lundi 10 juin 2019

Pour la peau d'un flic

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site ekladata.com

d'Alain Delon. 1982. France. 1h47. Avec Alain Delon, Anne Parillaud, Daniel Ceccaldi, Jean-Pierre Darras, Xavier Depraz, Michel Auclair, Jacques Rispal.

Sortie salles France: 9 Septembre 1981.

FILMOGRAPHIEAlain Delon, né le 8 novembre 1935 à Sceaux, est un acteur et homme d'affaires français. 1973 : Les Granges Brûlées (coréalisateur non crédité). 1981 : Pour la peau d'un flic. 1983 : Le Battant.


13è au box office avec 2 377 084 entrées (alors qu'1 an au préalable; 3 Hommes à abattre cumulait 2 194 795 entrées), Pour la peau d'un flic s'alloue d'un atout spécifique, celui d'avoir été réalisé par Alain Delon. Et on peut avouer sans rougir que pour une première réalisation (même s'il co-réalisa les Granges Brûlées en 73) l'acteur, plus fringant que jamais, s'en sort aussi bien derrière que face caméra. Car à partir d'une intrigue efficace retraçant l'investigation épineuse d'un détective privé à la recherche d'une fille disparue, Alain Delon dirige ce polar avec suffisamment de conviction, de soin et étonnamment d'humour pour nous divertir à rythme métronome. Entre scènes d'action percutantes (même si elles s'avèrent assez rares), poursuites en bagnole, romance friponne (toutes les séquences détendues entre le couple s'avèrent d'autant plus cocasses sous le pivot de dialogues inventifs) et confrontations psychologiques entre rivaux obtus.


Ainsi donc, grâce à son imprévue dérision (parfois même macabre), ses détracteurs feraient mieux d'y jeter un oeil tant l'acteur ne se la joue pas orgueilleux en flic machiste consciencieux sur le point de dévoiler au grand jour le vaste trafic de drogue d'une complicité policière. Outre sa cool attitude  épaulée de son acolyte dévoué Michel Auclair en faire-valoir semi-retraité, Pour la peau d'un flic affiche d'autant mieux une décontraction sensuelle parmi la présence frivole d'Anne Parillaud. Une secrétaire infidèle éprise de tendresse pour son boss et jamais avare d'allusions grivoises pour érotiser l'atmosphère, quand bien même l'actrice ose se dévoiler dans son plus simple appareil après avoir été kidnappée par ses ravisseurs (qui s'en plaindrait !). Ainsi, sans livrer une prestance super convaincante, cette dernière parvient pour autant à cultiver un certain charme naturel à travers son second-rôle de maîtresse soumise et attentionnée peu à peu emportée par l'ivresse de l'amour.


Polar ludique symptomatique de la décennie 80 auquel se disputait également sur d'autres affiches la star Bebel, Pour la peau d'un flic s'alloue d'un charme indéfectible en la présence du trio investigateur (particulièrement détendu pour y résoudre l'énigme) sous l'impulsion du tube planétaire d'Oscar Benton: "Bensonhurst blues". A revoir avec un pincement de nostalgie au coeur, notamment pour retrouver le talent hors-pair d'Alain Delon d'un charisme viril distingué inégalé dans le paysage français.

*Bruno

vendredi 7 juin 2019

Us

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Jordan Peele. 2019. U.S.A. 1h56. Avec Lupita Nyong'o, Winston Duke, Elisabeth Moss, Tim Heidecker, Yahya Abdul-Mateen II.

Sortie salles France: 20 Mars 2019. U.S: 22 Mars 2019

FILMOGRAPHIE: Jordan Haworth Peele, né le 21 février 1979 à New York, est un acteur, humoriste, réalisateur, scénariste et producteur américain. 2017: Get Out. 2019: Us.


Observez l'affiche et méditez !
Révélé 2 ans au préalable par le coup de maître Get Out, Jordan Peele récidive dans l'horreur sociale avec Us. Un homme invasion assez efficace dans son lot d'attaques cinglantes brillamment mises en scène (en dépit de certaines facilités éculées quant aux confrontations physiques) doublé d'un survival hystérique eu égard de sa seconde partie beaucoup plus surprenante lorsque la famille Wilson doit riposter auprès de leurs oppresseurs en s'échappant de leur cocon familial vers un lunapark. Sorte d'épisode longiligne de la 4è Dimension, Us parvient donc doucement dans un premier temps à renouveler le survival domestique grâce à l'originalité de son thème dérangeant; le "doppelgänger" (métaphore de notre double maléfique) s'efforçant de substituer chaque membre afro-américain de la famille Wilson lors d'une partie de cache-cache diablement cintrée. Le réalisateur relançant avec assez de brio l'action vrillée par le biais d'une progression dramatique plus ample que prévue et d'idées souvent imprévisibles au risque de perdre le spectateur lors de son (confus) dénouement outre-mesure. Peu exploité au cinéma d'horreur si bien que son pouvoir de fascination fait à nouveau mouche en l'occurrence, le "doppelgänger" est donc ici abordé avec maîtrise quant à sa véracité identitaire. Notamment de par leur posture mécanique à la mine anxiogène, de leur dialecte inaudible sensiblement angoissant et de leur origine scientifique tenant de l'aberration.


Jordan Peele alternant fougueusement intensité dramatique et dérision macabre sous l'impulsion d'une BO pop aussi entraînante que décomplexée, et d'une partition électro tonitruante. Sa narration tributaire de la formulation classique "ouh fais moi peur" - intelligemment - abordant en sous-texte une satire sur le matérialisme technologique, le féminisme (la mère de famille finissant par prendre les commandes et dicter sa loi auprès de son mari pataud) et le despotisme gouvernemental rivalisant d'idées à la fois immorales et saugrenues afin de mieux régir notre manière de penser. Ainsi, à travers son ossature narrative davantage débridée au point d'y effleurer à force d'ambition créative le ridicule (le twist final discutable risquera à coup sur de faire grincer certaines dents et d'y diviser le public), on songe inévitablement à l'Invasion des profanateurs de Sépulture auquel Us se prétend sa réactualisation moderne. Quant au cast spécialement afro-américain, outre la posture irritante du père de famille incarné par le lambda Winston Duke, Us évolue au rythme des actions féministes qu'impose avec charisme primitif Lupita Nyong'o en mère de famille belliqueuse épaulée de Shahadi Wright-Joseph en fille aînée en apprentissage martial. Toutes deux formant dans la cohésion familiale un duo rebelle assez persuasif auprès de leur trajectoire personnelle à courser vaillamment leur sosie.


