mardi 28 septembre 2021

Humongous (la Malédiction de l'île aux chiens)

                                             
                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au s ite Imdb.com

de Paul Lynch. Canada. 1982. 1h35. Avec Janet Julian, David Wallace, John Wildman, Janit Baldwin, Joy Boushel, Layne Coleman.

Sortie US : 11 Juin 1982

FILMOGRAPHIE SELECTIVEPaul Lynch est un réalisateur, scénariste et producteur britannique de films et séries TV, né en 1946 à Liverpool (Royaume-Uni). 1973 : The Hard Part Begins, 1978 : Blood & Guts, 1980 : Le Bal de l'horreur (Prom Night), 1982 : La Malédiction de l'île aux chiens (Humongous), 1983 : Cross Country, 1986: Blindside, 1997 : No Contest II, 1999 : More to Love, 2004: The Keeper.


Série B d'exploitation surfant sur les succès d'Anthropophagous et, à moindre échelle, de la Tour du DiableHumongous fut dans les années 80 un hit des vidéo-clubs que certains spectateurs n'hésitèrent pas à qualifier d'oeuvre culte, aussi mineur soit son contenu linéaire. Exhumé de l'oubli grâce à l'éditeur français Uncut Movies, il est enfin disponible en support Dvd plus de 30 ans après sa sortie ! Une aubaine que les nostalgiques s'empresseront d'acquérir dans une copie plutôt correcte, quand bien même la jeune génération pourra se faire une opinion sur sa petite renommée. Reprenant le même pitch que l'oeuvre scandale de Joe d'Amato (une poignée de vacanciers échoués sur une île devront se mesurer à un tueur cannibale),  Humongous lorgne davantage du côté de Survivance et de Vendredi 13 pour le cadre naturel de son environnement forestier résidé par un fou et auquel une bande de gamins vont évidemment tenter de se dépêtrer pour un enjeu de survie. Et si l'argument eut été maintes fois rebattu et que les clichés usuels, tels les personnages cabotins ne plaident pas en sa faveur, Humongous tire-parti de son attraction par l'entreprise d'une ambiance envoûtante laissant planer un suspense latent. Car jouant sur l'attente de la menace invisible et des estocades meurtrières, Paul Lynch insuffle avec minutie une angoisse diffuse en retardant l'apparence (hideuse) du tueur. 


Une manière leste d'y gérer le mystère et de jouer auparavant sur le bruitage de menaces perceptibles par l'ouïe ! A l'instar des hurlements de chiens que l'on entend la nuit du fond de la forêt ou de cette respiration rauque (établie comme de coutume en vue subjective !) épiant faits et gestes des vacanciers. Mais le clou de la révélation et des visions d'effroi (cadavres décharnés à l'appui !) émanent de la découverte d'une demeure familiale renfermant un lourd secret. Ce qui nous ramène au prélude redoutablement cruel, violent, pervers et malsain lorsqu'un homme en ébriété viola l'une de ses amies avant d'être dévoré par une meute de chiens ! Sans nul doute le moment le plus impressionnant du film grâce au vérisme de sa dramaturgie escarpée. Ainsi, par le biais de simples détails, telle la découverte d'un journal intime et de photos souvenirs, Paul Lynch crédibilise une affaire familiale souillée par le viol et l'homicide ! Spoil !!! Ce qui engendrera comme conséquence l'enfantement d'un ogre difforme vivant reclus sous la cave, tel un animal enchaîné. Fin du Spoil. Et si certains comédiens au physique ordinaire s'avèrent superficiels dans leur fonction de victime démunie, ils réussissent malgré tout à impliquer l'attachement auprès de leur vaillance, leur foi à pénétrer au coeur d'un endroit malfaisant et leur solidarité amicale à contrecarrer une menace toujours plus perceptible. On peut d'ailleurs saluer le jeu tout à fait convaincant de Janet Julian en héroïne en herbe insufflant un charisme aigre dans sa condition appréhensive pour autant chargée de certaines audaces lors de sa confrontation avec l'ogre des bois.  


Modestement efficace, quelque peu angoissant et parfois violent et haletant (les meurtres s'avèrent brutaux et le final ne déçoit pas dans l'affrontement échu à la dernière survivante en dépit de ses clichés éculés !), Humongous est surtout valorisé d'une ambiance mortifère plutôt prégnante que le cinéma actuel peine à reproduire avec autant d'intensité, de musicalité (score au synthé) et de photogénie blafarde. Un sympathique survival horrifique donc d'autant mieux scandé d'un score dissonant des plus lugubres que les nostalgiques se délecteront encore à estimer, si bien qu'Humongous tient toujours la route dans sa capacité à nous immerger dans un environnement forestier aussi ombrageux que licencieux, alors que certains cadrages alambiqués étonnent par leur formalité.     

Salutation à Uncut Movies (http://www.uncutmovies.fr/)

*Eric Binford
05.08.14. 158 v
26.09.21. 3èx

lundi 27 septembre 2021

Zombie Holocaust / La Terreur des Zombies

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Marino Girolami. 1979. Italie. 1h24. Avec Ian McCulloch, Alexandra Cole, Sherry Buchanan, Peter O'Neal, Donald O'Brien 

Sortie salles France: 22 Avril 1981. Italie: Décembre 1979

FILMOGRAPHIE: Marino Girolami (aussi connu sous les pseudonymes de Franco Martinelli, Frank Martin, Jean Bastide, Fred Wilson ou Bernado Rossi) est un réalisateur italien né le 1er février 1914 à Rome et mort à Naples le 20 février 1994. Il est le père d’Ennio Girolami et Enzo G. Castellari et a pour frère l’acteur Romolo Guerrieri. 1951 : Milano miliardaria. 1951 : Il mago per forza. 1951 : Terre de violence (Amore e sangue). 1951 : Quelles drôles de nuits (Era lui... sì! sì!). 1975 : Rome violente. 1976 : Opération jaguar. 1979 : La Terreur des zombies.  

Croisement improbable de Cannibal Holocaust et l'Enfer des Zombies (dont il reprend même quelques décors et acteurs), Zombie Holocaust est une série Z transalpine qui vaut essentiellement pour ses scènes gores assez réussies et crapoteuses. Dommage que le récit ridicule, ses dialogues risibles, la posture contractée des acteurs de seconde zone et les zombies peu convaincants finissent (très) rapidement par plomber toute ambition ludique. 

*Eric Binford
2èx

mercredi 22 septembre 2021

Serpico

                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Sidney Lumet. 1973. U.S.A/Italie. 2h10. Avec Al Pacino, John Randolph, Jack Kehoe, Biff McGuire, Barbara Eda-Young, Cornelia Sharpe, Tony Roberts, Allan Rich. 

