lundi 29 février 2016

ROOM. Oscar 2016 de la meilleure actrice, Brie Larson.

                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site les400coups.org

de Lenny Abrahamson. 2015. Canada/irlande. 1h57. Avec Brie Larson, Jacob Tremblay, Joan Allen, William H. Macy, Sean Bridgers, Tom McCamus.

Sortie salles France: 9 Mars 2016. U.S: 16 Octobre 2015.

FILMOGRAPHIE: Lenny Abrahamson est un réalisateur irlandais, né le 30 novembre 1966 à Dublin.
2004: Adam & Paul. 2007: Garage. 2012: What Richard Did. 2014: Frank. 2015: Room.


Prenant pour thème éculé le rapt lorsqu'une mère et son fils se retrouvent embrigadés dans un abris de jardin depuis 7 longues années, Lenny Abrahamson parvient à en détourner les codes grâce à l'intelligence de sa mise en scène scrutant les états d'âmes de nos protagonistes avec une sensibilité à fleur de peau. Sans misérabilisme ni pathos, le réalisateur nous transfigure un conte plein de poésie du point de vue candide de l'enfant tout en exacerbant un drame psychologique sur la difficile réadaptation sociale de la mère. La manière sobre dont est traitée cet enlèvement s'inscrit dans une pudeur fragile, de par les relations intimes qu'entretiennent quotidiennement Joy et Jack condamnés à coexister dans une chambre terne éludée de présence humaine. Seul la fenêtre d'une lucarne leur laisse parfois entrevoir l'exposition du soleil lorsque le temps en accorde une embellie.


Par le biais de cette vision édénique symbolisant l'épanouissement de la liberté, et par l'entremise de l'enseignement maternel, Lenny Abrahamson accorde beaucoup d'intérêt à éveiller les sentiments de l'enfant prochainement apte à se transcender pour tenter de braver leur exclusion. D'ailleurs, la séquence onirique auquel Jack contemple enfin pour la première fois l'immensité du ciel au moment même où sa vie en dépend affiche un lyrisme bouleversant ! Si la première partie dégage déjà une puissance émotionnelle pour les rapports étroits des otages livrés à leur seule compagnie, la seconde partie s'intéresse à leur rédemption dans le cadre autrement plus vaste et chaleureux d'une demeure familiale. En captant le regard attentionné et innocent de Jack curieux de comprendre le désarroi de sa mère, Lenny Abrahamson porte un témoignage bouleversant sur sa fragilité et son initiation à la sagesse tout en soulignant les liens amicaux inoxydables que peuvent sacraliser un enfant et sa mère. Si l'actrice Brie Larson n'a pas volé son oscar d'interprétation pour livrer avec une sobre émotion le douloureux portrait d'une mère traumatisée par sa claustration, je retiendrais surtout le jeu expressif de l'incroyable Jacob Tremblay se mettant à nu devant la caméra avec un naturel confondant. Une force de la nature transcendée par l'authenticité de son regard prude avide de découverte, de réconfort et d'amour.


Grâce au tact de sa mise en scène détournant les clichés du genre avec une habileté sans fard et à la présence incandescente des deux comédiens, Room transcende le drame psychologique par le biais du conte existentiel. Car sous l'alibi d'une situation traumatique d'embrigadement, Lenny Abrahamson en extrait un hymne à la vie, une initiation à l'apprentissage à travers les richesses de l'univers. Un moment intimiste d'une émotion suprême confinant au vertige par son intensité dramatique improvisée (dans le sens où le réalisateur ne surligne jamais les instants de gravité).

