mardi 31 octobre 2017

LA CHASSE DU COMTE ZAROFF

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site ecranlarge.com

"The Most Dangerous Game" de Ernest B. Schoedsack et Irving Pichel. 1932. U.S.A. 1h03. Avec Joel McCrea, Fay Wray, Leslie Banks, Robert Armstrong, Noble Johnson

Sortie salles France: 16 Novembre 1934. U.S: 20 Septembre 1932

FILMOGRAPHIE: Ernest Beaumont Schoedsack est un réalisateur, directeur de photo, producteur, monteur, acteur et scénariste américain, né le 8 Juin 1893 à Council Bluffs (Iowa), décédé le 23 Décembre 1979 dans le Comté de Los Angeles. 1925: Grass: a nation's battle for life.1927: Chang. 1929: Les 4 plumes blanches. 1931: Rango. 1932: Les Chasses du comte Zaroff. 1933: King Kong. 1933: The Monkey's Paw. 1933: Blind Adventure. 1933: Le Fils de Kong. 1934: Long Lost Father. 1935: Les Derniers jours de Pompéï. 1937: Trouble in Morocco. 1937: Outlaws of the Orient. 1940: Dr Cyclop. 1949: Monsieur Joe. 1952: The is Cinerama.


"La chasse a toujours été la distraction favorite des hommes de guerre en temps de paix, c'est-à-dire dans les périodes plus ou moins brèves où la chasse à l'homme n'est pas ouverte."

Chef-d'oeuvre absolu du film d'horreur moderne alors que celui-ci découle des années 30, la Chasse du comte Zaroff perdure son pouvoir de fascination avec une alchimie quasi ineffable ! Car outre l'habile variété de ses décors gothiques et de sa végétation naturelle, l'originalité de sa trame d'un sadisme incongru et l'interprétation hallucinée de l'immense Leslie Banks en Zaroff aux yeux pervers écarquillés (avec un oeil plus étroit que l'autre et une cicatrice au front de manière à appuyer sa posture patibulaire), la Chasse du Comte Zaroff nous plaque au siège par la puissance de ces images oniriques. On peut notamment compter sur l'authenticité de sa superbe photo noir et blanc formant un saisissant contraste auprès de ces décors funèbres, notamment lorsque nos 2 héros impitoyablement traqués de nuit s'enfoncent dans une jungle à la photogénie tentaculaire.


Bref, tout dans la Chasse du Comte Zaroff n'est qu'attraction, magnétisme et envoûtement sous l'impulsion d'un récit d'aventures à la fois haletant mais aussi psychologique (notamment auprès de sa première partie lorsque les convives de Zaroff commencent à s'interroger sur sa véritable identité après s'être laissé séduire par son hospitalité hautaine, sa passion pour la chasse et son talent musical). Outre la prestance symbolique de Leslie Banks (sans doute l'un des plus raffinés portraits de psychopathe vu sur écran !), La Chasse... est notamment rehaussé de la complémentarité du duo Joel McCrea / Fay Wray formant un couple solidaire partagé entre désarroi et frayeur d'un concept aussi sournois que cruel et l'instinct de survie de s'extraire des pulsions morbides du chasseur entièrement soumis à sa pathologie déviante (traquer puis tuer sa proie afin de ressentir l'extase du crime !). Au passage, et par ces principes immoraux, on notera le réquisitoire imputé au loisir de la chasse lorsque Robert (autrefois chasseur) énoncera à sa compagne avec regain de conscience et en guise d'épuisement: "tous ces animaux que j'ai traqué, je sais ce qu'ils ont ressenti !". Tout est dit en cette seule réplique !


Tourné économiquement la même année que King-Kong dans les mêmes décors, avec le même réalisateur et la même actrice, La Chasse du Comte Zaroff est parvenu à transcender son budget low-cost grâce au brio des deux cinéastes scrupuleusement inspirés à immortaliser leur réaliste cauchemar avec une intensité formelle hypnotique. Il y émane un des survivals les plus fascinants et cruels que l'on est vu au cinéma, tout en cultivant en filigrane une réflexion lucide sur la perversité (ascensionnelle) de la cynégétique que les chasseurs perdurent depuis des siècles avec une vile lâcheté. 

Bruno Dussart
4èx  

lundi 30 octobre 2017

HALLOWEEN 4

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"Halloween 4: The Return of Michael Myers". de Dwight H. Little. 1988. U.S.A. 1h29. Avec Donald Pleasence,  Ellie Cornell, Danielle Harris, George P. Wilbur, Michael Pataki, Beau Starr, Kathleen Kinmont.

Sortie salles France: 9 Mai 1990. U.S: 21 Octobre 1988

FILMOGRAPHIE: Dwight Hubbard Little est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 13 janvier 1956 à Cleveland, Ohio (États-Unis).1986 : Getting Even. 1986 : KGB: la guerre secrète. 1988 : Bloodstone. 1988 : Halloween 4. 1989 : Le Fantôme de l'opéra. 1990 : Désigné pour mourir. 1992 : Rapid Fire. 1995 : Sauvez Willy 2 : La Nouvelle Aventure. 1997 : Meurtre à la Maison-Blanche. 2001 : Deep Blue. 2004 : Anacondas : À la poursuite de l'orchidée de sang. 2009 : Tekken.


Une suite aussi poussive qu'inutile, faute d'un scénario inexistant et de situations rebattues dénuées de tout suspense et d'intensité, et ce en dépit d'une dernière demi-heure timidement spectaculaire mais pour autant avare en terme de surprises et revirement (si on épargne son grotesque épilogue). Même Donald Pleasance plutôt apathique (bien qu'il eut des problèmes de santé à l'époque du tournage) semble s'ennuyer dans son sempiternel rôle de traqueur franc-tireur.

Les bons points:
- Une jolie photo
- Le jeu intense, étonnamment naturel de la petite Danielle Harris


Eric Binford.
3èx

vendredi 27 octobre 2017

LE TOBOGGAN DE LA MORT

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemotions.com

"Rollercoaster" de James Goldstone. 1977. U.S.A. 1h58. Avec George Segal, Richard Widmark, Timothy Bottoms, Henry Fonda, Harry Guardino, Susan Strasberg, Helen Hunt.

