lundi 31 août 2020

Le Cercle Rouge

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Jean-Pierre Melville. 1970. France/Italie. 2h22. Avec Alain Delon, André Bourvil, Gian Maria Volonté, Yves Montand, Paul Crauchet, Paul Amiot

Sortie sales France: 20 Octobre 1970

FILMOGRAPHIE: Jean-Pierre Melville, né Jean-Pierre Grumbach le 20 octobre 1917 à Paris et mort le 2 août 1973 à Paris, est un réalisateur et scénariste français. 1946 : Vingt-quatre heures de la vie d'un clown (court-métrage). 1947 : Le Silence de la mer. 1950 : Les Enfants terribles. 1953 : Quand tu liras cette lettre. 1955 : Bob le flambeur. 1959 : Deux hommes dans Manhattan. 1961 : Léon Morin, prêtre. 1962 : Le Doulos. 1963 : L'Aîné des Ferchaux. 1966 : Le Deuxième Souffle. 1967 : Le Samouraï. 1969 : L'Armée des ombres. 1970 : Le Cercle rouge. 1972 : Un flic.


- Quand les hommes, même s’ils s’ignorent, doivent se retrouver un jour, tout peut arriver à chacun d’entre eux, et ils peuvent suivre des chemins divergents ; au jour dit, inexorablement, ils seront réunis dans le cercle rouge. »

Chef-d'oeuvre du polar français portant la signature du maître Jean-Pierre Melville, Le Cercle Rouge est le dernier film auquel collabora Bourvil puisqu'il meurt 1 mois avant la sortie du film, le 23 Septembre 1970. Réunissant à l'écran 4 monstres sacrés parmi lesquels Alain Delon, Yves MontandBourvil, Gian Maria Volonte, Le Cercle Rouge demeure un grand moment de cinéma sous l'impulsion de ce prestigieux casting sobrement flegmatique. Alors que Corey vient tout juste de sortir de prison, il s'associe avec Vogel, un évadé de prison s'étant confiné dans son coffre de voiture durant son escapade, pour l'enjeu d'un casse du siècle. Pour ce faire, ils solliciteront notamment l'aide de l'ancien policier Jansen, aujourd'hui devenu alcoolique, supervisant l'opération, avec comme détail singulier, l'élaboration d'une balle en plomb pour tromper la logistique de surveillance. D'une durée excessive de 2h21, Le Cercle Rouge ne connait aucun temps mort de par la fluidité de sa mise en scène où rien n'est laissé au hasard et du jeu dépouillé des acteurs évidemment irréprochables. Avec une attention toute particulière pour la présence à contre-emploi de Bourvil.


Ce dernier se taillant une carrure de commissaire revanchard après que son prisonnier eut pris la poudre d'escampette par la fenêtre d'un compartiment ferroviaire. Ainsi, Bourvil ne cède à aucune prétention pour s'investir froidement dans la peau de ce commissaire plus retors qu'il n'y parait quand à l'évolution de l'intrigue et de sa stratégie offensive afin d'alpaguer les 3 cambrioleurs. Au-delà du souci chirurgical de son histoire soigneusement charpentée; Le Cercle Rouge véhicule une ambiance nonchalante comme on en voit plus dans le cinéma courant. De par son climat blafard saturé d'une météo tantôt pluvieuse, tantôt grisonnante, ce polar moite et sombre dégage une envoûtante atmosphère crépusculaire autour du charisme bourru de cette galerie de personnages à la fois impassibles et placides dans leur posture virile. A l'instar du parti-pris de Jean-Pïerre Melville de n'inclure aucune parole durant le fameux casse d'une durée de 25 minutes. Une séquence anthologique au suspense sobrement instillé. On peut d'ailleurs en dire autant du prologue mutique de 7 minutes que Melville transcende par le brio de sa mise en scène épurée. Quant à l'ironie injectée à l'intrigue criminelle, elle ne manque pas d'audace grâce au personnage du commissaire Mattei ayant comme mission de redorer sa réputation après avoir failli à sa fonction policière. On peut enfin souligner l'intensité de sa discrète partition musicale qu'Éric Demarsan compose dans une personnalité cafardeuse afin de mettre en exergue le climat ombrageux dénué de toute luminosité.


Un western moderne laconique.
Pur film d'ambiance, pesante et anxiogène, Le Cercle Rouge est un chef-d'oeuvre mortifère à la réalisation millimétrée et au casting au diapason. Un régal à chaque révision si bien que le temps ne peut rien y détruire.

*Bruno

vendredi 28 août 2020

Insidious

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de James Wan. 2010. U.S.A. 1h42. Avec Patrick Wilson, Rose Byrne, Barbara Hershey, Ty Simpkins, Andrew Astor, Lin Shaye, Leigh Whannell, Angus Sampson, Corbett Tuck.

Sortie en salles en France le 15 Juin 2011. U.S.A: 01 Avril 2011

FILMOGRAPHIEJames Wan est un producteur, réalisateur et scénariste australien né le 27 Février 1977 à Kuching (Malaisie), avant de déménager à Perth (Australie). 2004: Saw, 2007: Dead Silence, Death Sentence, 2010: Insidious. 2013: The Conjuring. 2013 : Insidious : Chapitre 2. 2015 : Fast and Furious 7. 2016 : Conjuring 2 : Le Cas Enfield. 2018 : Aquaman.

                                         

Tourné à l'ancienne, un tour de montagne russe au savoir-faire indiscutable de par son horreur 1er degré. 
Le pitch: Un jeune couple et leurs 3 enfants emménagent dans une nouvelle demeure attrayante. Un soir, l'aîné parti batifoler dans le grenier trébuche incidemment sur une vieille échelle. Mais durant la nuit, il sombre dans un profond coma auquel les médecins n'éprouvent aucune explication plausible à diagnostiquer les causes de sa pathologie. Très vite, des évènements surnaturels se manifestent dans la maison pour tourmenter leurs occupants.

Précédé d'une réputation élogieuse Outre-atlantique, produit par le réalisateur Oren Peli (responsable du documenteur Paranormal Activity qui traumatisa Mr Steven Spielberg et rendu hilare 98 % de la population mondiale !), Insidious est un épigone du fameux Poltergeist, classique du film de demeure hantée des années 80 en mode festif. Épaulé de son scénariste attitré Leigh WhannellJames Wan a récemment affirmé qu'il avait décidé de concocter ce métrage au budget restreint pour avoir l'opportunité d'être invité à un festival du genre fantastique. Sa devise: foutre les pétoches aux spectateurs en réinventant la peur au cinéma à travers des artifices référentiels ! Car sur le principe ludique d'attiser la peur par le biais d'un argument fantastique, Insidious empreinte irrémédiablement au canevas établi par le duo Spielberg/Hooper, responsables d'un des plus célèbres films de maison hantée à gros budget,  Poltergeist. Un enfant sombre dans le coma alors que des forces surnaturelles se déchaîneront sur leurs occupants. Les parents terrifiés décident rapidement d'emménager dans une autre demeure (habile alibi pour contourner les clichés) mais d'autres incidents encore plus néfastes vont à nouveau rendre leur vie impossible. 

