mardi 14 mai 2019

Les Invisibles. Prix Chabrol coup de coeur du Jury, Prix du Public à Pau.

                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Louis-Julien Petit. 2018. France. 1h42. Avec Audrey Lamy, Corinne Masiero, Noémie Lvovsky, Déborah Lukumuena, Pablo Pauly, Sarah Suco, Brigitte Sy

Sortie salles France: 9 Janvier 2019

FILMOGRAPHIELouis-Julien Petit est un réalisateur français, né le 6 septembre 1983 à Salisbury (Royaume-Uni). 2009: Les Figures (court métrage). 2015: Discount. 2016: Carole Matthieu. 2018 : Les Invisibles.


Avant-propos: Le nombre de personnes sans-domicile est en progression constante, avec presque un doublement entre 2001 et 2012, selon les statistiques de l’Insee et l’Ined. 38 % des sans-domicile adultes sont des femmes.

"Les seules femmes heureuses sur cette terre sont celles à qui nulle caresse ne manque."
Auréolé de 5 récompenses en France, Les Invisibles est une merveille d'émotions dans le cadre précaire d'un foyer clandestin y accueillant en désespoir de cause des femmes SDF au tempérament à la fois explosif et chétif. Déjà remarqué avec le formidable (et tout aussi noble et discret) Discount, comédie sociale dans la même veine vériste, Louis-Julien Petit gravite d'un échelon avec Les Invisibles. De par la pudeur de sa mise en scène (en dépit de 2/3 situations dramatiques émaillée de bons sentiments facilement pardonnables) que de l'expression des actrices professionnelles se mêlant aux quidams non professionnelles (pour certaines ils s'agit d'ailleurs de véritables femmes SDF). Et sur ce dernier point oh combien saillant, on reste ébaubi par les prestances criantes de vérité humaine de ces laissés-pour-compte aussi rongés par la désillusion que d'une parcelle d'espoir que tentent de réanimer leurs managers Audrey, Manu et Hélène en communion solidaire. Le cheminement narratif inscrit dans la désinhibition du désir de s'affirmer se déclinant en parcours initiatique.


Une épreuve de force perpétuelle à retrouver leur dignité, leur foi en l'avenir et leur raison d'exister de par l'intérêt du projet professionnel et du soutien amical indéfectible qu'elles forment autour de leurs mentors. Ainsi donc, en éludant admirablement le misérabilisme auprès d'un sujet aussi grave qu'ignoré au cinéma, Louis-Julien Petit privilégie humour et légèreté auprès du tempérament mutuellement sémillant de cette troupe de comédiennes crevant l'écran à chacune de leur posture burinée. Si bien que ces visages ordinaires striés d'un passé social chaotique nous bouleversent auprès de leur attachante expression naturelle inscrite dans la force du vécu. Ces dernières, parfois timorées et chevrotantes, livrant à nu leurs sentiments frondeurs face à une caméra studieuse portant une immense tendresse auprès de leur engagement et résilience stoïque (du moins pour les plus preuses d'entres elles). Et ce en dépit du corps policier inévitablement intolérant à toute démarche illégale et dénué de courtoisie à respecter cette gente féminine estampillée "marginale".


"Femmes, je vous aime"
Hymne à la vie en forme de vertigineux feu d'artifice bipolaire, et au désir fougueux de vaincre la misère dans leur condition d'exclues de la société, Les Invisibles accouple intègrement la comédie dramatique par le biais de ces inoubliables tranches de vie divines d'amicalité candide. De par leur élan solidaire féminin d'y refréner leur rage en combattant la tête haute l'injustice (quel majestueux défilé final face une police impassible !) y émane une oeuvre infiniment fragile, sensible et bouleversante, mais pour autant truffée d'espoir, d'optimisme et de rêve à accomplir à force d'enjamber une à une les marches du podium. (Avec en sus un superbe témoignage au comité chaleureux de la région Haut-de-France !).  

*Bruno

Récompenses: Prix de la Meilleure Réalisation lors de la première édition du Festival International du Film Politique de Carcassonne.
Prix Chabrol Coup de coeur du Jury, Chabrol du Public et Chabrol du Jeune Public au Festival du Film du Croisic.
Prix du Public au Festival International du Film de Pau.












lundi 13 mai 2019

Border. Prix Un certain regard, Cannes 2018.

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"Gräns" de Ali Abbasi. 2019. U.S.A. 1h50. Avec Eva Melander, Eero Milonoff, Jörgen Thorsson, Sten Ljunggren, Ann Petrén

Sortie salles France: 9 Janvier 2019

FILMOGRAPHIE: Ali Abbasi, né en 1981 à Téhéran, en Iran1, est un scénariste, réalisateur et monteur danois d'origine iranienne. 2016 : Shelley. 2018 : Border


Natif de Suède, Border est une oeuvre inclassable étonnante, de par son parti-pris d'y casser les codes au point d'y larguer en route une partie des spectateurs, notamment faute de son climat insolite, austère, mutique, en accord avec une nature apaisante. Car conjuguant les genres du Fantastique, de la romance, du suspense, de l'horreur et du drame social de manière résolument iconoclaste, Border n'est pas conçu pour plaire tous les spectateurs. Son schéma narratif imprévisible se développant au fil de la quotidienneté d'une douanière douée d'un odorat exceptionnel pour alpaguer les fraudeurs, et qui un jour, sur son lieu de travail, rencontrera un individu suspicieux de prime abord avec qui elle entamera une liaison sentimentale. Conte écolo militant pour la cause animale et le droit à la différence à travers les thèmes si graves (et si inattendus) de la pédophilie et de la maltraitance infantile, Border tente de nous attacher auprès d'un couple marginal si bien que je tairai leur identité afin d'ébruiter l'indice.