Sortie salles France: 28 Décembre 1977. U.S: 10 Juin 1977

FILMOGRAPHIE: James Goldstone est un réalisateur et producteur américain né le 8 juin 1931 à Los Angeles et décédé le 5 novembre 1999 à Shaftsbury. 1968: Les Complices. 1969 : Virages. 1969 : A Man Called Gannon. 1970 : A Clear and Present Danger (en) (TV). 1971 : Brother John. 1971 : Red Sky at Morning. 1971 : The Gang That Couldn't Shoot Straight. 1972 : They Only Kill Their Masters. 1974 : Cry Panic (TV). 1974 : Dr. Max (TV). 1974 : Things in Their Season (TV). 1975 : Journey from Darkness (TV). 1975 : Eric (TV). 1976 : Le Pirate des Caraïbes. 1977 : Le Toboggan de la Mort. 1980 : Le Jour de la fin du monde. 1981 : Kent State (TV). 1982 : Charles & amp; Diana: A Royal Love Story (TV). 1983 : Rita Hayworth: The Love Goddess (TV). 1984 : Calamity Jane (TV). 1984 : Voyage sentimental (TV). 1984 : Le soleil se lève aussi (TV). 1986 : Dreams of Gold: The Mel Fisher Story (TV). 1988 : Les Voyageurs de l'infini (TV). 1990 : Mariage en noir(TV).


Plutôt oublié de nos jours en dépit de sa récente sortie commerciale en Blu-ray, Le Toboggan de la Mort est un excellent film catastrophe mené sur un rythme haletant si bien qu'il ne laisse que peu de répit au spectateur observant sans réserve les stratégies terroristes d'un dangereux maître chanteur spécialiste en explosif dans les manèges à sensations. Son attraction de prédilection, le Rollercoaster, montagne russe vertigineuse d'une envergure assez impressionnante si je la compare à nos manèges français un peu plus modérés. Sans jamais s'embarrasser de séquences inutiles conforme au schéma du genre catastrophe (la caractérisation d'une foule de protagonistes stéréotypés en 1er lieu), James Goldstone démarre sur les chapeaux de roue avec l'unique séquence catastrophe, l'explosion d'un rollercoaster lors d'une nuit bondée de touristes. Une séquence spectaculaire d'une violence assez impressionnante même si l'on parvient à discerner quelques mannequins lorsque les wagons détachés viennent se projeter sur des stands ou se retourner avant d'écraser chaque passager sur le sol. La suite du récit se focalise ensuite sur le chantage du tueur exigeant une rançon d'un million de dollars, auquel cas il poursuivra une deuxième action terroriste auprès d'un autre rollercoaster.


Dépêché sur les lieux, Harry Calder, contrôleur de sécurité, doit lui rapporter la valise en plein coeur de la fête foraine et parmi la filature des policiers maladroitement fondus dans la foule. Remarquablement mené grâce à son rythme oppressant balisé de fausses alertes, James Goldstone réussit à rendre palpitant son suspense policier auprès d'une réalisation efficace brodant un jeu de cache-cache entre le tueur et le héros mis à rude épreuve car gentiment brimé. Quant à la seconde partie, un peu plus tendue et nerveuse pour son nouvel enjeu dramatique, elle renoue avec la menace d'une troisième attaque terroriste après que les ouvriers d'un parc d'attraction soient parvenus à désamorcer une seconde bombe en dernier ressort. Outre son suspense émoulu instauré autour d'une scénographie festive efficacement exploitée (notamment ces multiples tours de montagne russe filmés en caméra subjective afin de nous donner le vertige !), le Toboggan de la mort est également rehaussé d'un casting 3 étoiles typique de sa décennie florissante. Principalement Richard Widmark en agent de police bourru constamment sur le qui-vive à coordonner ses plans d'action afin d'appréhender le tueur, et surtout le méconnu George Segal très à l'aise dans celui d'un émissaire de fortune s'efforçant sans relâche de déjouer les plans sournois du terroriste dont il ignore l'identité. Ce dernier étant endossé par le troublant Timothy Bottoms tout à fait machiavélique dans la peau d'un terroriste assez vaniteux car d'apparence faussement rassurant, plutôt retors et déterminé dans ses lâches stratagèmes.


Constamment haletant grâce à l'ossature de son suspense inquiétant fertile en rebondissements, et rehaussé du jeu viril des comédiens d'un charisme buriné, Le Toboggan de la Mort parvient d'autant mieux à nous tenir en haleine sans jamais user de bravoure si on écarte l'inévitable scène catastrophe de son introduction criminelle. 
A noter les furtives apparitions de Steve Guttenberg, Craig Wasson (Body Double) et Helen Hunt âgée de 14 ans !

Bruno Matéï
3èx

jeudi 26 octobre 2017

LA DERNIERE MAISON SUR LA GAUCHE

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site pinterest.fr

"The Last House on the Left" de Wes Craven. 1972. U.S.A. 1h25. Avec Sandra Cassel, Lucy Grantham, David Hess, Fred J. Lincoln, Jeramie Rain, Marc Sheffler.

Inédit en salles en France. Sortie U.S: 30 Août 1972

FILMOGRAPHIE: Wesley Earl "Wes" Craven est un réalisateur, scénariste, producteur, acteur et monteur né le 2 Aout 1939 à Cleveland dans l'Ohio. 1972: La Dernière maison sur la gauche, 1977: La Colline a des yeux, 1978: The Evolution of Snuff (documentaire), 1981: La Ferme de la Terreur, 1982: La Créature du marais, 1984: Les Griffes de la nuit, 1985: La Colline a des yeux 2, 1986: l'Amie mortelle, 1988: l'Emprise des Ténèbres, 1989: Schocker, 1991: Le Sous-sol de la peur, 1994: Freddy sort de la nuit, 1995: Un Vampire à brooklyn, 1996: Scream, 1997: Scream 2, 1999: la Musique de mon coeur, 2000: Scream 3, 2005: Cursed, 2005: Red eye, 2006: Paris, je t'aime (segment), 2010: My soul to take, 2011: Scream 4.