Récompenses:
Oscars du cinéma 2016 : Oscar de la meilleure actrice pour Brie Larson
Festival international du film de Toronto 2015 : People's Choice Award
Festival international du film de Vancouver 2015 : VIFF Award du meilleur film canadien
British Independent Film Awards 2015 : meilleur film indépendant international
Festival international du film des Hamptons 2015 : meilleur film
National Board of Review Awards 2015 :
Meilleure actrice pour Brie Larson
Meilleur espoir pour Jacob Tremblay
Golden Globes 2016 : meilleure actrice dans un film dramatique pour Brie Larson

vendredi 26 février 2016

TERREUR AVEUGLE

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site fan-de-cinema.com

"Blind Terror/ See No Evil" de Richard Fleischer. 1971. Angleterre. 1h29. Avec Mia Farrow, Dorothy Alison, Robin Bailey, Diane Grayson, Brian Rawlinson, Norman Eshley.

Sortie salles France: 2 Septembre 1971

FILMOGRAPHIE: Richard Fleischer est un réalisateur américain né le 8 décembre 1916 à Brooklyn, et décédé le 25 Mars 2006 de causes naturelles.
1952: l'Enigme du Chicago Express, 1954: 20 000 lieues sous les mers, 1955: les Inconnus dans la ville, 1958: les Vikings, 1962: Barabbas, 1966: le Voyage Fantastique, 1967: l'Extravagant Dr Dolittle, 1968: l'Etrangleur de Boston, 1970: Tora, tora, tora, 1971: l'Etrangleur de Rillington Place, 1971: Terreur Aveugle, les Flics ne dorment pas la nuit, 1973: Soleil Vert, 1974: Mr Majestyk, Du sang dans la Poussière, 1975: Mandingo, 1979: Ashanti, 1983: Amityville 3D, 1984: Conan le destructeur, 1985: Kalidor, la légende du talisman, 1989: Call from Space.


Thriller d'angoisse méconnu et peu diffusé à la TV malgré la notoriété de son auteur, Terreur Aveugle me fut dévoilé pour la première fois au début des années 80 sur la chaîne belge RTBF1. Sorti ensuite en location VHS chez quelques rares commerçants, sa sortie Dvd éditée en Belgique me permit de le redécouvrir dans une condition qualitative eu égard de sa copie épurée. Dans la lignée du classique de Terence Young, Seule dans la nuit, Terreur Aveugle illustre avec vigueur l'épreuve de force d'une célibataire en cécité, harcelée par un psychopathe. Séjournant chez son oncle et sa tante dans une maison rurale afin de mieux gérer son handicap, Sarah retrouve également son ancien amant avec qui elle pratique l'équitation. De retour après une promenade à cheval, elle part se délasser dans sa chambre sans savoir que des cadavres sont éparpillés dans les pièces de la demeure. C'est le début d'une descente aux enfers que Sarah va endurer pour se confronter à une menace invisible. Suspense horrifique rondement mené par sa tension distillée au compte-goutte et ses rebondissements justifiés, Terreur Aveugle part d'une idée solide (la cécité d'une victime tentant de déjouer une menace meurtrière) pour diluer une angoisse oppressante. Après la mise en place scrupuleuse des personnages, nous témoignons d'abord de la vision morbide de cadavres ensanglantés sans que la victime ne s'aperçoive au premier coup d'un quelconque incident.


Ce sentiment anxiogène de l'observer dans sa posture négligente est rehaussé de l'apparence suspecte d'un criminel flegmatique. Richard Fleischer se privant aussi de nous montrer son visage pour un motif que nous ne connaîtrons que dans la dernière partie. Passé ce premier acte cultivant un suspense en crescendo, la tension va graviter lorsque Sarah finira par découvrir l'horrible carnage. Par le biais d'un chaîne en or que le tueur avait égaré dans la maison, l'intrigue se focalise ensuite sur l'improvisation de cache-cache entre lui et la victime. Le spectateur assistant fébrilement aux stratégies de survie de notre frêle survivante habitée par une paranoïa préjudiciable (cadrages obliques et alambiqués à l'appui). Par le principe du huis-clos, Fleischer exploite intelligemment les décors familiers auquel le duo s'est malencontreusement fourvoyé. Et cela juste avant d'utiliser quelques idées ingénieuses pour les délocaliser vers la campagne anglaise. Cette dernière partie toujours plus tendue et éprouvante s'avère encore plus cruelle pour la condition molestée de la victime multipliant les risques, poursuites et tentatives d'évasion dans une cécité dénuée de repères. Alors que la conclusion semble toucher à son terme, Fleischer pousse un peu plus le vice lorsque Sarah est sur le point de trépasser sous notre impuissance. Une confrontation d'une rigueur émotionnelle éprouvante car privilégiant la caméra subjective afin de transcender une terreur asphyxiante.