Ces derniers ayant comme point commun un physique ingrat tuméfié (avec en sus une cicatrice dans le bas du dos), une misanthropie davantage appuyée au fil de leur relation existentielle contestataire ainsi qu'une nourriture peu ragoutante constituée entre autre d'asticots, insectes et vers de terre. Ainsi, en dépit de son climat équivoque parfois pesant et de moult ruptures de ton baroques à la lisière d'un David Lynch (on peut d'ailleurs prêter une allusion à Eraserhead à un moment propice d'une découverte), Border fascine par moments même si le malaise nous occasionne tantôt un sentiment de dégoût ou d'opposition contradictoire. Le réalisateur abordant également une réflexion sur le Bien et le Mal à travers le motif d'une vengeance sans vergogne. Méconnaissable en douanière à l'embonpoint affichant un visage repoussant, Eva Melander porte le film sur ses épaules avec une force d'expression discrètement magnétique eu égard de son introversion et de sa voie initiatique à se rebeller contre une mauvaise influence et le sentiments davantage aigu d'injustice. Accompagné d'Eero Milonoff aussi convaincant, son personnage s'avère bien plus énigmatique et équivoque lors de ses sous-entendus ironiques, son petit regard impur et ses actions parfois dénuées de raison ou de logique.


Que l'on aime ou que l'on rejette en bloc son contenu difficile d'accès, Border est un vrai film fantastique couillu possédant sa propre personnalité atypique. Un récit initiatique sur l'estime de soi, le désir d'indépendance (sans y être juger) et la maîtrise de la communication à travers le cadre du conte écolo remettant en cause une lourde responsabilité parentale du point de vue de l'orphelin. A découvrir. 

*Bruno

Festival de Cannes 2018 : Prix Un certain regard
Noir in Festival 2018 : Prix du meilleur film7,8.

vendredi 10 mai 2019

Rivière sans Retour

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site free-telechargement.co

"River of No Return" de Otto Preminger. 1954. U.S.A. 1h31. Avec Robert Mitchum, Marilyn Monroe, Rory Calhoun, Tommy Rettig, Murvyn Vye, Douglas Spencer

Sortie salles France: 30 Avril 1954

FILMO SELECTIVE: Otto Ludwig Preminger, né le 5 décembre 1905 à Wiznitz (en Autriche-Hongrie, aujourd'hui en Ukraine) et mort le 23 avril 1986 à New York (États-Unis), est un réalisateur américain d'origine autrichienne.1936 : Under Your Spell. 1937 : Charmante Famille. 1938 : Le Proscrit. 1944 : Laura. 1945 : Scandale à la cour. 1945 : Crime passionnel. 1946 : Quadrille d'amour. 1947 : Ambre. 1947 : Femme ou Maîtresse. 1949 : Le Mystérieux Docteur Korvo. 1950 : Mark Dixon, détective. 1951 : La Treizième Lettre. 1952 : Un si doux visage. 1953 : La Lune était bleue. 1954 : Rivière sans retour. 1954 : Carmen Jones. 1955 : L'Homme au bras d'or. 1955 : Condamné au silence. 1957 : Sainte Jeanne. 1958 : Bonjour tristesse. 1959 : Autopsie d'un meurtre. 1960 : Exodus. 1962 : Tempête à Washington. 1963 : Le Cardinal. 1965 : Première Victoire. 1965 : Bunny Lake a disparu. 1967 : Que vienne la nuit. 1970 : Dis-moi que tu m'aimes, Junie Moon. 1971 : Des amis comme les miens. 1975 : Rosebud. 1979 : The Human Factor.


« Il y a toujours deux côtés dans une histoire. »
Unique western d'Otto Preminger qui fit les beaux jours de la Dernière Séance d'Eddy Mitchell un 16 Novembre 1982 en 1ère partie de soirée, Rivière sans retour fait parti de ses classiques immuables auquel le côté désuet ne fait que renforcer son charme sensuel. Car fort d'une mise en scène aussi bien sobre que maîtrisée à travers un Scope technicolor, et d'une admirable direction d'acteurs, Rivière sans Retour impose un climat souvent placide à travers le périple houleux d'un couple de fortune et d'un enfant traversant une rivière agitée pour rejoindre la ville de Council City. Mais au préalable, après avoir prêté main forte au couple Harry et sa compagne Kay sur leur radeau échoué, Matt Calder (Robert Mitchum) et son fils Mark (qu'il vient de le récupérer après avoir purgé une peine de prison pour meurtre) sont trahis par l'étranger avide de rejoindre la ville de Council en y dérobant son fusil et son cheval. Un peu plus tard, après que celui-ci prit la fuite, Matt, Mark et Kay (qui décida de rester parmi eux en attendant le retour de son amant) sont pris à parti avec les indiens. Ainsi, ils sont contraints de descendre la rivière en radeau afin de tenter de rejoindre la ville et se venger du maraudeur du point de vue de Matt plutôt avisé aux valeurs du respect et d'intégrité depuis son passé galvaudé. Western contemplatif nanti de superbes paysages canadiens, Rivière sans Retour se décline en récit initiatique à travers ce trio improvisé s'épaulant mutuellement en guise de survie et d'éducation entre deux crises de contradiction.