Quintessence d'une horreur pestilentielle, un film monstre sur la nature perverse du plus redoutable des prédateurs: l'homme. 
Fer de lance du Rape and Revenge crapoteux interdit en salles en France et durant 30 ans au Royaume-Uni, La Dernière maison sur la gauche révolutionna le cinéma d'horreur, et ce bien avant que Tobe Hooper ne le marque également de son empreinte 2 ans plus tard avec l'électrisant Massacre à la Tronçonneuse. Sordide, poisseux, ultra glauque et malsain, La Dernière maison sur la gauche doit sa réputation scandaleuse grâce à l'aspect docu-vérité de sa réalisation amateuriste (il s'agit du 1er essai de Wes Craven derrière la caméra) illustrant durant sa 1ère partie (la plus réussie !) le chemin de croix de deux lycéennes prises à parti avec un quatuor de marginaux sans vergogne. Au coeur d'une forêt, et ironiquement à pied d'oeuvre de la maison des parents de l'une d'elles, elles subiront humiliations, sévices sexuels et tortures corporelles jusqu'à ce que mort s'ensuive. Sans user de débauche d'hémoglobine, Wes Craven parvient résolument à distiller un malaise à la fois psychologique et viscéral en privilégiant une violence crue d'une intensité rarement égalée au cinéma, et en optant pour une caméra à l'épaule usant parfois de gros plans sur les visages apeurés ou orduriers. Qui plus est, oscillant efficacement une bande-son dissonante, joviale et élégiaque afin de perdre nos repères, nous nous laissons emportés dans un vertige moral à la limite du malaise.


Et Wes Craven a beau introduire (maladroitement) des séquences cocasses avec l'intervention de deux flics empotés afin de désamorcer l'horreur des situations, le spectateur ne parvient pas relativiser depuis le choc des images barbares et du jeu aussi bien approximatif que convaincant des acteurs méconnus d'un charisme hallucinant de perversité ! Mentions spéciales à David Hess en raclure impérieuse éprouvant pour autant un regain de compassion après avoir commis un meurtre aussi lâche que gratuit ("Les véritables monstres ne sont jamais totalement dépourvus de sentiments. Je crois qu'en fin de compte c'est ça, et non pas leur aspect, qui les rend si effrayants" pour reprendre un aphorisme de Stephen King), et à Fred J. Lincoln (acteur porno à la carrière prolifique !) aussi dérangeant en tortionnaire sadique nanti de penchants masochistes. Parfois un chouilla complaisant (l'éviscération concise d'une des victimes, l'entaille au couteau lentement perpétrée sur le torse d'une autre martyr), La Dernière maison sur la gauche échappe pour autant au racolage, et ce en dépit de la gratuité des exactions tirées d'un fait-divers (nous précisera le post-générique) que l'on croirait tiré du "nouveau détective". Et si la seconde partie moins convaincante et percutante (notamment le peu d'empathie éprouvée auprès des parents lorsqu'ils découvrent trop rapidement leur fille moribonde près du lac !) ne possède pas cette même aura putride et ce degré de réalisme insupportable (photo granuleuse à l'appui), le climat malsain quasi irrespirable ressenti en interne du huis-clos familial (notamment auprès des postures sournoises des ploucs insalubres) et la vengeance putassière des parents redoublant d'idées saugrenues pour parvenir à leur fin perdurent une nouvelle descente aux enfers à la violence finalement paroxystique.


Réflexion sempiternelle sur l'instinct bestial/primitif de l'homme aussi véreux que son meurtrier depuis la déchéance de ses pulsions justicières, la Dernière maison sur la Gauche perdure son pouvoir de fascination, sommet d'horreur pestilentielle d'une intensité brut de décoffrage. Et ce même si certains cinéphiles lui préfèrent aujourd'hui La Bête tue de sang froid d'Aldo Lado (beaucoup mieux maîtrisé et interprété je dois avouer), remake transalpin gagnant en estime au fil des décennies. Quoiqu'il en soit, la Dernière maison sur la gauche restera une pierre angulaire d'un genre marginal et couillu, pionnier d'une horreur documentée où l'horreur est simplement humaine. 
Pour public averti.

Bruno Dussart

mercredi 25 octobre 2017

TOOTSIE. Oscar de la Meilleure Actrice pour Jessica Lange.

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemotions.com

de Sydney Pollack. 1982. U.S.A. 1h55. Avec Dustin Hoffman, Jessica Lange, Teri Garr, Dabney Coleman, Charles Durning, Bill Murray, Sydney Pollack.

Sortie salles France: 2 mars 1983. U.S: 17 Décembre 1982

FILMOGRAPHIE: Sydney Pollack est un acteur, réalisateur et producteur américain, né le 1er juillet 1934 à Lafayette, dans l'Indiana (États-Unis) et mort à Los Angeles le 26 mai 2008. 1965: The Slender Thread. 1966 : Propriété interdite. 1968 : Les Chasseurs de scalps. 1968 : Le Plongeon de Frank Perry, terminé par Pollack non crédité. 1969 : Un château en enfer. 1969 : On achève bien les chevaux. 1972 : Jeremiah Johnson. 1973 : Nos plus belles années. 1975 : Yakuza. 1975 : Les Trois Jours du condor. 1977 : Bobby Deerfield. 1979 : Le Cavalier électrique. 1981 : Absence de malice. 1982 : Tootsie. 1985 : Out of Africa. 1990 : Havana. 1993 : La Firme. 1995 : Sabrina. 1999 : L'Ombre d'un soupçon. 2005 : L'Interprète. 2005 : Esquisses de Frank Gehry.


Gros succès international des années 80 (en France il engrange 3 840 083 entrées) si bien qu'aujourd'hui il est répertorié comme un classique du genre, Tootsie est une comédie pétillante comme on n'en voit plus (ou alors si peu) de nos jours. Acteur au chômage débordant de talent et d'ambition, Michael Dorsey risque le tout pour le tout en se fondant dans le corps d'une sexagénaire prénommée Dorothy afin de mieux convaincre les producteurs d'un soap. Et le succès inespéré de se produire si bien que ce dernier, amoureux de sa partenaire à l'écran, essaie désespérément de s'extraire de la célébrité en osant dévoiler en dernier ressort son véritable visage ! Dirigé par l'éminent Sydney Pollack se refusant à vulgariser le thème du travestissement avec subtile émotion et parmi l'humilité de ses acteurs, Tootsie est justement l'occasion de mettre en valeur une pléiade de comédiens aux tempéraments sémillants, et ce jusqu'aux seconds-rôles. Tant auprès de Dabney Coleman en metteur en scène vaniteux, de Charles Durning en veuf subitement aimant de Dorothy, de Bill Murray en acolyte conciliant, de George Gaynes en acteur sclérosé gagné par la galanterie (car lui aussi épris de Dorothy !) que de l'explosive Teri Garr dans un rôle taillé sur mesure de maîtresse infortunée.


