mardi 30 juillet 2013

GENERATION PERDUE (The Lost Boys)

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site hollywoodgothique.com

de Joel Schumacher. 1987. U.S.A. 1h37. Avec Jason Patric, Corey Haim, Kiefer Sutherland, Corey Feldman, Jamison Newlander, Jami Gertz, Edward Herrmann.

Sortie salles France: 13 Janvier 1988. U.S: 31 Juillet 1987

FILMOGRAPHIE: Joel Schumacher est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 29 Août 1939 à New-York.
1981: The Incredible Shrinking Woman. 1983: SOS Taxi. 1985: St Elmo's Fire. 1987: Génération Perdue. 1989: Cousins. 1990: l'Expérience Interdite. 1991: Le Choix d'Aimer. 1993: Chute Libre. 1994: Le Client. 1995: Batman Forever. 1996: Le Droit de Tuer ? 1997: Batman et Robin. 1999: 8 mm. 1999: Personne n'est parfait(e). 2000: Tigerland. 2002: Bad Company. 2002: Phone Game. 2003: Veronica Guerin. 2004: Le Fantôme de l'Opéra. 2007: Le Nombre 23. 2009: Blood Creek. 2010: Twelve. 2011: Effraction. 2013: House of Cards. Prochainement: Breaking News.


Conçu à la base comme un divertissement pour ados, Génération Perdue réussit à dépasser son simple statut de commande grâce à la modernité de sa variation vampirique plutôt rock and Roll. Si bien qu'en l'occurrence, nos vampires se caractérisent par de jeunes marginaux au look rebelle, profitant de leur éternelle jeunesse dans une insouciance libertaire. Phénomène culte chez les générations 80 et 90 rehaussé d'un succès d'estime en salles, Génération Perdue semble défier les aléas du temps tant il préserve encore aujourd'hui la même fraîcheur par le biais de son ambiance crépusculaire de fête foraine. Lucy Emmerson et ses deux jeunes fils débarquent dans la demeure familiale de son père en Californie. Durant une soirée estivale, l'aîné fait la rencontre de la ravissante Star, une jeune fille tributaire d'un groupe de rebelles de sinistre renommée. Littéralement sous le charme, cette rencontre inopinée va totalement bouleverser la vie de Michael quand celui-ci va devoir se mesurer aux défis délétères que lui propose David, leader du clan. De retour chez lui, Michael semble souffrir du syndrome du vampire. Soutenu par une bande son rock endiablée et le fameux thème planétaire "Cry Little Sister", Génération Perdue condense une foule de qualité esthétiques et techniques pour séduire le spectateur avec un ton original pour l'époque.


Pour redorer du sang neuf au thème vampirique et ainsi convaincre la nouvelle génération, Joel Schumacher s'emploie à détourner certains codes et décors archaïques (telle la manière dont les vampires sont contraints de sommeiller, leur façon de se déplacer dans les airs et de s'agripper aux victimes, mais aussi leur tanière confinée sous une grotte au décorum de flibustier) et les exploitent dans un contexte moderne de festivités où la jeunesse en villégiature s'épanouie chaque nuit d'été. Soin formel d'une photographie flamboyante, réalisation alerte fourmillant de trouvailles visuelles, action trépidante influencée par la bande dessinée (trois de nos fervents lecteurs vont reproduire les armes de combat et s'inspirer de certaines règles de conduite entrevues dans leur revue afin de démasquer le chef des vampires !), point d'orgue très spectaculaire (on se surprend aussi de la qualité des fx explosifs !) et surtout étude caractérielle d'adolescents débrouillards, redoublant de pugnacité pour contrecarrer l'hostilité des vampires. L'étonnante réussite du film est notamment impartie au caractère crédible des enjeux de l'histoire. Sans jamais sombrer dans le ridicule, les péripéties que nos héros juvéniles perpétuent avec bravoure et audace sont établies dans une éthique de respect pour les valeurs familiales et la sauvegarde d'un amour en perdition (la relation romanesque de Michael et Star est compromise par leur statut de demi-vampire !). Le jeu naturel de chacun des comédiens (Kiefer Sutherland, absolument délectable dans le rôle insidieux du vampire intraitable, Jami Gertz se révèle devant nos yeux avec une beauté sensuelle ensorcelante et Jason Patric insuffle une présence charismatique quasi animale !) renforce inévitablement son capital attachant. Qui plus est, les seconds rôles attribués aux ados dégourdis ne font jamais preuve d'outrance et de trivialité dans leurs agissements utopiques car ils témoignent d'une naïveté humaine spontanée.