Thriller remarquablement charpenté par l'efficacité de ses rebondissements, ses péripéties alertes et le brio de sa mise en scène, Terreur Aveugle honore le suspense horrifique autour du ressort psychologique. La densité humaine de Mia Farrow insufflant une émotion viscérale aussi désespérée que valeureuse par son statut d'handicapée en initiation de survie. A redécouvrir au plus vite ! 


jeudi 25 février 2016

PIRANHA 3D

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site fan-de-cinema.com

d'Alexandre Aja. 2010. U.S.A. 1h28. Avec Elisabeth Shue, Adam Scott, Christopher Lloyd, Eli Roth, Kelly Brook, Jerry O'Connell, Ving Rhames, Dina Meyer, Richard Dreyfuss, Steven R. McQueen.

Sortie salles France: 1 Septembre 2010 (Interdit aux - de 12 ans). U.S: 20 Août 2010

FILMOGRAPHIE: Alexandre Aja, (Alexandre Jouan-Arcady) est un réalisateur, producteur, scénariste, dialoguiste et acteur, né le 7 Août 1978 à Paris.
1999: Furia. 2003: Haute Tension. 2006: La Colline a des yeux. 2008: Mirrors. 2010: Piranha 3D. 2013: Horns.


Déclinaison moderne (3D à l'appui !) de Piranhas de Joe Dante en précisant qu'Aja n'a jamais souhaité remaker son illustre modèle, Piranha 3D fleure bon le divertissement du samedi soir dans son alliage de sexe, drogue et alcool sur fond de techno et de gore. Prenant pour cadre la fête juvénile du Spring Break réunissant chaque été des milliers de fêtards, l'intrigue met en parallèle la virée indocile du fils du shérif Julie Forester (Elisabeth Shue à la maturité charnelle !) incidemment invité sur un yacht parmi une équipe de vidéastes pornographes. Alors qu'un séisme vient de libérer une armada de piranhas préhistoriques du fond d'un lac, nos étudiants vont devoir user de bravoure et subterfuges afin de déjouer la menace. Témoins de la découverte de cadavres déchiquetés, Julie Forester et son adjoint Fallon vont s'efforcer d'annuler les festivités avant le carnage redouté.


Série B décomplexée où le mauvais goût du gore putassier flirte avec l'érotisme polisson, Piranha 3D est entièrement voué à divertir le spectateur embarqué dans un délire cartoonesque des plus débridés. Multipliant les blagues salaces et lutinages sous l'influence d'un vidéaste érotomane, Aja s'en donne aussi à coeur joie à exhiber les corps de sirènes dénudées afin de satisfaire notre instinct voyeuriste. Jalonné de clins d'oeil, de sympathiques caméos (Richard Dreyfuss, Eli Roth, Christopher Lloyd) et de clichés volontairement éculés (l'ado désobéissant embarqué malgré lui dans une épreuve de survie, la foule avinée reniant le danger malgré l'injonction de la police !), Piranha 3D affiche un dynamisme aussi intense que jouissif par ces situations alertes d'affronts et de plaisanteries lubriques. Le clou du spectacle culminant avec le carnage du Spring Break auquel des centaines d'étudiants se feront déchiqueter de la manière la plus cruelle et inventive. L'humour noir souvent présent n'hésitant pas parfois à côtoyer la scatologie potache. Bref, une séquence de panique à graver dans les annales pour son ampleur orgasmique d'orgie improvisée ! Epaulé d'effets spéciaux numériques assez réussis (en épargnant quelques plans foireux de CGI mal intégrés chez certaines actions), Piranha provoque notamment la fascination en la présence outre-mesure de piranhas issus d'un âge séculaire. Voraces, teigneux, démoniaques et véloces, leurs déplacements en masse provoquent une irrésistible vigueur pour leur appétence carnivore à dévorer le plus furtivement nos nageurs impudents. Nombre de confrontations alertes oscillant la claustration du huis-clos (la survivante confinée dans le sous-sol du yacht) et suspense oppressant quant au sort précaire des nageurs prisonniers de l'eau.