Mask.
Sans toutefois jamais rivaliser avec le percutant Get Out, Us s'avère suffisamment inventif, efficace, facétieux, sardonique et débridé (jusqu'à overdose diront les plus sceptiques) pour satisfaire l'amateur pur et dur de peloche horrifique dirigée avec indéniable savoir-faire. Le "doppelgänger" s'avérant ici d'une hostilité franchement déstabilisante à travers leur magnétisme moral à daigner imposer leur ego sous couvert de dérision sociale caustique. 

*Bruno

jeudi 6 juin 2019

Amour et mort dans le jardin des Dieux

                                                                                 Photo empruntée sur Facebook

"Amore e morte nel giardino degli dei" de Sauro Scavolini. 1972. Italie. 1h29. Avec Erika Blanc, Peter Lee Lawrence, Ezio Marano, Orchidea de Santis, Rosario Borelli.

Sortie salles Italie: 4 Décembre 1972

FILMOGRAPHIE: Sauro Scavolini est un réalisateur et scénariste italien né le 3 Février 1934 à Pesaro, Marche. 1992: Un posto freddo in fondo al cuore (Télé-film). 1989 Un coup fumant (télé-film). 1985 Un foro nel parabrezza. 1977: Una devastante voglia di vincere (TV Mini-Series). 1972: Amour et mort dans le jardin des Dieux.


Excellente découverte totalement inédite en France et exhumée de sa torpeur grâce à l'éditeur Le Chat qui Fume, Amour et mort dans le jardin des Dieux (que titre fastueux pour autant pleinement justifié !) bénéficie en prime d'une copie HD scintillante afin de se plonger dans ce thriller psycho-romantique au doux parfum d'onirisme naturel. La nature, vaste, feutrée et verdoyante, s'avérant l'interprète louable du cadre criminel parmi la complicité de volatiles qu'un professeur étudie dans une sereine solitude (on peut d'ailleurs y déceler une référence à la trilogie animalière d'Argento mais encore à Blow Out de De Palma). Car si de prime abord l'énigme policière brossant les postures couardes d'un quatuor amoureux s'avère sans véritable surprise, Sauro scavolini (dont il s'agit hélas de l'unique réalisation au cinéma !) parvient lestement à nous enivrer de par son ossature narrative consciencieusement planifiée et le brio de sa mise en scène chiadée infiniment personnelle. Par conséquent, on en prend plein la vue à reluquer ces cadres stylisés abusant souvent de gros plans et de caméra à l'épaule si bien que son réalisme naturel à la fois étonnamment envoûtant et dérangeant nous déconcerte autant qu'il nous séduit.


Ainsi, dans une ambiance singulière d'étrangeté sensiblement perméable, nous nous laissons charmer par une curieuse dérive sentimentalo-mortuaire tout en restant en permanence sur le qui vive à démêler les tenants et aboutissants des divers amants pris dans les mailles de la jalousie, de l'infidélité, de la rancune et de la vendetta. A l'écoute des apartés sur bande magnétique que le professeur mutique reconstitue studieusement avec attention, Scavolini alterne flash-back et présent afin de mieux nous interpeller et ainsi consolider sa vénéneuse intrigue entièrement soumise à la dérive morale des personnages déviants. Des prétendants maudits si j'ose dire car épris d'amour aussi bien passionnel qu'obsessionnel, au point même que notre héroïne (incarné par l'étrange et  laiteuse  Erika Blanc) s'efforce d'y consulter un psychiatre afin d'élucider son attraction charnel qu'elle suscite auprès de ses soupirants. Ainsi, à travers le thème de l'inceste que Sauro Scavolini Spoil ! manipule parmi l'alibi du simulacre fin du Spoil, Amour et mort dans le jardin des Dieux captive en mode latent à travers l'efficacité d'une réalisation expérimentale baignant à bras ouvert dans un onirisme sensoriel. Ce thriller intime aussi bien marginal que singulier se savourant au rythme placide d'une balade romantique émaillée de morts violentes.


Aussi bien désincarné que réaliste au coeur d'un paradis naturel tranquille modestement expressif, Amour et mort dans le jardin des Dieux demeure une perle maudite de psycho-killer à recommander chaudement aux amateurs de romance nécrosée. 

*Bruno

mercredi 5 juin 2019

La Saignée

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site avoir-alire.com

de Claude Mulot. 1971. France/Italie. 1h28. Avec Bruno Pradal, Charles Southwood, Gabriele Tinti, Ewa Swann, Patti D'Arbanville, Claude Cerval.

Sortie salles France: 10 Novembre 1971. U.S: 17 Décembre 1972.

FILMOGRAPHIE: Claude Mulot (Frédéric Lansac) est un réalisateur et scénariste français, né le 21 août 1942 à Paris, décédé le 13 Octobre 1986 à Saint-Tropez. 1968: Sexyrella. 1969: La Rose Ecorchée. 1971: La Saignée. 1973: Profession : Aventuriers. 1974: Les Charnelles. 1975: Le Sexe qui parle. 1976: La Rage de jouir. 1977: Suprêmes jouissances. 1977: La Grande Baise. 1977: Belles d'un soir. 1978: Le Sexe qui parle 2. 1980: La Femme Objet. 1980: l'Immorale. 1980: Les Petites écolières. 1981: Le jour se lève et les conneries commencent. 1983: Black Venus. 1986: Le Couteau sous la gorge.


A réserver aux amateurs de curiosité introuvable bien d'chez nous.
Copie HD irréprochable.

mardi 4 juin 2019

Cérémonie Sanglante

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinematerial.com

"Ceremonia sangrienta" de Jorge Grau. 1973. Espagne. 1h28. Avec Lucia Bosè, Espartaco Santoni, Ewa Aulin, Ana Farra, Silvano Tranquilli, Lola Gaos.

Sortie salles Espagne: 19 Novembre 1973. Italie: 4 Octobre 1973

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Jorge Grau est un réalisateur et scénariste espagnol, né le 27 Octobre 1930 à Barcelone. 1973: Ceremonia sangrienta. 1974: Le Massacre des Morts-Vivants. 1959: Costa Brava. 1960: Sobre Madrid. 1960: Medio siglo en un pincel. 1961: Laredo, Costa Esmeralda. 1961: Barcelona vieja amiga. 1976: La Siesta. 1982: La Leyenda del tambor. 1983: Coto de Caza. 1987: El extranger-oh ! de la calle Cruz del Sur. 1990: La punyalada. 1994: Tiempos mejores.