Sous l'égide d'un réalisateur aussi inégal et impersonnel, Génération Perdue avait de quoi sombrer dans le produit aseptique pour rapidement prendre la poussière d'une relique. Mais grâce à la probité de Schumacher, ce divertissement artisanal pétri de fraîcheur, de fantaisies, d'actions fantastiques et de romance transcende l'ornière. Son irrésistible pouvoir de séduction émanant notamment des étreintes charnelles des amants éternels nous épanouissant au rythme du tube lyrique "Cry Little Sister" de Gerard McMann !

30.07.13. 4èx
Bruno Matéï

vendredi 26 juillet 2013

L'ASCENSEUR (De Lift). Grand Prix à Avoriaz 1984.


                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site notrecinema.com

de Dick Maas. 1983. Hollande. 1h35. Avec Huub Stapel, Willeke van Ammelrooy, Josine van Dalsum, Liz Snoyink, Wiske, Sterringa, Huib Broos, Pieter Lutz, Paul Gieske.

Sortie salles France: 22 Février 1984. U.S: 4 Juillet 1985

FILMOGRAPHIE: Dick Maas est un scénariste, réalisateur, producteur et compositeur hollandais né le 15 Avril 1951 à Heemstede (Pays-Bas). 1977: Picknick. 1977: Adelbert. 1981: Rigor Mortis. 1983: L'Ascenseur. 1986: Les Gravos. 1988: Amsterdamned. 1992: Flodder in Amerikia ! 1995: Les Lavigueur 3: le retour. 1999: Issue de secours. 2001: L'Ascenseur, niveau 2. 2003: Long Distance. 2004: Zien (video). 2010: Saints.


En 1984, une petite production hollandaise d'un jeune réalisateur méconnu décroche le prestigieux Grand Prix au Festival d'Avoriaz. Bien que décrié par la plupart des cinéphiles qui auraient plutôt privilégié des oeuvres plus probantes comme Christine, Dead Zone (même s'il se voit décerner 3 prix secondaires !) ou encore le Dernier Testament, l'Ascenseur trouve quand même son public dans les salles obscures si bien qu'il remporte un joli succès commercial. Cet engouement inattendu pour cette série B modeste est surtout favorisé par l'originalité de son concept lorsque l'ascenseur d'un immeuble résidentiel commet des actes meurtriers envers les quidams infortunés. Cette idée saugrenue, voire ridicule, est pourtant sauvée par l'ironie macabre du cinéaste multipliant incidents meurtriers dans un sens effréné de l'efficacité allié à son thème alarmiste: la technologie organique. A l'instar de cet aveugle trébuchant maladroitement dans le vide après avoir appuyé sur le bouton pour se rendre à l'étage désiré. Ou encore lorsque le gardien se retrouve la tête coincée entre deux volets d'ascenseur alors que la cage commence subitement à descendre pour là lui arracher ! Il y a aussi une autre séquence anxiogène de par son climat claustrophobe quand deux couples éméchés vont se retrouver piégées dans l'enceinte de l'ascenseur pour y être asphyxiés.