Outre l'intensité attachante de ces derniers issus de l'ancienne école, Tootsie décuple le pouvoir attractif de sa tendre fantaisie sous l'abattage de Dustin Hoffman partagé entre l'impudence de son personnage fictif, ses réels sentiments auprès de sa tendre partenaire hors écran et ses remords à oser duper son entourage dans celle d'une actrice autoritaire au tempérament autonome. A ses côtés, lui partageant sobrement la vedette du soap, la radieuse Jessica Lange (justement récompensée de l'oscar de la meilleure actrice dans un second-rôle) illumine l'écran dans sa fonction d'aimable confidente sitôt le tournage achevé car peu à peu enivrée par le magnétisme (masculin) de sa partenaire Dorothy. Débordante de charme et d'innocence, Jessica Lange insuffle une sensuelle affection, de par ses soupçons de sentiments véhiculés par son éventuelle homosexualité qu'elle se refuse à accepter. Sa délicate relation entamée avec Dorothy prouvant par cette occasion frauduleuse que l'amour ne se commande pas lorsque les sentiments restent plus forts que la raison quelque soit notre orientation sexuelle.


A travers ce jeu de cache-cache romantique compromis au vaudeville rocambolesque (les gags arborant une cocasserie toujours révérencieuse eu égard du tendre humanisme d'Hoffman), Tootsie traite des délicats problèmes du chômage, de la gestion de la starisation, de la quête identitaire, de l'affirmation de soi et de l'émancipation féminine avec une émotion subtilement poignante. Le divertissement efficacement structuré alternant mutuellement drôlerie, charme et romance parmi la motricité d'un scénario retors et celle d'un casting en roue libre. Un excellent anxiolytique aussi frais et pétillant qu'une coupe de champagne ! 

Eric Binford
3èx

Récompenses: Oscars 1983 : meilleure actrice dans un second rôle pour Jessica Lange
Golden Globes 1983 : meilleur film musical ou de comédie, meilleur acteur dans un film musical ou une comédie pour Dustin Hoffman, meilleure actrice dans un second rôle pour Jessica Lange
British Academy Film Awards 1984 : meilleur acteur pour Dustin Hoffman, meilleurs maquillages

mardi 24 octobre 2017

WIND RIVER. Prix de la mise en scène, Cannes 2017.

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site teaser-trailer.com

de Taylor Sheridan. 2017. U.S.A. 1h50. Avec Jeremy Renner, Elizabeth Olsen, Kelsey Chow, Jon Bernthal, Graham Greene, Julia Jones, Gil Birmingham.

Sortie salles France: 30 Août 2017. U.S: 4 Août 2017

FILMOGRAPHIE: Taylor Sheridan est un acteur, scénariste et réalisateur américain, né le 21 mai 1970 à Cranfills Gap au Texas, . 2011: Vile. 2017: Wind River.


Thriller choc d'une intensité dramatique aussi bouleversante qu'impitoyable, Wind River n'a pas volé son prix de la mise en scène à Cannes alors qu'il s'agit de la seconde réalisation du néophyte Taylor Sheridan. Ce dernier parvenant à tailler un suspense anxiogène autour d'un sordide fait divers (la découverte du cadavre d'une jeune indienne) qu'une agent du FBI et un chasseur vont tenter d'élucider en plein coeur de montagnes enneigées (magnifique paysages épurés). Intense et poignant quant à l'humanisme fragile que nos protagonistes véhiculent sans fard de par leur pudeur contenue et leur non-dit, Wind River nous immerge dans leur état de désagrément et d'impuissance morale sitôt les circonstances de la mort dévoilées ainsi que le chemin de croix que cette dernière parcourut en lieu et place de survie durant 10 kms dans une nature réfrigérante à - 30° ! Un exploit héroïque tenant du surpassement de soi auquel son ectoplasme va planer sur les épaules de nos héros durant leur investigation émaillée de rencontres ombrageuses cédant parfois aux brutaux éclairs de violence d'une vibrante intensité dramatique. Cet alliage d'émotions fulgurantes suscitant le vertige au spectateur (le + sensible) impliqué dans un règlement de compte d'une folie suicidaire !


Un peu comme l'avait d'ailleurs magnifiquement opéré Stanley Kubrick avec Full Metal Jacket (ou Spielberg avec le soldat Ryan...) lorsque les impacts de balles perforaient les chairs des victimes en émoi ou à l'agonie. La encore j'insiste sur le caractère éprouvant, voir résolument bouleversant de cette brutalité incisive que le réalisateur parvient à mettre en exergue avec un réalisme aride, et ce sans parti-pris racoleur. Notamment en tenant compte du caractère sournois du (ou des) coupable(s) compromis à la discrimination raciale et de rendre hommage avec vibrante humilité à cette victime sacrifiée en tenant compte de son exploit surhumain. Véritable oraison funèbre auprès des familles de défuntes tentant rigoureusement de se reconstruire après une tragédie aussi inique qu'impromptue, Wind River traite des thèmes douloureux du souvenir, de la survie, de la résilience, du dépassement de la souffrance avec une pudeur à fleur de peau et une ambiguïté morale quant à l'illégalité de l'auto-justice. Car outre la subtilité de sa mise en scène à sacraliser le "thriller" par le biais d'une caractérisation psychologique fouillée (et limpide) engendrant une réflexion sur la perte de l'être aimée, la providence et la canalisation de la souffrance, Wind River est illuminé par les présences des comédiens Jeremy Renner (un regard viril chargé de cicatrices morales derrière sa carapace stoïque) et Elizabeth Olsen (poignante d'empathie auprès de la victime et de son co-équipier puis de pugnacité durant son ascension professionnelle). Ces derniers formant de manière impromptue un duo commun de justiciers solidaires impliqués dans l'instinct de vengeance et l'initiation d'une survie propre à l'héroïsme.


Un coup de poignard en plein coeur, inextinguible. 
Hommage déchirant à la communauté amérindienne du point de vue d'une jeune martyr d'une endurance physique et morale symbolique, Wind River laisse en état de mutisme sitôt le générique écoulé. Le film s'édifiant en bouleversant requiem auprès des victimes sacrifiées au moment où leur famille se résigne à se reconstruire, entre fragilité démunie et regain de résilience. De mon point de vue personnel (puisque j'en sors traumatisé et que rares sont les films où leur saillie de brutalité me bouleverse aux larmes), Wind River constitue sans doute un chef-d'oeuvre intimiste sur la gestion de la souffrance et de la déveine, faute de la lâcheté de l'homme incapable de réprimer ses bas instincts. 

Bruno Dussart.