                                      

Avec une économie de moyens, James Wan reprend donc les poncifs inhérents au film de demeure hantée fondés sur la peur, le suspense lattent et la surenchère. Dès le préambule, une ambiance angoissante savamment entretenue est distillée au compte goutte par l'habile exploitation des recoins nocturnes d'une vaste maison abritant une entité malfaisante. Le tout filmé à l'aide d'une caméra à l'épaule particulièrement véloce. Bruits étranges dans la nuit, chuchotements à travers le récepteur du bébé, hurlements d'enfant, apparitions fantomatiques de personnages moribonds, alarme de maison soudainement enclenchée ! Des situations rebattues et balisées comme s'il en pleuvait que l'amateur d'épouvante connaît sur le bout des ongles. Et pourtant, l'ambitieuse entreprise de James Wan est de consentir à se réapproprier de ces stéréotypes pour les réinventer de par le savoir-faire indiscutable de la mise en scène tributaire d'angoisse diffuse, fondée sur l'irrationnel d'éléments fantastiques. Ainsi, dénué d'outrance et de grand-guignol (ou alors si peu), la fonction essentielle de l'auteur est de nous embarquer dans un train fantôme à la fois trépidant, tendu, oppressant, terrifiant, affolant ! L'intrigue orthodoxe parvenant pour autant à fasciner, épaulé il est vrai de la conviction des interprètes communément charismatiques. Tant et si bien que les parents ne sont pas écervelés à rester cloîtrés chez eux pour se laisser appâter par l'artillerie des phénomènes paranormaux qu'ils s'empresseront fissa de quitter afin de s'installer dans un autre pavillon ! Privilégié de comédiens photogéniques (les parents interprétés par Patrick Wilson et Rose Byrn jouent la carte de la sobriété alors que les seconds-rôles demeurent parfaitement convaincants dans leur cohésion spirituelle), le réalisateur réussit d'autant plus à authentifier une histoire contemporaine de maison hantée très efficacement contée à travers sa machine à frisson fréquemment fructueuse. A l'instar de cette séquence irritante où le signal d'alarme de la maison s'enclenche pour délivrer un son assourdissant afin de déstabiliser les occupants. Toute la première partie est habilitée à nous piéger dans un climat d'angoisse génialement oppressant exacerbé de l'anxiété des protagonistes dubitatifs mais finalement contraints d'accepter l'improbable. Quand bien même avec (presque autant d')efficacité, la seconde partie plus alarmiste nous invite à un voyage flamboyant au coeur d'une quatrième dimension à la fois crépusculaire, parfois flippante ou inquiétante et débridée. Quand bien même James Wan enfoncera le clou de l'ultime terreur lors d'une vengeance d'outre-tombe dénuée de concession, quitte à décevoir une majorité de spectateurs férus du traditionnel Happy-end. Rare pour ne pas le souligner donc d'autant plus que la flippe demeure à nouveau au rendez-vous auprès d'une violence aussi cruelle que rigoureuse !

                                       

Poltergeist, la suite.
De par le vérisme des comédiens épatants d'expression mesurée à travers leur appréhension névrotique,  Insidious fait office de flamboyante réussite pour James Wan voué à honorer la série B dans son amour immodéré pour la hantise. La grande efficacité de sa réalisation découlant de son savoir-faire technique à captiver la curiosité du spectateur impliqué dans un train-fantôme fertile en chausse-trappes, jump scares (fort réussis et peu nombreux), apparitions spectrales et incidents surnaturels de plus grande ampleur. Quant au clin-d'oeil rétro imparti à un immense classique du genre, quel plaisir de retrouver Barbara Hershey, l'inoubliable victime de l'Emprise, en matrone mystique prenant enfin sa revanche sur les esprits frappeurs. Une véritable perle du genre à revoir d'urgence. 

*Bruno
15.02.24. Vostfr
28.08.20
26.04.11. 390 v

jeudi 27 août 2020

Heartless

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Philip Ridley. 2009. Angleterre. 1h54. Avec Jim Sturgess, Clémence Poésy, Noel Clarke, Timothy Spall, Eddie Marsan, Luke Treadaway

Sortie salles France: 27 Janvier 2011 (au Festival de Gérardmer). Angleterre: 21 Mai 2010

FILMOGRAPHIE: Philip Ridley est un réalisateur et scénariste anglais né le 29 Décembre 1964 à Londres. 1990: L'enfant miroir. 1995: Darkly Noon. 2009: Heartless.


C'est seulement dans l'obscurité que vous pourrez voir les étoiles - Martin Luther King.
Il aura fallu attendre plus de 15 ans pour voir débarquer le nouveau long du franc-tireur Philip Ridley, réalisateur anglais bousculant les règles dans des directions toujours inopinées. Tant et si bien que son dernier rejeton laisse une fois de plus sur le carreau de par son alliage des genres voguant de l'amour à la tendresse et de l'humour noir à l'horreur la plus crue si je me réfère à 2 scènes-chocs à la limite du supportable. Tortueux cauchemar d'un jeune solitaire reniant son physique au sein d'un monde primitif gangrené par la violence urbaine, Heatless dérange, trouble, émeut, bouleverse, impressionne et terrifie avec une intensité dramatique que l'on ne voit jamais venir. Tant et et si bien qu'il s'avère impossible de deviner la séquence suivante quant au chemin de croix du jeune Jamie combattant ses démons (internes et externes) avec une hargne désespérée. Ainsi, en s'inspirant du Mythe de Faust réactualisé dans un contexte d'ultra violence sociétale au sein d'une Angleterre livrée à l'anarchie délinquante, Philip Ridley nous dépeint de manière toujours aussi personnelle le parcours chaotique de Jamie défiguré par une tâche sur sa joue gauche mais qui pallie sa peur de déplaire et sa souffrance existentielle dans la passion des photos de charme. Introverti donc au sein d'un monde dont il ne saisit le sens, brimé et insulté par la majorité des rebelles de son quartier, Jamie signera un étrange pacte avec un inconnu (papa B) depuis la mort de sa mère brûlée vive par d'étranges assaillants au visage monstrueux. 