Le scénario délirant (il y est question de micro puces douées de vie organique se régénérant d'après la machine d'un ordinateur !) s'attache donc à nous décrire l'investigation d'un dépanneur et d'une journaliste, déterminés à résoudre la mystérieuse défaillance technique empêchant la fonctionnalité ordinaire d'un ascenseur. Outre l'inanité des rapports conjugaux entre le héros et sa femme (leur mésentente s'avère peu crédible lorsque le mari impassible tente de lui réfuter son adultère avec sa collègue journaliste), le film véhicule un intérêt constant pour escompter la résolution d'une énigme débridée pointant du doigts les dangers de technologies innovantes. Sur ce point, on peut d'ailleurs souligner l'avant-garde de son thème d'anticipation si bien qu'il préfigure l'inoculation des puces électroniques en interne du corps humain (aujourd'hui l'identification d'un animal domestique peut-être imprimée sous la peau). On peut aussi évoquer dans un avenir proche les nouvelles lois envisageables auquel les puces seraient imposées dans le corps humain pour déjouer la progression d'une maladie (ce qu'évoque l'un des protagonistes lors de son analogie avec les puces organiques !).


De par son concept insensé et le caractère à la fois modeste et attachant des protagonistes, l'Ascenseur constitue une série B ludique dont le savoir-faire technique du réalisateur (les séquences chocs inventives, intenses et sardoniques se succèdent brillamment avec un sens du cadrage) renforce son capital irrésistiblement bonnard. 

RécompenseGrand Prix au Festival du Film Fantastique d'Avoriaz en 1984

*Bruno
26.07.13.
6èx


jeudi 25 juillet 2013

Litan, La Cité des Spectres Verts. Prix de la Critique à Avoriaz, 1982.

                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site kebekmac.blogspot.com

de Jean Pierre Mocky. 1981. France. 1h28. Avec Jean-Pierre Mocky, Marie José Nat, Nino Ferrer, Marysa Mocky, Bill Dunn, Georges Wod, Dominique Zardi.

Sortie salles France: 24 Février 1982

FILMOGRAPHIE: Jean Pierre Mocky (Jean-Paul Adam Mokiejewski) est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur français, né le 6 Juillet 1933 à Nice. 1959: Les Dragueurs. 1960: Un Couple. 1961: Snobs ! 1962: Les Vierges. 1963: Un Drôle de Paroissien. 1964: La Cité de l'indicible peur. 1965: La Bourse et la Vie. 1967: Les Compagnons de la Marguerite. 1969: La Grande Lessive. 1970: l'Etalon. 1970: Solo. 1971: l'Albatros. 1972: Chut ! 1973: l'Ombre d'une Chance. 1974: Un Linceul n'a pas de poche. 1975: l'Ibis Rouge. 1976: Le Roi des Bricoleurs. 1978: Le Témoin. 1979: Le Piège à Cons. 1981: Litan. 1982: Y'a t'il un français dans la salle ? 1983: A mort l'Arbitre. 1985: Le Pactole. 1986: La Machine à découdre. 1987: Le Miraculé. 1987: Agent Trouble. 1987: Les Saisons du plaisir. 1988: Une Nuit à l'assemblée nationale. 1988: Divine Enfant. 1990: Il gèle en enfer. 1991: Mocky Story. 1991: Ville à Vendre. 1992: Le Mari de Léon. 1992: Bonsoir. 1995: Noir comme le souvenir. 1997: Robin des Mers. 1997: Alliance cherche doigt. 1998: Vidange. 1999: Tout est calme. 1999: La Candide. 2000: Le Glandeur. 2001: La Bête de Miséricorde. 2002: Les Araignées de la nuit. 2003: Le Furet. 2004: Touristes, oh yes ! 2004: Les Ballets Ecarlates. 2005: Grabuge ! 2006: Le Deal. 2007: Le Bénévole. 2007: 13 French Street. 2011: Les Insomniaques. 2011: Crédit pour tous. 2011: Le Dossier Toroto. 2012: Le Mentor. 2012: A votre bon coeur, mesdames. 2013: Dors mon lapin. 2013: Le Renard Jaune.


Des masques, de la musique et des danses : dans la ville de LITAN chaque année, on fête ainsi les morts.
Mais cette année là...