Au-delà du caractère ludique de certaines scènes d'action (dont un étonnant final à la fois dramatique, mélancolique et salvateur), l'intérêt de l'aventure réside donc dans ces rapports conflictuels que se disputent Matt et Kay face au témoignage du jeune Mark lui même en apprentissage de maturité. Robert Mitchum, tout en noble élégance dans sa loyauté laconique, et Marilyn Monroe, femme de caractère divine de sobriété et de sensualité charnelle, irradiant l'écran à chaque plan. Quand bien même l'attachant Tommy Rettig fait aussi preuve d'une candeur dépouillée en enfant scrupuleux de nature sage et curieuse. Ainsi, si Rivière sans retour s'avère si captivant et magnétique sous l'impulsion de ces comédiens sans fard, il le doit autant à l'intelligence de sa mise en scène posée et studieuse observant le trio avec pudeur et dignité. Tant et si bien que l'on observe cette romance néophyte parmi la sensible attention des caractérisations humaines s'inculquant avec foi les valeurs du respect, d'amour, de pardon et de tolérance. Et ce sans jamais se laisser envahir par une quelconque sensiblerie programmée si bien que Rivière sans retour force le respect, notamment au travers des mélodies exaltantes que Marilyn Monroe chantonne avec une étonnante assurance. Des instants de magie pure, entre deux postures sensuelles subtilement aguicheuses et une expression mélancolique poignante.


Sincère et authentique quant à sa modeste représentation plutôt réaliste, fragile et persévérant quant à l'évolution des personnages en proie aux valeurs familiales et à la remise en question morale (notamment nos faibles capacités de jugement, d'esprit critique et de discernement face à l'amour), Rivière sans retour demeure un très beau western humaniste d'une élégance lestement épurée. 

*Bruno

jeudi 9 mai 2019

Le Capitan

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

de André Hunebelle. 1960. France/Italie. 1h45. Avec Jean Marais, Bourvil, Elsa Martinelli, Pierrette Bruno, Lise Delamare, Annie Anderson, Guy Delorme.

Sortie salles France: 5 Octobre 1960

FILMOGRAPHIE: André Hunebelle est un maître verrier et réalisateur français, né le 1er Septembre 1896 à Meudon (Hauts-de-Seine), décédé le 27 Novembre 1985 à Nice. 1948: Métier de fous. 1949: Millionnaires d'un Jour. 1949: Mission à Tanger. 1950: Méfiez vous des Blondes. 1951: Ma Femme est formidable. 1952: Massacre en dentelles. 1952: Monsieur Taxi. 1953: Les Trois Mousquetaires. 1953: Mon Mari est merveilleux. 1954: Cadet Rousselle. 1955: Treize à table. 1955: l'Impossible Monsieur Pipelet. 1956: Casino de Paris. 1956: Mannequins de Paris. 1956: Les Collégiennes. 1957: Les Femmes sont marrantes. 1958: Taxi, roulotte et Corrida. 1959: Le Bossu. 1959: Arrêtez le massacre. 1960: Le Capitan. 1961: Le Miracle des Loups. 1962: Les Mystères de Paris. 1963: Oss 117 se déchaîne. 1963: Méfiez vous Mesdames. 1964: Banco à Bangkok pour Oss 117. 1964: Fantômas. 1965: Furia à Bahia pour Oss 117. 1965: Fantômas se déchaîne. 1967:   Fantômas contre Scotland Yard. 1968: Pas de roses pour Oss 117. 1968: Sous le signe de Monte-Cristo. 1971: Joseph Balsamo. 1974: Les Quatre Charlots Mousquetaires. 1974: Les Charlots en Folie: A nous quatre Cardinal ! 1978: Ca va faire tilt.


Un an après l'immense succès Le BossuAndré Hunebelle rempile avec le film de cape et d'épée sous la houlette d'un roman de Michel Zévaco. Et d'y recruter à nouveau ses deux acteurs fétiches Jean Marais et Bourvil fraîchement débarqués du Bossu. Déjà adapté à l'écran par Robert Vernay en 1946, Le Capitan se décline en film d'aventures coloré et bondissant sous l'impulsion spontanée du duo précité. A savoir, complots, trahison, assassinats et vengeance perpétrés sous le règne de Louis XIII que deux clans se disputent afin de s'approprier le trône ! Ainsi, à travers cette conjuration,  François de Capestang, dit Le Capitan, s'associe auprès d'un saltimbanque afin d'y déjouer (de prime abord) les manigances de Marie de Médicis (mère du jeune Louis XIII) et de son premier ministre Concino Concini. Car depuis l'assassinat d'Henri IV, les deux escrocs décident de s'emparer du trône en semant la terreur dans la Province. Mais un autre leader des conjurés, le Duc d'Angoulême, désire également subtiliser la couronne du roi de par l'inexpérience et l'âge juvénile de ce dernier. Plutôt bien troussé à travers ses digressions à rebondissements auquel s'écharpent divers antagonistes pernicieux, la mise en scène assidue de Hunebelle est empreinte d'une réelle élégance formelle. Tant auprès de ses magnifiques décors naturels ou de ses intérieurs architecturaux, des costumes flamboyants que des séquences d'action rondement dirigées. Les duels homériques à l'épée s'opérant avec agilité quand bien même certaines cascades impressionnent de par leur réalisme, notamment lorsque Jean Marais s'oppose comme de coutume à s'épauler d'une doublure !