De par la présence encapuchonnée de ces derniers d'apparence reptilienne, le ton est donné. Heartless demeure marginal, hétérodoxe, décalé, fou, singulier, méchant, cruel, dérangeant et d'une extrême violence. Dans la mesure où le message du film tend à souligner les effets fructueux de la sauvagerie particulièrement gratuite afin que le monde puisse progresser et évoluer vers des horizons finalement rédempteurs. Bourré de métaphores donc, à l'instar du combat interne que nous pratiquons chaque jour pour se libérer de l'emprise du mal et de cette crainte paralysante de l'acceptation de soi, Heartless parvient à conjuguer terreur et émotion avec une fluide alchimie. Car profondément humain à travers sa splendide et fragile romance en herbe et son ode à l'amour paternel, déroutant et déstabilisant quant à l'impériosité de papa B manipulant à sa guise Jamie, Heartless insuffle un pouvoir de fascination méphitique au fil de sa dérive existentielle en proie aux insupportables dilemmes. Dans sa force émotive d'une fragilité démunie, Jim Sturgess oppose avec fébrilité ses sentiments contradictoires d'humanisme torturé et de révolte morale au sein d'un cheminement tortueux qu'il se créé lui même afin de trouver la vérité sur sa raison de vivre et d'être. Un rôle complexe en demi-teinte passant de victime apeurée à bourreau acharné dans sa labeur de sacrifier l'innocence sous la mainmise d'un démon perfide. Si bien qu'un monde sans violence n'est possible qu'après y avoir semé désordre et chaos. La terre ne serait alors qu'un purgatoire afin de tester notre résistance au Mal le plus couard nous promettant monts et merveilles.


Réflexion sur la peur de vivre, sur la difficulté de s'imposer aux autres et sur le dolorisme afin d'accéder au bonheur, exutoire existentiel au sein d'un cauchemar chimérique théorisant sur le pouvoir prédominant du Mal dans nos sociétés modernes (on peut d'ailleurs envisager que l'Enfer se trouve sur terre alors que sa conclusion salvatrice suppose que le paradis se situe au-delà des étoiles !), Heartless oppose ses thématiques sans jamais omettre la profonde tendresse de Jamie rêvant d'amour et de postérité d'après sa bouleversante fragilité morale. Du cinéma d'horreur auteurisant profondément actuel à travers l'impunité d'une violence contagieuse que Jamie combat incessamment dans son identité torturée. 

*Bruno
27.08.20
02.03.11. 110 v

RECOMPENSES: Meilleur Acteur (Jim Sturgess), Meilleure mise en scène, Meilleur réalisateur, Meilleur film au Festival de Fantasporto 2010.
Méliès d'Argent au Leeds International Film Festival 2009.

mercredi 26 août 2020

La Momie Sanglante

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Blood from the Mummy's Tomb" de Seth Holt. 1971. 1h34. Avec Andrew Keir, Valerie Leon, James Villiers, Hugh Burden, George Coulouris.

Sortie salles France: ? Angleterre: 14 Octobre 1971

FILMOGRAPHIESeth Holt (né le 21 juin 1923 et mort le 14 février 1971) est un réalisateur et un monteur britannique. 1958 : Nowhere to Go. 1961 : Hurler de peur. 1962 : La Blonde de la station 6. 1965 : Confession à un cadavre. 1967 : Le Coup du lapin. 1971 : La Momie sanglante.


Le pitch: Margaret est peu à peu possédée par le corps astral de la reine Tera, faute d'une main coupée que son père déroba en lui soutirant par cette occasion une bague rouge qu'il offrit à sa fille.

N'y allons pas par 4 chemins, La Momie Sanglante fait clairement parti des oeuvres les moins intéressantes de la Hammer en cette période déclinante des Seventies. Faute à une plate intrigue plutôt poussive (voire parfois même un tantinet confuse et sporadique), à des acteurs que l'on croiraient issus du cinéma Bis (en dehors de la ravissante et véritablement magnétique Valerie Leon de par l'intensité du regard azur) et à une réalisation relativement peu inspirée (pour ne pas dire dénuée d'âme). Ni bon ni mauvais, la Momie Sanglante demeure donc moyennement ludique auprès d'un public aussi fidèle qu'indulgent auprès la notoriété de la firme. Quand bien même ses quelques effets gores étonnamment réalistes éveillent un peu l'intérêt à travers des plaies d'égorgement du plus bel effet grossier (zoom à l'appui / rouge rutilant). On peut enfin relever son rythme un peu plus engagé lors de son ultime demi-heure (toujours) aussi curieuse qu'inquiétante. En tout état de cause, la magie gothique de la Hammer n'opère plus ici à travers cette commande vaguement inspirée d'une nouvelle de Bram Stoker. Il vaudrait même mieux revoir le très sympatoche Dans les Griffes de la Momie pour s'y consoler (ci-joint la chronique : http://brunomatei.blogspot.com/2017/09/dans-les-griffes-de-la-momie.html).


*Bruno

mardi 25 août 2020

Le Baiser du Vampire

                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

"The Kiss of the Vampire" de Don Sharp. 1962. Angleterre. 1h28. Avec Edward de Souza, Jennifer Daniel, Clifford Evans, Noel Willman.

Sortie salles France: 8 Juin 1964. U.S: 11 Septembre 1963

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Don Sharp est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur anglais d'origine australienne, né le 19 Avril 1922 à Hobart (Australie), décédé le 18 Décembre 2011.
1962: Le Baiser du Vampire. 1964: Les Pirates du Diable. 1965: La Malédiction de la Mouche. 1965: Le Masque de Fu-Manchu. 1966: Raspoutine, le moine fou. 1966: Opération Marrakech. 1966: Les 13 Fiancées de Fu Manchu. 1967: Le Grand Départ vers la lune. 1968: Les Champions. 1973: Le Manoir des Fantasmes. 1978: Les 39 marches. 1979: Le Secret de la banquise.


Honteusement méconnu pour une prod Hammer alors qu'une seconde jeunesse lui fut alloué en Dvd et en Blu-ray dans l'hexagone en 2017, Le Baiser du Vampire est un authentique bijou horrifique faisant office de meilleur archétype du mythe après l'inégalable le Cauchemar de Dracula et avec Dracula et les Femmes et les Maîtresses de Dracula (bien évidemment cela ne reste que mon jugement de valeur). Par ailleurs, c'est grâce à ce titre que Roman Polanski s'en inspira pour parfaire son parodique Le Bal des Vampires. Un parti-pris parodique dans la mesure où celui-ci détestait les oeuvres de la Hammer à son goût trop ridicules, orthodoxes, commerciales et obsolètes. Ca c'était pour la piqûre de rappel car lorsque l'on découvre pour la toute première fois Le Baiser du Vampire  (ce qui est mon cas et j'en ai bougrement honte ce soir au vu du flamboyant résultat !), on se rend de nouveau compte à quel point la firme possédait cet art inné de nous immerger dans leur univers gothique irrésistiblement magnétique sous la houlette d'un dandy vampire bourru. On peut d'ailleurs adouber le jeu aussi discret que nuancé de l'acteur Noel Willman plutôt convaincant à se tailler une carrure d'aristo aux canines affûtées en dépit de son charisme (évidemment) moins expressif et délétère qu'un Christopher Lee. Ainsi, si les clichés sont de rigueur dans le Baiser du Vampire  (surtout auprès de sa 1ère demi-heure plantant le décor de l'auberge autour d'hôtes venus s'abriter le temps d'une panne d'essence), le soin scrupuleux de la mise en scène, le jeu des acteurs (qui plus est inconnus afin de mieux s'identifier à eux) et ce prégnant climat de fascination macabre transcendent tout sur leur passage sous l'impulsion d'une rutilante recherche formelle. Tant auprès des décors domestiques fastueux, de sa nature forestière parfois tempétueuse, de la robe rouge de Marianne que du château poussiéreux renfermant à l'intérieur des trésors d'architecture gothique.


