vendredi 22 juin 2012

Duel. Grand Prix, Avoriaz 1973

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site ivid.it

de Steven Spielberg. 1971. U.S.A. 1h32. Avec Dennis Weaver, Jacqueline Scott, Eddie Firestone, Lou Frizzell, Gene Dynarski, Lucille Benson, Tim Herbert, Charles Seel, Shirley O'Hara, Alexander Lockwood.

Sortie salles France: 21 Mars 1973. U.S: 13 Novembre 1971

FILMOGRAPHIE: Steven Allan Spielberg, Chevalier de l'Ordre national de la Légion d'honneur est un réalisateur, producteur, scénariste, producteur exécutif, producteur délégué et créateur américain, né le 18 décembre 1946 à Cincinnati (Ohio, États-Unis). 1971: Duel , 1972: La Chose (télé-film). 1974: Sugarland Express, 1975: Les Dents de la mer, 1977: Rencontres du troisième type, 1979: 1941, 1981: les Aventuriers de l'Arche Perdue, 1982: E.T. l'extra-terrestre , 1983: La Quatrième Dimension (2è épisode), 1984: Indiana Jones et le Temple maudit, 1985: La Couleur pourpre, 1987: Empire du soleil, 1989: Indiana Jones et la Dernière Croisade, Always, 1991: Hook, 1993: Jurassic Park, La Liste de Schindler, 1997: Le Monde Perdu, Amistad, 1998: Il faut sauver le soldat Ryan Saving Private Ryan, 2001: A.I., 2002: Minority Report, Arrête-moi si tu peux, 2004: Le Terminal , 2005: La Guerre des Mondes, 2006: Munich, 2008: Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal. 2011 : Cheval de guerre. 2012 : Lincoln. 2015 : Le Pont des Espions. 2016 : Le Bon Gros Géant. 2017 : Pentagon Papers. 2018 : Ready Player One. 2021 : West Side Story. 2022 : The Fabelmans. 


A l'origine, Duel est un télé-film réalisé par un jeune novice inconnu, Steven Spielberg, d'après une nouvelle de Richard Matheson. Fort de son succès d'audience à la télévision américaine, le réalisateur décide de rallonger son film de 16 minutes pour pouvoir le diffuser en salles. Le public et la critique sont conquis ! Ce film à petit budget tourné en 12 jours remporte un succès d'estime à travers le monde et se voit même gratifié 2 ans après sa sortie du prestigieux Grand Prix du Festival d'Avoriaz. Avec un pitch d'une désarmante simplicité (une course effrénée entre deux véhicules routiers à travers les routes de Californie, jusqu'à ce que l'un d'entre eux en perde le contrôle), le débutant Steven Spielberg concrétise un modèle de mise en scène et d'efficacité poussée à son paroxysme. Toute l'habileté de cette situation saugrenue digne d'un épisode de la 4è dimension est impartie à la dimension psychologique de son personnage principal, un employé de commerce en crise conjugale. Durant son périple bucolique à travers les routes clairsemées de la Californie, David Mann (campé par un Dennis Weaver hanté par l'appréhension !) va se retrouver confronté à une terrible épreuve de survie dans sa banalité quotidienne. Sous un soleil écrasant, un mystérieux routier dont on ne verra jamais le visage décide de poursuivre inlassablement cet automobiliste, alors que son unique vocation semble être un duel machiste jusqu'à ce que mort s'ensuive.


Mené de main de maître par un Steven Spielberg déjà surdoué pour élaborer des séquences virtuoses de courses-poursuites d'une rare intensité, Duel est un suspense délétère d'autant plus interlope que nous ne connaîtrons jamais l'identité du routier erratique. Une manière sournoise pour le réalisateur d'entretenir le mystère et ainsi exacerber une situation de crise anxiogène auprès de la victime dépourvue d'assistance. Avec son poids-lourd à combustible rubigineux, véritable monstre d'acier au faciès rugissant, ce conducteur n'aura de cesse de harceler cet employé de commerce déjà contrarié par un conflit familial. Père de famille pudique et inhibé, David va devoir user de bravoure et vaillance pour se dépêtrer d'un duel infernal entrepris avec cet antagoniste toujours plus intraitable. Pour accentuer la dimension humaine de la victime réprimandée, Spielberg établit notamment une introspection sur ses pensées intimes gagnées par la paranoïa. De façon intermittente, un monologue va nous rappeler que notre automobiliste désorienté est intrinsèquement épris d'une terreur incontrôlée par l'influence d'un psychopathe indéfectible. Emaillé de péripéties impromptues parfois spectaculaires (l'offensive du poids-lourd chez la propriétaire de reptiles ou l'altercation devant la voie ferrée), Duel nous transcende la plus aberrante course-poursuite automobile jamais conçue au cinéma !


A la limite du fantastique irrationnel, Duel est un chef-d'oeuvre immuable d'une puissance narrative et émotionnelle atypique ! Jouant avec les nerfs du spectateur autant que la victime prise à partie, Steven Spielberg aménage avec des moyens minimalistes un sommet de suspense Hitchcockien d'une efficacité extravagante ! Mis en scène avec précision, ce premier coup de maître d'un authentique magicien du 7 art symbolise notamment non sans originalité une allégorie sur la montée de la violence routière.