Resté malencontreusement inédit en France et en video, Artus Films nous fait aujourd'hui l'honneur de nous exhumer une pépite d'horreur gothique d'après l'inoubliable auteur du Massacre des Morts-vivants, Jorge Grau. Car Inspiré des exactions de la tristement renommée comtesse hongroise  Élisabeth Báthory de Ecséd, celui-ci s'alloue d'une touche personnelle spécialement ibérique pour nous offrir une variation à la fois originale, déroutante et inquiétante. Et si durant les deux tiers de l'action, l'intrigue en dent de scie s'avère délibérément confuse auprès des motivations équivoques des personnages parfois incohérents, Cérémonie Sanglante cultive notre attention grâce au brio inspiré de Jorge Grau soignant la forme (photo flamboyante; décors architecturaux stylisés, contexte historique plus vrai que nature) et le fond (les thème du désir, de la jalousie et de la jeunesse éternelle engendrant une mégalomanie criminelle par le biais du meurtre en série). Pour condenser, on croit dur comme fer à ce que l'on voit de par sa capacité à retranscrire à l'écran un microcosme médiéval étonnamment crédible (instruments de torture à l'appui !). Et ce jusqu'aux seconds rôles dépouillés dénués de fard car normalement expressifs.


Ainsi donc, sobrement incarné par des têtes d'affiche méconnues dans nos contrées, nous nous identifions à observer les agissements immoraux des personnages notoires à travers leurs sentiments couards, perfides, menteurs, usurpateurs. Si bien qu'aucun d'eux ne nous suscite l'empathie dans leur volonté d'asservir et d'y détruire leur proie vulnérable pour le simple enjeu de l'éternelle jeunesse. D'autre part, en dénonçant les thèmes de la superstition et du fanatisme qu'exprime une populace rétrograde effrayée à l'idée du vampire suceur de sang, Jorge Grau se débarrasse des convenances grâce à son ossature narrative plus retorse qu'elle n'y parait, tant et si bien que les personnages majeurs nous captivent sans relâche de par leurs stratagèmes délétères éludés de manichéisme. Jorge Grau se souciant beaucoup de les esquisser de manière disgracieuse dans un anticonformisme occulte. On est par ailleurs surpris de son dénouement fortuit vis à vis du revirement moral de la comtesse Spoil ! se résignant à détruire tout ce qu'elle eut préalablement entrepris parmi ses complices, faute d'adultère. Fin du Spoil.


Série B d'un gothisme classieux où aucun détail n'est laissé au hasard, Cérémonie Sanglante honore l'épouvante séculaire grâce à la personnalité hispanique de Jorge Grau résolument amoureux du genre tant il fignole le cadre historique et les turpitudes des personnages avec un goût prononcé pour la provocation où s'y confine la désillusion existentielle. Une excellente surprise donc injustement passée inaperçue chez nous, à découvrir fissa. 

*Bruno

lundi 3 juin 2019

Au service du Diable / La Nuit des Pétrifiés

                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site arcadesdirect.fr

"LA NUIT DES PETRIFIES / LA PLUS LONGUE NUIT DU DIABLE / DEVIL'S NIGHTMARE" de Jean Brismée. 1971. Belgique/Italie. 1h35. Avec Erika Blanc, Jean Servais, Jacques Monseau, Ivana Novak, Lorenzon Terzon, Daniel Emilfork.

Sortie Française le 21 décembre 1973. U.S: Avril 1974

FILMOGRAPHIE: Jean Brismée est un réalisateur d'origine belge né le 20 Août 1926. 1971: La plus longue nuit du diable.  1964 Monsieur Plateau (Short).  1962 Jean Rouch (TV Series).  1959 La planète fauve (TV Short).  1958 Cinéma, bonjour (TV Movie documentary).  1956 Forges (Documentary short).


Unique film du réalisateur belge Jean Brismée, Au service du Diable (/ La Nuit des Pétrifiés) est un ovni d'autant plus rare que sa résurrection en Dvd et Blu-ray relève du miracle ! On ne peut donc que saluer l'heureuse initiative d'Artus Film d'avoir osé exhumé de l'oubli ce p'tit bijou bisseux à mi-chemin entre le nanar et la série B d'exploitation gentiment ludique. Le pitch: Durant la seconde guerre mondiale, un père de famille, le baron Von Rumberg, sacrifie sa progéniture depuis que sa femme enfanta une fille en lieu et place d'un garçon. Cet infanticide est à l'origine d'une vieille malédiction auquel ses descendants seraient des succubes si le nouveau-né s'avérait une fille. Quelques décennies plus tard, ce dernier sclérosé coule des jours paisibles dans son château reculé, quand bien même un groupe de 7 étrangers y fait irruption le temps d'une nuit d'épouvante chargée en fantasmes et cruelles mise à morts ! Avec l'entrée en matière d'un prologue aussi couillu pour son infanticide explicitement décrit en noir et blanc (bien que maladroitement mis en image désamorçant ainsi son réalisme escompté), Au service du diable fut donc interdit aux moins de 18 ans à l'époque de sa sortie ! Car si d'autres effets-chocs viennent ensuite égayer l'intrigue, elles s'avèrent plutôt sobres, concises et jamais choquantes, aussi sympatoches soient-elles.


Ainsi donc, dans une ambiance gothique constamment inquiétante à travers son obscur château cédant parfois aux étreintes saphiques purement gratuites, Au service du diable plante lentement son décor occulte et sa poignée de convives s'égarant dans les corridors, sous-sols et chambres de la bâtisse parmi la présence d'une éventuelle succube (incarnée par l'étrange et véritablement effrayante Erika Blank lors de sa métamorphose à la mine patibulaire !). Sa motivation: séduire et éliminer un par un tous les invités depuis leurs tentations des 7 pêchers capitaux, tout en s'efforçant de courtiser un jeune prêtre timidement sensible à ses charmes. Ainsi, à travers un scénario somme toute banal et peu motivant, Jean Brismé réussit peu à peu l'exploit de nous fasciner et de nous intriguer auprès d'une multitude de détails visuels que nous ne voyons jamais arriver ! Car déconcertant, interlope, machiavélique, imprévu, Au service du diable se décline en fantasme horrifique indicible tant il cumule, dans des formes aussi bien maladroites que contrairement brillantes une moisson de situations ubuesques parfois imprégnées d'onirisme baroque. Le jeu théâtral des acteurs (dont certains timorés s'avèrent un peu inexpressifs) renforçant le caractère saugrenu de l'entreprise alternant le chaud et le froid avec une étonnante sagacité formelle et technique (notamment auprès de certains cadrages stylisés épaulés d'une photo saturée). Car difficilement explicable sur papier à décrire mes véritables impressions subjectives, Au service du Diable enchaîne fréquemment à mi-parcours des séquences inquiétantes pensées par un auteur inénarrable délibéré à égarer notre perception cérébrale dans une combinaison extravagante de qualités et de défauts.