Sortie salles France: 22 Mai 1974. U.S: 5 Décembre 1973

FILMOGRAPHIE: Sidney Lumet est un réalisateur américain, né le 25 Juin 1924 à Philadelphie, décédé le 9 avril 2011 à New-York. 1957: 12 Hommes en colère. 1958: Les Feux du Théâtre. 1959: Une Espèce de Garce. 1959: l'Homme à la peau de serpent. 1961: Vu du pont. 1962: Long voyage vers la nuit. 1964: Le Prêteur sur gages. 1964: Point Limite. 1965: La Colline des Hommes perdus. 1966: Le Groupe. 1966: MI5 demande protection. 1968: Bye bye Braverman. 1968: La Mouette. 1969: Le Rendez-vous. 1970: Last of the mobile hot shots. 1970: King: A filmed record... Montgomery to Memphis. 1971: Le Dossier Anderson. 1972: The Offence. 1972: Les Yeux de Satan. 1973: Serpico. 1974: Lovin' Molly. 1974: Le Crime de l'Orient Express. 1975: Un Après-midi de chien. 1976: Network, main basse sur la TV. 1977: Equus. 1978: The Wiz. 1980: Just tell me what you want. 1981: Le Prince de New-York. 1982: Piège Mortel. 1982: Le Verdict. 1983: Daniel. 1984: A la recherche de Garbo. 1986: Les Coulisses du Pouvoir. 1986: Le Lendemain du Crime. 1988: A bout de course. 1989: Family Business. 1990: Contre Enquête. 1992: Une Etrangère parmi nous. 1993: l'Avocat du Diable. 1997: Dans l'ombre de Manhattan. 1997: Critical Care. 1999: Gloria. 2006: Jugez moi coupable. 2007: 7h58 ce samedi-là.

"Ma présence ici aujourd'hui me donne l'espoir qu'à l'avenir les membres de la police n'éprouveront plus les déception et les angoisses que j'ai subi par la faute de mes supérieurs parce que j'essayais de dénoncer la corruption. Ils m'ont fait sentir que je les chargeais d'une tâche dont ils ne voulaient à aucun prix. Ce qui importe c'est de mettre un terme à cette ambiance et à cet état d'esprit, il faut qu'un policier honnête puisse agir sans avoir peur du ridicule ou des représailles de ces collègues. La corruption de la police ne peut exister que si elle est tolérée par les plus hautes autorités. Votre devoir le plus important c'est de redonner confiance à tous, c'est de convaincre le personnel de la police que de grands changements interviendront. C'est pour assurer cette garantie que la création d'un comité permanent et indépendant enquêtant sur la corruption comme l'a fait cette commission est essentielle." Serpico. 

Une date dans l'histoire du cinéma policier symptomatique du cinéma vérité des Seventies sous l'impulsion d'un Pacino aussi fébrile que vulnérable. 

Sortir à nouveau de la projo de Serpico après une dizaine d'années d'abstinence prouve à quel point le cinéma des années 70 demeure un vivier inépuisable de classiques inoxydables eu égard de la puissance émotionnelle qui s'y dégage sans fioritures. Mais pas que, car son réalisme documenté, sa violence âpre ne sont pas en reste lorsqu'il s'agit d'y pratiquer un cinéma engagé auprès du profil stoïque d'un représentant de l'ordre à la fois burné, dubitatif et anticonformiste. Ainsi donc, en s'inspirant de l'histoire vraie du jeune recrue Serpico délibéré 11 années durant à tenter de percer au grand jour la corruption policière au sein de son propre commissariat, l'immense Sidney Lumet déploie son talent de conteur et de metteur en scène studieux au gré d'une intensité dramatique lestement exposée. Pour ce faire, on peut évidemment compter sur la présence (déjà) iconique d'Al Pacino tout en sobriété pour se fondre dans le corps d'un policier néophyte réfutant les conventions à travers sa tenue vestimentaire baba cool, longs cheveux bruns et barbe en sus afin de se démarquer de ses confrères et ainsi mieux alpaguer la faune urbaine. 


Omniprésent à l'écran, Al Pacino dégage une force d'expression à la fois irascible, langoureuse et soucieuse de par son parcours de longue haleine à dénoncer le corps policier complice de corruption, entre violences policières, pots de vin, abus de pouvoir, racket, malversations (et non assistance à personne en danger). L'intérêt de l'intrigue soigneusement charpentée dépeignant l'acharnement de ce jeune flic seul contre tous, qui plus est exploité par quelques bienfaiteurs sournois, se démenant à ébruiter la vérité au grand dam de sa liaison conjugale en perdition. Sidney Lumet accordant notamment beaucoup d'intérêt (tout du moins à un moment propice du récit) à radiographier la dépression morale de Serpico peu à l'écoute de l'être aimé, car peu enclin à considérer son épouse en détresse affective. Celui-ci demeurant hélas tiraillé par sa résilience, ses risques suicidaires et ses efforts disproportionnés à tenter de réunir des mains secourables dans sa prise de position contestataire à dénoncer ses pairs au mépris de sa hiérarchie davantage hostile. Le film débutant par l'agression probablement mortelle de Serpico, Sidney Lumet instaurant durant tout le récit un suspense dramatique tacite quant au sort précaire de celui-ci. Quand bien même nous nous interrogions autant sur les conditions qui ont pu engendrer son agression et quels en étaient les complices osant commanditer pareil guet-apens ?

Puissant réquisitoire contre toute forme de corruption policière, Serpico est un grand moment de cinéma à la fois humaniste et engagé à travers l'inoubliable profil de ce jeune flic vaillant (quelle leçon de courage !) sacrifiant sa vie (professionnelle et conjugale) au profit de sa droiture d'esprit. Inoubliable. 

*Eric Binford. 
3èx

mardi 21 septembre 2021

Les Yeux de Laura Mars

                                                                                                                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site toutlecine.com


"Eyes of Laura Mars" d'Irvin Kershner. 1978. U.S.A. 1h43. Avec Faye Dunaway, Tommy Lee Jones, Brad Dourif, René Auberjonois, Raul Julia, Frank AdonisSal, Lisa Taylor, Darlanne Fluegel, Rose Gregorio.