*Bruno
22.06.12. 4èx

Récompenses: Grand Prix à Avoriaz, 1973
Emmy Awards du Meilleur Montage sonore en 1972

jeudi 21 juin 2012

C'ETAIT DEMAIN (Time after Time). Grand Prix à Avoriaz 1980

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site every70smovie.blogspot.com

de Nicholas Meyer. 1979. U.S.A. 1h55. Avec Malcolm Mc Dowell, David Warner, Mary Steenburgen, Charles Cioffi, Kent Williams, Andonia Katsaros, Patti d'Arbanville, James Garrett, Leo Lewis.

Sortie salles France: 23 Janvier 1980. U.S: 31 Août 1979

Récompenses: Grand Prix et Antenne d'Or à Avoriaz, 1980.

FILMOGRAPHIE: Nicholas Meyer est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur américain, né  le 24 Décembre 1945 à New-York.
1979: C'était demain. 1982: Star Trek 2. 1983: Le Jour d'Après. 1985: Volunteers. 1988: Les Imposteurs. 1991: Company Business. Star Trek 6. 1999: Vendetta


Londres, 1893. Le célèbre écrivain HG Wells vient de mettre au point une machine à voyager dans le temps. Mais le tueur Jack l'Eventreur réussit à dérober son invention pour se projeter dans un futur beaucoup plus familier pour ses exactions meurtrières. HG Wells décide de le rejoindre afin de tenter de l'appréhender.


Couronné du Grand Prix et de l'Antenne d'Or à Avoriaz, C'était Demain doit sa renommée grâce à un scénario ciselé, des personnages finement dessinés et un concept délirant absolument stimulant. Imaginez H.G Wells, illustre romancier de science-fiction, expliquant à ces amis qu'il est le concepteur d'une machine à explorer le temps. Seulement voilà, parmi l'assemblée, John Stevenson, alias Jack l'éventreur, fait parti des invités et décide de dérober l'engin révolutionnaire pour fuir la police de Scotland Yard. Et HG Wells de s'empresser de le rejoindre dans le monde moderne du vingtième siècle à San Francisco ! Commence alors le début d'une palpitante chasse à l'homme me direz vous ! Oui et non, car de prime abord le réalisateur Nicholas Meyer souhaite privilégier la dimension psychologique de ces protagonistes réfugiés dans notre monde contemporain avili par la banalité d'une violence criminelle. Et notamment de mettre en exergue le comportement matérialiste de l'espèce humaine tributaire des nouvelles technologies du monde moderne. Alors que Jack l'Eventreur s'épanouit pleinement à perpétrer ses crimes dans cette nouvelle époque dissolue, H.G Wells établit la rencontre d'une ravissante banquière pour entamer une relation édénique. Si le réalisateur s'attarde avant tout à nous décrire une romance vertueuse entre les deux amants, c'est aussi pour nous familiariser à leurs rapports communs et confectionner un suspense grandissant quant à la sauvegarde de la dulcinée de Wells, prochaine cible de l'éventreur.


Avec sobriété et refus de surenchère, C'était Demain cultive son intérêt par une structure narrative charpentée mais aussi et surtout par la spontanéité fougueuse des personnages. En romancier avisé revenu de l'époque victorienne, Malcolm McDowell livre une interprétation timorée toute en pudeur. Sa posture de détective circonspect affublé d'un look rétro façon Sherlock Holmes, son intégrité et sa passion amoureuse de s'éprendre d'une femme avenante imposent un profil docile pour contraster avec la folie ambiante d'un nouveau siècle régi par l'incivisme. Secondé par la charmante Mary Steenburgen, l'actrice endosse une romantique anachronique éperdument vouée à rencontrer le prince charmant. Sa présence suave, sa voix lascive et son caractère altruiste insufflant un irrésistible pouvoir de séduction dont H.G Wells et le spectateur sont naturellement contraints d'y céder. Enfin, Jack l'éventreur est incarné par le génial David Warner, absolument magnétique dans son flegme odieusement délétère. Son hypocrisie arrogante et sa déraison meurtrière caractérisant avec rigueur un tueur impassible, presque mutique lors de ses exactions crapuleuses.


Mené de main de maître par un réalisateur inspiré et pourvu d'une grande intelligence dans sa structure narrative découlant d'une allégorie sur l'infection du Mal, C'était Demain n'a rien perdu de son attrait. La densité de son suspense progressif, son humour perspicace et surtout la dimension prude accordée à la tendre romance configurent une réussite de la science-fiction moderne !

21.06.12. 4èx
Bruno Matéï

mercredi 20 juin 2012

CREEPSHOW

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site webringjustice.wordpress.com

de Georges A. Romero. 1982. U.S.A. 1h59. Avec Hal Holbrook, Adrienne Barbeau, Fritz Weaver, Leslie Nielsen, Carrie Nye, E.G. Marshall, Viveca Lindfors, Ed Harris, Ted Danson, Stephen King, Warner Shook.