Ainsi donc, la trame a beau être éculée (un jeune homme mettra tout en oeuvre pour récupérer son épouse kidnappée au château du vampire, et ce avec l'appui d'un Van Helsing aussi torve qu'aviné - apparenté à Coffin Joe avec sa cape et son chapeau noir - !), sa manière structurée de nous la conter et surtout le talent auquel Don Sharp s'emploie pour donner chair à cet univers irréel nous enivre de charme. Tant et si bien que l'on croit à l'irréel sans jamais se plaindre de mauvaises questions incohérentes ou racoleuses. Qui plus est, et afin de se démarquer du chef-d'oeuvre Le Cauchemar de Dracula, il modernise un peu le contexte de l'époque (d'où l'apparition de la voiture en début d'intrigue, de l'agressivité d'antagonistes bonimenteurs et de l'idée du bal costumé résolument baroque) en émaillant son intrigue de trouvailles aussi originales qu'audacieuses. Tant auprès de son prologue cinglant que l'on ne voit pas arriver, de l'accoutrement limpide de la secte des vampires à travers leur toge blanche, du bal masqué dont Polanski reprendra l'idée emphatique et de son final plutôt sanglant faisant intervenir une armée de chauve-souris sous la mainmise de Zimmer invoquant les force du Mal sur le propre terrain des vampires. Enfin, si le Baiser du Vampire demeure aussi captivant et capiteux, il le doit notamment à sa tension dramatique émanant d'une galerie de personnages mesquins en collaboration perfide afin de piéger le couple de jeunes mariés. Et sur ces surprenants ressorts, il vaut d'ailleurs mieux taire le nom de certains protagonistes. Ainsi, en s'identifiant pleinement au désarroi alarmiste de Gérald (qui plus est à peine remis d'une gueule de bois !), s'évertuant à retrouver son épouse en alertant tout l'entourage, l'intrigue insuffle un suspense exponentiel d'après la lâcheté d'une complicité communautaire. Autant dire qu'ici les vampires confinés en groupe s'avèrent redoutablement impassibles, sournois, maléfiques et détestables dans leur égocentrisme commun.


Bourré de charme, vénéneux et insidieux à travers une facture macabre subtilement moderne, le Baiser du Vampire demeure un incontournable de la Hammer à (re)découvrir d'urgence ! 

*Bruno

lundi 24 août 2020

La Piscine.

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Mauvais-genres.com

de Jacques Deray. 1969. France/Italie. 2h02. Avec Alain Delon, Romy Schneider, Maurine Ronet; Janes Birkin, Paul Crauchet, Suzie Jaspard.

Sortie salles France: 31 Janvier 1969

FILMOGRAPHIE: Jacques Deray (Jacques Desrayaud) est un réalisateur français né le 19 février 1929 à Lyon, décédé le 9 août 2003 à Boulogne-Billancourt. 1960 : Le Gigolo. 1963 : Rififi à Tokyo. 1963 : Symphonie pour un massacre. 1965 : Par un beau matin d'été. 1966: Avec la peau des autres. 1966 : L'Homme de Marrakech. 1969 : La Piscine. 1970 : Borsalino. 1971: Doucement les basses. 1971 : Un peu de soleil dans l'eau froide. 1972 : Un homme est mort. 1974 : Borsalino & Co. 1975 : Flic Story. 1977 : Le Gang. 1978 : Un papillon sur l'épaule. 1980 : Trois hommes à abattre. 1982 : Les Secrets de la princesse de Cadignan (TV). 1983 : Le Marginal. 1983 : Credo (TV). 1985 : On ne meurt que deux fois. 1987 : Le Solitaire. 1987 : Maladie d'amour. 1989 : Les Bois noirs. 1991 : Contre l'oubli. 1991 : Netchaïev est de retour. 1993 : Un crime. 1994 : 3000 Scénarios contre un virus (segment « Arnaud et ses copains »). 1994 : L'Ours en peluche. 1998 : Clarissa (TV). 2000 : On n'a qu'une vie (TV). 2001 : Lettre d'une inconnue (TV).


"Un crime n'est véritablement un chef-d'oeuvre que si l'auteur reste impuni."
Chef-d'oeuvre imputrescible du cinéma français salué par la critique et le public, si bien qu'il cumule à sa sortie 2 342 059 entrées pour se hisser 9è au classement, La Piscine est autant un modèle de mise en scène qu'un film d'acteurs au diapason. Car en y réunissant les duos sacrés Alain Delon / Romy Schneider, et dans une moindre mesure Maurice Ronet / Jane Birkin, Jacques Deray dirige ces derniers à la perfection à travers leur complicité conjugale à la fois vénéneuse et sournoise qu'ils s'échangent au sein d'une idyllique villa Tropézienne. De par la force des regards tacites partagés entre désir, passion et jalousie y découlera un acte impensable de la part de l'un d'eux en proie à une rancoeur devenue ingérable. C'est donc une histoire de rivalité machiste que nous relate avec parcimonie Jacques Deray à travers les personnages trop orgueilleux de Jean-Paul (Delon) et Harry (Ronet), amis d'hier, ennemis d'aujourd'hui. Ainsi, à travers les expressions en berne des personnages témoins d'une situation criminelle improvisée, La Piscine s'enrichit d'une puissante intensité dramatique au fil des profils galvaudés du duo maudit Delon / Schneider transperçant l'écran à chacune de leur fébrile présence.


Des amants pris dans les mailles de la rupture conjugale sous l'impulsion des silences pesants du regard sentencieux. Car en y transplantant le drame psychologique dans le cadre d'une intrigue criminelle, La Piscine demeure une histoire d'amour maladive lorsque un couple s'adonne au jeu dangereux d'une séduction un brin provocatrice en guise de convoitise. Alain Delon se fondant dans le corps de l'amant en perdition avec une saisissante expression à la fois tranquille et contrariée eu égard de son geste irréparable d'une implacable cruauté. Un être assombrit par la défaite et la peur de perdre l'être aimé qui, peu à peu, prendra conscience de la gravité de sa folie. Quand bien même Romy Schneider (d'une beauté sensuelle ici très érotique, notamment auprès de ce prologue à la fois charnel et torride !) se taille une carrure de femme envieuse davantage meurtrie au fil de sa relation équivoque avec Jean-Paul. Et ce jusqu'à y déroger les barrières de sa moralité si je me réfère à l'étonnant épilogue où chacun y laissera malgré tout de profondes cicatrices quelque soit leur destinée.


