dramaturgie escarpée lorsque Alejandro doit tenter de passer la frontière pour sauver l'otage sévèrement ballottée d'assister en direct à des tueries de masse. Là encore, Stefano Sollima apporte un soin scrupuleux à dresser le portrait si "réaliste" d'une jeune fille obtuse et rebelle mais davantage fragile et démunie au fil de son parcours de survie en proie au chaos. Outre le regard très sobre de Isabela Moner très impressionnante dans sa fonction aussi bien soumise qu'épeurée, le jeune Elijah Rodriguez s'avère aussi soigneusement structuré en passeur en herbe indécis gagné pour autant par le désir de vaincre ses peurs et montrer ses preuves à sa vile hiérarchie quitte à y vendre son âme. La pâleur de son regard candide, sa posture plutôt timorée doucement ternis par ses actes frauduleux nous glacent d'amertume passé sa probation criminelle.


Passionnant, violent et tendu à l'extrême lors d'un second acte littéralement anthologique, Sicario: la guerre des cartels surpasse son modèle en mode thriller noir et radical où bons et méchants ne font plus qu'un au sein d'une société aussi parano que schizo. 

* Bruno

lundi 5 novembre 2018

Du sang dans la poussière

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Spikes Gang" de Richard Fleischer. 1974. U.S.A. 1h36. Avec Lee Marvin, Gary Grimes, Ron Howard, Charles Martin Smith, Arthur Hunnicutt, Marc Smit.

Sortie salles U.S: 1er Mai 1974

FILMOGRAPHIE: Richard Fleischer est un réalisateur américain né le 8 décembre 1916 à Brooklyn,  et décédé le 25 Mars 2006 de causes naturelles. 1952: l'Enigme du Chicago Express, 1954: 20 000 lieues sous les mers, 1955: les Inconnus dans la ville, 1958: les Vikings, 1962: Barabbas, 1966: le Voyage Fantastique, 1967: l'Extravagant Dr Dolittle, 1968: l'Etrangleur de Boston, 1970: Tora, tora, tora, 1971: l'Etrangleur de Rillington Place, 1972: Terreur Aveugle, les Flics ne dorment pas la nuit, 1973: Soleil Vert, 1974: Mr Majestyk, Du sang dans la Poussière, 1975: Mandingo, 1979: Ashanti, 1983: Amityville 3D, 1984: Conan le destructeur, 1985: Kalidor, la légende du talisman, 1989: Call from Space.


Honteusement méconnu et oublié alors qu'il s'agit à mon sens d'un des plus beaux westerns des années 70, Du sang dans la poussière retrace sans fioriture le parcours criminel de 3 adolescents après avoir secouru un braqueur de banque blessé lors de règlements de compte. Mélancolique, dur et désespéré, Du sang dans la poussière se veut à contre-courant du western traditionnel gentiment ludique dans la mesure où Richard Fleicher opte pour un réalisme froid en dressant le portrait si fragile d'ados en requête d'espoir et de liberté faute de leur encadrement parental psycho-rigide. Tout du moins c'est que l'on apprendra du point de vue de l'aîné Will Young régulièrement battu par son paternel en guise punitive, et qui donc décide un jour de se faire la malle pour acquérir sa propre indépendance et dénicher un havre de paix. Le réalisateur illustrant avec une rigueur dramatique expansive les conséquences tragiques du grand banditisme du point de vue de ces ados utopistes débordants de vie, de joie et d'humanité. 


Et donc sous l'influence d'un braqueur de banque aguerri, le trio s'imagine une nouvelle vie plus prospère après avoir opéré de petits emplois de fortune. Seulement, au fil de leur nouveau parcours délinquant particulièrement inhospitalier puisque semé de désordre et confrontations sanglantes, la vie de braqueur s'apparente plutôt à un danger endémique, une traque sans fin surtout lorsque l'on fait preuve d'inexpérience et que l'on privilégie l'esprit de camaraderie à travers leur amitié indéfectible. Magnifiquement interprété (on reconnaîtra le novice Ron Howard accompagné de l'excellent Charles Martin Smith dans sa nature empotée), Du sang dans la poussière est surtout illuminé par l'acteur  Gary Grimes en jeune frondeur féru de rêve et de positivisme avant de se laisser hanter par le remord et la vengeance que Richard Fleischer souligne notamment à travers ses pensées introspectives. Toujours aussi impressionnant dans sa carrure robuste et son charisme viril, Lee Marvin endosse un sexagénaire marginal avec une autorité déférente auprès de ses ados secourables lors de leur première rencontre. Et ce avant de leur dévoiler son véritable visage impassible, froid, calculateur de par sa ferme autonomie à ne leur céder aucune clémence lors des situations les plus alarmistes et moribondes. La dure loi du métier leur inculquant au final qu'il ne faudra compter que sur soi même pour tenter de s'extirper de la défaite, pour ne pas dire la mort.  