Sortie salles France: 31 Janvier 1979. U.S: 2 Août 1978

FILMOGRAPHIEIrvin Kershner est un réalisateur et producteur américain, né le 29 Août 1923 à Philadelphie (Pennsylvanie), décédé le 27 Novembre 2010 à Los Angeles (Californie). 1958: Stakeout on Dope Street. 1959: The Young Captive. 1961: Le Mal de vivre. 1963: Face in the Rain. 1964: The Luck of Ginger Coffey. 1966: l'Homme à la tête fêlée. 1967: Une sacré fripouille. 1970: Loving. 1972: Up the Sandbox. 1974: Les 'S' Pions. 1976: La Revanche d'un Homme nommé Cheval. 1978: Les Yeux de Laura Mars. 1980: l'Empire contre-attaque. 1983: Jamais plus jamais. 1990: Robocop 2.


Deux ans avant l'Empire contre-attaque, Irvin Kershner succéda au metteur en scène Michael Miller pour élaborer un thriller fantastique parmi la présence d'une des plus illustres stars d'Hollywood, Faye Dunaway. Avec l'entremise d'un scénario concocté par David Zelag et le maître de l'horreur, John Carpenterles Yeux de Laura Mars est une efficace machine à suspense de par son savant dosage de thriller, fantastique, érotisme et angoisse. Le pitchDurant le tournage d'une pub, une éminente photographe est l'objet de visions d'horreur prémonitoires. Un mystérieux tueur s'en prend à son entourage en crevant les yeux des victimes à l'aide d'un pic à glace. Il semblerait qu'un psychopathe soit à l'origine de cette vague de meurtres mais le coupable continue ses exactions en toute impunité. A cause de ses visions, Laura Mars est suspectée par l'inspecteur John Neville avec qui elle finit par entretenir une liaison sentimentale. A travers un argument fantastique basé sur la prescience (un thème qu'Armand Mastroianni reprendra quatre ans plus tard avec le curieux et sympathique Un Tueur dans la Ville), tributaire d'une intrigue criminelle honorablement menée, les Yeux de Laura Mars s'enrichit en prime d'une densité psychologique auprès de son héroïne en perdition morale. Car en photographe de mode esthétisante auprès de ses délires érotico-macabres, Faye Dunaway insuffle une fragilité humaine déconcertée face à l'infortune de son don.


A l'instar de Christopher Walken dans Dead Zone, son calvaire imposé est d'autant plus perturbant qu'elle s'avère incapable de pouvoir avertir ou prémunir la prochaine victime pourchassée. En prime, cette impuissance de ne pouvoir refréner ses visions cinglantes de clairvoyance demeure d'autant plus trouble que les flashs imposés sont perçus en vue subjective. Dans la mesure où les yeux de Laura, transis d'effroi, sont subitement envahis d'images diaphanes préfigurant le crime par le truchement du regard du meurtrier ! Des séquences spectaculaires impressionnantes distillant à travers ses visions un climat horrifico-surnaturel saturé d'une bande-son stridente et dissonante. On peut également souligner le côté charnel de l'entreprise de Laura lors des postures provocantes des mannequins arborant lors des séances photos une tenue aussi déshabillée qu'effrontée. Ainsi, parmi l'empathie suscitée pour ses victimes familières et sa culpabilité contrariée de mettre en avant une exubérance artistique, l'actrice véhicule un humanisme davantage chétif auprès de sa vulnérabilité démunie. Quand bien même sa tendre relation amorcée avec l'inspecteur John Neville lui permettra pour autant de retrouver un certain équilibre et un réconfort avant qu'une énième vision morbide ne revienne l'alpaguer. Leur romance partagée est d'autant plus sincère, attachante et harmonique que nous nous éprenons facilement de compassion pour eux. Par conséquent, l'alliage de suspense criminel et de romance fonctionne plutôt bien sous l'impulsion de comédiens doués donnant chair à leur personnage sans effet de manche.


Les yeux de la Terreur. 
Agrémenté de la mélodie envoûtante de Barbara Streisand, Les Yeux de Laura Mars demeure un captivant thriller, aussi trouble et intense que sexy et angoissant. Le talent infaillible de Faye Dunaway accompagnée de l'inquiétant Tommy Lee Jones insufflant charme et vigueur à l'intrigue (surnaturelle) par le biais d'une liaison dangereuse. Au-delà de sa facture ludique aussi bien captivante que fascinante, le réalisateur en profite notamment pour y tisser une réflexion morale sur la nécessité ou non de glorifier la violence et le sexe à des fins artistiques au sein du paysage médiatisé pubard. Qui plus est en y filmant la ville de New-York de manière à la fois réaliste, détaillée et improvisée (la foule urbaine constamment fureteuse de ce qui s'y déroule lorsque la police est dépêchée !). 

* Eric Binford
21.09.21. 4èx
08.11.12. 141 v



lundi 20 septembre 2021

Sueur Froide dans la Nuit

                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Fear in the Night" de Jimmy Sangster. 1972. Angleterre. 1h34. Avec Joan Collins , Peter Cushing , Judy Geeson , Ralph Bates , James Cossins.

Sortie salles France: 8 Octobre 1975. Angleterre: 9 Juillet 1972.

FILMOGRAPHIE: Jimmy Sangster est un réalisateur, scénariste et producteur de cinéma britannique né le 2 décembre 1927 dans le North Wales (Pays de Galles), décédé le 19 août 2011 à Londres. 1970 : Les Horreurs de Frankenstein. 1971 : Lust for a Vampire. 1972 : Sueur froide dans la nuit.


Thriller à suspense produit par la Hammer au moment de nous livrer leurs derniers fleurons à l'orée des Seventies, Sueur froide dans la Nuit est réalisé par Jimmy Sangster ayant déjà oeuvré pour la firme à 2 antécédentes reprises avec Les Horreurs de Frankenstein et Lust of a Vampire. Deux oeuvres horrifiques plutôt mal aimées par la critique si bien que l'on peut avouer sans rougir que Sueur froide dans la nuit est de loin sa plus franche réussite. Clairement influencé par Hitchcock à travers ses thèmes du simulacre et de la machination, le récit s'articule autour des efforts infructueux de Peggy Heller tentant de convaincre son mari qu'un mystérieux individu l'eut agressée à deux reprises. Un manchot à main ganté s'efforçant de la molester alors que celle-ci venait d'être soignée pour dépression après avoir séjourné en psychiatrie. Isolée dans la propriété de son époux à proximité d'une école enseignée par le professeur Michael Carmichael, elle remarque que celui-ci, manchot, ne transmet aucun cours dans une classe vide d'élèves. 