Récompensé du Prix de la Critique à Avoriaz en 1982 (mais de l'aveu du réalisateur sifflé par Brian De Palma et John Boorman durant une représentation  !), Litan est l'un des rares films de Jean Pierre Mocky à avoir su traiter le genre fantastique avec une ambition toute spirituelle. Le pitchDurant la fête de la saint Litan, un couple se retrouve impliqué dans une série d'évènements mystérieux et meurtriers. Plongés dans une folie incontrôlée, les habitants de cette cité montagneuse semblent être victimes d'une machination scientifique révolutionnaire. Athée mais persuadé que l'âme perdure au delà de la mort, Jean Pierre Mocky nous illustre ici un rêve fantasmatique aux allures de carnaval macabre. Baignant dans l'atmosphère irréelle d'un cadre naturel montagneux nappé de brouillard, le réalisateur accorde un soin formel à peaufiner ses décors diaphanes de cimetière gothique, de grotte humectée ou d'hôpital délabré, quand bien même des villageois affublés de masques morbides sèment la zizanie parmi la foule hagarde.


Ainsi, le mystère de Litan semble émané d'une rivière jalonnée de feux-follets depuis qu'un séisme aurait peut-être libéré un minerais inconnu dissout dans l'eau. Au sein de cette fête des morts, il y a aussi les sinistres expérimentations d'un scientifique capable de démystifier les secrets inavoués de l'après-mort. Avec un désir prégnant de nous immerger dans un rêve insolite de bal costumé dénué de sens et de raison, Jean Pierre Mocky s'interroge sur le mystère insondable de la mort. Alors qu'un couple est témoin d'étranges phénomènes, telles ces disparitions et meurtres inexpliqués et l'avènement de cadavres hébétés, le secret de Litan semble s'éclaircir après les déclarations d'un revenant récalcitrant ! Pour se faire, pour l'idéologie du réalisateur, pas d'enfer ni de dieu après la mort mais une âme errante assoupie dans un rêve attendant le moment propice de s'y libérer. "Nous rêvons votre vie et quand notre rêve s'arrête alors vous mourrez", dira l'un des sujets expérimenté sous hypnose ! La réflexion métaphysique d'une mise en abyme (un rêve dans un rêve) est donc évoquée, la lutte de deux ombres dans un même corps, à moins que nous ne sommes que le songe d'une âme assoupie se donnant libre choix d'endiguer notre rêve à tous moments ! C'est d'ailleurs par un rêve prémonitoire vécu par l'héroïne que le film amorce son fantasme pour s'y matérialiser face à notre témoignage ! Ainsi, nous sommes donc peut-être le fruit d'une expérience d'un alchimiste créateur !


Le carnaval des âmes
Délire baroque à l'imagerie païenne saisissante, farce macabre où les morts sont détroussés de leur âme par une eau rocheuse ou disséquées par un médecin mystificateur, Litan intrigue, déroute et fascine pour nous plonger dans le mystère le plus abyssal de notre existence: l'au-delà de la mort. De par son pouvoir d'envoûtement prédominant et sa mélodie orchestrale entêtante, on peut aisément concéder que cette perle rare reste l'une des plus belles réussites fantastiques pour un genre si boudé et peu exploré dans l'hexagone. Un authentique film culte en somme à l'aura indicible prégnante. 

* Bruno
04.03.22. 4èx
25.07.13. 

Récompense: Prix de la Critique au Festival International du film fantastique d'Avoriaz en 1982.

Dormir et rêver...
C'est comme si on flottait, on sent la présence des autres morts autour de soi... Pas de ciel, pas d'enfer, rien... Rien, vous êtes là et vous attendez, quelque fois vous rêvez mais ensuite le rêve s'arrête.. Vous attendez que les vivants meurent et il nous rejoignent dans notre rêve... Nous rêvons votre vie et quand notre rêve s'arrête alors vous mourrez... Nous sommes comme deux ombres luttant pour un même corps, bientôt nous ne serons plus qu'une âme... Eric ne sera plus que le souvenir de quelqu'un que j'ai été il y a très longtemps... Quelqu'un qui était en vous, j'ai été plus fort que lui alors je me souviendrais de sa vie  comme si ça avait été la mienne...
                                          LITAN, LA CITE DES SPECTRES VERTS

mercredi 24 juillet 2013

ONLY GOD FORGIVES. Grand Prix au Festival du film de Sydney, 2013.