A la fois film maudit et oeuvre culte dont l'identité méconnue de l'auteur continuera à jamais de nous interroger et de nous fasciner quant à ses véritables propos artistiques, Au service du Diable est un délire saugrenu à l'aura d'étrangeté inexplicablement perméable. Une curiosité inusité dégageant un charme vénéneux de trouble sensualité à travers l'icone d'une succube partagée entre l'amour et la mort. Sa conclusion équivoque s'achevant de manière étonnamment tendre et ironique sous la mélodie lancinante d'Alessandro Alessandroni dans toutes les mémoires. A découvrir.

*Bruno
03.06.19. 2èx
01.03.11. 568 v

jeudi 30 mai 2019

3 Hommes à abattre

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site boxofficestory.com

de Jacques Deray. 1980. France. 1h36. Avec Alain Delon, Dalila Di Lazzaro, Michel Auclair, Pascale Roberts, Lyne Chardonnet, Jean-Pierre Darras, Bernard Le Coq.

Sortie salles France: 31 Octobre 1980 (Int - 13 ans)

FILMOGRAPHIEJacques Deray (Jacques Desrayaud) est un réalisateur français né le 19 février 1929 à Lyon, décédé le 9 août 2003 à Boulogne-Billancourt. 1960 : Le Gigolo. 1963 : Rififi à Tokyo. 1963 : Symphonie pour un massacre. 1965 : Par un beau matin d'été. 1966: Avec la peau des autres. 1966 : L'Homme de Marrakech. 1969 : La Piscine. 1970 : Borsalino. 1971: Doucement les basses. 1971 : Un peu de soleil dans l'eau froide. 1972 : Un homme est mort. 1974 : Borsalino & Co. 1975 : Flic Story. 1977 : Le Gang. 1978 : Un papillon sur l'épaule. 1980 : Trois hommes à abattre. 1982 : Les Secrets de la princesse de Cadignan (TV). 1983 : Le Marginal. 1983 : Credo (TV). 1985 : On ne meurt que deux fois. 1987 : Le Solitaire. 1987 : Maladie d'amour. 1989 : Les Bois noirs. 1991 : Contre l'oubli. 1991 : Netchaïev est de retour. 1993 : Un crime. 1994 : 3000 Scénarios contre un virus (segment « Arnaud et ses copains »). 1994 : L'Ours en peluche. 1998 : Clarissa (TV). 2000 : On n'a qu'une vie (TV). 2001 : Lettre d'une inconnue (TV).


Succès considérable à sa sortie puisqu'il engrange 2 194 795 entrées, 3 Hommes à abattre est la nouvelle réunion du maître Jacques Deray (Borsalino et sa suite, Flic Story, La Piscine, le Gang) et du monstre sacré Alain Delon pour le meilleur du polar si on en juge l'efficacité du script appuyé d'une solide mise en scène et d'un casting hors-pair. Dans la mesure où les comédiens particulièrement virils ou autrement sclérosés se disputent la mise avec un charisme strié que l'on ne retrouve que trop rarement dans le polar mainstream. Mais au-delà du brio de sa mise en scène rigoureuse prenant son temps à planter l'histoire ainsi que l'évolution des personnages dans une formulation d'action en règle (notamment cette incroyable poursuite en voitures en plein Paris !) et de rebondissements parfois couillus (son épilogue hallucinant de radicalité pessimiste vaut son pesant de cacahuètes !), 3 Hommes à abattre est illuminé par la présence démiurge d'Alain Delon. Un justicier impassible traqué par des tueurs après avoir porté assistance à un homme grièvement blessé.


Depuis, devenu une cible prioritaire, il ne cesse de se planquer d'un endroit à un autre tout en tentant de préserver la vie de sa compagne, une jolie italienne que campe modestement Dalila Di Lazzaro  (Chair pour Frankenstein pour citer son oeuvre scabreuse la plus mémorable). Machiste, avouons le, auprès de sa compagne avenante, et d'une force de sûreté et de tranquillité, Alain Delon magnétise l'écran à chacune de ses apparitions fulgurantes. De par son élégance distinguée ne surfant pour autant jamais avec une quelconque complaisance orgueilleuse (même si sa fierté sereine finira par le perdre) et son regard azur chargé d'humanité et de loyauté. Ainsi donc, à travers son rôle de victime lâchement traquée, engendrant par l'occasion quelques dommages collatéraux, celui-ci s'alloue d'un héroïsme particulièrement brutal eu égard du parti-pris draconien de Jacques Deray incluant par moments une violence frontale terriblement cinglante ! Là encore, on s'étonne de subir un réalisme aussi percutant au point parfois d'y effleurer une certaine complaisance (zoom à l'appui sur les chairs éclatées) que le ciné transalpin se fit porte-étendard (tant auprès de leur pellicule gorasse que du néo-polar bisseux). Quand bien même sa conclusion d'une noirceur insensée aura probablement ébranlé une majorité de spectateurs subitement gagnés par l'acrimonie.


Pour tous les amateurs de polar carré hérité du cinéma de papa, 3 Hommes à abattre est un incontournable du genre à travers sa corruption ministérielle qu'Alain Delon tente de contrecarrer avec une élégance virile imputrescible. Rien que pour sa présence électrisante, 3 Hommes à abattre se doit d'être vu et revu avec toujours ce même plaisir de cinéphile puriste affecté par les valeurs du cinéma noble. 

*Bruno
2èx

mercredi 29 mai 2019

Le Train sifflera 3 fois. Oscar du Meilleur Acteur: Gary Cooper.

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"High Noon" de Fred Zinnemann. 1952. U.S.A. 1h25. Avec Gary Cooper, Grace Kelly, Thomas Mitchell, Lloyd Bridges, Katy Jurado, Lon Chaney Jr, Lee Van Cleef.

Sortie salles France: 26 Septembre 1962. U.S: 13 Août 1952

FILMOGRAPHIEFred Zinnemann est un réalisateur et producteur américain d'origine autrichienne, né le 29 avril 1907 à Vienne (Autriche), décédé le 14 mars 1997 à Londres (Royaume-Uni). 1930 : Les Hommes le dimanche. 1936 : Les Révoltés d'Alvarado. 1938 : Tracking the Sleeping Death. 1938 : They Live Again. 1938 : That Mothers Might Live. 1938 : A Friend in Need. 1938 : The Story of Doctor Carver. 1939 : Weather Wizards. 1939 : While America Sleeps. 1939 : Help Wanted. 1939 : One Against the World. 1939 : The Ash Can Fleet. 1939 : Forgotten Victory. 1940 : Stuffie. 1940 : The Old South. 1940 : The Great Meddler. 1940 : A Way in the Wilderness. 1941 : Forbidden Passage. 1941 : Your Last Act. 1942 : The Lady or the Tiger ? 1942 : L'Assassin au gant de velours. 1942 : Les Yeux dans les ténèbres. 1944 : La Septième Croix. 1946 : Little Mister Jim. 1947 : My Brother Talks to Horses. 1948 : Les Anges marqués. 1948 : Acte de violence. 1950 : C'étaient des hommes .1951 : Benjy. 1951 : Teresa. 1952 : Le train sifflera trois fois. 1952 : The Member of the Wedding. 1953 : Tant qu'il y aura des hommes. 1955 : Oklahoma ! 1957 : Une poignée de neige. 1959 : Au risque de se perdre. 1960 : Horizons sans frontières. 1964 : Et vint le jour de la vengeance. 1966 : Un homme pour l'éternité 1973 : Chacal. 1977 : Julia. 1982 : Cinq jours, ce printemps-là.