Sortie salles France: 22 Juin 1983. U.S: 12 Novembre 1982
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FILMOGRAPHIEGeorges Andrew Romero est un réalisateur, scénariste, acteur, auteur américain, né le 4 Février 1940 à New-York. 1968: La Nuit des Morts-vivants. 1971: There's Always Vanilla. 1972: Season of the Witch. 1973: The Crazies. 1977: Martin. 1978: Zombie. 1981: Knightriders. 1982: Creepshow. 1985: Le Jour des Morts-vivants. 1988: Incidents de parcours. 1990: Deux Yeux Maléfiques. 1992: La Part des Ténèbres. 2000: Bruiser. 2005: Land of the Dead. 2008: Diary of the Dead. 2009: Survival of the Dead. 2011: Deep Red.

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Georges Romero à la réalisation, Stephen King au poste de scénariste et Tom Savini pour les effets-spéciaux ! Trois légendes de l'horreur se sont réunies pour rendre hommage à leur comic books de jeunesse, les EC.Comics. Ces fameuses bandes dessinées pour adultes garnies d'ironie macabre firent leur apparition dans les années 50. Chaque magazine y regroupait quatre histoires d'horreur pour mettre en vedette monstres, morts-vivants, insectes mutants, cannibales, plantes carnivores, vampires assoiffés de sang, etc... Le prologue acerbe lors d'une discorde familiale (un gamin est sévèrement réprimandé par son père d'avoir osé lire une BD d'épouvante) démontre bien l'intransigeance des parents à vitupérer leur bambin féru d'horreur. Une séquence iconique dont bon nombre de teenagers s'y sont sans doute reconnus (moi compris !) mais que Georges Romero va quand même nous venger pour le sort réservé au paternel lors d'un épilogue diablement caustique.


Un vieillard revient d'entre les morts pour réclamer son gâteau d'anniversaire. Un fermier déficient se transforme en plante verte après avoir touché une météorite. Un mari trompé, passionné de vidéo, décide de se venger de sa femme et de son amant en filmant leur propre agonie. Une caisse verrouillée datant de 1834 renferme un monstre glouton dévoreur de chair humaine. Enfin, un PDG vaniteux se retrouve embrigadé sur son lieu de travail parmi la prolifération de cafards !

                                     

Sorti en 1982, Creepshow remporta un beau succès à travers le monde et il faut remonter à 1972 pour renouer avec autant de réussite auprès du génial Histoires d'outre-tombe de Freddie Francis. En conjuguant l'horreur grand-guignolesque désamorcée d'humour noir décomplexé, nos trois maîtres de l'épouvante ont conçu un formidable hommage à ces récits d'horreur des années 50, préalablement dessinés par des artistes prodiges. La galerie de personnages mesquins, sournois ou délétères s'avère un atout jouissif dans leurs exactions meurtrières perpétrées sans vergogne. Et à ce degré de perversité, Hal Holbrook et Adrienne Barbeau forment un tandem masochiste de premier choix dans un des sketchs les plus notoires, La Caisse ! Le soin des maquillages et FX artisanaux conçus par Tom Savini et les scénarios machiavéliques, ironiquement grotesques ou plaisantins inspirés de Stephen King, nous entraînent dans une sarabande cartoonesque diablement réjouissante. La mise en scène assidue de Georges Romero multipliant les teintes colorées d'une photo parfois saturée de rouge flashy, et les cadrages alambiqués ou obliques étant également mis en valeur afin de renouer avec l'esprit EC. Comics dérivé de l'anime.


Quelque peu inégal eu égard des deux premiers sketchs assez prévisibles mais néanmoins bougrement attachants et pittoresques, Creepshow transcende ensuite son potentiel cartoonesque avec trois autres récits beaucoup plus féroces. Son alliage d'humour sardonique et d'horreur festive, sa mélodie rétro interprétée au clavier, sa galerie de trognes peu recommandables, ses monstres charismatiques et sa perversité tranchante s'acheminant au chef-d'oeuvre. Aujourd'hui encore, il reste inégalé et continue de fasciner les amateurs de farce macabre érigée sur le principe d'un grand-guignol omnibus.

* Bruno
20.06.12. 5èx

 

mardi 19 juin 2012

LOS ANGELES 2013

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Sortie salles France: 13 Novembre 1996. U.S: 9 Août 1996

de John Carpenter. 1996. U.S.A. 1h41. Avec Kurt Russel, A.J Langer, Steve Buscemi, Georges Corraface, Stacy Keach, Michelle Forbes, Pam Grier, Jeff Imada, Cliff Robertson, Valeria Golino, Peter Fonda.