Fun et jouissif, pour ne pas dire jubilatoire lorsqu'on évoque sa séquence anthologique instaurée durant le Spring break, Piranha 3D cultive une insolence et une générosité expansives sous la spontanéité d'étudiants fébriles sévèrement brimés. Une série B d'exploitation d'une belle efficacité qu'Aja coordonne avec savoir-faire au rythme énergisant de la techno et d'une imagerie gore friponne.  

La Chronique de Piranhas: http://brunomatei.blogspot.fr/2015/06/piranhas.html

25.02.16
06.03.11 (269)

mercredi 24 février 2016

MON ROI. Prix d'Interprétation Féminine, Cannes 2015.

                                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site avisdupublic.net

de Maïwenn. 2015. France. 2h10. Avec Vincent Cassel, Emmanuelle Bercot, Louis Garrel, Isild Le Besco, Chrystèle Saint Louis Augustin, Patrick Raynal, Yann Goven, Paul Hamy, Djemel Barek.

Sortie salles France: 21 Octobre 2015

FILMOGRAPHIE: Maïwenn Le Besco est une réalisatrice, actrice, scénariste française, née le 17 Avril 1976 aux Lilas (Seine-Saint-Denis). 2004: I'm an actrice (court-métrage). 2006: Pardonnez moi. 2009: Le Bal des Actrices. 2011: Polisse. 2015: Mon Roi.


Quatre ans après le choc Polisse, la réalisatrice Maïwenn aborde le mélo sous l'impulsion d'un duo d'acteurs d'une belle vérité humaine. Mon Roi retraçant avec réalisme méticuleux la descente aux enfers d'un couple passionnel d'autant plus tributaire d'une responsabilité parentale. A la suite d'une chute de ski, Tony part en rééducation dans un centre spécialisé. C'est durant sa longue convalescence qu'elle se remémore sa romance partagée avec Georgio. Un charmeur plutôt instable et ingrat par son insouciance libertaire.


A partir d'une intrigue finalement banale s'attardant à décrire avec une certaine intensité la déliquescence morale d'une épouse inlassablement soumise par un escamoteur, Maïwenn compte surtout sur l'autorité viscérale de Vincent Cassel et Emmanuelle Bercot pour provoquer l'émotion entrecoupée d'éclairs de violence conjugale. Emmanuelle Bercot se livrant corps et âme devant la caméra à la manière d'une écorchée vive dans sa condition de souffre-douleur. Un portrait saisissant de femme fragile incapable de se délier de ses sentiments pour l'être aimé jusqu'au regain de conscience à ne plus se laisser chérir par la manipulation. Sa prestance naturelle inscrite dans une dignité féminine ne laissa pas indifférent le jury de Cannes si bien qu'il lui décerna un prix d'interprétation. Dans un rôle à contre-emploi de Don Juan phallocrate rempli d'orgueil, Vincent Cassel suscite souvent l'irritation, voir parfois même une violente antipathie par son indifférence et son mépris à contredire le désarroi de son épouse. Si le côté redondant de leurs prises de bec alternant séparations/réconciliations peut à force lasser une frange du public, la mise en scène plutôt maîtrisée et le réalisme imparti à la fragilité de leur quotidien parviennent modestement à transcender cette lacune. On peut également souligner le vent de liberté accordé aux seconds-rôles servant de pilier amical afin de soutenir (délibérément ou incidemment) le couple.