“Là où il n’y a le choix qu’entre lâcheté et violence, je conseillerai la violence.”
Western légendaire s'il en est, si bien qu'il est conservé à la Bibliothèque du Congrès aux États-Unis pour son "importance culturelle, historique ou esthétique", le Train sifflera 3 fois privilégie dans une facture monochrome (alors que la plupart des westerns sont tournés en couleurs à cette époque) la carte du suspense exponentiel lorsqu'un shérif s'efforce de redouter l'arrivée d'un repris de justice qu'il condamna autrefois à mort. Western audacieux de par sa démarche psychologique dépeignant sans ambages la lâcheté d'une population urbaine apeurée par un danger si redouté, le Train sifflera 3 fois est sublimé par le charisme saillant de Gary Cooper (Oscar du Meilleur Acteur svp) à travers la gravité de son regard hanté de contrariété mais pour autant résigné à faire preuve de bravoure en lieu et place de dignité. Quand bien même la gracile Grace Kelly lui partage la vedette avec une tendresse démunie eu égard de son refus de lui porter assistance faute de son passé familial tragique ayant engendré la mort de son père et de son jeune frère.


Ainsi donc, ce western iconoclaste n'hésitant pas à brosser le portrait d'un héros solitaire hanté de crainte et de doute s'alloue d'une dimension humaniste particulièrement empathique eu égard du spectateur s'identifiant à la résilience du shérif Will Kane refusant obstinément de quitter la ville depuis les avertissements des citadins communément lâches et sournois, voir même rancuniers auprès des plus influençables ou envieux. La grande force du cheminement narratif résidant dans son intensité dramatique que Fred Zinnemann ossature autour de confrontations psychologiques houleuses lorsque ceux-ci se résignent à décourager leur shérif afin d'y déjouer un bain de sang. Le cinéaste retardant au maximum toute action violente (en dépit d'une baston improvisée) lors des efforts infructueux du shérif à solliciter leur aide potentiellement stoïque avant que la venue (si escompté) d'un train ne nous dévoile son potentiel explosif depuis la vendetta d'un bandit sans vergogne.


Grand classique du western séculaire dénonçant avec force et radicalité les thèmes de la lâcheté, de la peur et de l'hypocrisie humaine lorsqu'elle s'y refuse de secourir une victime esseulée, le Train sifflera 3 fois s'accompagne de manière métronome de l'ironique mélodie: "si toi aussi tu m'abandonnes..." afin de caricaturer ses postures déloyales incapables de se mesurer au goût du soutien, du risque et de l'héroïsme.

P.S: omission d'un détail auprès de la génération 80 ayant été bercée par la Dernière Séance, le Train sifflera 3 fois fut diffusé le 6 Juillet 1982 en première partie de soirée.

*Bruno

Récompenses:
Oscar du meilleur acteur pour Gary Cooper
Oscar du meilleur montage pour Elmo Williams et Harry Gerstad
Oscar de la meilleure musique pour Dimitri Tiomkin
Oscar de la meilleure chanson pour Dimitri Tiomkin (musique) et Ned Washington (paroles)

mardi 28 mai 2019

Top Gun

                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site mauvais-genres.com

de Tony Scott. 1986. U.S.A. 1h50. Avec Tom Cruise, Kelly McGillis, Anthony Edwards, Meg Ryan, Val Kilmer, Rick Rossovich, Tom Skerritt, Michael Ironside, John Stockwell, Tim Robbins, Whip Hubley.

Sortie salles France: 17 Septembre 1986. U.S: 16 Mai 1986

FILMOGRAPHIE: Tony Scott (né le 21 juillet 1944 à Stockton-on-Tees, Royaume-Uni - ) est un réalisateur, producteur, producteur délégué, directeur de la photographie, monteur et acteur britannique. 1983 : Les Prédateurs, 1986 : Top Gun, 1987 : Le Flic de Beverly Hills 2, 1990 : Vengeance,1990 : Jours de tonnerre, 1991 : Le Dernier Samaritain,1993 : True Romance, 1995 : USS Alabama,1996 : Le Fan,1998 : Ennemi d'État, 2001 : Spy Game, 2004 : Man on Fire,   2005 : Domino, 2006 : Déjà Vu, 2009 : L'Attaque du métro 123, 2010 : Unstoppable.


"Le 3 mars 1969, la marine américaine fonde une école pour pilotes d'élite. Son objectif: apprendre l'art du combat aérien et garantir que ceux sélectionnés soient les meilleurs pilotes de chasse du monde. Mission accomplie. La marine appelle cette école : Fighter Weapons School. Les pilotes l'appellent: Top Gun."


Produit commercial symptomatique de l'écurie Hollywood chewing-gum, Top Gun demeure un divertissement lambda accueilli en fanfare par le grand public (certains fans lui attribuent d'ailleurs le terme "culte") mais déprécié par la critique. Car si 3 ans au préalable, Tony Scott nous livra le chef-d'oeuvre de sa carrière, les Prédateurs, il nous contente avec Top-gun le minimum syndical dans sa caricature d'une intrigue frimeuse truffée de clichés (prôner l'élite de pilotes de chasse lors d'un concours de rivalités aériennes). Entre action virevoltante, drame en berne et romance à l'eau de rose digne d'un roman-photo de gare. Et si les affrontements aériens font parfois illusion dans leur intensité escomptée (principalement l'action finale en apothéose), d'autres s'avèrent beaucoup moins captivants eu égard d'absence d'enjeu belliciste. Pour autant, avec un brin de nostalgie mélancolique,  Top Gun peut encore séduire son public grâce aux attachantes prestances des acteurs juvéniles.


Tant et si bien que Tom Cruise ne déborde pas trop en pilote aguerri en ascension héroïco-sentimentale, la charmante Kelly McGillis esquive de justesse la caricature mielleuse en mentor attentionnée quand bien même la midinette Meg Ryan se laisse plutôt dominer par ses sentiments en épouse éplorée. Pour parachever on peut également louer le charme des années 80 que Tony Scott reproduit à travers leur panel de bons sentiments fondés sur l'amitié, l'honneur, la fidélité, l'amour, la bravoure et le dépassement de soi (amen !). Divertissement mineur aussitôt vu qu'oublié à travers sa propagande martiale pro américaine (pour autant loin d'y déchaîner les passions), Top Gun se décline donc en produit d'action gentiment naïf (les rivalités masculines affublées de lunettes noires nous font sourire à travers leur provocation inoffensivement railleuse) soutenu d'une BO entraînante ("take ma breath away") et d'une photo scope clinquante.