FILMOGRAPHIEJohn Howard Carpenter est un réalisateur, acteur, scénariste, monteur, compositeur et producteur de film américain né le 16 janvier 1948 à Carthage (État de New York, États-Unis). 1974 : Dark Star 1976 : Assaut 1978 : Halloween, la nuit des masques 1980 : Fog 1981 : New York 1997 1982 : The Thing 1983 : Christine 1984 : Starman 1986 : Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin 1987 : Prince des ténèbres 1988 : Invasion Los Angeles 1992 : Les Aventures d'un homme invisible 1995 : L'Antre de la folie 1995 : Le Village des damnés 1996 : Los Angeles 2013 1998 : Vampires. 2001 : Ghosts of Mars 2010 : The Ward
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Le pitch: Snake Plissken est une nouvelle fois contraint de servir son pays dans une cité anarchique de Los-Angeles afin de retrouver une mallette ayant pour objet d'enrayer la planète.  
Nouvel échec commercial et critique pour Big John, Los Angeles 2013 est la suite (remake ?) tant fantasmée par les millions de fans du notoire New-York 1997Bande dessinée échevelée par son action épique, ces personnages hauts en couleur et ces décors décharnés mis en exergue sous un climat crépusculaire, notre anti-héros renoue aujourd'hui avec une mission suicide toujours aussi palpitante. Ces nouvelles vicissitudes remplies de dérision s'avérant un plaisir de cinéma comme on en voit trop peu dans le domaine du divertissement adulte. Et même si les FX de synthèse grossiers et désuets font preuve d'une maladresse évidente (faute d'une société en débâcle lors de la post-production), l'univers polychrome dépeint par Carpenter s'y prête plutôt bien pour grossir l'ambiance délurée d'une cité effrontée.
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Le pitch reprend à peu près la même ossature narrative que son prédécesseur, sans doute afin de mieux souligner l'itinéraire routinier d'un baroudeur fatigué de servir un état despotique régi par un président fasciste. On sent que cette fois-ci, John Carpenter a souhaité privilégier l'action homérique très influencée par l'univers de la BD et du cartoon Bis plutôt que de mettre en valeur une atmosphère opaque en décrépitude. Pour autant, son climat nocturne reste toujours bel et bien présent mais l'angoisse ombrageuse ressentie durant le premier volet est éludée au profit d'un univers bariolé et d'un humour railleur. Et à ce niveau, Carpenter s'en donne à coeur joie pour brimer Snake Plissken assujetti à prendre les risques les plus saugrenus. Car ici notre borgne frondeur risque sa vie après avoir été séquestré par un chirurgien vitriolé adepte de la greffe esthétique, joué une partie de basket-ball pour relayer le jeu de cirque romain, pratiqué le surf (avec l'aide du vétéran soixante-huitard Peter Fonda !) pour rattraper un bad guy arrogant, circulé en moto pour courser ses rivaux lors d'une chevauchée futuriste, ou encore s'envolé en delta plane (sous l'influence de la reine noire Pam Grier !) afin de dérober une mallette et sauver sa peau.
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Avec l'appui de comparses tous plus sournois et mesquins les uns des autres (Steve Buscemi, génial d'hypocrisie en guide badin ou encore la fille anarchiste du président en potiche versatile), la mission périlleuse de Snake constitue une déroute pour la sauvegarde d'une Amérique libre. Que ce soit sur l'île de Los Angeles, lieu de déportation des marginaux tributaires d'un leader extrémiste ou dans l'autre camp régi par un président mandaté à vie, l'émancipation n'a plus aucun mérite si bien que la violence, l'intolérance et la criminalité se sont emparées de nos mentalités. La corruption s'est donc infiltrée à travers nos doctrines et le monde court davantage à sa perte par l'entremise de Snake Plissken ! Car aujourd'hui, notre cow-boy revanchard, plus que jamais désillusionné d'être le bouc émissaire d'un état prédestiné à la prohibition, décide d'éteindre la lumière afin d'annihiler l'humanité toute entière ! No futur !


Plus les choses changent et plus elles restent les mêmes
Pamphlet contre nos sociétés totalitaires, Los Angeles 2013 est un pied de nez aux stratégies politiques véreuses dénuées de toute morale. Jouissif, délirant et inventif en diable de par ses péripéties fertiles, et baignant dans un univers d'apocalypse aussi crépusculaire que bigarrée, les nouvelles mésaventures de Snake constitue un (généreux) divertissement décomplexé où le cynisme social finit par cultiver le chaos. L'audace ironique de son célèbre épilogue dévoilant notamment derrière son message nihiliste l'amertume d'un cinéaste au bord du gouffre car désabusé de sa propre condition existentielle. A réhabiliter d'urgence !

19.06.12. 3èx
Bruno Matéï


lundi 18 juin 2012

Obsession

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site moviescreenshots.blogspot.com

de Brian De Palma. 1976. U.S.A. 1h38. Avec Cliff Robertson, Geneviève Bujold, John Lithgow, Sylvia Kuumba Williams, Wanda Blackman, J. Patrick McNamara, Stanley J. Reyes, Nick Kreiger.

Sortie salles en France: 18 Janvier 1977. U.S: 1er Août 1976

FILMOGRAPHIEBrian De Palma, de son vrai nom Brian Russel DePalma, est un cinéaste américain d'origine italienne, né le 11 septembre 1940 à Newark, New-Jersey, Etats-Unis. 1968: Murder à la mod. Greetings. The Wedding Party. 1970: Dionysus in'69. Hi, Mom ! 1972: Attention au lapin. 1973: Soeurs de sang. 1974: Phantom of the paradise. 1976: Obsession. Carrie. 1978: Furie. 1980: Home Movies. Pulsions. 1981: Blow Out. 1983: Scarface. 1984: Body Double. 1986: Mafia Salad. 1987: Les Incorruptibles. 1989: Outrages. 1990: Le Bûcher des vanités. 1992: l'Esprit de Cain. 1993: l'Impasse. 1996: Mission Impossible. 1998: Snake Eyes. 2000: Mission to Mars. 2002: Femme Fatale. 2006: Le Dahlia Noir. 2007: Redacted.