L'affliction amoureuse
Grâce à sa direction d'acteurs hors-pair où la diction des personnages épargne admirablement l'intonation théâtrale (trop rare pour ne pas le souligner chez le cinéma français), Mon Roi s'extirpe in extremis de la routine pour retracer avec une émotion tantôt prude tantôt brutale le chemin de croix vertigineux d'une femme aveuglée par la passion. Il en émane un moment d'émotion poignant émaillée de séquences intimistes d'une grave intensité, à l'instar de son épilogue bouleversant lorsque Maïwenn transfigure de manière chirurgicale la physionomie galante de Vincent Cassel sous le regard subtilement concentré d'Emmanuelle Bercot




mardi 23 février 2016

LAND OF THE DEAD (le territoire des morts).

                                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site imdb.com

de George A. Romero. 2005. U.S.A/Canada/France. 1h37. Avec Simon Baker, John Leguizamo, Dennis Hopper, Asia Argento, Robert Joy, Eugene Clark, Joanne Boland.

Sortie salles France: 10 août 2005. U.S: 24 juin 2005

FILMOGRAPHIE: Georges Andrew Romero est un réalisateur, scénariste, acteur, auteur américain, né le 4 Février 1940 à New-York. 1968: La Nuit des Morts-vivants. 1971: There's Always Vanilla. 1972: Season of the Witch. 1973: The Crazies. 1977: Martin. 1978: Zombie. 1981: Knightriders. 1982: Creepshow. 1985: Le Jour des Morts-vivants. 1988: Incidents de parcours. 1990: Deux Yeux Maléfiques. 1992: La Part des Ténèbres. 2000: Bruiser. 2005: Land of the Dead. 2008: Diary of the Dead. 2009: Survival of the Dead.


20 ans après le Jour des Morts-vivantsGeorges Romero s'entreprend en 2005 d'offrir une suite à sa légendaire trilogie avec Land of the Dead. Série B horrifique avant tout conçue sur l'action d'affrontements homériques entre survivants et zombies, Land of the dead continue d'exploiter le thème de l'intelligence des zombies par le biais du souvenir et de l'instinct des habitudes que le docteur Frankenstein avait préalablement su expérimenter sur le sujet Bub. L'action d'aujourd'hui prend pour cadre une cité urbaine de Pittsburgh juste après l'apocalypse. Après avoir été trahi par le gouverneur Kaufman, un mercenaire latino s'y rebelle en lui dérobant l'éclaireur, un camion ultra perfectionné pourvu de lance-roquettes. Exigeant une rançon contre l'engin blindé, Kaufman renonce à sa transaction et fait appel à Riley afin de récupérer l'éclaireur. Epaulé de son adjoint Charlie et d'une marginale, ils partent accomplir leur mission au moment même où les zombies doués de lucidité s'organisent en masse pour affronter les vivants.


Etablissant une analogie au terrorisme du 11 septembre par le biais (avant-coureur) d'une menace interne, Land of the Dead exploite une intrigue suffisamment haletante et captivante pour y dénoncer la responsabilité d'un dirigeant en tractation avec un activiste aussi véreux. En l'occurrence, Cholo, employé de ravitaillement de nourriture délibéré à récupérer sa part du gâteau après avoir été dupé. Avec ironie (notamment le portrait à contre-emploi de Dennis Hopper) et une violence gore décomplexée, George A Romero parvient à mettre en exergue une flamboyante bande-dessinée conçue sur l'efficacité d'enjeux de survie entre mercenaires, rupins et zombies. Outre l'intensité de cette dangereuse mission à se disputer la mise d'un fourgon customisé, Romero s'attarde également à dresser un portrait humaniste sur cette communauté désoeuvrée de zombies en instance de conscience. Eveillés par la perspicacité rebelle d'un afro américain, ces derniers vont s'efforcer de concrétiser leur vengeance après avoir été exploités par la cupidité de leurs ancêtres. Formellement fascinant dans une photo scope aux teintes noires/azur, la scénographie urbaine affiche un onirisme macabre aussi envoûtant que mélancolique, comme le soulignent les états d'âme endeuillés de nos zombies et la loyauté de dernier ressort des survivants. Pourvu d'un charisme infaillible, les comédiens remarquablement dessinés parviennent à donner chair à leur personnage avec une vérité humaine parfois poignante et un héroïsme jamais pédant (si on épargne le zèle assumé de l'excellent John Leguizamo). Outre ses têtes d'affiche souvent méconnues mais très attachantes par leur esprit de cohésion (principalement le duo Riley/Charlie), Land of the Dead est également rehaussé de la présence photogénique des zombies putréfiés. Des êtres hagards sillonnant les ruelles urbaines avec une amertume souvent empathique dans leur condition démunie. Sous l'impulsion de cette menace en voie de sédition, l'univers crépusculaire dans lequel ils évoluent nous magnétise l'esprit parmi la sobre émotion d'un score fragile (on pense aussi à l'ambiance noire et ensorcelée d'un Carpenter).