A l'instar de son intense escalade vertigineuse sur l'une des tours du château ou encore lors de la chevauchée endiablée de Louis XIII culminant sa chute dans le précipice d'une falaise en compagnie de son cheval. Qui plus est, saturé d'une photo en Eastmancolor, le Capitan s'octroie d'un rutilant cinémascope. Niveau cast, en chevalier intrépide redresseur de tort au charisme saillant, Jean Marais s'alloue d'un naturel spontané fondée sur les valeurs de noblesse, de loyauté, de fidélité et d'amour, tant auprès de sa protégée que du jeune roi sur le fil du rasoir. Si bien que l'acteur éprouve un réel plaisir à participer une seconde fois à sa fonction de preux chevalier. Quant à son comparse servant de "faire-valoir", l'impayable  Bourvil incarne avec sa bonhomie usuelle un baladin fripon conçu pour détendre l'aventure entre deux sémillantes chansonnettes dont l'une s'avère littéralement féerique. Au delà de son action échevelée agréablement menée, André Hunebelle  n'oublie pas d'y introduire un souffle romanesque auprès d'une charmante idylle entre Gisèle d'Angoulème et le Capitan. Leur relation en herbe débouchant par ailleurs par une tentative de secours audacieuse lorsque celle-ci le sauvera in extremis de la mort. Qui plus est, et pour renchérir son climat gentiment tendre, son disciple Cogolin cédera notamment au charme de Giuseppina grâce à leur timidité commune. Une servante italienne pudique d'autant plus sensible à la candeur du saltimbanque non avare de séduction coquine.


Après son réjouissant Le Bossu, André Hunebellesolide artisan du film de cape et épée, nous confirme donc avec le Capitan une seconde réussite comme le souligne sa côte de popularité critique et public (5 177 812 entrées rien que dans l'hexagone puisqu'il s'agit d'une co-production avec l'Italie). Aventures, action, romance se conjuguant avec une harmonie fougueuse, de par l'efficience de sa narration à la fois épique et politique (entre amour conflictuel, complots et trahisons) que de la chaleureuse complémentarité de nos loyaux lurons. Une pépite antidépressive à savourer de préférence entre amis ou en famille. 


*Bruno
09.05.19. 4èx
18.10.12. (140 v)

mercredi 8 mai 2019

Il était temps / About Time

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site under-my-screen.com

de Richard Curtis. 2013. Angleterre. 2h03. Avec Domhnall Gleeson, Rachel McAdams, Bill Nighy, Margot Robbie, Lindsay Duncan, Lydia Wilson.

Sortie salles France: 6 Novembre 2013

FILMOGRAPHIE: Richard Curtis est un réalisateur, scénariste, et producteur de cinéma et de télévision Néo-Zélandais d'origine australienne, né le 8 novembre 1956 à Wellington, . 2003 : Love actually. 2009 : Good Morning England. 2013 : Il était temps (About Time).


“On ne vit qu'une fois. Et encore !”
Abordant le thème du voyage dans le temps dans le cadre de la romcom, Il était temps s'avère aussi frais que sémillant de par la vigueur de son hymne à l'amour et à la vie que Richard Curtis illustre sans pathos. Et ce même si quelques bons sentiments s'avèrent parfois un brin surexposés sans pour autant céder à la mièvrerie. Car émaillé de touches d'humour assez subtiles (on reconnait bien là l'identité anglaise de l'entreprise, notamment auprès de ces dialogues ciselés), d'instants d'onirisme impromptus (l'étonnante séquence du mariage sous une tempête) et de plages de tendresse que s'harmonise le couple amoureux, Il était temps vise assez juste pour cibler le coeur du public embarqué dans une chronique sentimentale finalement ordinaire. Dans la mesure où ce portrait de famille aisé nous ressemble tous à travers les joies et les peines encourues lors de notre destinée nous imposant fatalement la mise à l'épreuve du deuil à travers la vieillesse, la maladie ou l'incident aléatoire (autrement injustifié). La moralité du film nous prodiguant avec une certaine poésie naturaliste d'y cueillir le jour présent sans se soucier du lendemain. Un discours très explicite au final que certains pourraient toutefois trouver un brin complaisant ou tout du moins un peu trop appuyé lors des monologues solennels du héros s'efforçant d'améliorer ses relations humaines en remontant dans le passé.


Ainsi donc, c'est à travers la difficile acceptation du deuil lors de son ultime demi-heure très émouvante qu'Il était temps exploite tout son potentiel métaphysique. Le voyage temporel (uniquement opéré dans le passé et non dans le futur) n'étant qu'un prétexte pour la remise en question du héros d'apprendre à savourer chaque seconde de son existence en étant scrupuleusement attentif aux faits et gestes du monde qui l'entoure, et en y tirant les leçons bénéfiques des épreuves du malheur. Notamment auprès des rapports étroits qu'il partage avec son paternel débonnaire quant aux valeurs de l'amour, de la famille et de la communication. Livret d'images fougueuses baignant dans un climat de quiétude stimulant et fructueux, Il était Temps parvient d'autant plus à séduire auprès des caractères vibrants d'humanisme des protagonistes familiaux en mutabilité existentielle et sentimentale. Domhnall Gleeson incarnant avec un naturel sobre et une timidité tacite un paternel néophyte gagné par l'optimisme en dépit de ces indécisions, de sa crainte du changement et de son manque d'aplomb auprès de la gente féminine. Pétillante à travers son irrésistible sourire et sécurisante auprès de sa personnalité loyale, Rachel McAdams lui partage la vedette avec une spontanéité fringante. Un atout de charme et séduction prédominant que les spectateurs mâles les plus réceptifs ne manqueront pas de fantasmer secrètement dans leur idéal romantique.


“Rien n'a plus de valeur qu'aujourd'hui.”
Joliment photographié dans une teinte solaire naturelle, Il était temps demeure donc une jolie comédie romantique beaucoup plus intègre, communicative et authentique qu'elle n'y parait, si bien qu'elle nous rafraîchit les sens à travers son idéologie "Carpe diem".

Remerciement à Nikko Larsson pour la découverte.