Hommage à Sueurs Froides d'Alfred Hitchcock, Obsession est une errance romantique avec la mort. A travers l'argument d'un banal kidnapping ayant mal tourné, Brian De Palma nous transcende une incroyable machination doublé de romance particulièrement élégiaque. Le pitchaprès la disparition de sa femme et de sa fille, rongé par le remord et la culpabilité de n'avoir pu les sauver lors d'un kidnapping, un riche  entrepreneur séjourne 16 ans en Italie pour se remémorer leur première rencontre édénique. C'est dans la bâtisse d'une église qu'il fait connaissance de Sandra Portinari, le parfait sosie de son ancienne défunte ! Obsédé par la trouble beauté de la jeune femme, Michael Courtland la courtise et réussit par l'inviter à déjeuner. Au fil de leurs rendez-vous, une liaison amoureuse se lie entre eux. Mais Sandra semble elle aussi peu à peu éprise de fascination pour la disparition d'Elizabeth Courtland. Thriller vertigineux si fragile de par son ambiance romantique ensorcelante et sa montée en puissance du suspense au fil d'un cheminement davantage ombrageux, Obsession insuffle une irrésistible ambiance ésotérique. Poème mélancolique sur l'amour galvaudé et la perte de l'être aimé, cette oeuvre infiniment prude nous dépeint de prime abord l'impossible deuil d'un veuf taciturne incapable de se pardonner un choix tranché au point d'enchaîner comme conséquence la mort soudaine de sa famille.


Quant à la seconde partie, beaucoup plus inquiétante et fébrile auprès des tourments amoureux des amants, elle nous transfigure un implacable suspense Hitchcockien dont l'issue culmine vers une bouleversante alliance rédemptrice. Scandé de la puissante mélodie orchestrale de Bernard Herrman, aussi suave que suspicieuse,  Obsession nous entraîne dans la contrée touristique de Florence en compagnie de deux amants avides de retrouver un amour éperdu. Mis en scène de manière épurée et baignant dans un lyrisme diaphane parmi ses couleurs sépia voluptueuses, le suspense audacieux savamment instillé est en outre habité par l'interprétation des amants d'infortune. Dans celui du promoteur cossu, Cliff Robertson livre une interprétation poignante de par sa présence placide, taiseuse, réservée, timorée, d'autant plus noyé de chagrin et de culpabilité d'avoir ôté la vie de son épouse. Dans un double rôle équivoque, Geneviève Bujold transmet avec clémence et charme docile le personnage en demi-teinte d'une femme tourmentée d'un passé traumatique. Enfin, l'excellent John Lithgow se joue un malin plaisir à se fondre dans le corps d'un homme d'affaire perfide uniquement appâté par le gain. Sa gouaille orgueilleuse et ses ambitions cupides émanant d'un opportunisme couard à daigner déprécier sa victime. En somme le parfait salopard. 


Liens d'amour et de mort 
D'un romantisme lyrique absolu à travers une mélancolie pudibonde, Obsession se décline en voyage envoûtant où les songes du passé remontent à la surface afin de divulguer un secret éhonté. Car à travers l'improbable destinée de cet amant assujetti à sa passion amoureuse, Brian De Palma nous façonne finalement un magnifique profil d'amour paternel après nous avoir cruellement piégé au sein d'une conspiration sournoise. Illuminé de la chorale entêtante de Bernard Herrmann et transi d'émoi passionnel auprès du couple Robertson / Bujold, l'obscure obsession confine à la mélopée éperdue. Un chef-d'oeuvre de hantise mortifère imprégnée de romantisme obsédant. Et puis quelle mise en scène circonspecte ! 

Bruno
13.01.23. 5èx
19.06.12. 

                                      

jeudi 14 juin 2012

HELEN

Photo empruntée sur Google, appartenant au site Cinemovies.fr
de Sandra Nettelbeck. 2009. U.S.A. 1h40. Avec Ashley Judd, Goran Visnjic, Lauren Lee Smith, Alexia Fast, Alberta Watson, David Nykl, David Hewlett, Ali Liebert.

Sortie salles France: 30 Juillet 2010. U.S: 2009

FILMOGRAPHIE: Sandra Nettelbeck est une scénariste, réalisatrice, monteuse et actrice allemande, née le 4 avril 1966 à Hambourg (Allemagne).
1994: A Certain Grace
1995: Unbestandig und Kul (télé-film)
1998: Mammamia (télé-film)
2001: Chère Martha
2004: Sergeant Pepper
2009: Helen