                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site flicksandbits.com

de Nicolas Winding Refn. 2013. France/Danemark. 1h30. Avec Ryan Gosling, Kristin Scott Thomas, Vithaya Pansringarm, Tom Burke, Ratha Pohngam, Byron Gibson.

Récompense: Grand Prix au Festival du film de Sydney, 2013.

Sortie salles France: 22 Mai 2013. U.S: 19 Juillet 2013

FILMOGRAPHIE: Nicolas Winding Refn est un scénariste, réalisateur, producteur et acteur danois, né le 29 septembre 1970 à Coppenhague (Danemark).
1996: Pusher. 1999: Bleeder. 2003: Inside Job. 2004: Pusher 2. 2005: Pusher 3. 2008: Marple - Nemesis (télé-film). 2009: Bronson. 2010: Valhalla Rising. 2011: Drive. 2012: Only God Forgives.


Après le succès inattendu Drive et la révélation Ryan GoslingNicolas Winding Refn enchaîne avec Only God Forgives, récompensé du Grand Prix à Sydney. Trip métaphysique quasi expérimental, le réalisateur prend ici le contre-pied de son polar antécédent pour nous livrer un ovni beaucoup moins accessible pour le spectateur lambda peu habitué aux ambiances hermétiques. Car ici, le réalisateur utilise le thème de la vengeance pour fignoler avant tout une mise en scène hyper travaillée dans des décors stylisés et picturaux. A la suite de la mort de son frère, Julian voit débarquer l'arrivée de sa mère lui suppliant d'assassiner le responsable. Cette doléance intransigeante d'une mégère castratrice va être le théâtre d'un règlement de compte sanglant entre Chang, officier de police véreux et Julian, célibataire introverti en quête existentielle. 


Pari audacieux que ce polar obscur noyé dans un rythme languissant mais transcendé par une ambiance envoûtante et des éclairs de violence soudains. Concerto emphatique sur la vengeance expéditive, Only God Forgives bouscule les habitudes du spectateur dans un spectacle onirique de sons et lumières. A l'intonation d'une partition musicale électrisante, les antagonistes ressemblent ici à des fantômes errants se provoquant communément par des regards mutiques puisque les bavardages laconiques laissent souvent place aux coups de sabres pourfendeurs et gunfights assourdissants ! Balade nocturne dans un Bangkok crépusculaire illuminé de néons polychromes où les prostituées ferment les yeux face à la barbarie, Only God Forgives chorégraphie la besogne de meurtriers renfrognés, ne cessant de se provoquer par des exactions vindicatives inutiles. La filiation, la paternité déchue sont ici abordés du point de vue de protagonistes meurtris d'un deuil infantile. En justiciers redresseurs de torts, ils souhaitent établir eux mêmes la sentence meurtrière afin d'apaiser leur rancoeur. Au milieu de cette confrontation sanglante, notre anti-héros Julian va devoir se mesurer à un ange de la vengeance indestructible. Compromis par la dictature tyrannique de sa mère (Kristin Scott Thomas est littéralement transie d'agressivité impassible !) et ayant vécu une enfance douloureuse (il avait préalablement assassiné son propre géniteur dans son pays natal !), Julian va devoir combattre la figure divine d'un ange exterminateur dans une éthique indécise en perte de repères. Car ici, notre gangster est un boxeur novice brisé par la solitude et la démission parentale mais néanmoins épris d'empathie auprès de la candeur des enfants martyrs. 