Drame passionnel donc débouchant vers une sombre intrigue criminelle (avec en filigrane une réflexion complexe sur le pardon), La Piscine puise sa densité grâce à la mise en scène épurée de Deray prenant tout son temps à implanter son récit et à nous familiariser avec ses protagonistes par le biais d'un climat estival davantage orageux. Un grand moment de cinéma au sens noble du terme, transcendé de la caractérisation humaine des personnages fragiles, surtout si je me réfère au passé obscur de Jean-Paul (que Deray effleure à travers sa tentative de suicide) aujourd'hui impliqué dans les arcanes d'un amour fusionnel pour autant destructeur. Un personnage prétentieux et possessif incapable de gérer ses émotions contradictoires lorsque rancune et jalousie viendront ternir sa romance épanouie.  

*Bruno
2èx

vendredi 21 août 2020

A Good Woman Is Hard to Find

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site bifff.net

de Abner Pastoll. 2019. U.S.A. 1h37. Avec Sarah Bolger, Edward Hogg, Andrew Simpson, Jane Brennan, Caolan Byrne.

Sortie salles UK:  25 October 2019. France: 19 Août 2020 en Dvd

FILMOGRAPHIEAbner Pastoll est un réalisateur, scénariste et monteur anglo-sud-africain, né le 12 février 1982 en Afrique du Sud. 2004: Shooting Shona. 2015: Road Games. 2019: A Good Woman Is Hard to Find


                      « Découper quelqu'un est très dur, très douloureux, et très… très long. »

Le pitch: Eprouvée par le décès de son mari, sauvagement poignardé par un mafieux, Sarah Collins n'est pas au bout de ses surprises lorsqu'un inconnu entre par effraction chez elle pour y planquer de la came. Or, lors d'un concours de circonstances malchanceuses, elle est contrainte de se défendre contre cet assaillant pour ensuite remonter la filière des responsables de son défunt mari grâce au témoignage de son fils.  


Bon p'tit thriller nappé de polar violent et tendu d'après l'influence de Nicolas Winding Refn (photo léchée, éclairs de violence stylisés, tempo musical clinquant, plages d'accalmie envoûtées), A Good Woman Is Hard to Find tire attrait de son intensité dramatique de par le magnétisme lascif de Sarah Bolger portant le film à bout de bras en némésis en initiation criminelle. L'actrice s'avérant très impliquée dans sa fonction de mère semi-dépressive en proie à une appréhension expressive (quel ténu regard étincelant !) quant à sa soudaine condition de victime molestée peu à peu gagnée par une bravoure de dernier ressort. Et bien que son cheminement narratif pâti parfois de grosses ficelles au niveau de la cohérence des situations de stress (la mère peu étonnée que sa fille se parle à elle-même dans le couloir alors qu'elle s'adressait au tueur !), de l'apparition furtive du mafieux à un moment auditif trop propice ou de certaines exactions criminelles (l'idée vrillée du démembrement du cadavre), A good woman is Hard to Find demeure efficace de bout en bout pour qui raffole des thrillers du samedi soir.


Et ce même si sa formidable première partie (dans la gestion du suspense lattent peu à peu oppressant) demeure le moment le plus probant au niveau de sa scrupuleuse mise en scène dénuée de fioriture. Emaillé d'anicroches donc, notamment auprès du méchant caricatural un peu trop outré dans ses expressions mégalos, A Good Woman Is Hard to Find n'en demeure pas moins constamment ludique à travers son cocktail de suspense, d'action et de violence parfois grand-guignolesque (principalement au niveau d'un découpage de chair efficacement graphique pour tenir lieu de la difficulté de l'assassin à s'employer à une gageure aussi incongrue dans sa fonction novice !). Fréquentable. 

*Bruno

jeudi 20 août 2020

Sue perdue dans Manhattan

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

"Sue" de Amos Kollek. 1997. U.S.A. 1h31. Avec Anna Thomson, Matthew Powers, Tahnee Welch, Tracee Ellis Ross, John Ventimiglia.

Sortie salles France: 16 Septembre 1998

FILMOGRAPHIEAmos Kollek est un réalisateur et scénariste israélien né le 15 septembre 1947 à Jérusalem. 1985 : Goodbye New York. 1987 : Prise (Forever, Lulu). 1989 : High Stakes. 1992 : Trois semaines à Jérusalem. 1993 : Five Girls. 1994 : Whore 2. 1996 : Teddy Kollek (documentaire). 1997 : Sue perdue dans Manhattan. 1999 : Fiona. 2000 : Fast Food, Fast Women. 2001 : Queenie in Love. 2002 : Bridget. 2003 : Happy End. 2008 : Dans la nuit. 2010 : L.L. 2011 : Chronicling a crisis. (documentaire).


"La souffrance et la solitude sont les maîtres-maux du chaos."
Peu connu du public en dépit de sa réputation élogieuse par la critique, si bien qu'il s'agit d'une oeuvre indépendante sortie en catimini en 1998, Sue perdue dans Manhattan laisse une trace dans l'encéphale sitôt le générique clôt. Car résolument influencé par le cinéma vérité de John Cassavetes, l'israélien Amos Kollek nous livre un magnifique portrait d'ange déchu à travers le cheminement en perdition de Sue égarée au sein d'une jungle urbaine dénuée de clémence pour les laissés pour compte. Anna Thomson transperçant le cadre à chaque seconde (du fait de son omniprésence à l'écran) en femme esseulée d'une fragilité à fleur de peau. Tant auprès de son désir immodéré d'affection amicale et sentimentale, d'amour maternel (sa mère est atteinte de la maladie d'Alzheimer) et de reconnaissance professionnelle (notamment à travers son CV louablement diplômé). D'un charisme indicible à travers l'élégance de sa posture filiforme et sa lascivité du regard blême noyé de douceur, Anna Thomson nous communique son désarroi, faute d'un passé infortuné. Son besoin inassouvi d'aimer et d'être aimé sous l'impulsion de sa posture infiniment naturelle. Digne des grandes actrices du cinéma indépendant (on peut même oser la comparer à Gena Rowlands à travers son charisme autonome aussi ineffable que terriblement impressionnant), Anna Thomson nous trouble de séduction désenchantée à travers ses déambulations urbaines émaillées de rencontres marginales aussi miséreuses et dépressives dans leur requête ultime de tendresse. 


Ainsi, à travers le parti-pris d'une réalisation documentée à la lumière naturelle, Sue perdue dans Manhattan rejoint sans rougir les plus grands drames sociaux de John Cassavetes de par sa force d'expression plus vraie que nature (et j'évoque tous les comédiens et seconds-rôles !) et l'intensité dramatique d'une solitude existentielle faisant office de mal du siècle. Sue s'efforçant de communiquer le plus souvent auprès d'une faune cosmopolite afin d'éclipser sa profonde détresse existentielle. Inévitablement émouvant donc de manière extrêmement prude, poignant puis bouleversant auprès Spoil ! d'un épilogue disgracieux d'un cruauté inconsolable fin du Spoil, Sue ensorcelle l'écran tel un fantôme errant de par son extrême pudeur à ne pas nuire à autrui dans sa condition miséreuse. Cumulant les rencontres sexuelles d'un soir, (si bien qu'elle ne communique qu'à travers la sexe avouera t'elle à une quidam d'une laverie), Sue ne parvient pas à gérer son immense solitude en dépit de ses aventures parfois amicales, si bien qu'une potentielle rencontre amoureuse la contraint néanmoins de se plonger dans une défiance et une appréhension finalement préjudiciables. Ainsi, quoiqu'elle fasse et quelque soit son courage employé, son destin galvaudé semble tracé d'avance, notamment faute de sa naïveté trop influençable.