Soigneusement réalisé et sobrement interprété par des acteurs irréprochables se délectant à martyriser notre héroïne avec une duplicité détestable, Sueur Froide dans la nuit est d'autant mieux construit pour entretenir un certain suspense latent au fil du parcours parano de Peggy en proie à des agressions nébuleuses eu égard que l'agresseur n'a pas pour fonction de l'occire. Judy Geeson (inoubliable interprète d'Inseminoïd) endossant la pauvre victime démunie avec une fragilité  névralgique expressive auprès de sa gestuelle communicative. Quand bien même Ralph Bates lui partage la vedette en époux réservé assez peu attentionné au comportement angoissé de son épouse tan et si bien que l'acteur demeure épatant d'orgueil et de charisme impassible pour des raisons probablement suspicieuses. On peut d'ailleurs autant suspecter la fonction secondaire de Peter Cushing en professeur taiseux plutôt snob mais avenant à travers son langage courtois. Enfin, Joan Collins est une fois de plus délicieuse d'arrogance, de cruauté (le coup de fusil sur le lapin) et de condescendance à mépriser notre Peggy bien esseulée à tenter de se faire une petite place amicale auprès de ce trio altier. 


Inquiétant et captivant dans une juste mesure avant d'amorcer un rythme plus nerveux au fil de son ultime demi-heure fertile en rebondissements escomptés, Sueur Froide dans la Nuit demeure tout à fait plaisant à travers sa mécanique huilée de suspense Hitchcockien. Son atmosphère d'angoisse éthérée et sa dramaturgie graduée gagnant du terrain au fil d'une cruauté morale à la fois perverse et humiliante quant au sort inéquitable de l'héroïne recluse sur elle même (comme le souligne l'épilogue évocateur dénué d'illusion). 

*Eric Binford
3èx

vendredi 17 septembre 2021

Bac Nord

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Cédric Jimenez. 2021. France. 1h45. Avec Gilles Lellouche, Karim Leklou, François Civil, Adèle Exarchopoulos, Kenza Fortas, Cyril Lecomte, Michaël Abiteboul.

Sortie salles France: 18 Août 2021

FILMOGRAPHIE: Cédric Jimenez est un réalisateur, producteur et scénariste français né le 26 juin 1976 à Marseille. 2012 : Aux yeux de tous. 2014 : La French. 2017 : HHhH. 2021 : BAC Nord. 2022: Novembre. 

“On ne sert plus à rien... plus je fais mon métier, moins je le fais.”
Uppercut émotionnel à couper le souffle, Bac Nord est une épreuve morale comme peu de métrages ont sur le parfaire avec autant de réalisme documenté à travers sa délinquance urbaine aujourd'hui rendue incontrôlable (c'est peu de le dire et c'est du jamais vu dans le paysage français). Il faut d'ailleurs remonter à mon sens au percutant la Haine de Kassovitz (et non aux Misérables auquel j'émets quelques réserves) pour retrouver cette dimension dramatique malaisante, cette fulgurance rigoureuse parfois résolument terrifiante eu égard de la guerre sans merci que se livrent flics et voyous s'acharnant à monopoliser leur autorité dans un brouhaha suicidaire. C'est dire si l'efficacité de la mise en scène au cordeau de Cédric Jimenez rivalise avec les productions ricaines les plus musclées dans son sens du cadrage, dynamisme du montage, caméra portée à l'épaule, pour nous immerger de plein fouet dans l'hystérie collective de ces règlements de compte où le pire est sur le point d'éclater lors de tirades d'affolement communautaire. Certaines situations incongrues filmées dans l'urgence demeurant d'une tension paroxystique quant au sort précaire de nos policiers confrontés à l'arrogance des délinquants prêts à se sacrifier pour défendre leur territoire de deal coordonné dans une directive militaire. Tant et si bien que depuis des décennies, politique, justice et membres pédagogues semblent avoir démissionné de leur fonction impérieuse de par le sentiment d'affranchissement d'une délinquance mineure et majeure parvenant communément à imposer leur dictature au sein de leur fief ghettoïsé.   

Et de mémoire, à moins d'y avoir loupé une oeuvre référence, je ne connais aucun métrage ricain ayant su inscrire avec tel souffle belliqueux moult péripéties effrénées de par le vérisme frénétisé des acteurs aussi bien amateurs que professionnels s'affrontant physiquement / verbalement les nerfs à vif. Tous demeurant communément époustouflants de charisme névralgique dans leur fureur animale décomplexée. D'où l'incroyable sentiment d'immersion morale que procure le métrage traitant avec souci de véracité de la hiérarchie délinquante aussi coordonnée et studieuse que leur homologues policiers. Tant et si bien que la frontière entre le Bien et le Mal est rompue, et que certains flics à bout de nerfs dans leur posture humiliée, pour ne pas dire avilissante, finissent par perdre pied avec le sens des valeurs au point de se comporter comme leur rivaux haineux et d'adopter leur gestuelle, leur orgueil démesuré faute de cette violence primale fatalement contagieuse. Ainsi, à travers cette cacophonie désaxée où complices et indics se mêlent également à la partie du gendarme et voleur, Bac Nord jette un effrayant pavé dans la mare. Un effrayant constat d'amertume, de désillusion et de déroute auprès d'une corruption humaine déchue de leurs codes moraux. Et ce tout en romantisant la situation finalement désoeuvrée de ce trio de flics aussi véreux qu'héroïques (leurs burnes s'avèrent aussi grosses que des boules de billards à travers leurs risques encourus, leur course poursuite à bout de souffle et leur stoïcité radicale !) abandonné par leur propre confrère pour un enjeu de racket et de trafic de stupéfiants pas aussi préjudiciable que prévu. 


"Quand on lutte contre des monstres, il faut prendre garde de ne pas devenir monstre soi-même. Si tu regardes longtemps dans l'abîme, l'abîme regarde aussi en toi."
Impulsé du véhément trio Gilles Lellouche, Karim Leklou et surtout François Civil (en fringant jeune loup fumeur de joint), accompagné du talent plus vrai que nature d'Adèle Exarchopoulos en jeune maman intuitive; Bac Nord met les nerfs à rude épreuve au coeur d'un western urbain en déliquescence séditieuse d'où perce l'animosité d'une jeunesse criminelle davantage azimutée, pour ne pas dire quasi invincible. Un constat d'échec évidemment effrayant car sans lueur d'espoir alors que la génération prochaine osera inévitablement relever le défi d'imposer leur loi avec plus de cran, d'autonomie et de bassesse. 

*Eric Binford

jeudi 16 septembre 2021

Candyman

                                  Photo empruntée sur Facebook par l'intermédiaire de Thierry Spadino

de Nia DaCosta. 2021. U.S.A. 1h31. Avec Yahya Abdul-Mateen II, Teyonah Parris, Nathan Stewart-Jarrett, Colman Domingo, Vanessa A. Williams, Tony Todd, Rebecca Spence.