Helen est une professeur de musique menant une existence paisible avec son mari David et sa fille Julie. Un jour, elle rechute dans une grave dépression qui la contraint de se faire hospitaliser. Sa famille tente malgré tout d'apporter soutien et amour pour essayer de la sortir de son mutisme nihiliste.  
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Portrait chétif d'une femme dépressive sous l'oeil contemplatif d'une réalisatrice vouée à la pudeur, réfractaire au pathos ou au racolage lacrymal. Epaulé par l'interprétation bouleversante de Ashley Judd et d'une poignée de comédiens persuasifs, Helen est une dérive élégiaque sur une pathologie neurotique, la dépression.
Réalisé avec délicatesse pour aborder prudemment un sujet aussi grave, ce drame austère nous entraîne vers une poignante dérive déshumanisée d'une femme livrée à ses propres tourments sans que la cellule familiale ne puisse la prémunir. Professeur de musique studieuse mariée à un brillant avocat mais divorcée d'un ancien mari avec qui elle eut sa fille Julie, helen est une femme fragile aux antécédents déjà suicidaires. Incapable de pouvoir surmonter la tare toujours plus rude de sa maladie, elle est contrainte de se faire interner en institut spécialisé. Alors que le mari contrarié et sa fille vulnérable tentent vainement de la ramener à la raison, Helen trouve refuge vers l'amitié d'une de ses élèves de cours, Mathilda, réciproquement atteinte de la même affliction. Isolées du monde, livrées à elles-mêmes et cloîtrées dans un appartement ténu, elles tentent avec toute leur complexité psychologique de sortir d'une existence cafardeuse noyée d'aigreur.


Le film, rigoureux par son climat démoralisant en chute libre, décrit avec beaucoup de vérité humaine la terrible difficulté intrinsèque qu'une personne accablée doit transcender pour s'extirper d'un fardeau inexorable. Ce sentiment de tristesse jusqu'au-boutiste, cette incapacité psychologique pour le sujet mis à épreuve à pouvoir s'extraire de sa dépression psychiatrique sont retranscrits avec une acuité émotionnelle à fleur de peau. D'autant plus que le cocon familial, démuni et désuni par l'incompréhension se morfond finalement dans une fatale solitude, faute de pouvoir privilégier une convalescence par la rédemption amoureuse.
La réalisatrice dresse également en second lieu la désillusion bouleversée d'une amitié candide entre deux femmes atteintes du même mal. Leur combat commun confiné dans la solitude miséreuse d'un appartement oppressant nous place dans une situation anxiogène davantage fébrile pour leur destin à venir. Si Helen semble revenir à la raison après l'opération d'une séance d'ECT (un traitement thérapeutique d'électro-choc), son amie Mathilda est rongée par la culpabilité d'un évènement traumatique fortuit et d'une solitude toujours plus opprimante. Leur dignité amicale et l'extrême fragilité qui émane de leur moralité malmenée nous plonge tête baissée dans un désarroi toujours plus implacable avant son épilogue en demi-teinte.


Noyé de morosité et de nonchalance, Helen est le témoignage douloureux de deux femmes dépressives injustement destituées de l'aubaine existentielle. Mis en scène avec une sensibilité contractée pour illustrer la caractère trouble de la neurasthénie, cette introspection de la solitude est transcendée par l'interprétation sensitive d'une Ashley Judd transie d'affliction. On sort du film la boule au ventre par tant de tiraillement infligé aux malades ébranlés, même si la guérison est toujours une lueur d'espoir pour ceux qui ont encore l'endurance de persévérer. 
Dépressifs, s'abstenir !
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14.06.12
Bruno Matéï
                               

mercredi 13 juin 2012

LA NUIT DECHIREE (Sleepwalkers). Prix du Meilleur film à Fantafestival 1992.

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site hollywood90.com  

de Mick Garris. 1992. U.S.A. 1h29. Avec Brian Krause, Madchen Amick, Alice Krige, Jim Haynie, Cindy Pickett, Ron Perlman, Lyman Ward, Dan Martin, Glenn Shadix, Cynthia Garris, Monty Bane, John Landis.

Sortie salles France: 19 Août 1992. U.S: 10 Avril 1992

FILMOGRAPHIE: Mick Garris est un acteur, producteur, scénariste et réalisateur américain, né le 4 Décembre 1951 à Santa Monica, en Californie. 1988: Critters 2. 1990: Psychose 4. 1992: La Nuit Déchirée. 1994: Le Fléau (télé-film). 1997: Shining (télé-film). 1997: Quicksilver Highway (télé-film). 1998: l'Expérience Fatale (télé-film). 2001: Juge et Coupable (télé-film). 2004: Riding the Bullet. 2005: Chocolate (Masters of Horror, saison 1, Epis 5). 2006: Désolation. 2011: Sac d'Os.


"Somnanbule, n.m. Créature errante aux origines mi-humaines mi-féline. Vulnérable aux griffes du chat, elle se nourrit de l'énergie vitale de femmes vierges. Est à l'origine du mythe de la légende du vampire."  
ENCYCLOPEDIE CHILLICOATHE D'ARCANE KNOWLEDGE, PREMIERE EDITION, 1884

Charles et sa mère Mary Brady sont les derniers descendants des somnanbules, une race de créatures félines particulièrement voraces pour violenter des femmes vierges. Affamée et séquestrée par une meute de chats suspectant les alentours de leur demeure, Mary ordonne à son fils de lui ramener une jeune fille docile pour s'alimenter de chair humaine. Charles part à la rencontre d'une jeune serveuse de cinéma de quartier.