*Bruno

Récompenses: Utah Film Critics Association Awards 2013 : Meilleur acteur dans un second rôle pour Bill Nighy.
Prix de l'ATAA 2015 : prix de l'adaptation en doublage pour un film en prises de vue réelles pour Sylvie Caurier.

mardi 7 mai 2019

Johnny Guitare

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site wikipedia.org

de Nicholas Ray. 1954. U.S.A. 1h45. Avec Joan Crawford, Sterling Hayden, Scott Brady, Mercedes McCambridge, Ward Bond, John Carradine, Ernest Borgnine.

Sortie salles France: 27 Mai 1954

FILMOGRAPHIE: Nicholas Ray, de son vrai nom Raymond Nicholas Kienzle, est un réalisateur, scénariste et acteur américain né le 7 août 1911 à Galesville (Wisconsin) et mort le 16 juin 1979 à New York (New York).1949 : Les Amants de la nuit. 1949 : Les Ruelles du malheur. 1949 : Secret de femme. 1949 : Roseanna McCoy, (non crédité). 1950 : Le Violent. 1950 : Born to Be Bad. 1951 : Les Diables de Guadalcanal. 1951 : The Racket. 1952 : La Maison dans l'ombre. 1952 : Le Paradis des mauvais garçons. 1952 : Les Indomptables. 1952 : Androclès et le Lion. 1954 : Johnny Guitare. 1955 : À l'ombre des potences. 1955 : La Fureur de vivre. 1956 : L'Ardente Gitane. 1956 : Derrière le miroir. 1957 : Jesse James, le brigand bien-aimé. 1957 : Amère Victoire. 1958 : La Forêt interdite. 1958 : Traquenard. 1959 : Les Dents du diable. 1961 : Le Roi des rois. 1963 : Les 55 Jours de Pékin. 1968 : Œdipe Roi. 1975 : Wet Dreams - segment The Janitor. 1976 : We Can't Go Home Again. 1980 : Nick's Movie ou Lightning Over Water, coréalisé avec Wim Wenders.


Grand classique du genre considéré comme l'un des meilleurs westerns dit traditionnel, Johnny Guitare est illuminé par les présences vampiriques de Joan Crawford et de Mercedes McCambridge se disputant le pouvoir avec une provocation perfide si je me réfère à la plus déloyale habitée par une rancoeur punitive. D'ailleurs, il s'avère que sur le tournage les 2 actrices se détestaient tant au point de s'y crêper le chignon à renfort de règlement de compte sournois (prioritairement Joan Crawford à contre-emploi de sa loyauté fictive). Nanti d'un solide scénario à l'intensité dramatique truffée de rebondissements, Johnny Guitare aborde les thèmes de la jalousie, du mensonge, du faux semblant et de la félonie sous le catalyseur d'une romance impossible que convoite la diabolique Emma secrètement amoureuse du bandit Dancing Kid. Or, alors que Johnny Guitare refait surface afin de rendre visite à sa bien-aimée d'autrefois Vienna, Kid espère lui conjurer son amour en dépit de son refus péremptoire et de sa réputation de tenancière marginale potentiellement complice d'un hold-up meurtrier fraîchement opéré.


Diabolisée par Emma épaulée de sa troupe de justiciers, Vienna tente vainement de prouver son innocence afin de laver son honneur. Ainsi donc, à travers cette intrigue insidieuse où l'influence de masse, les malentendus et la lâcheté sont légions afin d'y démasquer une éventuelle coupable au caractère digne, Nicholas Ray sublime son récit à travers une étude de caractères contradictoires. A savoir, se laisser influencer par une diabolique leadeuse rarement à court de preuves ou accorder le bénéfice du doute auprès de Vienna prise dans les mailles d'un concours de circonstances infortunées mais délibérée à se défendre et rétablir la vérité au grand dam de son impuissante solitude. A moins qu'elle ne compte en dernier ressort sur l'amour de Johnny reluquant dès le départ ces règlements de compte verbaux avec une prévention scrupuleuse. Et donc, à travers les agissements résolument perfides d'Emma assoiffée de haine meurtrière, Nicholas Ray ne fait qu'illustrer les conséquences dramatiques de sa jalousie, de ses mensonge et de sa vengeance lorsque celle-ci se résigne à influencer tout son entourage afin d'emporter la mise.


Western (étonnamment) féministe peuplé de seconds-rôles perplexes en proie au doute et à une remise en question morale (notamment auprès des questions de la présomption d'innocence et de la peine de mort), Johnny Guitare cultive une puissance de fascination sous l'impulsion luminescente de 2 actrices au sommet se disputant l'inimitié avec une audace héroïque à double tranchant. Du grand et beau cinéma, noble, romantique, lyrique, grave et puissant à travers sa tournure dramatique. 

*Bruno

lundi 6 mai 2019

Le Cerveau

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Pinterest.com

de Gérard Oury. 1969. France. 1h55. Avec Jean-Paul Belmondo, Bourvil, David Niven, Eli Wallach, Silvia Monti, Raymond Gérôme, Jacques Balutin, Henri Attal.

Sortie salles France: 7 Mars 1969.

FILMOGRAPHIE: Gérard Oury (Max-Gérard Houry Tannenbaum) est un réalisateur, acteur et scénariste français né le 29 avril 1919 à Paris, décédé le 20 Juillet 2006 à Saint-Tropez.
1960: La Main Chaude. La Menace. 1962: Le Crime ne paie pas. 1965: Le Corniaud. 1966: La Grande Vadrouille. 1969: Le Cerveau. 1971: La Folie des Grandeurs. 1973: Les Aventures de Rabbi Jacob. 1978: La Carapate. 1980: Le Coup du Parapluie. 1982: L'As des As. 1984: La Vengeance du Serpent à Plumes. La Joncque (inachevé). 1987: Levy et Goliath. 1989: Vanille Fraise. 1993: La Soif de l'or. 1996: Fantôme avec chauffeur. 1999: Le Schpountz.