Sauvage et cruel, monotone et concis mais d'une beauté contemplative ensorcelante, Only God forgives privilégie l'expérience atmosphérique et le lyrisme envoûtant au sein d'une intrigue tortueuse imprimant la quête impossible d'une plénitude et de la repentance. On adhère et on se laisse bercer par la mélodie baroque ou on rejette en bloc cette ambition auteurisante de prôner avant tout une mise en scène prodige. Pour ma perception sensorielle, la balade funeste m'a laissé une trace indélébile dans l'esprit !
24.07.13
Bruno Matéï

mardi 23 juillet 2013

OBLIVION

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site nowhereelse.fr

de Joseph Kosinski. 2013. U.S.A. 2h04. Avec Tom cruise, Morgan Freeman, Olga Kurylenko, Nikolaj Coster-Waldau, Melissa Leo, Andrea Riseborough.

Sorties salles France: 10 Avril 2013. U.S: 12 Avril 2013

FILMOGRAPHIE: Joseph Kosinski est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 3 Mai 1974. 2010: Tron: l'héritage. 2013: Oblivion


Film d'anticipation grand public à la portée mystique universelle (renouer avec l'autonomie du souvenir dans une doctrine d'altruisme et de sentiment), Oblivion est un nouveau spectacle d'une opulence visuelle inédite au sein d'un univers terrestre clairsemé.

Envahie par une espèce extra-terrestre surnommée les "Scavs", la moitié de la terre fut décimée après une guerre nucléaire entre les humains et ces envahisseurs. Depuis, les survivants se sont réfugiés sur la planète Titan sous le contrôle d'un mystérieux ordinateur. 2077. A cause d'une loi interdisant de prémunir les souvenirs, Jack et son alliée Julia ont perdu la mémoire pour être installés dans une station afin de pouvoir surveiller la fiabilité des drones. Des engins volants capables d'extraire de l'eau de mer pour la transformer en énergie chez les humains expatriés sur Titan. Un jour, Jack est témoin du crash d'un vaisseau spatial. A proximité, il découvre parmi des caissons une jeune femme en hibernation au visage familier. Il décide de la ramener dans sa station sans savoir que son destin est subordonné à l'avenir de l'humanité. 


Avec une ambition esthétique singulière, le réalisateur Joseph Kosinski se rattache au soin formel pour authentifier les décors décharnées d'une terre dévastée par une guerre extra-terrestre. Un couple de geôliers se contentent de surveiller du haut de leur station la surface aride de la terre évacuée de toute présence humaine. Cet univers criant de réalisme blafard donne lieu à des décors de désolation de toute beauté, renforcés par les teintes désaturées d'une photographie argentée. En ce qui concerne l'aspect technologique d'une civilisation extra-terrestre, là aussi un soin scrupuleux est préconisé pour façonner des vaisseaux spatiaux circulaires au design immaculé ou encore des drones de combat aussi furtifs que précis dans leur cible ajustée. Avec l'illustre présence de Tom Cruise aux commandes, l'acteur livre avec conviction une présence héroïque pugnace accentuée d'une prise de conscience humaniste en quête identitaire. Si le scénario étroitement lié au clonage (thème emprunté à une métaphore sur la réincarnation) et à la réminiscence (notamment notre rapport affectif au souvenir) avait gagné à être perfectible, il ne manque pas de nous captiver pour sa structure ciselée privilégiant la densité romantique d'un couple en rédemption ainsi que leur responsabilité majeure d'un enjeu imparti à la survie de la Terre. Déployant par intermittence des séquences de combats aériens à couper le souffle, Joseph Kosinski allie aussi une action belliqueuse vers son point d'orgue crucial avant de renouer avec un lyrisme prude militant pour une réflexion spirituelle. Notamment le sens de la bravoure et du sacrifice afin de rendre honneur aux défunts, mais aussi notre dignité à prémunir la vie des futures générations (comment un homme peut-il mieux mourir qu'en affrontant les dangers ! Pour les cendres de ces ancêtres et les temples de ses dieux, déclarait le romain Orathius !).