*Bruno
3èx

lundi 27 mai 2019

The Perfection

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Richard Shepard. 2018. U.S.A. 1h31. Avec Allison Williams, Molly Grace, Logan Browning, Steven Weber, Alaina Huffman.

Diffusé sur Netflix le 24 Mai 2019

FILMOGRAPHIE: Richard Shepard est un réalisateur et scénariste américain né en 1965. Cool Blue (1990). L'incident de Linguini (1991). Mercy (1995). Oxygène (1999). Mexico (2000). Le matador (2005). Ugly Betty (2006) (TV). Le groupe de chasse (2007). 30 Rock (2008) (TV). Je savais que c'était toi (2010). Ringer (2011) (TV). Filles (2013) (TV). Golden Boy (2013) (TV). Dom Hemingway (2013). Salem (2014) (TV). Sweetbitter (2018) (TV). La perfection (2018). La zone crépusculaire (2019) (TV). 2019: Perfection.


Prenant pour thème l'enjeu de la compétition dans le cadre élitiste d'une profession artistique (celle d'une soliste en violoncelle), The Perfection aurait pu aboutir à un excellent thriller s'il ne s'était entaché des conventions du genre, notamment auprès de sa dernière partie punitive à la limite du ridicule. Pour autant, plutôt bien rythmé, interprété avec aplomb et jamais ennuyeux, The Perfection fait en prime illusion lors de son alléchante première demi-heure résolument inquiétante et impressionnante dans son art viscéral de provoquer le malaise eu égard d'une victime en état de marasme. Richard Shepard parvenant admirablement à nous déstabiliser grâce à l'interprétation sensorielle de Logan Browning jouant les victimes éplorées avec une force d'expression paranoïde. Là je me suis dis que la direction sinueuse empruntée par le cinéaste était fort prometteuse tant les séquences de malaise physiques que celle-ci accumule s'avère d'une intensité terriblement éprouvante ! Outre cette excellente entrée en matière schizophrène provoquant donc une réelle appréhension aussi bien morale que viscérale, la bonne idée de The Perfection est également d'osciller événements du présent et flasback afin de reconsidérer les actions des personnage. Le réalisateur prenant malin plaisir à inverser les rôles de victimes / coupables parmi l'efficacité du simulacre. Un procédé qu'il réitérera plus d'une fois pour mieux nous surprendre en dépit d'une intrigue somme toute classique, comme le souligne son intensité dramatique pas si escarpée que prévu après avoir saisi les tenants et aboutissants de l'héroïne.


Un sympathique thriller plutôt bien emballé mais finalement peu surprenant quant à la densité de l'intrigue débouchant sur les artifices d'une vendetta éculée, même si on peut y louer la gravité de ces thèmes abordés (Spoil ! notamment la pédophilie dans les milieux huppés fin du Spoil). Et donc vite vu vite oublié pour ma part...

*Bruno

vendredi 24 mai 2019

Booksmart

                                                           Photo empruntée sur Facebook

de Olivia Wilde. 2018. U.S.A. 1h42. Avec Kaitlyn Dever, Beanie Feldstein, Noah Galvin, Billie Lourd, Skyler Gisondo, Jessica Williams.

Diffusé sur Netflix le 24 Mai 2019

FILMOGRAPHIEOlivia Wilde (Olivia Jane Cockburn) est une actrice, réalisatrice et productrice américaine née le 10 Mars 1984. 2019: Booksmart.


Le problème de l'ado n'est pas qu'il soit fou, son problème vient du faite qu'il est trop complexé. Il doit avoir les pieds sur terre tout en gardant la tête dans les étoiles.
Arc en ciel guilleret d'humour, d'hilarité, de fraîcheur et de tendresse que l'on pourrait d'ailleurs scinder en deux actes, Booksmart retrace avec une inventivité en roue libre la nuit flamboyante de deux inséparables étudiantes délibérées à s'éclater, faute d'avoir consacré trop de temps pour leurs études. Car après avoir été à nouveau brimées par leurs camarades de classe ayant parvenu à décrocher une place en fac, Amy et Molly ont décidé de prendre leur revanche en s'autorisant tous les excès le temps d'une nuit bipolaire (si je me réfère à sa dernière partie autrement prude car plus terre à terre et aux prises de drogues et d'alcool). Ainsi, à travers une moisson de situations déjantées et de quelques quiproquos engendrés par les sentiments timorés du manque de confiance (selon Amy, lesbienne complexée incapable de franchir le pas sentimental et sexuel), Olivia Wilde, actrice et réalisatrice néophyte, explose les codes dans son refus du Teen movie standard souvent réduit à une trivialité polissonne. Tant et si bien qu'ici, à travers la fidélité amicale de ces deux étudiantes au bagout aussi tranchant qu'émancipé, Olivia Wilde y cultive une pléthore de gags tantôt cocasses, tantôt hilarants à travers leurs répliques génialement caustiques (ça fuse tous azimuts sans jamais lasser !). Et ce à travers les thèmes usuels de la sexualité (notamment le saphisme bien en vogue au cinéma), de la timidité, de la quête identitaire et la remise en question du point de vue pubère.


Cette dernière parvenant notamment à maintenir l'attention en relançant l'action débridée dans de multiples foyers fêtards que nos héroïnes explorent avec fébrile décontraction. Ces sentiments exaltants, si communicatifs, de joie, de bonne humeur et de délire psychédélique (notamment parmi l'emprise de l'acide) étant transcendés par la complémentarité survitaminée de Kaitlyn dever (Amy) et de Bonnet Feldstein (Molly) se prêtant main forte parmi leur tendre dignité de la fidélité amicale. Dans la mesure où Olivia Wilde sous-entend plus qu'elle ne montre leurs rapports les plus graves et sensibles afin d'éviter de sombrer dans le tire-larme. D'ailleurs, à ce titre, le final bouleversant parvient brillamment à renverser la donne de manière totalement fortuite grâce à de nouveaux éclats de rire libérateurs. Le spectateur en larmes (enfin chez celui le plus sensible) éprouvant subitement un sentiment antinomique de fou-rire incontrôlée qu'il accueille librement de la même façon que ses héroïnes. C'est dire si la cinéaste s'y entend pour ne pas céder aux sirènes des conventions de par sa personnalité à la fois indépendante et spontanée qu'elle parvient à imprimer chez les tempéraments scintillants d'Amy et Molly en remise en question identitaire. Car derrière les masques de la désinvolture et de la provocation s'y détachent peu à peu des profils d'un humanisme inévitablement fragile dans leur rapport précaire au sexe et aux sentiments. Quand bien même leurs camarades habituellement dévergondés, car abonnés aux préjugés et aux petites brimades, se nourrissent d'orgueil et de cynisme en guise de carapace morale.