5 547 305 entrées à sa sortie si bien qu'il se classe N°2 au Box-Office français (et ce en dépit de la déception des producteurs qui espéraient plus après les antécédents succès du Corniaud et de la Grande Vadrouille), Le Cerveau est tout à fait symptomatique du savoir-faire de Gérard Oury  condensant avec son efficacité traditionnelle, comédie, action, aventures et romance sur un rythme sans répit. Inspiré de l'attaque du train postal Glasgow-Londres, Le cerveau exploite donc le film de casse sous l'impulsion d'un casting 4 étoiles parmi lesquels les duos Bourvil/Belmondo, David Niven/Eli Wallach. Quatre comédiens cosmopolites jonglant entre exubérance, charme, maladresse et héroïsme illégal avec une fringance à revendre. Et très sincèrement ces duos inopinés fonctionnent à merveille de par leur inimitié marginale à daigner s'approprier une fortune dans un climat d'insolence et de cocasserie parfois proche du cartoon. Quand au rôle le plus drôle, on peut avouer que paradoxalement Eli Wallach vole la vedette à l'illustre Bourvil en truand perfide habité par une jalousie maladive eut égard de la beauté gracile de sa soeur italienne que certains prétendants osent aborder. Les meilleurs gags découlant de sa posture irascible, obsessionnelle, paranoïaque, volontairement outrée.


Ainsi, si le script s'avère de prime abord sans surprise (2 duos de malfrats vont se disputer un butin sans savoir qu'au même moment ils opérèrent le même stratagème), dès que le fameux casse du train entre en jeu (soigneusement mis en scène par ailleurs !), le cheminement narratif va emprunter un virage autrement inventif, fou et décomplexé à travers une moisson de quiproquos fondées sur le simulacre et le trompe-l'oeil. Chaque protagoniste s'opposant à leur doute et à leur perplexité avec une savoureuse dérision si bien que les rôles vont notamment s'inverser à un moment propice du jeu du chat et de la souris lorsque Arthur et Anatole (Belmondo/Bourvil) prétendent découvrir la véritable identité du cerveau ! Et si cette comédie folingue davantage trépidante ne provoque pas tant de drôlerie escomptée, l'aventure loufoque et assez débridée la compense largement grâce au savoir-faire inventif d'Oury jamais avare d'idée saugrenue (l'incroyable feux d'artifice improvisé dans les jardins du château donne lieu à une séquence onirique du plus bel effet). Notamment en comptant enfin sur l'aimable complémentarité de Bourvil et Jean-Paul Belmondo très à l'aise en malfrats burnés, sans compter la présence fortuite de David Niven étonnamment frais et spontané en cerveau retors jamais à court de charme (sa relation naissante qu'il entamera avec la soeur de Frankie incarné par la très sensuelle Silvia Monti )


Superbement mené avec des moyens considérables (le film possède le plus gros budget de l'époque) et rythmé sous l'impulsion d'un cast alerte et d'une trame policière davantage rocambolesque auprès de ses revirements vertigineux, le Cerveau se décline en spectacle populaire festoyant si bien qu'il n'a pas pris une ride par sa mécanique de séduction infaillible.

*Bruno
2èx

vendredi 3 mai 2019

Les Aventures de Rabbi Jacob

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site medias.unifrance.org

de Gérard Oury. 1973. France. 1h41. Avec Louis De Funès, Claude Giraud; Henri Guybet, Renzo Montagnani, Suzy Delair, Marcel Dalio, Claude Piéplu, Janet Brandt, Miou-Miou, Popecke.

Sortie salles France: 18 Octobre 1973

FILMOGRAPHIE: Gérard Oury (Max-Gérard Houry Tannenbaum) est un réalisateur, acteur et scénariste français né le 29 avril 1919 à Paris, décédé le 20 Juillet 2006 à Saint-Tropez.
1960: La Main Chaude. La Menace. 1962: Le Crime ne paie pas. 1965: Le Corniaud. 1966: La Grande Vadrouille. 1969: Le Cerveau. 1971: La Folie des Grandeurs. 1973: Les Aventures de Rabbi Jacob. 1978: La Carapate. 1980: Le Coup du Parapluie. 1982: L'As des As. 1984: La Vengeance du Serpent à Plumes. La Joncque (inachevé). 1987: Levy et Goliath. 1989: Vanille Fraise. 1993: La Soif de l'or. 1996: Fantôme avec chauffeur. 1999: Le Schpountz.


1 au Box-Office avec 7 295 811 entrées et archi rediffusé à la TV, les Aventures de Rabbi Jacob est le classique populaire de la démesure. Tant et si bien que 2 ans après son coup d'éclat La Folie des Grandeurs, le maître Gérard Oury signe à nouveau un modèle du genre de par son savoir-faire infaillible à exploiter un scénario retors (qu'il écrivit en compagnie de Danièle Thompson) prétexte à aventures rocambolesques menées à tombeau ouvert. Le pitch: à la suite d'un concours de circonstances malchanceuses, l'industriel Victor Pivert se retrouve mêlé à un kidnapping auprès du révolutionnaire Mohammed Larbi Slimane. Parvenant à échapper à ses agresseurs mais pris en otage par ce dernier, Victor finit par se retrouver à l'aéroport d'Orly afin de fuir avec lui le pays. Mais alors que la police, son épouse (craignant une infidélité !) et les terroristes tentent de les appréhender, Victor et Slimane parviennent à usurper l'identité de rabbins dans les toilettes de l'aéroport pour mieux les semer. Une folle cavalcade les attend à travers les villes de Paris et au sein d'une synagogue. Comédie d'aventures à la fois folingues et endiablées que Gérard Oury mène avec une ambition outre-mesure, les Aventures de Rabbi Jacob prolifère les rebondissements, gags en pagailles et courses-poursuites improbables sous l'impulsion de têtes d'affiche totalement déjantées !