Récompenses: Prix Un certain regard, Prix de la mise en scène, Cannes 2017
Festival international du film de Karlovy Vary 2017 : prix du public pour Taylor Sheridan, prix du président pour Jeremy Renner

vendredi 20 octobre 2017

LES VIKINGS

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site cover.box3.net

"The Vikings" de Richard Fleischer. 1958. U.S.A. 1h55. Avec Kirk Douglas, Tony Curtis, Janet Leigh, Ernest Borgnine, James Donald, Alexander Knox, Maxine Audley

Sortie salles France: 15 Décembre 1958. U.S: 28 Juin 1958

FILMOGRAPHIE: Richard Fleischer est un réalisateur américain né le 8 décembre 1916 à Brooklyn, décédé le 25 Mars 2006 de causes naturelles. 1952: l'Enigme du Chicago Express, 1954: 20 000 lieux sous les mers, 1955: les Inconnus dans la ville, 1958: les Vikings, 1962: Barabbas, 1966: le Voyage Fantastique, 1967: l'Extravagant Dr Dolittle, 1968: l'Etrangleur de Boston, 1970: Tora, tora, tora, 1971: l'Etrangleur de Rillington Place, 1972: Terreur Aveugle, les Flics ne dorment pas la nuit, 1973: Soleil Vert, 1974: Mr Majestyk, Du sang dans la Poussière, 1975: Mandingo, 1979: Ashanti, 1983: Amityville 3D, 1984: Conan le destructeur, 1985: Kalidor, la légende du talisman, 1989: Call from Space.


Grand classique hollywoodien au pouvoir de fascination trouble, de par son réalisme historique surfant dans un contexte de spectacle flamboyant,  Les Vikings est bel et bien un chef-d'oeuvre du film d'aventures au souffle épique d'une étonnante envergure. A l'instar de sa spectaculaire bataille finale déployant gros moyens techniques et moult figurants sous l'oeil avisé de Richard Fleischer en pleine possession de ses ambitions. La vigueur des combats barbares se renouvelant sans cesse grâce au dynamisme du montage véloce exploitant aussi bien décors naturels que ceux de la bastille avec un brio d'autant plus formel (sa photo sépia sublimant sans modération des images picturales que l'on croirait extrait d'un bouquin d'histoire !).


Outre ce morceau d'anthologie à la fois immersif et palpitant, le récit se permet en prime de renchérir le goût du spectacle avec une diabolique efficacité lorsque Einar et Erik iront se combattre épées à la main sur la tour de la chapelle. Là encore, Fleischer chorégraphie ce corps à corps avec une inventivité constante car multipliant les angles de vues alambiqués au sein d'un cadre exigu édifié sous haute altitude ! En prime de la qualité percutante d'un jeu d'acteurs expansifs (le toujours aussi fringant Kirk Douglas se dispute ardemment la vedette avec Tony Curtis inopinément crédible dans sa posture bourrue d'esclave en quête d'affirmation et de rébellion héroïque !), Les Vikings bénéficie d'un scénario solide autour de la rivalité de deux frères pour autant indulgents car (inconsciemment lucides de leur parenté puis) communément contraints de collaborer afin de soutirer la promise du roi anglais, Aella. Janet Leigh se glissant dans le corps ténu de la princesse Morgane avec douce fragilité, tourments et perplexité quant à sa nouvelle condition de soumise en proie au chantage des vikings complaisamment machistes et belliqueux.


Décrivant dans un premier temps avec réalisme et souci du détail, fougue passionnelle et violence incisive (même si le hors-champs est souvent préconisé) les us et coutumes des vikings et leur goût pour la guérilla (notamment leur code d'honneur de périr avec l'épée afin de gagner le repos dans l'au-delà), Richard Fleischer parvient à infiltrer un souffle à la fois épique et romantique au fil d'un récit fertile en dissension psychologique lorsque les liens du sang fraternel sont compromis par un terrible secret autour des sentiments d'une promise. Envoûtant, sauvage et d'une beauté formelle capiteuse ! 

Bruno Dussart
2èx

jeudi 19 octobre 2017

MORT SUSPECTE D'UNE MINEURE

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au blog Lupanarsvisions

"Morte sospetta di una minorenne / Too young to die" de Sergio Martino. 1975. Italie. 1h40. Avec Claudio Casinelli, Mel Ferrer, Lia Tanzi, Massimo Girotti, Barbara Magnolfi.

Inédit en salles en France. Italie: 12 Août 1975

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Sergio Martino est un réalisateur, producteur et scénariste italien né le 19 Juillet 1938 à Rome (Italie). 1970: l'Amérique à nu. Arizona se déchaine. 1971: l'Etrange vice de Mme Wardh. La Queue du Scorpion. l'Alliance Invisible. 1973: Mademoiselle Cuisses longues. 1973: Torso. 1975: Le Parfum du Diable. 1975: Morte sospetta di una minorenne. 1977: Mannaja, l'homme à la hache. 1978: La Montagne du Dieu Cannibale. 1979: Le Continent des Hommes poissons. Le Grand Alligator. 1982: Crimes au cimetière étrusque. 1983: 2019, Après la Chute de New-York. 1986: Atomic Cyborg. 1989: Casablanca Express. 1990: Mal d'Africa. Sulle tracce del condor.


Inédit en salles et sous support numérique sur notre territoire, Mort suspecte d'une mineure combine les composantes (en vogue) du polar (les puristes lui préfèreront le terme "poliziesco") et du giallo autour de l'efficacité d'un script assez bien structuré dénonçant (comme son confrère La Lame Infernale) la corruption d'un notable particulièrement aguiché par la coke et les jeunes adolescentes. En filature, un commissaire aux méthodes expéditives tente de découvrir le ou les coupables du meurtre sordide d'une mystérieuse adolescente avec l'appui d'un chapardeur véloce. Plutôt nerveux par son action policière entrebâillée d'une poursuite automobile étonnamment cocasse et assez violent auprès de quelques meurtres stylisés, Mort suspecte d'une mineure constitue un bon divertissement sous l'impulsion musicale du score percutant de Luciano Michelini n'ayant rien à envier au groupe Goblin (une partition rock et entêtante si bien que le chef-d'oeuvre d'Argento, Les Frissons de l'Angoisse s'y fait instinctivement écho !). Sans pour autant laisser de souvenir impérissable, cette série B correctement emballée par le spécialiste Sergio Martino doit notamment son capital sympathie grâce à la solidité de son casting réunissant Claudio Casinelli (très à l'aise en flic réactionnaire entêté), le vétéran Mel Ferrer et la charmante Barbara Magnolfi dans un rôle toutefois assez discret je dois avouer. Enfin, et à moindre échelle, on ne reste pas insensible à l'esthétisme raffiné des décors domestiques typiquement transalpins et parfois même baroques. A découvrir.