Teen-movie expansif d'une drôlerie inventive disproportionnée (l'intrusion d'une planche de cartoon fait illusion à partir d'un onirisme aussi décalé que baroque), Booksmart explose les barrières de la convenance sous l'impulsion d'un tandem féminin d'une exubérance retorse. Si bien que la réalisatrice infiniment inspirée à se détacher du conformisme n'oublie pas pour autant d'y esquisser leur fragile tendresse sous l'efficace pilier d'un humour dévastateur que sa BO entraînante transfigure avec autant d'autonomie. 

Spéciale dédicace à Fred Serbource ^^
*Bruno

jeudi 23 mai 2019

Les Bonnes Manières. Prix du Jury, Gerardmer 2018

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Marco Dutra et Juliana Rojas. 2017. Brésil. 2h16. Avec Isabél Zuaa, Marjorie Estiano, Miguel Lobo, Cida Moreira, Andrea Marquee, Felipe Kenji.

Sortie salles France: 21 Mars 2018. Brésil: 7 Juin 2018 

FILMOGRAPHIEMarco Dutra, né le 17 mars 1980 à São Paulo, est un réalisateur et scénariste brésilien. 2011 : Travailler fatigue (Trabalhar Cansa) co-réalisé avec Juliana Rojas. 2014 : Quando Eu Era Vivo. 2016 : O Silêncio do Céu. 2017 : Les Bonnes Manières (As Boas Maneiras) co-réalisé avec Juliana Rojas. Juliana Rojas est une réalisatrice et scénariste brésilienne, née le 23 juin 1981. 2011 : Travailler fatigue (Trabalhar Cansa) co-réalisé avec Marco Dutra. 2014 : Sinfonia da Necrópole. 2017: Les Bonnes Manières (As Boas Maneiras) co-réalisé avec Marco Dutra.


Etonnant ovni que cette production indépendante conjuguant avec une surprenante fluidité les composantes de la romance, du fantastique, de la féerie, de l'horreur et même du musical, Les Bonnes Manières ne peut laisser personne indifférent dans sa matière baroque native du Brésil. Tout du moins chez les cinéphiles aguerris avides de curiosité aussi originale qu'intelligente quand bien même la critique plutôt conquise et les jurys de divers festivals lui ont attribués moult récompenses (voir en bas de l'article). Scindé en 2 parties bien distinctes, Les Bonnes manières prend son temps 50 minutes durant à nous familiariser auprès de l'amitié naissante entre une jeune femme enceinte et sa gouvernante afro. Huis-clos intimiste teinté de tendresse saphique et de songes étranges sous un ciel d'un onirisme tantôt pailleté (le feux d'artifice), tantôt crépusculaire (les nuits de pleine lune en clair-obscur), le climat placide finit par déboucher vers un axe autrement dramatique lorsque l'enfant est sur le point de voir le jour. Ce qui nous amène à reluquer sa seconde partie plus attachante, déroutante, violente et inquiétante auprès des rapports davantage conflictuels entre une mère et son jeune fils initié aux bonnes manières dans l'art de vivre.


Cette dernière psychorigide forçant son gamin à l'enchaîner et à dormir dans une chambre blindée tout en l'inculquant depuis sa naissance au végétarisme. Bref, arrêtons nous là, car afin de ne pas ébruiter les nombreux effets de surprise irriguant admirablement l'intrigue, Les Bonnes Manières vous surprendra à coup sur, notamment à travers son réalisme clinique que Marco Dutra et Juliana Rojas maîtrisent avec un étonnant parti-pris hétérodoxe. Les auteurs oscillant les genres avec une alchimie miraculeuse eu égard de certaines séquences audacieuses (surtout les séquences musicales élégiaques) que n'importe quel tâcheron aurait facilement bâclé dans une formulation Z. Ainsi donc, sans toutefois crier au chef-d'oeuvre, cette petite perle brésilienne parvient avec une émotion prude à réactualiser le cinéma fantastique à travers une réelle proposition à la fois déconcertante et singulière. La comédienne afro Isabél Zuaa et le petit Miguel Lobo s'avérant d'autant plus attachants dans leurs valeurs familiales s'acheminant néanmoins vers la pente d'une houleuse contrariété pour y semer la rébellion. Spoil ! Il faut d'ailleurs probablement remonter à Ginger Snaps pour retrouver une telle vitalité, un tel sens de la persuasion et une intégrité par le biais du mythe du loup-garou. Fin du Spoil. 


Fragile, sensible et délicat avec une juste mesure, horrifique et violent sans jamais offusquer de la manière la plus brutale, Les Bonnes Manières s'articule autour du conte fantastique avec une surprenante originalité de ton. Et ce à travers les thèmes oecuméniques de l'éducation, de la différence et de l'intolérance si bien que le final, abrupt et expéditif, nous évoquera (en réminiscence) une filiation au Frankenstein de James Whale

*Bruno

Récompenses: Prix Spécial du Jury au Festival international du film de Locarno 2017.
Prix du public à L'Étrange Festival 2017,
Mention Spéciale du jury au Festival Biarritz Amérique latine 2017,
Prix du jury au Festival de Gérardmer 2018.
Prix de la Critique au Festival international du film de Catalogne 2017;
Meilleur film, meilleure actrice dans un second rôle pour Marjorie Estiano, meilleure photographie, prix de la critique au Festival international du film de Rio de Janeiro 2017.

mercredi 22 mai 2019

Têtes vides cherchent coffres pleins

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Brink's Job" de William Friedkin. 1978. U.S.A. 1h43. Avec Peter Falk, Peter Boyle, Allen Garfield, Warren Oates, Gena Rowlands, Paul Sorvino, Sheldon Leonard.

Sortie salles France: 16 Janvier 1980. U.S: 8 décembre 1978

FILMOGRAPHIE: William Friedkin est un réalisateur, scénariste et producteur de film américain, né le 29 août 1935 à Chicago (Illinois, États-Unis). Il débute sa carrière en 1967 avec une comédie musicale, Good Times. C'est en 1971 et 1973 qu'il connaîtra la consécration du public et de la critique avec French Connection et L'Exorciste, tous deux récompensés à la cérémonie des Oscars d'Hollywood. 1967: Good Times. 1968: l'Anniversaire. 1968: The Night they Raided Minsky's. 1970: Les Garçons de la bande. 1971: French Connection. 1973: l'Exorciste. 1977: Le Convoi de la peur. 1978: Têtes vides cherchent coffres pleins. 1980: The Cruising. 1983: Le Coup du Siècle. 1985: Police Fédérale Los Angeles. 1988: Le Sang du Châtiment. 1990: La Nurse. 1994: Blue Chips. 1995: Jade. 2000: l'Enfer du Devoir. 2003: Traqué. 2006: Bug. 2012: Killer Joe.