Car en y semant la zizanie entre terroristes, policiers, rabbins, jeunes mariés et épouse contrariée, nos héros Victor et Slimane sont contraints de s'adapter à la culture juive que Victor exècre en raciste irascible. Ainsi donc, à travers le thème de la haine de l'étranger, Gérard Oury en extrait une satire irrésistible auprès de l'abattage de De Funès plus en forme et téméraire que jamais à travers ses grimaces, verbigérations et mimiques hilarantes en se fondant dans l'identité d'un étranger néophyte. Accompagné de Claude Giraud étonnamment à l'aise en contestataire faussement torve, celui-ci s'improvise preneur d'otage (au bon coeur) avec une dérision amiteuse. Constamment drôle et cocasse, badin et épique à travers son action en roue libre parmi lesquelles des cascades d'un réalisme impressionnant et une partie de danse improvisée (quel numéro décomplexé !), les Aventures de Rabbi Jacob détonne par son concentré d'humour inventif où le sens du détail confine au cartoon live. A l'instar de la poursuite survoltée implantée dans l'usine à chewing-gum que Gérard Oury mène à la perfection de par le dynamisme du montage et l'énergie à revendre des acteurs batifolant le cache-cache tous azimuts. Et pour parachever, quoi de mieux que de clôturer cette folle et vertigineuse escapade à proximité d'une église, à travers la tendresse du mariage et de la réconciliation conjugale.


Complètement azimuté car d'une énergie insolente et d'une drôlerie sémillante, les Aventures de Rabbi Jacob préserve son intensité comique sous l'impulsion dévastatrice de comédiens dégénérés se coursant tous azimuts sous un pilier narratif ramifié. Une pochette surprise expansive donc au sein de ses genres hétéroclites. 

*Bruno
3èx

jeudi 2 mai 2019

Dragged Across Concrete. Prix Sang neuf, Beaune 2019

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de S. Craig Zahler. 2018. U.S.A/Canada. 2h39. Avec Mel Gibson, Jennifer Carpenter, Vince Vaughn, Laurie Holden, Michael Jai White, Udo Kier, Tory Kittles.

Sortie en Italie le 3 septembre 2018 (Mostra de Venise 2018).
Sortie salles U.S: 9 octobre 2018. Beyond Fest: 22 mars 2019. Interdit - 16 ans.
Sortie salles France: ?

FILMOGRAPHIE: S. Craig Zahler est un réalisateur et scénariste américain né en 1973 à Miami, Floride. 2015: Bone Tomahawk. 2017: Section 99 (Brawl in Cell Block 99). 2018: Dragged Across Concrete.


Révélé par Bone Tomohawk et Section 99S. Craig Zahler n'en finit plus de surprendre avec ce 3è long, Dragged Across Concrete. Polar longiligne d'une durée exceptionnelle de 2h39 (ah ouai quand même !), le récit s'articule autour d'un juteux compromis entre deux flics suspendus à la suite d'une bavure. A savoir, daigner dérober le magot d'une bande de braqueurs afin de pallier leur 6 mois de suspension et ainsi subvenir aux besoins de leur famille. Prenant son temps à planter son contexte vénal parmi la caractérisation des voyous afros et des deux flics réputés pour leur bravoure mais pour autant pénalisés par leur hiérarchie lors d'une filature musclée, S. Craig Zahler poursuit une démarche Tarantinesque à travers ses dialogues ciselés, sa soul-music entêtante (mais jamais envahissante) et sa structure narrative savamment planifiée. Le tout transcendé d'une étude psychologique plutôt fouillée et avisée, tant auprès de la fidèle amitié de ce duo subitement influencé par le gain en lieu et place de survie (alors que l'un d'eux se contredit par sa réticence), que de certains seconds-rôles que Zahler ne manque pas de substantialiser. Surtout si je me réfère au sort précaire d'une jeune maman (Jennifer Carpenter plutôt poignante dans sa force d'expression affligée) en proie à un implacable chantage et malencontreusement employée au mauvais moment, au mauvais endroit.


Emaillé de réparties et situations cocasses (Vince Vaughn dégustant son sandwich dans l'habitacle de sa voiture en un temps record de 98 mns selon l'aveu de son acolyte Mel Gibson !) avant de bifurquer vers un virage autrement noir et dramatique, eut égard des impitoyables revirements impromptus s'enchaînant en crescendo, Dragged Across Concrete laisse un arrière goût amer de souffre à travers sa sombre désillusion. Et ce même si l'épilogue un brin salvateur ne s'avère pas si tragique passé son intensité dramatique escarpée. Niveau casting, Mel Gibson (affublé d'une moustache) s'en sort enfin avec les honneurs puisqu'il nous dévoile ici la pleine mesure de son talent en flic sexagénaire influent sur le point d'approcher la retraite mais délibéré en l'occurrence à sauver son train de vie instable en privilégiant le bonheur de sa famille. Fort de son charisme aujourd'hui strié et de son tempérament viril, Mel Gibson magnétise l'écran avec une sobriété exemplaire. Quant à la posture aussi râblée de son compère Vince Vaughn, il y esquisse un être plus vulnérable et moins expérimenté à risquer sa vie pour la mise des lingots d'or. Flic un peu plus intègre mais pour autant séduit par cette transaction commerciale, Vince Vaughn s'avère parfaitement convaincant à travers la palette de ses sentiments de doute, de crainte et d'amour pour sa future épouse. On peut également souligner 2 mots sur la posture spectrale des braqueurs affublés de lunettes de soudeur, cagoules et vêtements noir lors de leur violent braquage puisque sans pitié lorsqu'il s'agit d'y sacrifier des vies afin de tenir lieu de leur prospérité. Armé de silencieux lors de leurs exactions meurtrières à répétition, les amateurs pourraient prêter une certaine filiation au fameux Assaut de Carpenter dans la manière insolite dont Zahler fait preuve afin de mettre en exergue le flegme de ses tueurs sans vergogne nous suscitant trouble et émoi anxiogène eut égard de leur cruauté déloyale.