Sortie salles France: 29 Septembre 2021. U.S: 27 Août 2021

FILMOGRAPHIENia DaCosta est une réalisatrice et scénariste américaine, née le 8 novembre 1989 à New York. 2018 : Little Woods (réalisation et scénario). 2021 : Candyman (réalisation et scénario). 2022 : The Marvels (réalisation). 


La corruption du Mal par la rancoeur. 
Sortir de la projo de Candyman 2021 n'est point une mince affaire de par sa vénéneuse noirceur et son nihilisme sociétal davantage déclinant. Vendu comme un Remake du chef-d'oeuvre de Bernard Rose, Candyman 2021 n'est nullement l'épigone réactualisé au goût du jour pour contenter le chaland en mal de sensations fortes. Tant et si bien que Candyman, LA SUITE, s'adresse avant tout à un public à la fois mature et responsable tant son climat austère, hermétique n'est pas à la merci de tous afin de l'approcher dans un strict premier degré (pas une once d'humour à relever à l'horizon !). Rare pour ne pas le souligner en cette année catastrophique (selon moi évidemment) pour le genre horrifique réduit au produit de consommation. C'est dire si cette version résolument personnelle ne fera pas l'unanimité auprès du public peu habitué à fréquenter une oeuvre intime dénuée de fard puisque s'intéressant avant tout à nous caractériser une galerie de personnages afro-américains hantés par leur condition esclavagiste auprès d'une civilisation blanche incapable de s'extraire de la haine de l'étranger auprès des ignorants et extrémistes épeurés par la différence. Formellement stylisé à travers ses ombres chinoises, ses figures géométriques, ses tableaux picturaux et ses éclairages flashy compromis au baroque épuré, Candyman 2021 est un éblouissement esthétique en perpétuelle créativité. Et à ce niveau, on peut clamer le chef-d'oeuvre formel aussi moderne qu'atypique (certains plans évoquant par ailleurs une scénographie futuriste tout à fait appropriée et non conçu comme une fioriture de remplissage). 


Un parti-pris idoine d'y dénoncer en filigrane l'exploitation des noirs dans le domaine de l'art auprès de la suprématie blanche quand bien même les violences policières demeurent davantage factuelles si je me réfère à son final horrifique à la dramaturgie malaisante. On quitte donc l'épreuve horrifique avec un arrière goût de souffre et d'amertume dans la bouche eu égard de son dénouement mortifié militant pour une vendetta, faute de la fracture irréversible entre blancs et noirs d'où la communication est feinte faute de simulacre prodigué. Ainsi, derrière son contexte social amer, Candyman 2021 dégage une atmosphère d'angoisse sous-jacente quasi indicible au fil d'un cheminement moral indécis ponctué de bipolarité et de revirements fréquemment malaisants. Sans compter ses scènes de terreur sournoises, démoniales, acrimonieuses lorsque apparaît derrière la victime le croquemitaine appréhendant ses proies de manière éthérée. Sa présence souvent invisible (mais brièvement visible au fond du miroir par le spectateur !) provoquant chez nous une peur viscérale à la fois malsaine et étouffante d'y redouter l'inévitable, renforcée qui plus est d'un goût pour une certaine crudité sanguine à travers son réalisme gore littéralement cinglant. Quant aux interprètes hétéros (mais aussi gays pour y défendre leur cause plus qu'actuelle), quelle judicieuse idée d'avoir sélectionné des comédiens pour la plupart méconnus du public pour mieux se familiariser, s'impliquer dans leurs tourments moraux sous l'impulsion d'une rigueur dramatique (parfois trop) inconfortable. D'où l'aspect  régulièrement déconcertant, voir quelque peu antipathique de ce Candyman autonome n'adjurant nullement à être aimé et exploitant la trame de Bernard Rose avec une intelligence on ne peut mieux intègre, pour ne pas dire déférente. 


No Futur. 
Persuadé qu'un second visionnage permettra mieux d'apprivoiser cette séquelle difficile d'accès mais lestement captivante (sans toutefois que l'on s'en aperçoive), Candyman 2021 demeure en tout état de cause une réelle surprise inattendue dans le paysage imberbe du remake aseptique souvent tributaire du copié-collé. Tant et si bien qu'ici c'est tout l'inverse qui se produit en mode (véritable)"séquelle" pour attirer le chaland et (surtout) le passionné du genre en manque de 1er degré. Et ce au point d'y rejoindre les meilleurs spécimens du genre parmi lesquels trônent probablement sur vos étagères fétichistes, The Thing, La Mouche, Maniac, L'Invasion des Profanateurs, La Colline a des Yeux, Le Cauchemar de Dracula, La Féline, Suspiria et quelques autres pépites... 
A découvrir avec précaution donc en étant averti du contenu à la fois opaque, cérébral, hermétique, au point de sortir de la projo avec une certaine gueule de bois anticonforme... (je me demande d'ailleurs encore ce à quoi je viens d'assister ce soir là ! ?).

*Eric Binford. 

mardi 14 septembre 2021

Les Longs Manteaux

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site placedeslibraires

de Gilles Béhat. 1986. France/Argentine. 1h33. Avec Bernard Giraudeau, Claudia Ohana, Robert Charlebois, Federico Luppi

Sortie salles France: 19 Février 1986

FILMOGRAPHIEGilles Béhat (Gilles Marc Béat) est un réalisateur et acteur français, né le 3 Septembre 1949 à Lille (Nord). 1978: Haro. 1981: Putain d'histoire d'amour. 1984: Rue Barbare. 1985: Urgence. 1986: Charlie Dingo. 1986: Les Longs Manteaux. 1988: Le Manteau de Saint-Martin. 1990: Dancing Machine. 1994: Le Cavalier des nuages. 1997: Un Enfant au soleil. 2000: Une Mère en colère. 2009: Diamant 13.

Le Pitch: Loïc Murat, un géologue français, installe son campement dans la montagne bolivienne. Il y croise la route d'un groupe fasciste, Les Longs Manteaux, qui tentent d'assassiner un écrivain, Juan Mendez. Murat fait également la connaissance de Julia, la fille de Mendez.