Oeuvre aussi mineure qu'occultée dans la filmo de William Fridekin se prêtant au film de braquage d'après des évènements réels survenus à l'orée des années 50, Têtes vides cherchent coffres pleins demeure un sympathique divertissement en dépit de son manque d'humour, de folie et d'intensité (si on écarte son prélude quasi comique). Disons que personnellement (et en me fiant à l'affiche si frétillante) je soupçonnais un délire beaucoup plus cocasse pour la caractérisation de ses pieds nickelés redoublant d'audaces et de certaines maladresses pour s'emparer du coffre d'une société de transports de fonds obsolète. Fort bien réalisé à travers sa superbe reconstitution rétro (visuellement c'est un régal), et bénéficiant d'un cast de rêve (Peter Falk, Peter Boyle, Allen Garfield, Warren Oates, Gena Rowlands et Paul Sorvino sont totalement inspirés dans leur cohésion mafieuse), ce gentil film de casse s'alloue d'un pitch assez saugrenu pour autant dénué de surprises. Ainsi, William Friedkin compte sur l'authenticité du braquage du siècle scrupuleusement étudié par leur mentor (Peter Falk crève l'écran à chaque apparition !) et avant que ce dernier et ses acolytes ne passent à l'action. Mais trop orgueilleux et vaniteux passé leur exploit historique, et suspicieux auprès de l'un d'eux, leur prospérité se solde finalement par une déroute. De par leur passé judiciaire mutuellement entaché de récidive et leur manque de retenue dans leurs relations sociales (notamment auprès de leur arrogance avec les flics).


A découvrir avec curiosité si bien qu'il s'agit au final d'un étrange film de braquage jamais ennuyeux, assez attachant et formellement immersif. William fridkin ne sachant trop sur quel pied danser à osciller les tons ! 

*Bruno
2èx

mardi 21 mai 2019

Les Griffes de la peur

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Eye of the Cat" de David Lowell Rich. 1969. U.S.A. 1h42. Avec Michael Sarrazin, Gayle Hunnicutt, Eleanor Parker, Tim Henry, Laurence Naismith, Jennifer Leak, Linden Chiles.

Sortie salles France: 17 Juillet 1969. U.S: 18 Juin 1969

FILMO SELECTIVEDavid Lowell Rich est un réalisateur et producteur de cinéma américain, né le 31 août 1923 à New York, décédé le 21 octobre 2001 à Raleigh. 1966 : Madame X. 1966 : Les Fusils du Far West. 1967 : Wings of Fire (TV). 1968 : A Lovely Way to Die. 1968 : Three Guns for Texas. 1969 : Marcus Welby, M.D. (TV). 1969 : Les Griffes de la peur. 1973 : La Dernière enquête (TV). 1973 : Crime Club (TV). 1973 : Beg, Borrow, or Steal (TV). 1973 : Satan's School for Girls (TV). 1973 : Runaway! (TV). 1973 : Death Race (TV). 1973 : That Man Bolt. 1974 : The Chadwick Family (TV). 1978 : Les Quatre Filles du docteur March (TV). 1979 : Airport 80 Concorde. 1980 : Nurse (TV). 1980 : Enola Gay: The Men, the Mission, the Atomic Bomb (TV) .1981 : Chu Chu and the Philly Flash. 1983 : Thursday's Child (TV). 1983 : The Fighter (TV). 1983 : Condamnation sans appel (TV). 1986 : L'Impossible évasion (TV). 1986 : Les Choix de vie (TV). 1986 : Trois témoins pour un coupable (TV). 1987 : Infidelity (TV).


Série B aussi méconnue qu'oubliée réalisée par un spécialiste de téléfilms et de séries TV, les Griffes de la Peur demeure une vraie bonne surprise à réhabiliter d'urgence tant David Lowell Rich redouble d'efficacité à instaurer un suspense hitchcockien taillé à la serpe. Car prenant comme argument classique le stratagème criminel d'un couple d'amants délibérés à s'emparer le magot d'une tante tétraplégique, les Griffes de la Peur s'avère roublard de perversité, d'humour noir, d'originalité et de machiavélisme sous le pivot d'un roué goguenard et de sa maîtresse vénale. Et ce jusqu'à l'intensité exponentielle d'un dénouement horrifique diablement retors, notamment si je me réfère à 2 coups de théâtre fortuits. Car empruntant le thème peu commun du chat familier auquel la tante s'adonne par trentaine en guise de chaleureuse compagnie, David Lowell Rich y pimente le pitch d'une faille pathologique que le neveu diablotin (il ne cesse de terroriser cette dernière par de grotesques effets de surprises macabres !) accuse dans sa phobie contre ceux-ci !


La présence sous-jacente puis explicite des chats réunis en masse autour et en interne de la demeure semant un climat d'inquiétude assez envoûtant sous l'impulsion du thème orchestral de l'illustre Lalo Schifrin. Doté d'une mise en image flamboyante à travers le huis-clos d'une vaste demeure gothique, et d'un étonnant brio quant à sa mise en scène avisée (intervention du split screen entre autre) émaillée de séquences-chocs super tendues (la chute escarpée de Tante Danny dans son fauteuil roulant à proximité d'une route fait office de morceau de bravoure technique, et le sort d'un des personnages nous halète d'appréhension avant l'estocade escomptée), les Griffes de la peur s'enrichit pour parachever d'un cast 3 étoiles. Tant auprès de la magnétique et si raffinée Eleanor Parker en tante souffreteuse brimée par son diabolique neveu que l'excellent Michael Sarrazin campe avec une gouaille insolente, que de la voluptueuse Gayle Hunnicutt en maîtresse vénale à la fois discrètement aguicheuse, machiavélique et enfin fourbe lors de ses impatiences capricieuses qu'elle peine à maîtriser.


Farce macabre impeccablement menée parmi l'autorité de protagonistes pernicieux entourées d'une moisson de chats étrangement hostiles, Les Griffes de la Peur s'alloue même d'un zeste d'inceste pour les rapports un peu trop affectueux que se disputent Danny et Wylie. Emballé dans une mise en scène ciselée résolument captivante si je me réfère à l'ossature de son suspense hitchcockien et à sa scénographie gothique, les Griffes de la Peur s'adonne en toute modestie (exit donc le racolage grand-guignolesque !) au thriller horrifique avec un surprenant savoir-faire. 

*Bruno
3èx