Seule contre tous. 
De par son hyper réalisme à couper au rasoir extériorisant une dimension dramatique toujours dépouillée, Sue perdue dans Manhattan nous transmet à l'écran avec une rare vérité humaine le douloureux portrait d'une marginale en berne que personne ne parviendra à extraire de la déveine faute d'une société déshumanisée ne comptant que sur leur ego pour s'extirper de la précarité. Très dur dans sa sinistrose pleine de pudeur mais inoubliable de puissance émotionnelle à travers ce profil intime noyé de mansuétude .  

*Bruno2èx

mercredi 19 août 2020

Summer of Sam

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site posteritati.com

de Spike Lee. 1999. U.S.A. 2h22. Avec John Leguizamo, Adrien Brody, Mira Sorvino, Jennifer Esposito, Michael Rispoli, Saverio Guerra, Brian Tarantina, Al Palagonia, Ken Garito.

Sortie salles France: 5 Janvier 2000

FILMOGRAPHIE: Spike Lee (Shelton Jackson Lee) est un scénariste, réalisateur, acteur et producteur américain né le 20 mars 1957 à Atlanta (Géorgie, États-Unis).1983 : Joe's Bed-Stuy Barbershop: We Cut Heads. 1986 : Nola Darling n'en fait qu'à sa tête. 1988 : School Daze. 1989 : Do the Right Thing. 1990 : Mo' Better Blues. 1991 : Jungle Fever. 1992 : Malcolm X. 1994 : Crooklyn. 1995 : Clockers. 1996 : Girl 6. 1996 : Get on the Bus. 1998 : He Got Game. 1999 : Summer of Sam. 2000 : The Very Black Show. 2002 : La 25e Heure. 2004 : She Hate Me. 2006 : Inside Man. 2008 : Miracle à Santa Anna. 2012 : Red Hook Summer. 2013 : Old Boy. 2014 : Da Sweet Blood of Jesus. 2015 : Chi-Raq. 2018 : BlacKkKlansman. 2020 : Da 5 Bloods.


Grande fresque sociale de plus de 2h22, véritable documentaire sur les années 70 à travers la mode du Disco, la nouvelle vague Punk, la coke et la libération sexuelle (les boites à partouze, les streap pornos, le cinéma X, l'homosexualité se dévoilant un peu plus en public), Summer of Sam insuffle un climat paranoïde en crescendo sous l'impulsion du célèbre tueur en série, "le fils de Sam" durant l'été caniculaire de 77. Nanti d'un prestigieux casting à travers le quatuor John Leguizamo (en époux infidèle hanté de culpabilité), la douce Mira Sorvino (en maîtresse bafouée en proie à la rébellion), Jennifer Esposito (en jeune effrontée en quête identitaire), Adrien Brody (en punk à l'homosexualité refoulée),  Summer of Sam s'illumine de leurs présences hautes en couleur. Spike Lee ne lésinant pas sur les étreintes érotico-pornos à travers quelques coïts bercés de soul et de tube discos. Pour ce faire, on peut presque évoquer le genre musical tant le cinéaste voue un culte à ses tubes entêtants que les fans auront plaisir à réécouter. Mais au-delà de sa satire caustique contre l'homophobie et l'adultère en expansion lors des Seventies (probablement faute de la nouvelle tendance du porno "hardcore"), Spike Lee dénonce la paranoïa collective d'une communauté italienne délibérée à faire la peau à l'assassin à travers leur loi du Talion. Même la mafia s'en mêlera depuis la sollicitation d'un policier préalablement issu de leur même milieu vénal.


Et ce parmi le témoignage majeur du porto-ricain Vinny, véritable emmanché dans ses infidélités conjugales et félonie amicale, tant et si bien que son meilleur ami Ritchie risque de trépasser faute de son excentricité vestimentaire, son look de carnaval et son ambiguïté sexuelle. On y traite donc de droit à la tolérance dans ce thriller torride jonglant avec plusieurs genres à travers sa représentation folklorique d'une faune urbaine en ébullition, faute de la flambée de l'insécurité découlant d'une unique menace. La foule, et particulièrement les jeunes couples, sombrant toujours un peu plus dans une appréhension contagieuse. Les scènes de violence réalistes demeurant souvent impressionnantes dans leur impact cinglant (avec toujours ce même mode opératoire criminel de plusieurs balles dans la tête dans l'habitacle d'une voiture). Tout cela demeure donc assez sombre, décomplexé, hystérique et captivant. Tant auprès de son climat d'insécurité aux confins de l'horreur, du profil improbable du demeuré obsédé par les aboiements d'un chien, que de la caractérisation humaine de ces personnages instables en proie à une quête identitaire. Spike Lee dressant le pathétique portrait d'un porto-ricain incapable de grandir dans son entêtement machiste, son orgueil et son obsession pour le sexe. Quand bien même son alter-ego Ritchie s'affuble d'une posture de grand benêt (il cohabite au départ avec sa mère) en punk aussi instable se réfugiant dans la prostitution et les bras de sa meilleure amie en guise de survie.


Hormis des effets de mise en scène inutilement alambiqués, un rythme parfois sporadique se perdant même un tantinet en cours de route (fallait-il raccourcir le film à 2h00 ?) et une violence aseptique  paradoxalement peu réaliste (j'évoque uniquement les tabassages musclés abusant de ralentis ou  d'effets maniérés fort peu convaincants), Summer of Sam demeure un flamboyant spectacle de décadence corruptrice. Tant auprès de Vinny se raccrochant à la foi de Dieu afin de pardonner son érotomanie, de l'évolution sordide de Ritchie mais aussi du courant dévergondé de Dionna (compagne de Vinny) désemparée à l'idée de combler son partenaire sexuel. Perfectible sans aucun doute de par son climat frénétique pas aussi bien géré par moments, peut-être même démanché (surtout vers sa seconde partie), mais néanmoins transcendé du brio des comédiens totalement investis dans leur fonction à la fois impopulaire et galvaudée. L'intrigue traitant prioritairement d'échec conjugal et professionnel au sein d'une société en pleine mutation (le fameux courant Punk anti social). A revoir donc. 

*Bruno
3èx

mardi 18 août 2020

Little Miss Sunshine. Grand Prix, Deauville 2006.

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Jonathan Dayton et Valerie Faris. 2006. U.S.A. 1h42. Avec Greg Kinnear, Toni Collette, Steve Carell, Paul Dano, Abigail Breslin, Alan Arkin, Bryan Cranston, Dean Norris.