Eric Binford.

mercredi 18 octobre 2017

BETTER WATCH OUT

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Chris Peckover. 2016. 1h29. U.S.A/Australie. Avec Levi Miller, Olivia DeJonge, Ed Oxenbould, Patrick Warburton, Dacre Montgomery, Virginia Madsen.

Sortie salles France: Prochainement. U.S: 6 Octobre 2017

FILMOGRAPHIEChris Peckover est un réalisateur américain.
2010: Undocumented. 2016: Better Watch out.


Conte de noel horrifique d'une saveur vitriolée dans son jeu de cache-cache avec la peur et de manipulation morale auprès des victimes démunies, Better Watch Out demeure une heureuse surprise dans le paysage familièrement formaté du genre car si peu avare en originalité, impudence et créativité. D'une audace détonnante pour ses éclairs de violence tranchés, cette série B remarquablement menée et techniquement maîtrisée (notamment pour l'inventivité et la souplesse de certains plans vertigineux et pour la flamboyance de sa photo !) doit son salut à son scénario à tiroirs constamment surprenant, et aux portraits juvéniles que forment des ados dévergondés.


En pleine période de Noël, Ashley (incarnée par la séduisante et néophyte Olivia DeJonge préalablement entrevue dans The Visit !) joue la babysitter auprès d'une famille respectable en gardant leur fils unique. Mais l'intrusion de mystérieux tueurs dans la demeure va inciter le duo à faire preuve de ruse et courage pour rester en vie, notamment en s'efforçant de récupérer l'arme du paternel planqué sous son lit. Voilà pour le pitch présageant un huis-clos tendu et effréné, sorte de pastiche horrifique de Maman j'ai raté l'avion accouplé d'un autre illustre métrage dont je tairais le nom afin de préserver tout effet de surprise. Car cumulant sur un rythme soutenu péripéties et soubresauts avec autant d'intelligence que d'efficacité (notamment au niveau des réactions censées des ados en porte-à-faux se mesurant à leur vaillance et à leur esprit de provocation), Better Watch out est une pochette-surprise jusqu'au-boutiste. Le spectateur s'interrogeant de prime abord à savoir si dans la séquence redoutée le réalisateur osera aller jusqu'au bout de son concept criminogène par le biais d'idées putassières sachant qu'en l'occurrence tous les protagonistes (ou plutôt la plupart) sont des ados pré-pubères portés sur la sexualité, le machisme et le désir du dépassement de soi.


Progressivement malsain donc quant à la tournure (radicale) des évènements, voir parfois même choquant et dérangeant (sans dévoiler les résultantes des situations stressantes d'embrigadement !), Better Watch Out constitue une farce méchamment sardonique, pied de nez au politiquement correct en cette période sereine des fêtes de Noël. Intense, inventif, subversif, assez captivant et d'un humour noir décapant, le divertissement convainc d'autant mieux sous l'impulsion de comédiens juvéniles épatants de fourberie ou de sobre appréhension du côté des victimes. Spoil ! En tirant mon chapeau à un des acteurs dont je tairais le nom car portant le film sur ses épaules avec un charisme d'une vénéneuse séduction ! Fin du Spoil. Pour l'anecdote, on est également ravi de retrouver en second-plan l'une des stars des années 80, Virginia Madsen (Electric Dreams, Dune, Hot Spot, Highlander, le retour, Candyman, etc...), presque méconnaissable dans son visage tuméfié. Très sympa. 

P.S: Je vous déconseille de visionner tous trailers ou éventuels extraits afin de préserver les nombreux retournements de situation !

En remerciant Pascal Frezzato pour la découverte !
Bruno Matéï

mardi 17 octobre 2017

LE CLAN DES SICILIENS

                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

de Henri Verneuil. 1969. France/Italie. 2h05. Avec Jean Gabin, Alain Delon, Lino Ventura, Irina Demick, Yves Lefebvre, Marc Porel, Elisa Cegani, Amedeo Nazzari, Danielle Volle, Philippe Baronnet.

Sortie salles France: 5 Décembre 1969

FILMOGRAPHIE: Henry Verneuil (de son vrai nom Achod Malakian) est un réalisateur et scénariste  français d'origine arménienne, né le 15 Octobre 1920 à Rodosto, décédé le 11 Janvier 2002 à Bagnolet. 1951: La Table aux crevés. 1952: Le Fruit Défendu. 1952: Brelan d'As. 1953: Le Boulanger de Valorgue. 1953: Carnaval. 1953: l'Ennemi public numéro 1. 1954: Le Mouton a 5 pattes. 1955: Les Amants du Tage. 1955: Des Gens sans importance. 1956: Paris, palace Hôtel. 1957: Une Manche et la belle. 1958: Maxime. 1959: Le Grand Chef. 1959: La Vache et le Prisonnier. 1960: l'Affaire d'une Nuit. 1961: Le Président. 1961: Les Lions sont lâchés. 1962: Un Singe en Hiver. 1963: Mélodie en sous-sol. 1963: 100 000 Dollars au Soleil. 1964: Week-end à Zuydcoote. 1966: La 25è Heure. 1967: La Bataille de San Sebastian. 1969: Le Clan des Siciliens. 1971: Le Casse. 1972: Le Serpent. 1975: Peur sur la ville. 1976: Le Corps de mon ennemi. 1979: I comme Icare. 1982: Mille Milliards de Dollars. 1984: Les Morfalous. 1991: Mayrig. 1992: 588, rue du Paradis.


Triomphe en salles à sa sortie avec plus de 4 821 585 entrées, le Clan des Siciliens est la réunion de talents hors-pair qu'Henri Verneuil s'est permis de recruter parmi lesquels Jean Gabin, Alain Delon et Lino Ventura, et ce afin de parfaire un polar de l'ancienne école. Production franco-italienne, le cinéaste s'entoure également de la contribution d'Ennio Morricone pour transfigurer une mélodie élégiaque restée dans toutes les mémoires. Un thème métronomique que l'on entend tout le long du récit car collant si bien aux sobres déplacements d'une mafia partagée entre son orgueil professionnel et la rancune d'un code d'honneur conjugal bafoué. A peine évadé de prison, Roger Sartet propose à son ami sicilien de dévaliser une bijouterie avec l'accord du patriarche Vittorio. Réticent de prime abord, ce dernier finit par céder au vu de son alléchant casse notamment lorsque Roger lui annonce qu'il possède la topographie de la bijouterie. Mais une idée plus judicieuse amène Vittorio à reconsidérer leur plan. 