Vivre et laisser mourir
Avec maîtrise technique et souci formel prégnant, Oblivion privilégie une belle place pour l'émotion lyrique (accord musical au souffle romanesque à l'appui !) avant de s'engager dans la virtuosité de quelques séquences homériques. L'intensité humaine qui émane des personnages conquérants ainsi que sa réflexion formulée à la dévotion des sentiments transcendent aisément l'aspect conformiste de son scénario. Ainsi, on garde en mémoire un spectacle d'une beauté épurée enchanteresse. 

23.07.13
Bruno 

lundi 22 juillet 2013

LA PEUR AU VENTRE (Running Scared)

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Wayne Kramer. 2006. U.S.A. 2h02. Avec Paul Walker, Cameron Bright, Vera Farmiga, Chazz Palminteri, Karel Roden, Johnny Messner, Ivana Milicevic.

Sortie salles France: 1er Mars 2006. 24 Février 2006

FILMOGRAPHIE: Wayne Kramer est un réalisateur, scénariste et monteur sud-africain, né en 1965 en Afrique du Sud.
1992: Blazeland. 2003: Lady Chance. 2006: La Peur au Ventre. 2009: Droit de passage.


Polar hard-boiled mené à un train d'enfer, La Peur au Ventre est un pur divertissement stimulé par une intrigue fertile en rebondissements (un peu trop parfois même) mais qui ne s'embarrasse pas de certaines ficelles grossières durant son cheminement trépidant. Durant un deal de came, une rixe sanglante éclate entre des gangsters et des flics ripoux provoquant la mort d'un des membres de la police. Afin d'éviter la prison et celle de ses alliés, Joey décide de planquer l'arme dans sa cave. Seulement, le camarade de son rejeton réussit à s'en emparer pour tenter de tuer son beau-père tyrannique. Par l'autorité de son leader, Joey ne possède que quelques heures de sursis afin de de retrouver l'arme du crime. 


Avec son prologue pétaradant déployant une chorégraphie d'échanges de tirs sanglants, La Peur au Ventre n'hésite pas à façonner une réalisation stylisée pour mettre en valeur l'esbroufe d'une ultra violence spectaculaire. Méchamment cinglant, ce polar brutal et palpitant véhicule une indéniable efficacité dans sa narration linéaire multipliant des revirements fortuits au creux d'une urbanisation lunaire livrée à la corruption. Si en cours de route, certaines invraisemblances se compromettent dans la facilité (les nombreuses mésaventures que Oleg doit traverser durant sa fugue, la facilité à laquelle Joey réussit à enfiler la blouse et récupérer la balle au sein du service hospitalier) et que son épilogue abuse d'une dramaturgie aussi inutile que simulée, le film n'en demeure pas moins captivant par sa vigueur effrénée . D'autant plus que le rôle principal imparti au bellâtre Paul Walker est un choix concluant puisque l'acteur véhicule une prestance plutôt viscérale dans sa stoïcité à provoquer ces adversaires. Anti-héros érigé sous la bannière du bad boy aux yeux bleux, notre comédien dégage une véritable intensité émotionnelle par son tempérament impétueux déclenchant parfois un héroïsme suicidaire. Dans le rôle de l'épouse maternelle, la charmante Vera Farmiga lui partage la vedette avec sincérité et nous surprend également par son tempérament réactionnaire d'une pulsion expéditive lorsqu'elle décide d'endiguer un couple de pédophiles. Enfin, dans la peau d'un ado maltraité en quête paternelle, le petit Cameron Bright grossit parfois le trait dans ses expressions de stupeur mais s'en tire tout de même honorablement par sa présence photogénique aussi flegme que taciturne.