Bouleversant, noir et cruel, Du sang dans la poussière fait presque office de documentaire en soulignant la dérive criminelle d'ados livrés à eux mêmes depuis leur mauvaise fréquentation à s'idéaliser un nouveau père. Terriblement amer et sans concession à travers un cheminement indécis remarquablement conté et structuré, Richard Flescher nous éprouve moralement à travers la puissance de ces images mélancoliques noyées de désespoir existentiel. Tant et si bien que Du sang dans la poussière nous laisse gagner par une tristesse nonchalante sous l'impulsion du score sensible de Fred Karlin (résonnant longtemps dans nos mémoires après le générique de fin).

* Bruno
3èx 

vendredi 2 novembre 2018

L'enfant du Diable

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Changeling" de Peter Medak. 1980. U.S.A. 1h47. Avec George C. Scott, Trish Van Devere, Melvyn Douglas, Jean Marsh, John Colicos, Barry Morse, Madeleine Thorton-Sherwood, Helen Burns, Frances Hyland.

Sortie en salle en France le 29 Octobre 1980. U.S.A: 28 Mars 1980.

FILMOGRAPHIEPeter Medak est un réalisateur et producteur hongrois né le 23 Décembre 1937 à Budapest (Hongrie). 1968: Negative, 1972: A day in the death of Joe Egg, 1973: Ghost in the noonday sun, 1978: The Odd job, 1980: l'Enfant du diable, 1981: la Grande Zorro, 1986: The Men's club, 1990: la Voix humaine, 1993: Romeo is bleeding, 1994: Pontiac moon, 1998: la Mutante 2.


Quelques mois après la sortie du grand succès public Amityville, la maison du diable, les producteurs Garth H. Drabinsky et Joel B. Michaels proposent pour 7,6 millions de dollars le nouveau projet d'un film de maison hantée. C'est à Peter Medak qu'incombe la tâche, metteur en scène canadien ayant déjà fait ses preuves avec les séries T.V Amicalement VotreCosmos 1999 ainsi que quelques longs-métrages parmi lesquels Negative et A day in the death of Joe Egg. Tiré d'un scénario de Russel Hunter auquel le récit serait fondé sur des évènements réels, l'Enfant du diable  (titre français d'apparence racoleur mais finalement moins fallacieux qu'il n'y parait !) puise sa substantialité et son intensité grâce à un alibi narratif en concertation avec les ambiances lourdes d'une angoisse diffuse. Et ce au mépris de l'artillerie de la surenchère trop habituelle chez nos producteurs margoulins. John Russel vient de perdre sa femme et sa fille lors d'un tragique accident de voiture. Lourdement éprouvé et après 4 mois de deuil, il quitte son foyer pour s'installer dans l'état de Washington et poursuivre un poste d'enseignant mélomane. Réfugié dans une vaste demeure en louage, il est rapidement témoin de phénomènes inexpliqués. Après un prélude d'une sobre intensité lors d'une tragédie accidentelle percutant de plein fouet une mère et sa fille face au témoignage impuissant du père, Peter Medak  nous fait pénétrer ensuite dans l'environnement gothique d'une vaste demeure où chaque pièce aphone semble hantée d'une présence occulte. Une ambiance inquiétante délectable émaillée de  moments de tension d'un réalisme aussi ensorcelant que perturbant si bien que le spectateur renoue avec sa peur du noir et de l'inconnu à proximité des chambres les plus poussiéreuses. Peter Medak exploitant agilement (mais de manière placide) sa caméra parfois subjective pour mieux nous confondre au vénéneux sentiment d'insécurité.