Film policier d'une distinction impériale si je me réfère au jeu dépouillé des 3 monstres sacrés cités plus haut, Le Clan des Siciliens constitue un grand moment de cinéma sous l'autorité infaillible d'Henri Verneuil érigeant, une fois n'est pas coutume (pointe d'ironie !), un modèle de mise en scène. Notamment auprès de l'épicentre du suspense, un fameux détournement d'avion qu'imposera la famille Manalese avec un flegme imperturbable si bien qu'aucune violence n'est imputée aux passagers (à l'exception d'un seul un brin zélé que Roger corrigera d'un coup de pied !). Une séquence d'anthologie d'une subtile intensité par sa coordination professionnelle réfutant tout dérapage criminel sous le pilier d'un habile montage à couper au rasoir. Outre la solidité de l'intrigue à la structure symétrique et un rebondissement aussi retors que dérisoire quant à la déroute du clan mafieux (une simple trahison d'adultère), Henri Verneuil transcende sa mise en scène au cordeau avec l'appui de ses trois immenses acteurs d'un charisme viril qu'on ne retrouve plus dans le cinéma mainstream. Ventura/Delon/Gabin jouant le jeu du chat et de la souris pour la mise du pouvoir dans une posture à la fois impassible, caractérielle et bourrue.


Chef-d'oeuvre du polar français emprunt d'une touche transalpine auprès de l'intense mélodie du maestro Morricone et chez ses seconds-rôles photogéniques (outre les frères de la famille Manalese au regard torve, on est aussi sensible à l'implication véreuse et fragile de la soeur de Roger, et à celle compromise dans une adultère aléatoire !), Le Clan des Siciliens perdure son pouvoir de séduction et de fascination, de par sa narration plausible (on croit dur comme fer au casse du siècle !) et le romantisme (tragique) qu'insuffle le trio divergeant, Delon/Gabin/Ventura. Du grand art ! 

Bruno Dussart
3èx

lundi 16 octobre 2017

POUR 100 BRIQUES T'AS PLUS RIEN

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Senscritique.com

de Edouard Molinaro. 1982. France. 1h22. Avec Daniel Auteuil, Gérard Jugnot, Anémone, Jean-Pierre Castaldi, François Perrot, Paul Barge, Georges Géret, Darry Cowl.

Sortie salles France: 12 Mai 1982

FILMOGRAPHIE: Edouard Molinaro est un réalisateur et scénariste français, né le 13 Mai 1928 à Bordeaux, en Gironde, décédé le 7 Décembre 2013 à Paris.1958: Le Dos au mur. 1959: Des Femmes disparaissent. 1959: Un Temoin dans la ville. 1960: Une Fille pour l'été. 1961: La Mort de Belle. 1962: Les Ennemis. 1962: Les 7 Pêchers capitaux. 1962: Arsène Lupin contre Arsène Lupin. 1964: Une Ravissante Idiote. 1964: La Chasse à l'Homme. 1965: Quand passent les faisans. 1967: Peau d'Espion. 1967: Oscar. 1969: Hibernatus. 1969: Mon Oncle Benjamin. 1970: La Liberté en Croupe. 1971: Les Aveux les plus doux. 1972: La Mandarine. 1973: Le Gang des Otages. 1973: L'Emmerdeur. 1974: L'Ironie du sort. 1975: Le Téléphone Rose. 1976: Dracula, père et fils. 1977: L'Homme pressé. 1978: La Cage aux Folles. 1979: Cause toujours... tu m'intéresses ! 1980: Les Séducteurs. 1980: La Cage aux Folles 2. 1982: Pour 100 briques t'as plus rien... 1984: Just the way you are. 1985: Palace. 1985: L'Amour en douce. 1988: A gauche en sortant de l'ascenseur. 1992: Le Souper. 1996: Beaumarchais, l'insolent. 1996: Dirty Slapping (court-métrage).


Comédie populaire des années 80 dirigée par le spécialiste du genre, Edouard MolinaroPour 100 briques t'as plus rien s'avère irrésistible de drôlerie sous l'impulsion du duo pétulant Gérard Jugnot/Daniel Auteuil incarnant des braqueurs de banque à la p'tite semaine avec une fringance saillante. Licencié de son emploi de serrurier, Sam propose avec son comparse Paul de braquer une banque en guise de survie. Après un entrainement intensif dans le logement de la petite amie de Sam, ces derniers décident de passer à l'action. Complètement improbable car multipliant les situations saugrenues (ah cette fameuse transaction avec le personnel bancaire !) autour d'une prise d'otages que 2 braqueurs endimanchés dirigent avec (une fantaisiste) détermination, Pour 100 braques t'as plus rien ne s'embarrasse nullement de crédibilité afin de privilégier les facéties déjantées de nos braqueurs redoublants de maladresses et d'utopie pour parfaire leur dessein.


Truffé de gags désopilants grâce à l'inventivité d'idées politiquement incorrectes et de situations grotesques tournant autour de l'appât du gain sous l'autorité du duo survolté Jugnot/Auteuil, Pour 100 briques t'as plus rien transpire la sincérité (assortie d'une générosité) pour amuser le spectateur immergé dans une action fertile en rebondissements. Outre la fougue expansive de nos deux illustres acteurs s'en donnant à coeur joie dans les effronteries délinquantes et criminelles (notamment la fausse mort de Sam !), et des seconds-rôles aussi convaincants dans leur fonction de victime en sursis, on peut notamment compter sur l'aplomb spontané d'Anémone se fondant dans le corps d'une otage avec un bagout décomplexé ! Plusieurs séquences délirantes émanant de son impertinence à débriefer la situation de crise à la police et aux médias tout en se concertant avec les malfrats. Sam, dragueur invétéré, n'hésitant pas à l'accoster afin de mieux parvenir à ses fins cupides. 


Divertissement mineur sans prétention mené à 100 à l'heure, Pour 100 briques t'as plus rien ne manque ni de drôlerie, ni d'audaces ni d'originalité pour pasticher une improbable prise d'otages sous l'impulsion de comédiens pétris de ferveur et de complicité amicale dans leur fonction vénale. Un antidépresseur d'une efficacité en roue libre !