Un sympathique récit d'aventures sur fond de western contestataire qui doit beaucoup à la force tranquille et de sureté de Bernard Giraudeau, un des meilleurs acteurs des années 80 plutôt omis de nos jours, et c'est fort dommage eu égard de son charisme magnétique aux yeux azurs. Accompagnée de la méconnue Claudia Ohana, cette charmante actrice brésilienne ne démérite pas dans sa posture de fille fragile mais résiliente à escompter la liberté de son père, écrivain emprisonné par son régime totalitaire 2 ans avant la nouvelle mise en place d'un gouvernement démocratique. Tourné en scope afin de transcender ses magnifiques paysages boliviens, Les Longs Manteaux est notamment ponctué de scènes d'actions aussi nerveuses que réussies, rare pour ne pas le souligner au sein de notre paysage français peu habitué à émuler celui du ciné ricain. Peut-être pas le haut du panier du divertissement musclé des années 80 mais un honnête spectacle conduit avec savoir-faire par Gilles Béhat, inoubliable auteur de Rue Barbare (déjà accompagné de Bernard Giraudeau), sous l'impulsion du superbe score de Jean-François Léon aussi entêtant qu'un tantinet langoureux.

*Eric Binford

lundi 13 septembre 2021

Malignant

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de James Wan. 2021. U.S.A. 1h52. Avec Annabelle Wallis, Jake Abel, George Young, Jacqueline McKenzie, Mckenna Grace, Maddie Hasson, Michole Briana White.

Sortie salles France: 1er Septembre 2021

FILMOGRAPHIE: James Wan est un producteur, réalisateur et scénariste australien né le 27 Février 1977 à Kuching (Malaisie), avant de déménager à Perth (Australie). 2004: Saw, 2007: Dead Silence, Death Sentence, 2010: Insidious. 2013: The Conjuring. 2013: Insidious 2. 2016: The Conjuring 2. 2021: Malignant. 


         Avertissement ! Sans toutefois spoiler, il est préférable d'avoir vu le film avant de lire ce qui        va suivre.

Quand James Wan se télescope à Bruno Mattei et Frank Henenlotter.
Peut-être lassé de s'adonner au film de Hantise (Conjuring / Insidious), James Wan détourne quelque peu le genre avec son nouveau métrage, Malignant transcendé d'un bouche à oreille plutôt euphorisant à défaut de rassembler les critiques assez partagées. Histoire de s'écarter des conventions du film de maison hantée commanditée d'un esprit frappeur, Malignant demeure donc efficacement troussé lors de sa première heure misant sur l'inquiétude (l'attente d'un éventuel danger, d'une menace incertaine), l'appréhension diffuse (via le silence) et l'expectative que le spectateur adoube avec une attention fureteuse quant à l'enjeu de cette énigme filiale. Le récit cumulant à rythme métronome quelques séquences chocs gratinées parmi le témoignage de Madison impuissante d'observer en direct des mises à mort surnaturelles que le tueur la contraint d'observer par télépathie (on peut aussi parler de téléportation de par l'invention de la mise en scène immersive substituant un décor domestique par un autre sans effet de coupe, sorte de fondu enchainé limpide). Alors que la police piétine, la soeur de Madison s'empare de l'enquête épineuse en se dirigeant dans l'ancienne clinique lorsque Madison fut sujette à diverses expérimentations médicales en 1993 (ce que nous suggérait le prologue déjà incongru lors de ses règlements de compte surnaturels). Celle-ci ayant été abdiquée par sa mère lors de sa naissance pour des motifs que nous ne connaîtrons que vers l'ultime étape apocalyptique. Ainsi, si le mode du thriller horrifique s'avère plutôt bien géré et formellement soigné 1 heure durant (à l'instar de son hallucinant plan séquence en surplomb dans une demeure ou de son onirisme macabre de l'extérieur d'une bâtisse ou d'un hôpital); la suite opte pour un virage à 180 degrés afin de relancer le mystère de cette vague de crimes à renfort de vendetta hyperbolique. 

Et c'est ainsi que Malignant dévoile tout son potentiel à la fois homérique et horrifique tout en rendant depuis le départ un sublime hommage au Giallo où plane l'ombre d'Argento. Et ce de la manière la plus épurée et saugrenue qui soit à travers le charisme iconique du tueur affublé d'un poignard en or massif. Le spectacle borderline, décérébré, décomplexé, frénétisé demeurant ultra jouissif auprès de ses affrontements dantesques entre le "diable" et nos héros déconcertés par une révélation aussi ubuesque qu'après tout bien réel. Bref, on marche à plein tube les yeux écarquillés en dépit de son concept totalement allumé, et c'est cela qui s'avère proprement jubilatoire. Car c'est justement ce qui fait que Malignant dégage une véritable puissance visuelle par sa folie improbable redoutablement adroite et percutante, notamment auprès de l'ultra dynamisme du montage, de l'agilité des plans s'enchainant sans répit. On peut également saluer à travers le jeu (bicéphale) de l'interprète très convaincant (dont je tairai le patronyme) sa manière éraillée de communiquer avec ses interlocuteurs par le biais du téléphone et de postes radios. Un tueur iconique donc infiniment fascinant auprès de son élégance hermétique alors que ses confrontations véloces techniquement soignées (j'insiste encore, c'est méritoire) auprès de l'inventivité des effets de caméra (parfois alambiqués) nous plaquent au siège de par son réalisme tranché. Quand bien même la jeune Annabelle Wallis dégage un véritable charme vénéneux aussi magnétique que fragilement sensuel en victime démunie tentant de s'extraire de sa prison mentale en concertation avec le tueur. Son attachante présence (quasi omniprésente) permettant notamment d'instaurer un certain suspense et une densité psychologique à travers ses fêlures morales frappées d'amnésie et de désir du dépassement de soi. Notamment pour la 1ère partie thérapeutique et ses rapports empathiques avec son entourage familial mais aussi policier (même si suspicieux du point de vue d'une lieutenant sur le qui vive quant à ses allégations farfelues). On peut enfin saluer ses crises d'hystéries horrifiées, ses hurlements stridents magnifiquement expressifs tant l'actrice insuffle un vénéneux charisme féminin de par sa tenue vestimentaire ténébreuse et son regard subtilement épeuré que Wan transfigure par la maestria de sa caméra scrupuleuse, à l'écoute de ses souffrances morales traduites dans l'impuissance. 


Basket Case.
A la fois efficacement étrange et inquiétant (en dépit de son classicisme liminaire pour autant maîtrisé avec savoir-faire comme de coutume chez Wan), puis complètement vrillé, singulier, alerte et incroyablement fascinant auprès de son imagerie horrifiante nous agressant les mirettes grâce au parti-pris décomplexé de Wan en totale roue libre (pour le plus grand bonheur des fans de Bis en ébullition), Malignant se décline en tour de montagne russe qu'il est impossible d'interrompre dès le rouage amorcé. James Wan parvenant comme par miracle par son degré de folie incorrigible à conjuguer délire saugrenu et réalisme brut de décoffrage à travers l'audace d'un twist anthologique érigé en bombe à retardement. Déjà culte, assurément, tout du moins chez les fans de délire insensé, qui plus est fier de l'être. 