Sans vouloir parfaire le chef-d'oeuvre mais en persévérant d'imprimer sa propre personnalité en dépit de ces influences déjà exploitées lors de ces 2 précédents métrages, Dragged Across Concrete transpire la sincérité d'un cinéma de genre révolu. Celui du Buddy movie cool et hargneux car peu à peu irrigué d'éclairs de violence d'une âpre brutalité (jamais outrancière) que des marginaux à la dérive existentielle engendrent par leurs actions vénales. Poignant et radical.  

*Bruno

Récompense:
Festival international du film policier de Beaune 2019 : Prix sang neuf

mercredi 1 mai 2019

Le Grand Chemin. César meilleure actrice, Anémone.

                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site unifrance.org

de  Jean-Loup Hubert. 1987. France. 1h45. Avec Anémone, Richard Bohringer, Antoine Hubert, Vanessa Guedj, Christine Pascal, Raoul Billerey, Pascale Roberts.

Sortie salles France: 25 Mars 1987

FILMOGRAPHIEJean-Loup Hubert est un réalisateur et scénariste français né le 4 octobre 1949 à Nantes. 1981 : L'Année prochaine... si tout va bien. 1984 : La Smala. 1987 : Le Grand Chemin. 1989: Après la guerre. 1990 : La Reine blanche. 1993 : À cause d'elle. 1997 : Marthe. 1999 : Duel. 1999 : Pulpeuse fiction. 2004 : 3 petites filles.


Porté par les talents épurés d'Anémone et de Richard Bohringer, communément récompensés d'un César, Le Grand Chemin est une jolie chronique rurale à travers l'initiation d'un jeune garçon parti 3 semaines en villégiatures chez une amie d'enfance de sa maman. Or, la véritable intention de cette dernière découlait de sa séparation conjugale qu'elle n'ose lui avouer à son âge aussi apprenti, alors qu'elle est aussitôt sur le point d'accoucher de son 2è enfant. Nanti d'un climat très particulier de par son parti-pris documenté d'illustrer sans fioriture une banalité quotidienne paysanne, Le Grand Chemin peut surprendre par sa crudité (mise à mort et dépeçage d'un lapin, insecte écrasé au pied, vers de terre jetés sur un mur, coït d'un jeune couple face aux enfants voyeurs, violence conjugale auprès de l'époux alcoolique, discours salace et curiosité sexuelle de la petite Martine depuis la rencontre de Louis). Tant et si bien que le spectateur non averti risque d'y être dérouté. Dans la mesure notamment où le réalisateur réfractaire aux conventions se refuse à y dépeindre une émotion programmée au gré des batifolages du jeune Louis constamment brimé par la friponne Martine en tenue légère parfois provocatrice.


Dans la manière radicale de radiographier ses enfants au tempérament naturel irrécusable et évoluant dans un environnement champêtre un peu sauvage, Jean-Louis Hubert joue la carte du vérisme au risque d'occulter son émotion escomptée. Notamment grâce à la sobriété d'expression des jeunes acteurs Antoine HubertVanessa Guedj étonnamment naturels à travers leur complicité amiteuse si bien que l'on prêterait une allusion au chef-d'oeuvre Jeux Interdits de René Clément, de par leurs rapports étroits avec le sens de la vie et de la mort. D'autant plus qu'ils résident à proximité d'un cimetière qu'ils arpentent régulièrement en guise d'ennui et de découverte insolite. Ainsi, en dépit d'un score un brin pathétique par moments, le Grand Chemin touche juste à mettre en exergue les thèmes de l'éveil initiatique et de la démission parentale. Tant auprès du jeune Louis soudainement abdiqué par son père et donc livré à lui même que du couple Marcelle / Pello jamais remis de la mort de leur progéniture. C'est donc à travers l'attachement progressif de Louis (natif de la ville) que ces derniers vont parvenir à accepter leur deuil en lui enseignant auprès de ses interrogations récurrentes les valeurs de la force de l'âge, de l'amitié et de l'amour avec l'appui désinvolte de Martine.


Gros succès à sa sortie (4è au Box-Office avec 3 177 560 entrées), Le Grand Chemin aborde la comédie dramatique avec une retenue d'émotions à la fois fructueuse et déroutante auprès du spectateur non averti. En tout état de cause, on ne peut nier la sincérité de l'auteur portant un regard subtilement tendre pour ces protagonistes adultes et infantiles grâce à sa digne modestie. 

A Anémone et Christine...

*Bruno

Récompenses:
César 1988 du meilleur acteur pour Richard Bohringer
César 1988 de la meilleure actrice pour Anémone
Prix Georges de Beauregard 1987