Sortie salles France: 6 Septembre 2006 

FILMOGRAPHIEJonathan Dayton est un réalisateur, producteur, scénariste, et directeur de la photographie américain. Il est né le 7 juillet 1957 à Alameda, en Californie. Il est marié à Valerie Faris, réalisatrice, productrice et scénariste. 2017: Battle of the Sexes. 2012: Elle s'appelle Ruby. 2006: Little Miss Sunshine.
Valerie Faris est une réalisatrice, productrice, scénariste et monteuse américaine née le 20 octobre 1958 dans le comté de Los Angeles en Californie aux États-Unis. 1989 : Rhythm Nation 1814. 2005 : The Check Up. 2006 : Little Miss Sunshine. 2012 : Elle s'appelle Ruby. 2017 : Battle of the Sexes.


Un esprit "punk" plane chez la famile Hoover ! 
Bijou d'humour et d'émotions caustiques à travers les thématiques de l'apparence, de l'élitisme et de la célébrité, Little miss Sunshine n'a pas grugé ses moult récompenses tant il demeure aussi jubilatoire qu'intelligent à se gausser (là on ne l'attend jamais !) du politiquement correct. Tant et si bien que le couple de réalisateurs Jonathan Dayton et Valerie Faris (au passage couple à la ville) parvient à nous attacher à l'une des plus facétieuses familles ricaines vues sur écran de cinéma. Et ce avec une originalité dévergondée comme le souligne l'éthique transgressive du grand-père avide d'interdits et de grossièretés grivoises faute de son âge avancé. Pour ce faire, on s'étonne de rire nerveusement ou de bon coeur lors des moments les plus réjouissants, alors qu'à la seconde d'après on se surprend d'éprouver le sentiment contraire d'une empathie subitement poignante lors d'un contexte tragi-comique. Mais si Little Miss Sunshine parvient autant à séduire sans fard, il le doit aux profils hauts en couleurs (MAIS plus vrais que nature !) d'une famille si fragile dans leur humanisme torturé (le cast irréprochable est donc littéralement renversant !). Car d'autant plus en proie à une rage de vivre incontrôlée dans leur refus de se plier aux exigences d'une société condescendante dénuée d'indulgence chez les précaires, surtout lorsque l'apparence demeure trop standard.


Car communément partagés entre le désir de vaincre et la crainte de perdre comme leur enseigne le patriarche dans sa résignation du dépassement de soi, ces derniers vont finir par s'épauler à se rebeller contre les convenances tout en acceptant leurs échecs personnels. Car comme l'énonce si justement l'un des protagonistes à peine remis d'un chagrin d'amour, c'est par la souffrance que l'on finit par grandir pour apprendre de nos erreurs alors que les jours heureux demeureront de simples souvenirs ludiques. Ainsi, c'est à travers le parcours infantile d'Olive que l'intrigue se cultive, tant et si bien que cette dernière va participer à un célèbre concours de beauté en Californie en compagnie des membres de sa famille malmenés par l'aléa du deuil. Et donc à travers le vent de liberté qui agite davantage chaque personnage, Little Miss Sunshine parvient avec cette énergie solaire à exister par lui même pour se démarquer du divertissement imberbe. De par sa tendresse et ses éclats de rire constants émergeant au sein d'un climat familial orageux, le couple Dayton / Faris radiographie ces profils lambdas avec un humanisme terriblement expressif. La grande réussite de cette satire contre l'élitisme émanant de leur évolution morale à s'exprimer indépendamment par eux mêmes après avoir essuyé leurs revers. Et ce au mépris de se plier aux hiérarchies bien-pensantes se vautrant dans une vulgarité de mauvais goût à travers l'univers pailleté des mini-miss grimées en poupée Barbie.


Il y a des occasions où il vaut mieux perdre que gagner.
Ode suprême à la liberté la plus épanouie du point de vue des valeurs familiales, de l'amour et de la tolérance (quelque soit le choix de nos cultures religieuses, sociales, politiques ou sexuelles), Little Miss Sunshine donne furieusement envie d'embras(s)er la vie si l'on parvient à extraire le vainqueur qui est en soi après avoir assumé les déceptions. Si bien que les premiers seront derniers et les derniers seront premiers... 

*Bruno
2èx

Récompenses: Festival du cinéma américain de Deauville 2006 : Grand prix
Festival international du film de Saint-Sébastien 2006 : Prix du public
American Film Institute Awards 2006 : top 10 des meilleurs films de l'année
BAFTA Awards 2007 :
Meilleur acteur dans un second rôle pour Alan Arkin
Meilleur scénario original pour Michael Arndt
César du cinéma 2007 : meilleur film étranger
Independent Spirit Awards 2007 : meilleur film
Oscars du cinéma 2007 :
Meilleur acteur dans un second rôle pour Alan Arkin
Meilleur scénario original pour Michael Arndt
Screen Actors Guild Awards 2007 : meilleure distribution
Young Artist Awards 2007 : meilleure actrice pour Abigail Breslin

lundi 17 août 2020

La Route

                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Road" de John Hillcoat. 2009. U.S.A. 1h52. Avec Viggo Mortensen, Kodi Smit-McPhee, Charlize Theron, Garret Dillahunt, Robert Duvall, Guy Pearce.

Sortie salles France: 2 Décembre 2009

FILMOGRAPHIEJohn Hillcoat est un cinéaste australien né en 1961 au Queensland. 1988 : Ghosts… of the Civil Dead. 1996 : To Have and to Hold. 2005 : The Proposition. 2009 : La Route. 2012 : Des hommes sans loi. 2016 : Triple 9. 2020 : Witchfinder General.


Terrassant d'intensité dramatique à travers l'épreuve de survie d'une odyssée désenchantée, La Route laisse en état d'amertume bouleversé eu égard de son hyper-réalisme blafard dénué de luminosité. Car épaulé d'une photo désaturée afin de souligner l'aspect funeste de ces décors décharnés étrangement mutiques, La Route transcende le drame post-apo sous l'impulsion d'une caractérisation humaine à fleur de peau. Viggo Mortensen endossant avec une sobriété sentencieuse un paternel prévenant résigné à préserver coûte que coûte la vie de son fils que Kodi Smit-McPhee incarne avec une fragilité naturelle aussi dépouillée. A eux deux, ils forment un duo inoubliable dans leur parcours chaotique où ne cesse de s'y profiler la menace du trépas, tant auprès de la famine, de la maladie que des prédateurs cannibales sillonnant les bourgades. Quand bien même le réalisateur nous rappelle via l'entremise du flash-back la situation conjugale en berne que traversa l'homme avant de plier bagage avec son fils vers un no mans land. Là encore d'une grande sensibilité de par l'intensité dramatique d'une condition de vie dénuée de lueur d'espoir, ses séquences intimistes provoquent le sentiment d'impuissance à travers la détermination d'une femme épuisée par la misère. Poignant et bouleversant (pour ne pas dire déchirant quant au final binaire), mais aussi terriblement inquiétant, parfois terrifiant et déprimant; si bien que l'on y traite de cannibalisme avec une cruauté impassible, La Route ne s'embarrasse ni de fioriture ni de lueur (ou alors si peu) pour provoquer le désarroi.