*Bruno
27.08.22. 2èx

samedi 11 septembre 2021

L'alter Ego


Réalisé par Monsieur K, scénarisé par Näamlock. 2021. France. Bande dessinée éditée par ARTUS FILMS.

En exclusivité, je me permets aujourd'hui cet écart d'y chroniquer une bande-dessinée hexagonale. Les raisons premières ? Parce que le scénariste Näamlock est un proche ami que je côtoie via le réseau Facebook, parce que j'apprécie particulièrement la boite éditrice Artus Films et parce que je suis friand de BD horrifico-fantastique, tout du moins lorsque je parviens facilement à m'immerger dans l'aventure dépaysante. Tant et si bien que je suis loin d'être un spécialiste en la matière (à contrario de ma passion indéfectible pour le ciné), et que donc je tenterai ici de dévoiler mes petites impressions subjectives avec modestie, et ce en tenant compte de mon inculture pour la BD et l'architecture des dessins.


Sans trop déflorer l'intrigue, L'Alter Ego nous dépeint lors d'une scrupuleuse attention chronologique (chaque case est équivalente à la journée quotidienne de tel ou tel personnage), la nouvelle relation amoureuse entre Martin, fraîchement séparé, avec Alice rencontrée via le site de rencontres Meetic. Alors que celui-ci tente difficilement de monter le projet cinématographique d'un Giallo, Alice est peu à peu délaissée au moment d'y apprendre une triste nouvelle. Quand bien même, Hélène, fille de Martin, tente vainement de l'interpeller de par son absence paternelle. Ainsi, ce qui surprend fissa lors de la lecture monochrome de L'Alter Ego c'est le soin consciencieux imparti à sa structure narrative littéralement hypnotique. C'est simple, chaque case charpentée ne déborde jamais pour ce concentrer sur le développement de l'intrigue au moment de donner chair à ses personnages remarquablement dessinés. C'est aussi la grande force et l'intérêt du récit tentaculaire que d'y caractériser avec ambiguïté ce  triangle fragile lors de leurs relations humaines en perdition. Tant auprès de Martin toujours plus irritable à tenter d'approcher un producteur et parfaire son projet, d'Alice en détresse affective que de la jeune Hélène aussi délaissée, tendrement parlant. 


Ceux-ci ayant comme point commun une contrariété morale anxiogène à mi-chemin de la dépression. Et ce sans que cela nous soit dévoilé de manière explicite. Naamlock se motivant farouchement à les rendre énigmatique au fil d'un récit reptilien où plane les ombres de Nicolas Roeg, d'Hitchcock et de David Cronenberg. Car les références ciné sont plutôt nombreuses lors du cheminement imprévisible des personnages, à l'instar de la chambre de Martin ornementée d'affiches de classiques du Fantastique. Mais ce qui fascine et captive lors de ce récit à suspense effilé émane de son ambiance d'étrangeté sous-jacente alors qu'à d'autres moments on se confronte à des situations dérangeantes autrement explicites (Spoil ! je songe aux désagréments corporels ! Fin du Spoil). Le récit adoptant par ailleurs un revirement radical lors de sa seconde partie (nouvelle teinte monochrome en sus !) puisque établi cette fois ci du point de vue de la fille de Martin, Hélène en position d'investigatrice en herbe. Un 2è acte plus morbide, détaillé, frénétique et barré prouvant que l'ambition des auteurs (Naamlock et le dessinateur Monsieur K) était de nous plonger dans une sorte de vertige filandreux, un cauchemar moral assez perméable bien que ce soit par moments confus (notamment en y infiltrant le genre espionnage). 


Une allégorie de l'amour consumériste.
Perfectible, déstabilisant et déconcertant (car il manque un "je ne sais quoi" pour l'estampiller "incontournable" du genre), hypnotique, ombrageux et ramifié auprès de son scénario sournois soumis à la psychologie torturée de ses personnages, à l'instar du canard hallucinatoire que Martin perçoit lors de ses inquiétantes névroses, l'Alter Ego ne laisse indifférent le lecteur pris dans la tourmente d'une débâcle davantage malsaine, viscérale, persifleuse, nécrosée.

L'album est en vente à partir du 22 octobre 2021 au prix de 14.90 Euros. 

*Eric Binford

jeudi 9 septembre 2021

Borrower, le voleur de têtes

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site perdudansla5edimension.com

"The Borrower" de John Mc Naughton. 1991. U.S.A. 1h35. Avec Rae Dawn Chong, Don Gordon, Tom Towles, Antonio Fargas, Neil Giuntoli, Larry Pennell. 

Sortie salles U.S: 25 Mai 1991

FILMOGRAPHIE: John Mc Naughton est un réalisateur américain, né le 13 Janvier 1950 à Chicago. 1984: Dealers in Death. 1986: Henry, portrait d'un serial killer. 1991: Sex, drugs, Rock and Roll. 1991: The Borrower. 1993: Mad Dog and Glory. 1996: Normal Life. 1998: Sexcrimes. 2000: Condo Painting. 2001: Speaking of sex. 2004: Redliners. 2009: Backstabbers. 2013: The Harvest.


Inédit en salles chez nous, Borrower est une pochette surprise horrifique de la part de John Mc Naughton, réalisateur du mythique Henry, portrait d'un Serial-Killer. Autrement délirant, décalé et décomplexé, Borrower empreinte la satire sociale avec un réalisme cartoonesque vitriolé lorsqu'un extra-terrestre est condamné à errer sur terre après avoir été jugé de crimes par ses pairs. Mais contraint de changer de tête pour pouvoir rester en vie (à un moment donné, sa tête explose soudainement !) il doit donc décapiter ses victimes au fil de son cheminement initiatique sur terre. Alors que la jeune inspectrice Diana Pierce et son co-équipier Charles Krieger enquêtent sur cette série de crimes sauvages, un autre tueur (cette fois-ci terrien) échappé de l'hôpital est sur le point de se venger. Hélas, sur ce dernier point de digression, le réalisateur l'abandonne en cours de route si bien que l'on finit par omettre ce personnage trivial en dépit de sa réapparition soudaine cependant vite sacrifiée. Série B horrifique du Samedi soir, comme le souligne son prologue déjanté proche d'une série Z (la sentence juridique puis le corps à corps entre un E.T insecte et son prisonnier banni de chez lui), Borrower cumule les effets-chocs et rebondissements musclés à rythme métronome. 