Si Land of the Dead n'atteint jamais la quintessence de la trilogie par son manque d'ambition et le contexte éculé de son message socio-politique, George Romero parvient tout de même à cristalliser une solide série B constamment efficace par sa structure narrative vigoureuse et la virilité d'un jeu d'acteurs à la complicité commune. Petit bémol, et en dépit de sa sympathique prestance, on aurait peut-être aimé un peu plus d'entrain de la part d'Asia Argento pour affirmer sa stature guerrière malgré la beauté effrontée de son charme félin. 



lundi 22 février 2016

LES 7 CITES D'ATLANTIS

                                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site wrongsideoftheart.com

"Warlords of Atlantis" de Kevin Connor. 1978. Angleterre. 1h36. Avec Doug McClure, Peter Gilmore, Shane Rimmer, Capitaine Daniels, Lea Brodie, Michael Gothard, Hal Galili, John Ratzenberger, Derry Power.

Sortie salles France: 12 juillet 1978. U.S: 15 Mai 1978

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Kevin Connor est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né en 1937 à Londres (Royaume-Uni).
1973: Frissons d'outre-tombe. 1975: Le 6è Continent. 1976: Trial by combat. 1976: Centre Terre, septième continent. 1977: Le Continent Oublié. 1978: Les 7 cités d'Atlantis. 1979: Le Trésor de la Montagne Sacrée. 1980: Nuits de Cauchemar. 1982: La Maison des Spectres.


Spécialiste de l'aventure mythologique comme en témoignent le 6è Continent, Centre Terre-septième continent et Le Continent Oublié, Kevin Connor rajoute une corde à son arc avec Les 7 cités d'Atlantis, juste avant d'achever son cycle parmi le Trésor de la Montagne sacrée. Un spectacle familial aussi exaltant que spectaculaire lorsqu'une poignée d'aventuriers échouent sur l'île engloutie d'Atlantis pour y côtoyer une étrange civilisation. Car depuis la dictature du chef Atmir, ils vont devoir user de stratégies afin de s'échapper de ce lieu tenu secret depuis des millénaires. Nanti d'effets spéciaux cheap mais néanmoins assez convaincants lorsqu'il s'agit de donner chair aux monstres préhistoriques, Les 7 Cités d'Atlantis exalte un parfum rétro réjouissant dans son alliage de fantaisie et d'action périlleuses, de fantastique, de merveilleux mais aussi d'anticipation, sachant que le peuple extra-terrestre d'Atlantis est issu de la planète Mars. Si l'intrigue simpliste n'apporte aucune surprise au cheminement de survie de nos héros, la vigueur des affrontements avec les monstres, les échanges de tirs entamés contre l'ennemi et les situations excentriques (l'expérience du casque aux visions prémonitoires) cultivent une modeste efficacité sous l'impulsion attachante de personnages solidaires. C'est sans compter sur la bonhomie des comédiens de seconde zone (l'acteur fétiche en tête Doug McClurese) se prêtant au jeu héroïque avec ferveur alors que d'autres vont servir de transfuge pour endosser une fonction insidieuse inscrite dans la cupidité. Une manière efficiente d'épicer l'intrigue de quelques revirements autour de la convoitise d'une relique en or.