Et ce à travers son houleux climat de déréliction qu'un père et son fils arpente désespérément afin de dénicher un éventuel havre de paix (musique élégiaque à l'appui composée par Nick Cave et Warren Ellis, excusez du peu !). Le cheminement narratif étant soumis à leur pérégrination et intermittentes rencontres humaines au sein d'un environnement hostile épargné de toute trace végétative et animale. C'est dire si La Route s'avère psychologiquement plombant car d'une infinie tristesse eu égard du chemin de croix que traverse le duo avec une foi désargentée. Au-delà d'y soigner sa mise en forme crépusculaire auquel le dépaysement demeure glaçant d'austérité, John Hillcoat s'efforce tout le long de l'intrigue d'humaniser ses personnages précaires soumis à des conditions de vie draconiennes. Le fils tentant d'ailleurs fréquemment de rappeler à l'ordre de la morale la rigidité de son père lorsqu'il s'agit de prêter main forte à un étranger potentiellement inhospitalier. Cette dégénérescence morale tendant à prouver qu'en situation de dystopie seule la loi du plus fort et l'individualisme priment afin de pouvoir rester en vie. On peut d'ailleurs s'offenser de certaines séquences horrifiantes lorsque des victimes (confinées dans une cave de garde-manger) sont sur le point d'être dévorés par des cannibales alors que l'homme ne prendra aucune mesure pour tenter de les sauver de leur fatale situation.


Terriblement dur donc par son réalisme cafardeux difficilement gérable et d'une noirceur singulière auprès du genre post-apo (j'ai rarement vu aussi nihiliste !), La Route demeure une bouleversante aventure humaine parmi l'autorité de l'amour paternel résigné à sauver sa progéniture pour la postérité du lendemain meilleur. De par son intensité dramatique éprouvante à travers le duo plein de fragilité que forment Viggo Mortensen  Kodi Smit-McPhee, la Route traite de l'amour, du souvenir, de l'espoir et de la résilience avec une tangible tendresse jamais outrée. Une oeuvre existentielle magnifique aux confins du chef-d'oeuvre sépulcral. 

*Bruno
2èx

Récompenses: 2009 : San Diego Film Critics Society Award de la meilleure photographie (Javier Aguirresarobe)
2009 : Utah Film Critics Association Award du meilleur acteur (Viggo Mortensen)
2010 : Vits Award de la meilleure photographie (Javier Aguirresarobe)

dimanche 16 août 2020

The King of Staten Island

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Judd Apatow. 2020. U.S.A. 2h17. Avec Pete Davidson, Bel Powley, Ricky Velez, Lou Wilson, Moises Arias, Marisa Tomei, Maude Apatow.

Sortie salles France: 22 Juillet 2020

FILMOGRAPHIEJudd Apatow est un réalisateur, scénariste et producteur de cinéma américain, né le 6 décembre 1967 à Syosset (New York). 2001: North Hollywood (TV Movie). 2007: En cloque, mode d'emploi. 2005: 40 ans, toujours puceau. 2009: Funny People. 2012: 40 ans mode d'emploi. 2015: Crazy Amy.


Comédie à la fois tendre et drôle à travers le portrait d'un jeune adulte de 24 ans piquant sa crise de nerf lorsque sa mère roucoule avec un nouveau prétendant depuis la disparition de son père mort en service lors d'un incendie; The King of Staten Island est arc en ciel de fraîcheur et d'émotions (bipolaires) en dépit de la gravité du sujet (faisant écho en filigrane aux attentats du 11 Septembre). Le climat hybride, aussi bien explosif que détendu, alternant avec une surprenante fluidité le politiquement incorrect, les décompressions morales de la banalité quotidienne et les actions altruistes. Entre prises de drogue douce (Scott et ses potes tatoués fument du matin au soir), soirées ciné d'exploitation émaillées de séries TV (en mode Game of Throne svp !), leçon néophyte de baby-sitting, cambriolage en herbe, combats de boxe improvisés en plein resto et pédagogie professionnelle (tant pour la passion du tatouage que Scott cultive tout le long de son cheminement que de l'héroïsme des soldats du feu depuis une éviction familiale !). Le réalisateur en profite d'ailleurs de rendre hommage à la bravoure des pompiers lors d'un stage impromptu que Scott témoignera avec émotion forte. Mais c'est autour des thèmes majeurs de l'acceptation du deuil et de l'absence paternelle que Judd Apatow fait évoluer son récit de par son talent de narrateur aussi bien généreux qu'inventif lorsqu'il s'agit de relancer l'action dans des directions toujours imprévisibles.


C'est dire le plaisir procuré face à cette moisson de scénettes de ménage d'un humour caustique (tant familiales et amicales que sentimentales) car soufflant le chaud et le froid quant aux confrontations tempétueuses des personnages se débattant autour de Scott afin de l'extirper de sa torpeur. Outre l'incroyable fantaisie des dialogues incisifs constamment jouissifs, The King of Staten Island est saturé d'un scénario charpenté pour rendre compte de l'état moral du jeune héros à la fois paumé et insouciant depuis la disparition d'un père qu'il a connu jusqu'à l'âge de 7 ans. Cette absence inconsolable pesant inconsciemment sur ses frêles épaules au point de lui freiner toute ambition sociale, professionnelle et sentimentale. Scott déambulant au ralenti (tel un zombie junkie) à se cloîtrer dans les jupes de sa mère davantage préoccupée pour son avenir en suspens. Mais pour autant pétri d'humanité tacite dans son désir timoré de s'ouvrir aux autres avec une impayable maladresse, Scott finira donc par y semer amour, courage, pardon, confiance et reconnaissance de par son initiation de s'éveiller aux autres grâce aux leçons de vie que son entourage lui instille le plus naturellement. Et ce entre flegme et pulsions colériques (avec un brin de rancune), et vice-versa. De par la sobre expansivité des acteurs débordants de vitalité et de sémillance à travers leur optimisme mais aussi leur découragement subsidiaire, Judd Apatow y extrait une galerie de nobles personnages résolument authentiques dans leur esprit foisonnant de communication, de partage, de soutien et de cohésion à mettre en pratique les bienfaits de l'ambition et des valeurs familiales.


Splendide comédie fringante émaillée de fragments de sensibilité et de tendresse, The King of Staten Island est une merveille d'écriture d'y composer sous l'alibi d'un humour fructueux les préoccupations morales de la peur de soi et de grandir face à la tare d'une absence paternelle péniblement gérable. Y émane du vrai cinéma mature au sens "noble" qui plus est renforcé de protagonistes superbement dessinés dans leur humanisme aussi bien vulnérable que pugnace. Un hymne à la vie et à l'amour en somme que nous procure à bras ouvert son auteur confirmé. 

*Bruno