Outre le plaisir contradictoire de frissonner avec malaise en étant totalement impliqué dans la situation inexpliquée, le récit charpenté, scrupuleusement conté, privilégie ensuite diverses énigmes à résolver du point de vue démystificateur de John Russel. Croire à l'improbable, l'art de narrer sans effet de manche une ignoble stratégie infanticide où la psychologie des personnages les plus dignes se taillent une carrure d'investigateurs afin de démanteler le coupable jamais condamné ! Telle est la puissance de suggestion lorsque le metteur en scène s'efforce de nous convaincre d'une présence surnaturelle confinée le plus souvent dans un grenier orné de vieux souvenirs. La sobriété des comédiens à l'humanisme prévenant extériorisant notamment une inévitable compassion face à l'épouvantable tragédie qui s'esquisse devant eux ! Ainsi donc, au fil de ce climat anxiogène littéralement tangible mais vaporeux, sa trajectoire s'enrichit d'une passionnante investigation criminelle à la dramaturgie aussi poignante que révoltante. Peter Medak exploitant sans pathos un contexte crapuleux si bien que l'intrigue s'efforcera d'élucider au compte goutte les tenants et aboutissants d'un crime infantile toléré par une sommité handiphobe. Dans la peau du veuf accablé assorti d'une noble pudeur dans son refus de s'y morfondre, l'immense George C. Scott dilue une empathie dépouillée auprès de sa détermination studieuse à daigner coûte que coûte rétablir l'ultime vérité. Spoil ! Dans la mesure où elle compromet la culpabilité "équivoque" d'un notable notoire quasi intouchable. Sa lourde tâche de délivrer l'âme d'un enfant martyr s'avérant d'autant plus fébrile et épineuse qu'il devra s'opposer aux forces occultes avec une bravoure précaire.  Fin du Spoil. Irradiant l'écran parmi son imposante présence, l'acteur porte l'intrigue sur ses épaules en exprimant une force d'expression naviguant entre désagrément et désarroi, incompréhension et soif de découverte, et ce afin d'accéder à la rédemption (tant auprès de sa condition endeuillée que de la victime estropiée éplorant le secours). 


De par son florilège de séquences impressionnantes Spoil ! (la séance de spiritisme, la découverte du grenier et du puits, la noyade dans la baignoire, les coups de marteau tambourinant les cloisons, la balle ricochant dans l'escalier, l'apparition de la chaise du haut de l'escalier, le final explosif) fin du SpoilL'Enfant du Diable prône avec une noble maturité le Fantastique le plus épuré, à l'instar de ses congénères La Maison du Diable, les Innocents, Ne vous retournez pas, Trauma ou encore  l'inoubliable Le Cercle Infernal. La fragilité de l'intrigue générant un poids dramatique davantage rigoureux (lever le voile sur une innocente disparition), le charisme robuste du vétéran George C. Scott en veuf désireux de prêter main forte à l'inconnu, la douceur bienveillante de Trish Van Devere  (autrement favorable pour soutenir son partenaire contrarié), et surtout l'atmosphère d'angoisse irriguant les murs de l'immense bâtisse achèvent d'accéder l'Enfant du diable au panthéon du chef-d'oeuvre maudit aussi lancinant que tragique. 

Récompenses: Prix du Meilleur acteur (George Scott) au Fantafestival 1982.
Prix génie du meilleur film, Genie Awards de la Meilleure photographie, Meilleur son, Meilleure direction artistique, Meilleur acteur étranger (George Scott), Meilleure actrice étrangère (Trish Van Devere), Meilleur scénario et Meilleur son en 1980

* Bruno
02.11.18. 5èx
07.04.11. 4 (611 v)

jeudi 1 novembre 2018

Vendredi 13, chapitre VI : Jason le mort-vivant

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Friday the 13th Part VI: Jason Lives" de Tom Mcloughlin. 1986. U.S.A. 1h29. Avec Thom Matthews, Jennifer Cooke, David Kagen, Kerry Noonan, Renée Jones, Tom Fridley.

Sortie salles France: 14 Janvier 1987. U.S: 1er Août 1986.