Cheap et naïf par son récit débridé, sa scénographie en carton pâte ou en matte-painting et ses monstres articulés, mais dégageant un charme rétro irrésistiblement attachant, Les 7 Cités d'Atlantis constitue un divertissement familial généreux et sincère dans sa modeste création dénuée de prétention. 


vendredi 19 février 2016

MASSACRE AU CAMP D'ETE

                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site contrebandevhs.blogspot.fr

"Sleepaway Camp" de Robert Hiltzik. 1983. U.S.A. 1h24. Avec Felissa Rose, Jonathan Tiersten,
Karen Fields, Christopher Collet, Mike Kellin, Katherine Kamhi, Paul DeAngelo, Tom Van Dell.

Sortie salles U.S: 18 Novembre 1983

FILMOGRAPHIE: Robert Hiltzik est un producteur, scénariste et réalisateur américain.
1983: Massacre au camp d'été. 2008: Return to Sleepaway Camp (Video) .


Précédé d'une réputation sulfureuse pour la révélation traumatique du meurtrier lors d'un dénouement resté dans toutes les mémoires, Massacre au camp d'été surfe sur la vague déferlante du Slasher forestier initié par Vendredi 13. Bien que sa conclusion aussi originale qu'effrayante parvient réellement à susciter un malaise tangible, Massacre au camp d'été fait pâle figure comparé à son modèle et ses disciples beaucoup plus ludiques et maîtrisés (Carnage, Humongous, Survivance, Rituals). En dépit d'idées plutôt originales pour le genre (le trouble identitaire chez un refoulé sexuel et l'homosexualité suggérée chez certains suppléants autoritaires), l'intrigue peine à motiver notre intérêt tant les situations éculées sont paresseusement exploitées autour des humiliations quotidiennes d'une souffre-douleur autrefois traumatisée par la mort accidentelle de son père. Depuis ses persécutions, ses oppresseurs vont un à un faire les frais d'un mystérieux meurtrier multipliant les stratégies afin de les trucider de la manière la plus cruelle.


Sans une once de suspense ou de tension et sans chercher à nous interroger sur l'éventuelle culpabilité d'un ou de plusieurs suspects, Robert Hiltzik émaille son récit de mises à mort gentiment spectaculaires mais désamorcées du hors-champ si on épargne un meurtre à l'arme blanche assez grotesque quand on se réfère à la posture inexpressive de la victime. Privilégiant la résultante du crime, le réalisateur réussit tout de même à provoquer une certaine répulsion lorsqu'un cuisinier s'ébouillante le visage avec une marmite et quand un ado se retrouve coincé dans les WC pour s'opposer à un essaim d'abeilles. Au faible intérêt narratif où l'on peine notamment à distinguer le caractère puéril de chaque personnage, le réalisateur n'épargne pas non plus le ridicule lorsque le moniteur du camp est persuadé que le fidèle ami d'Angela constitue le véritable meurtrier. Multipliant les outrances physiques et verbales, Mike Kellin (l'alcoolo entrevu dans le prologue de Survivance) fait preuve d'un cabotinage grotesque à tenter de nous convaincre que cet éventuel suspect serait à l'origine des méfaits. Difficile donc d'éprouver une quelconque empathie à cette clique de vacanciers passant leur temps à batifoler et flirter quand il ne s'agit pas de se gausser d'Angela. Souvent mutique et prostrée dans une lassante expression d'apathie, Felissa Rose parvient aussi timidement à éveiller la compassion dans son statut infortuné.


Faute d'une réalisation aseptique, d'un scénario redondant et d'une direction d'acteurs maladroite, Massacre au camp d'été ne parvient pas à captiver par son absence flagrante de suspense et de tension, et ce en dépit du contexte singulier imparti à la pathologie de l'assassin. Néanmoins, avec une grande indulgence, on peut juger le spectacle futilement plaisant avant de se confronter à l'horreur viscérale de sa conclusion perturbante. Rien que pour ce moment d'anthologie, Massacre au camp d'été mérite tout de même le coup d'oeil.