Dans la mesure où notre E.T est contraint de s'approprier une nouvelle tête toutes les 10/15 minutes (le rythme s'accélérant progressivement au fil du récit davantage vrillé !), prétexte pour Mc Naughton à se défouler sur les séquences chocs particulièrement gorasses et convaincantes. Les FX et maquillages demeurant suffisamment crédibles pour croire sans peine à la nouvelle métamorphose de l'E.T que chaque acteur endosse avec une mine patibulaire infaillible dans leur posture marginale atone. Sorte de SDF insalubre dont personne ne prête attention à travers leur apparence de laissé-pour-compte. Et s'il faut un petit temps d'adaptation à se familiariser auprès des errances urbaines de notre E.T durant la 1ère demi-heure assez ordinaire, la suite s'avère plus intéressante et quelque peu captivante lorsque le réalisateur accorde beaucoup d'importance à la faune urbaine à la fois désaxée, décérébrée et incivilisée que côtoie l'étranger stellaire au sein d'une société de stupre sevrée à la pop-culture, au sexe, à la criminalité et à la drogue. Quand bien même Mc Naughton boucle son récit en suspens de manière à la fois (sciemment) bâclée et désordonnée en renouant avec l'exploitation d'une série B ludique à l'ambiance survoltée. 


Drôle de farce récréative donc que ce Borrower, voleur de tête que John Mc Naughton façonne avec une certaine efficacité (passée la 1ère demi-heure) en conjuguant l'horreur sociale et cartoonesque avec un esprit caustique assez probant. 

*Eric Binford
3èx

mardi 7 septembre 2021

Supergirl

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Jeannot Szwarc. 1984. U.S.A/Angleterre. 2h04. Avec Helen Slater, Faye Dunaway, Brenda Vaccaro, Peter Cook, Hart Bochner, Peter O'Toole, Mia Farrow, Simon Ward.

Sortie salles France: 10 Octobre 1984. U.S: 21 Novembre 1984

FILMOGRAPHIE: Jeannot Szwarc est un réalisateur français, né le 21 Novembre 1939 à Paris. 1973: Columbo: adorable mais dangereuse. 1975: Les Insectes de Feu. 1978: Les Dents de la Mer 2. 1980: Quelque part dans le temps. 1983: Enigma. 1984: Supergirl. 1985: Santa Claus. 1987: Grand Larceny. 1988: Honor Bound. 1990: Passez une bonne nuit. 1991: La Montagne de Diamants. 1994: La Vengeance d'une blonde. 1996: Hercule et Sherlock. 1997: Les Soeurs Soleil.


Pourquoi tant de haines ?
Massacré par la critique dès sa sortie et boudé par le public si bien qu'il se solda par un inévitable échec commercial, Supergirl ne méritait pas tant de mépris tous azimuts. Car s'il faut bien avouer que Jeannot Swarc a bel et bien conçu un nanar de luxe à savourer indubitablement au second degré, Supergirl demeure aujourd'hui beaucoup plus charmant, attachant, stimulant, pétillant à travers ses tentatives intègres de nous faire rêver en mode artisanal. A l'instar des premiers vols expérimentaux de notre super-héroïne blonde n'ayant rien à envier à ceux de son cousin Superman (que le désormais légendaire Christopher Lee marqua de son empreinte) tant le souffle féerique retranscrit à l'écran nous gratifie la vue. Alors, ok, du point de vue du récit ultra naïf se résumant à l'affrontement redondant entre une sorcière des temps modernes et Supergirl se disputant l'enjeu d'un prince charmant (un jeune jardinier touché par la flèche empoisonnée de Cupidon - ou plutôt de Selena ! -), Supergirl ne s'embarrasse guère de subtilité pour contenter avant tout un public jeune plus sensible à leurs crépages de chignon que leurs parents non dupes de tant de naïveté imbibée de romance à l'eau de rose et de bons sentiments. 


Pour autant, et raison pour laquelle Supergirl est à mon sens destiné à un public finalement FAMILIAL, le spectacle fantaisiste est scandé du dynamisme des scènes d'actions plutôt bien foutues avec ses FX tactiles, et de la spontanéité des personnages pleinement investis dans leur rôle respectif (au point parfois de jouer l'outrance pour certains d'entre eux). Mention majeure à l'illustre Faye Dunaway résolument habitée par son rôle de méchante tant l'actrice prend son rôle très au sérieux à travers l'artillerie de ses supers pouvoirs occultes qu'elle projette contre sa rivale 2h00 durant. Imperturbable et impassible, élégante et raffinée en mode démonial, Faye Dunaway vole donc effrontément la vedette à tout son entourage. Et ce en dépit de la néophyte Helen Slater que je trouve aussi convaincante à travers ses expression candides, ses interrogations morales de super-héroïne en herbe peu à peu motivée par le sens de la justice, de la bravoure et de l'initiation amoureuse. Quand bien même le charme qu'elle nous suscite innocemment à l'écran dépend aussi de la douceur de ses yeux bleus et de la blondeur de son brushing dans sa rutilante panoplie rouge et bleue. On n'en dira pas tant de la présence incongrue de Brenda Vaccaro en adjointe gouailleuse, alter-ego primaire de Selena faisant office de faire-valoir risible, bien que la pilule passe un peu auprès de sa bonne humeur expansive. Et je ne parle même pas du pauvre jardinier qu'Hart Bochner incarne avec une bonhomie puérile (c'est peu de le dire pour les séquences romantiques les plus nunuches !) dans sa fonction de victime intoxiquée par le sérum de l'amour. Mais on lui pardonne bien tant l'acteur atone se prête volontiers au jeu avec esprit bonnard. 


Un divertissement familial bonnard, entre naïveté attendrie, facéties candides et féerie salvatrice. 
Inévitablement maladroit, bancal et parfois ridicule sans toutefois jamais nous irriter ou nous blaser, Supergirl est un plaisir innocent comme on en voit très peu de nos jours. Un gros spectacle raté plein de charme, de fantaisies, d'actions et d'humour involontaire sous l'impulsion d'un casting hybride se prêtant au jeu de la bande dessinée live avec franchise décomplexée. Et rien que pour la présence de l'attachante Helen Slater très à l'aise en super-héroïne novice, Supergirl mérite qu'on y replonge,  nostalgie émotionnelle aidant faisant parfois éclore une féerie divine (ses 1ers vols aériens sur Terre, oui j'insiste !). 

*Eric Binford
3èx