de Jacques Audiard. 2012. France/Belgique. 1h55. Avec Marion Cotillard, Matthias Schoenaerts, Bouli Lanners, Corinne Masiero, Armand Verdure, Céline Sallette, Yannick Choirat.
Sortie salles France: 17 Mai 2012
Récompenses: Prix du Meilleur Film au Festival du film de Londres, 2012
Swann d'or du meilleur film au Festival du film de Cabourg, 2012
FILMOGRAPHIE: Jacques Audiard est un réalisateur, scénariste et monteur français, né le 30 Avril 1952 à Paris.
1994: Regarde les Hommes tomber. 1996: Un héros très discret. 2001: Sur mes lèvres. 2005: De battre mon coeur s'est arrêté. 2009: Un Prophète. 2012: De Rouille et d'Os.
Suite à une rixe violente à la sortie d’une boîte, Stéphanie est raccompagnée chez elle par le videur Ali, un père en situation précaire, fraîchement installé chez sa sœur avec son fils de cinq ans.
Dresseuse d’orques dans un parc aquatique, Stéphanie est victime d’un accident aussi brutal qu’inattendu, qui l’ampute des deux jambes.
Au fil des semaines, une relation fraternelle, puis sentimentale, se noue entre ces deux êtres cabossés. Pour gagner un peu d’argent, Ali s’adonne à des combats de rue clandestins, tandis qu’il tente maladroitement d’élever le petit Sam.
Sans jamais céder au pathos lacrymal souvent consigné dans le genre mélodramatique, Audiard capte, avec une ambition formelle saisissante, la trajectoire de deux écorchés. Stéphanie, jeune femme aguicheuse en quête de reconnaissance, croise le chemin d’Ali, marginal défavorisé au tempérament irascible, mais débordant d’un humanisme brut. Leur rencontre, fruit d’un hasard cruel, scelle l’émergence d’une relation d’abord pudique, bientôt salvatrice.
Traversé de moments de poésie empreints de lyrisme - Stéphanie, silencieuse, face à la vitre de l’orque, lui adressant un attachement muet par le langage des signes - et d’effets de ralenti sublimant la brutalité des corps à corps, De Rouille et d’Os devient l’odyssée sentimentale de deux âmes en perdition.
L’introspection intime de ces deux amants en quête d’un futur possible les pousse, peu à peu, à transcender leurs failles, à s’épauler au cœur d’un drame imprévu, aux conséquences irrémédiables.
Marion Cotillard (je t’aime !) n’a peut-être jamais été aussi sobrement lumineuse : gracile, lucide, éprise d’éthique et d’un amour rédempteur. Quant à Matthias Schoenaerts, révélé dans le bovin Bullhead, il irradie d’une intensité tangible, dans la peau d’un homme incapable d’exprimer la tendresse qu’il voudrait pourtant offrir à son fils. Sa compassion pour Stéphanie, son échec familial, et un contretemps tragique, viendront le confronter, douloureusement, à un équilibre qu’il n’osait plus espérer.
Transcendé par une mise en scène fastueuse et deux interprètes incandescents de fragilité humaine, De Rouille et d’Os est un moment de cinéma précieux, presque séraphique.
Une leçon de vie pour les infortunés, pour les insurgés de l’intolérance. Une lutte obstinée vers la lumière.
Un conte rugueux et suave, distillant des éclats d’émotion dans un souci de vérité, flirtant parfois avec le vertige (jusqu’à ce point d’orgue traumatique), mais toujours rattrapé par la douceur d’une rédemption.