Revolver
Polar brutal rondement mené par l'adrénaline d'actions intempestives, La Peur au ventre s'impose en excellent divertissement pour mettre en vedette une foule d'antagonistes à l'immoralité sardonique. Sa réalisation inventive (montage assidu et clippesque) et moderne (couleurs saturées, slow motion chorégraphié, séquence inscrite sur pause ou en déchronologie accélérée) ainsi que l'interprétation persuasive de Paul Walker (peut-être son meilleur rôle à l'écran !) nous permettent aussi de faire l'impasse sur quelques facilités fantaisistes. Enfin, à travers l'obsession passionnelle d'un des antagonistes pour son archétype chimérique, on appréciera l'hommage sincère adressé à une légende du western cher à Ford, John Wayne

22.07.13. 2èx
Bruno Matéï

vendredi 19 juillet 2013

7 JOURS A VIVRE (Seven days to live)

                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site schyzo-dead-house.purforum.com

de Sebastian Nemman. 2000. Allemagne/Tchecoslovaquie/U.S.A. 1h37. Avec Amanda Plummer, Sean Pertwee, Nick Brimble, Gina Bellmman, Sean Chapman, Eddie Cooper, Amanda Walker.

Sortie salles France: 9 Mai 2001

FILMOGRAPHIE: Sebastian Nemman est un réalisateur et scénariste allemand, né le 21 Juin 1968 à Lüneburg.
2000: 7 Jours à Vivres
2002: Das Jesus Video (télé-film)
2006: Hui Buh - Le Fantôme du château


Série B d'épouvante blindée de références aux classiques du genre (Amityville, Shining, la Maison près du cimetière, l'Au-dela), 7 Jours à Vivre nous refait le coup du couple maudit (ils viennent de perdre leur enfant à la suite d'un incident domestique) parti s'exiler dans une bâtisse bucolique en guise de deuil infantile. Au préalable, un inquiétant prologue nous avait établi la découverte macabre d'une femme ventripotente, retrouvée tuméfiée sur une chaise par ses voisins, alors qu'à proximité, son mari en état de choc s'est avachi sur le coin du salon.
Ca commence fort avec la mort d'un bambin étouffé par une guêpe qui s'était dissimulée dans son petit déjeuner. La séquence éprouvante et réaliste s'exacerbe un peu plus quand le paternel décide d'infliger à son rejeton une trachéotomie en désespoir de cause. C'est après ce décès brutal que le couple décide d'emménager dans une vieille demeure isolée, située à proximité d'un marais. Rapidement, d'étranges évènements ébranlent le quotidien d'Ellen. Sujette à des hallucinations, de mystérieux indices lui révèlent de manière chronologique qu'il ne lui reste que 7 jours à vivre. De son côté, son mari Martin devient de plus en plus irascible et démystifie la paranoïa de son épouse sur la disparition de leur fils. Elle décide alors de consulter un psychologue...


Modestement réalisé, 7 Jours à Vivre n'invente rien avec son pitch éculé lorgnant surtout du côté de Shining (Martin, écrivain en manque d'inspiration, est gagné par une folie incontrôlée !) et des atmosphères chères de Lucio Fulci. Sur ce dernier point, il faut saluer le soin esthétique imparti à sa photo sépia et surtout à son climat gothique imprégné de brume. Avec un évident souci formel, Sebastian Nemman fignole des images macabres d'une beauté picturale afin de renforcer l'aspect inquiétant d'une demeure isolée. L'architecture externe et son cadre naturel nous évoquent instinctivement celle de la Maison près du Cimetière, tandis que la cave nous rappelle l'Au-dela pour son épilogue voué aux fantômes putrides revenus ici d'un marais maudit ! En prime, les interprétations convaincantes d'Amanda Plummer et de Sean Pertwee renforcent une certaine densité psychologique dans leur déveine récursive et leur espoir de solidarité en perdition. Si l'intrigue balisée, non exempt de clichés, nous laisse un sérieux goût de déjà vu, sa structure narrative laisse tout de même planer un certain suspense. Et cela, jusqu'à la frustration de ces 20 dernières minutes plutôt prévisibles nous laissant sur notre faim par la faute d'un dénouement aseptique.


Indubitablement, 7 Jours à vivre ne laissera pas un souvenir impérissable auprès de l'amateur d'horreur à sensations fortes. Néanmoins, et à condition d'être indulgent, le soin accordé à son atmosphère palpable, la qualité de l'interprétation et la beauté de certaines images nous permettent de passer un moment ludique.  

19.07.13. 3èx
Bruno Matéï