FILMOGRAPHIE: Tom Mcloughlin est un scénariste et réalisateur américain né en 1950. 1983: One Dark Night, 1986: Jason le mort-vivant, 1987: Date with an angel, 1991: Sometimes they come back, 1992: Something to live for: the alison gertz story, 1999: Anya's Bell, 2001: The Unsaid, 2002: Murder in Greenwich, 2003: D.C. Sniper: 23 Days of fear, 2004: She's too young, 2005: Odd Girl Out, Cyber Seduction: His secret life, 2006: Not like everyone else, 2007: The Staircase Murders, 2008: Fab Five: The Texas Cheerleader Scandal.


Aussi surprenant que cela puisse paraître, car qui aurait pu imaginer un tel revirement dans l'ornière de la célèbre saga; Vendredi 13, Chapitre 6 s'avère de loin le meilleur du lot. Tout du moins, et à mon sens, le plus fun, le plus ludique, le plus décomplexé, le plus cartoonesque, et ce grâce au panache de sa mise en scène jamais à court de carburant, à ses personnages en roue libre et à son esthétisme bucolique joliment photographié. Réalisé par Tom Mcloughlin à qui l'on doit le sympathique Une nuit trop noire (bien connu des rats des vidéos), ce dernier parvient miraculeusement à transcender les situations éculées grâce à une dérision endémique que les protagonistes empotés et Jason l'incorrigible amorcent avec second degré assumé. Ainsi donc, truffé de personnages inconséquents que Jason Voorhees poursuit avec une tranquillité limite parodique, Vendredi 13, Chapitre 6 transpire la bonne humeur en toute décontraction. Notamment grâce au duo burné formé par Thom Matthews (Tommy aujourd'hui adulte, l'ado autrefois rescapé du Chapitre Final !) et Jennifer Cooke (la fille entêtée du shérif s'adonnant à une marginalité héroïque impromptue). Et donc si son schéma narratif ne sort pas des sentiers battus, Tom Mcloughlin parvient efficacement à renouveler les séquences de poursuites et exactions meurtrières dans de multiples sentiers forestiers si bien que l'on s'étonne de son rythme littéralement affolant (notamment auprès de son final haletant avec son action ramifiée du point de vue des flics et du couple juvénile !).


Ainsi, le spectateur jouasse s'enjaille à comptabiliser les victimes, sacrifiées, comme de coutume, de manière aussi cruelle que spectaculaire. D'ailleurs, on s'étonne même parfois d'y ressentir un soupçon d'empathie auprès de certaines timidement attachantes de par leur innocence. Et pour pimenter l'intrigue inévitablement rebattue (de jeunes vacanciers du camp "Forrest Green", quelques quidams locaux et 3,4 militaires férus de paintball vont faire les frais du tueur parmi le témoignage médusé d'une colonie d'enfants auquel Jason n'osera jamais lever la main !), Tommy s'efforcera durant sa garde à vue prolongée de convaincre le shérif local que Jason est bel et bien revenu d'entre les morts pour y semer un nouveau carnage. A cet égard, on peut également souligner son jouissif préambule aussi inventif que pittoresque lorsque Tommy et un acolyte se résignent à exhumer le cadavre de Jason dans une nécropole (délicieusement photogénique !) afin d'exorciser son traumatisme d'ado. Inventive, trépidante et semée d'humour noir, cette mise en bouche prometteuse annonce déjà le parti-pris sarcastique du cinéaste tout en starisant Jason dans sa nouvelle stature criminelle davantage indestructible (on croirait presque avoir à faire à un super-anti-héros !).


B movie du samedi soir purement ludique à travers sa moisson de péripéties horrifiques rondement menées, Vendredi 13, Chapitre 6 détonne en diable sous l'impulsion d'une dérision à la fois espiègle et sardonique. Quand bien même on s'étonne de la prestance convaincante de son casting guilleret se prêtant au jeu du "ouh fais moi peur" et du "attrapes moi si tu peux" avec une fougue communément expansive. Si bien que le tournage assurément festif leur aura sans doute légué un précieux souvenir potache ! 

* Bruno
3èx

mercredi 31 octobre 2018

Une prière avant l'aube

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site fr.muaythaitv.com

"A Prayer Before Dawn" de Jean-Stéphane Sauvaire. 2018. France/Angleterre. 1h56. Avec Joe Cole, Vithaya Pansringarm, Nicolas Shake, Panya Yimmumphai, Pornchanok Mabklang, Billy Moore.