D'après un scénario de Stephen King (mais tiré d'une nouvelle jamais publiée), La Nuit Déchirée est le troisième film de Mick Garris, réalisateur inégal mais intègre dans sa prédilection pour le genre fantastique. Prolifique dans ses adaptations de King souvent recadrées pour la TV, ce cinéaste attachant réalise en 1992 son meilleur film en dépit d'un humour graveleux sans doute influencé par les délires sardoniques d'un certain Freddy Krueger. En prime, le scénario conventionnel et linéaire ne prétend pas révolutionner le genre hérité du mythe vampirique. Pourtant, il se dégage de cette série B attrayante un parfum de scandale chez le profil incestueux d'une mère et d'un fils communément amoureux. L'originalité de la Nuit Déchirée et son impact fascinant émane de la caractérisation d'une dernière lignée de somnanbules, ou plus exactement des félidés. Pour cause, cette race de créatures mi-félines, mi-humaines s'abreuvent de l'énergie vitale de femmes vierges afin de perdurer leur longévité. Craignant les chats domestiques comme la peste, nos deux amants sont contraints de façonner des pièges autour de leur demeure pour se prémunir de leur présence hostile. Parfois, pour duper les investigateurs un peu trop curieux, ils possèdent la faculté de se rendre invisible par la seule force de leur pensée (mais aussi de camoufler leur voiture afin de contre-carrer les autorités !).

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Mick Garris cultive un soin avisé à nous familiariser avec cette mère chérissante, éprise d'amour pour son bellâtre fils juvénile. L'érotisme audacieux qui en découle lors de certaines séquences sulfureuses (l'étreinte du couple suivie d'une relation sexuelle !) véhicule un charme vénéneux particulièrement incongru. D'autant plus que ces amants délétères se révèlent d'horribles créatures condamnées à sacrifier de jeunes vierges dociles. D'ailleurs, leur véritable apparence monstrueuse peut-être suggérée à travers les miroirs quand ils ne sont pas épris d'une colère primitive pour dévorer les êtres humains, à moins d'extérioriser leur rancune jalousie. Et dans le rôle de la mégère impérieuse, Alice Krige se révèle absolument charismatique et envoûtante dans sa posture lascive de choyer son fils par amour interdit. Brian Krause ne manque pas non plus d'attrait sardonique dans celui du charmeur faussement vertueux et véritablement insidieux, quand bien même la ravissante Mädchen Amick déploie une élégance suave en victime candide subordonnée à l'allégeance des deux amants corrompus.


Si la Nuit Déchirée avait été élaboré avec un scénario plus ambitieux et si l'humour noir lourdingue en avait été éludé, cette série B fort sympathique aurait pu gagner en densité dramatique (on se surprend d'ailleurs à éprouver une certaine empathie auprès du désarroi maternel d'une soupirante destituée de son rejeton moribond !). En l'état, le film de Mick Garris reste un efficace divertissement par son rythme haletant jalonné de péripéties violemment sanglantes (à l'image de son final explosif !). La flamboyance de sa photographie, les sublimes mélodies entêtantes de Boadicea (interprété par Enya) et Sleepwalk (composé par Santo et Johnny) ainsi que le caractère incestueux du thème vampirique confirmant son pouvoir de fascination diaphane. Enfin, pour témoigner de son affection pour le genre, Mick Garris a eu l'idée de réunir en guise de clin d'oeil les sympathiques apparitions de John Landis, Tobe Hooper, Clive Barker, Joe Dante et même Stephen King.

13.06.12
Bruno Matéï

Récompenses: Prix du Meilleur Film, Meilleur Réalisateur, Meilleur Scénario et Meilleure Actrice (Alice Krige), au Fantafestival, 1992.

mardi 12 juin 2012

ATOMIC CYBORG (Vendetta dal futuro)

                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site moviepostershop.com

de Sergio Martino (Martin Dolman). 1985. Italie. 1h34. Avec Daniel Greene, John Saxon, George Eastman, Claudio Cassinelli, Janet Agren.

Sortie salles France: 26 Mars 1986

FILMOGRAPHIESergio Martino est un réalisateur, producteur et scénariste italien né le 19 Juillet 1938 à Rome (Italie). 1970: l'Amérique à nu. Arizona se déchaine. 1971: l'Etrange vice de Mme Wardh. La Queue du Scorpion. l'Alliance Invisible. 1973: Mademoiselle Cuisses longues. 1973: Torso. 1975: Le Parfum du Diable. 1977: Mannaja, l'homme à la hache. 1978: La Montagne du Dieu Cannibale. 1979: Le Continent des Hommes poissons. Le Grand Alligator. 1982: Crimes au cimetière étrusque. 1983: 2019, Après la Chute de New-York. 1985: Atomic Cyborg. 1989: Casablanca Express. 1990: Mal d'Africa. Sulle tracce del condor.