Eric Binford.
3èx

vendredi 13 octobre 2017

MORTS SUSPECTES

                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Coma" de Michael Crichton. 1978. U.S.A. 1h53. Avec Geneviève Bujold, Michael Douglas,
Elizabeth Ashley, Rip Torn, Richard Widmark, Lois Chiles.

Sortie salles France: 28 Juin 1978. U.S: 6 Janvier 1978

FILMOGRAPHIE: Michael Crichton est un écrivain, scénariste, producteur et réalisateur américain, né le 23 Octobre 1942, décédé le 4 Novembre 2008 à Los Angeles. 1972: Pursuit (télé-film inédit en France). 1973: Mondwest. 1978: Morts Suspectes. 1979: La Grande Attaque du Train d'or. 1981: Looker. 1984: Runaway, l'évadé du futur. 1989: Preuve à l'appui (Physical Evidence).


Thriller médical diablement ficelé sous l'autorité du maître du genre; l'écrivain et réalisateur Michael Crichton (on lui doit le sympathique Runaway, l'évadé du Futur, le formidable La Grande Attaque du train d'or et les génialement visionnaires Mondwest et Looker !), Morts Suspectes (on lui préfère son titre US plus concis et pertinent) est une machine à suspense haletante sous l'impulsion d'une Geneviève Bujold omniprésente dans sa fonction investigatrice. Médecin chef dans un éminent hôpital, Susan Wheeler s'inquiète de nombreux cas inexpliqués de comas durant toute l'année écoulée. Toujours plus suspicieuse à l'idée d'une conspiration depuis la mort subite de son amie d'enfance, elle tente de convaincre son compagnon que sa paranoïa n'est nullement le fruit de son imagination. S'efforçant scrupuleusement, avec réalisme et dextérité, à retranscrire la lente dérive morale de l'héroïne en proie à une paranoïa grandissante quant à son interrogation sur ses morts cérébrales inexpliquées, Morts Suspectes joue de prime abord la carte de la suggestion avec souci documenté. Il s'agit d'ailleurs à mon sens de la meilleure partie du récit dans son art de cultiver  angoisse est inquiétude sous-jacentes (tant auprès des maigres indices que des énigmes en suspens que l'héroïne s'efforce de reconstituer) sans avoir recours aux traditionnelles ficelles du genre.


L'amant de Susan (que campe sobrement le jeune Michael douglas), en proie aux chamailleries conjugales avec cette dernière, cultivant notamment une certaine densité à l'intrigue quant à sa perplexité de se laisser convaincre par elle en crise parano, quand bien même le spectateur est peut-être en droit de lui suspecter une éventuelle complicité auprès des trafics de cadavres. Intrigant et subtilement anxiogène quant aux portraits chafouins d'autres membres médicaux redoublants de vigilance et d'interrogation sur le rôle accusateur de Susan, Morts Suspectes distille un suspense progressif au fil des stratégies illégales de celle-ci délibérée à découvrir le fin mot de l'énigme avec une audace vaillante. La seconde partie, beaucoup plus haletante et nerveuse mais pour autant conventionnelle dans sa trajectoire de survie éculée, décuple suspense et tension lors d'une course-poursuite tentaculaire que Susan prolonge avec autant de pugnacité que de crainte et désarroi. Exploitant astucieusement les décors hospitaliers constituées de chambres froides, corridors, sous-sols et conduits que l'héroïne ne cesse de parcourir afin de déjouer l'ennemi et repérer le nid du poison (le fameux monoxyde carbone !), Michael Crichton ne laisse aucun répit au spectateur plongé dans un survival médical certes plutôt classique dans ce second acte (même si l'anticipation pointe agréablement le bout de son nez !) mais pour autant redoutablement efficace et réservant en dernier ressort un éprouvant rebondissement lorsque Susan risque de trépasser sur la table d'opération.


Formidable machine à suspense impeccablement menée et agrémentée de quelques péripéties particulièrement tendues, Morts Suspectes emprunte les thèmes de la corruption médicale au profit de savants fous cupides au sein d'un contexte moderne tristement actuel. Renforcé d'une solide distribution (principalement Geneviève Bujold plutôt viscérale dans son jeu parano et ses bravoures physiques), ce petit classique des seventies reste donc plus de 4 décennies plus tard toujours aussi palpitant et captivant en dépit de quelques scories. 

Bruno Dussart
3èx

jeudi 12 octobre 2017

MAIS OU EST DONC PASSEE LA 7E COMPAGNIE ?

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Robert Lamoureux. 1973. France. 1h29. Avec Jean Lefebvre, Pierre Mondy, Aldo Maccione,
Robert Lamoureux, Pierre Tornade, Jacques Marin, Marcelle Ranson-Hervé, Érik Colin.

Sortie salles France: 13 Décembre 1973

FILMOGRAPHIERobert Lamoureux est un acteur, humoriste, auteur dramatique, réalisateur, poète, parolier et scénariste français, né le 4 janvier 1920 à Paris et décédé le 29 octobre 2011 à Boulogne-Billancourt. 1960 : Ravissante. 1960 : La Brune que voilà. 1973 : Mais où est donc passée la septième compagnie ? 1974 : Impossible... pas français. 1975 : On a retrouvé la septième compagnie. 1975 : Opération Lady Marlène. 1977 : La Septième Compagnie au clair de lune.


Juin 1940. A la suite de la capture de la 7è compagnie par les allemands, trois soldats réfugiés dans une forêt tentent d'échapper à l'ennemi avec l'aide du lieutenant Duvauchel, rescapé d'un crash d'avion. Au fil de leur escapade semée d'heureuses et mauvaises rencontres, puis dans un concours de circonstances aléatoires, ils parviennent in extremis à libérer leur compagnie. 


Comédie troupière d'une rare indigence et platitude par son cheminement routinier, Mais ou est donc passé la 7è compagnie ? est à mon sens l'une des plus racoleuses arnaques du cinéma français ! Faute d'une réalisation académique peu inspirée, d'un scénario linéaire exploitant fort maladroitement péripéties cocasses, gags adipeux et rebondissements ballots, et d'aimables têtes d'affiche batifolant dans leur accoutrement militaire avec une verve crédule. Seule la présence furtive de Jacques Marin dans le rôle d'un épicier collabo eut parvenu à m'arracher quelques sourires lors d'une séquence de racket alimentaire perpétrée par nos trois franchouillards déguisés en allemands.


Insipide, soporifique et déprimant alors que deux autres suites verront le jour avec plus (le 2è opus) ou moins (le 3è) de succès commercial.

Eric Binford.