Sortie salles France: 20 Juin 2018 (Int - 16 ans). Angleterre: 20 Juin 2018.

FILMOGRAPHIE: Jean-Stéphane Sauvaire est un réalisateur, producteur et scénariste français, né le 31 décembre 1968. 2003, Carlitos Medellin. 2008, Johnny Mad Dog. 2012: Punk (télé-film). 2017 : Une prière avant l'aube.


"L'important est de ne jamais désespérer"
Film choc retraçant avec un vérisme ultra documenté le parcours d'endurance de Billy Moore, jeune détenu britannique incarcéré en prison pour possession de drogue, Une prière avant l'aube est une expérience sensitive dans l'enfer carcéral Thaïlandais peu (ou jamais ?) abordé à l'écran. Tout du moins c'est que nous illustre sa première partie littéralement nauséeuse lorsque Billy témoigne des conditions sordides de son incarcération avec d'autres détenus similaires à des animaux sauvages impudents. Viols, suicide, meurtres, châtiments corporels s'avérant leur lot quotidien si bien que chacun d'entre eux tente de survivre avec comme seul palliatif moral la drogue dure et l'alcool. Pour autant, dans ce milieu insalubre dénué d'humanité où tout se marchande, Billy va parvenir à se raccrocher au fil de sa passion pour la boxe après avoir essuyé une tentative de suicide. On peut d'ailleurs prévenir les âmes sensibles que sa première demi-heure parfois insoutenable (le mot n'est point outré) nous plonge dans un état de malaise viscéral difficilement gérable. Prioritairement une exaction de viol communautaire de par son réalisme ultra malsain auprès des corps en rut et d'un témoignage impuissant. Jean-Stéphane Sauvaire filmant son contexte carcéral avec une vérité sensorielle eu égard de sa caméra expérimentale auscultant les corps en mutation avec une virtuosité autonome.


Quand bien même tous les interprètes thaïlandais méconnus chez nous s'expriment dans leur langage volontairement inaudible (une partie des dialogues n'est pas sous-titré) afin de mieux s'identifier dans le mental de Billy en proie à la perte de repères, l'incompréhension et l'incommunicabilité. Car si Une prière avant l'aube s'avère aussi dur, cruel, asphyxiant et brut de décoffrage, il le doit au talent personnel de son auteur réfutant toute forme de racolage car plutôt délibéré à nous conter avec souci de vérité un vécu inusité. Tant et si bien qu'Une prière avant l'aube demeure avant tout un film de boxe transplanté dans la cadre d'un drame carcéral soigneusement reconstitué. Evitant les clichés usuels et l'esbroufe lors de multiples matchs de combats d'un réalisme et d'une intensité à perdre haleine, Jean-Stéphane Sauvaire nous hypnotise les sens lors de l'initiation héroïque de Billy partagé entre une révolte fielleuse (notamment faute de sa prise de stupéfiants par intermittence !) et un désir de surpasser ses pires démons. Le réalisateur filmant avec beaucoup de sensualité les déplacements et mouvements corporels des boxeurs vouant un culte pour le Tatoo afin d'imprimer leur nouvelle identité dans leur condition exclue. A travers son parti-pris d'authentifier et d'y dénoncer l'enfer d'un témoignage carcéral puis de bifurquer ensuite vers l'hymne à la boxe thaï sous l'impulsion d'une fureur de vaincre, il faut impérativement saluer la précision de sa bande-son hyper travaillée là encore conçue pour nous immerger dans l'introspection morale de Billy passant par divers stades de souffrances/transformations corporelles. Quitte à en perdre son essence vitale à travers ses perles de sueur !


La Nouvelle Chair.
D'une intensité dramatique constamment rigoureuse sans céder à la facilité de sentiments démonstratifs, Jean-Stéphane Sauvaire opte pour la pudeur et la sobriété, notamment auprès du jeu naturel de Joe Cole (Peaky Blinders, Green Room) époustouflant en guerrier primitif naviguant entre résilience et désespoir, folie et quête de rédemption. Drame carcéral éprouvant doublé d'un drame sportif par le truchement d'une histoire vraie, Une prière avant l'aube n'épargne aucune souffrance au spectateur immergé dans la tourmente d'un détenu stoïque à deux doigts d'y perdre son âme. 

* Bruno