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Deux ans après son fleuron post-apo 2019, Après la chute de New-York, Sergio Martino récidive à piller gentiment les succès notoires outre-atlantique pour amorcer Atomic Cyborg. Ce succédané transalpin de Terminator préfigure notamment avec deux ans d'avance le chef-d'oeuvre de Verhoven, Robocop (pour la quête identitaire du robot asservi par son créateur arriviste)A titre d'anecdote, le film fut en outre endeuillé par la disparition de l'acteur Claudio Cassinelli (Peter Hallo), décédé sur le tournage dans un accident d'hélicoptère. Avec cette tragédie impondérable, Sergio Martino fut contraint de modifier l'agencement de son final explosif. Après avoir épargné la vie d'un militant écologiste, Paco Queruak, cyborg humain programmé pour tuer, est contraint de s'exiler dans sa contrée natale pour fuir l'entrepreneur Turner ainsi que les autorités de l'état. Dans un motel, il fait la rencontre de Linda, une jeune serveuse avec qui il décide d'entretenir une relation amoureuse. Mais des agents du FBI ainsi que les hommes de main de Turner sont lancés à ses trousses. 
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Classique bisseux des eighties, Atomic Cyborg peut sans conteste se targuer de figurer au palmarès des réussites les plus ludiques dans le domaine des ersatz des années 80. Western futuriste prenant pour cadre les contrées montagneuses de l'Arizona, cette série Z plutôt vigoureuse rivalise de péripéties débridées et de trognes délurées pour divertir les fans de nanar impayable. En dépit d'un premier quart-d'heure peu attractif et plutôt bavard, le film de Sergio Martino attise rapidement la sympathie dans son intégrité à daigner offrir au public un généreux spectacle d'action conçu sans prétention. La trame puérile et fantaisiste se résume à des confrontations musclées entre un cyborg vindicatif, destitué de sa véritable identité par la faute d'un perfide entrepreneur, délibéré à se défendre contre ses supérieurs ainsi que les autorités de l'état. De prime abord, après avoir sympathisé avec une jeune serveuse dans un motel reclus, Paco va devoir se mesurer à une bande de camionneurs, partisans musclés du bras de fer concurrentiel. Alors qu'un de leur leader influent (l'inénarrable Georges Eastman en traître cabotin !) va tout mettre en oeuvre pour le circonscrire. Comme d'habitude dans ce genre de zèderie, la maladresse des dialogues infantiles est exprimée avec un sérieux inébranlable par des comédiens au physique grotesque.


Et dans le rôle du Terminator mexicain, Daniel Greene endosse la carrure d'un héros intrépide aussi austère qu'apathique dans sa physionomie de catcheur docile. Rien que pour sa présence figée, le film est absolument incontournable et doit beaucoup au caractère pittoresque de ces déconvenues musclées avec des gros bras autoritaires ou des tueurs flegmatiques. Sa rixe hilarante avec une androïde sexy est d'ailleurs un revirement fortuit d'offensive cinglante dans les échanges de tirs et les corps à corps chorégraphiés en mode kung-fu ! Justement, le savoir-faire technique des séquences d'action et la conception efficiente de certains effets-spéciaux (la tête arrachée de la blonde humanoïde, le bras déchiqueté de Paco façon "Terminator" ou encore le coeur extirpé des entrailles de Turner) ajoute un impact attractif à ces péripéties homériques. Alors que le score de Claudio Simonetti véhicule honorablement un certain charme naïf dans sa rythmique mélancolique pour scander les mésaventures du justicier robotisé.


Conventionnel et crétin mais efficace et aussi attendrissant qu'hilarant, Atomic Cyborg est un classique bisseux de la zèderie ritale en pleine ascension du plagiat post-apo. La présence estimable de vétérans de seconde zone (George Eastman, John Saxon et surtout Daniel Greene !) et la vigueur de la mise en scène privilégiant l'action échevelée concourent de nous offrir un plaisir coupable encore plus pittoresque qu'à l'époque de sa sortie ! 
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A Claudio Cassinelli
Dédicace à Ciné-bis-art
12.06.12
Bruno Matéï

GORE GORE GIRLS


En dépit de 3 scènes gores gratinées et de 3 nichons folichons, le délire de Lewis est une farce soporifique d'une rare vacuité. Même pas drôle.

11.06.12
Bruno Matéï

jeudi 7 juin 2012

LES 5000 DOIGTS DU DR T (The 5000 Fingers of Dr T)

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site filesdrop.com

de Roy Rowland. 1953. U.S.A. 1h28. Avec Peter Lind Hayes, Mary Healy, Hans Conried, Tommy Rettig, John Heasley, Noel Cravat.

Sortie salles France: 30 Juillet 1954. U.S: 1 Juillet 1953

FILMOGRAPHIE (Wikipedia): Roy Rowland est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 31 Décembre 1910 à New-York, décédé le 29 Juin 1995 à Orange (Californie). 1943: A Stranger in Town. l'Ange perdu. 1945: Our Vines have tender Grapes. 1946: Boy's Ranch. 1947: Mac Coy aux poings d'or. l'Heure du pardon. 1949: La Scène du Crime. 1950: Le Convoi Maudit. Les Heures Tendres. 1951: Un Fou au Volant. 1952: Les Clairons sonnent la charge. Les 5000 Doigts du Dr T. 1953: Commérages. Le Voleur de Minuit. 1954: Sur la trace du crime. Témoin de ce meurtre. 1955: L'Aventure Fantastique. La Fille de l'Amiral. 1956: Viva Las Vegas. Passé perdu. 1957: Calomnie. Terreur dans la Vallée. 1958: Arrivederci Roma. 1963: Solo pour une blonde. 1965: Sie nannten ihn Gringo. 1966: Surcouf, le tigre des 7 mers.


Le pitch: Bart, un jeune apprenti musicien s'endort sur le clavier de son piano à cause de la discipline drastique de son professeur, le Dr Terwiliker. Parmi 500 enfants kidnappés, il se retrouve entraîné dans le monde irréel du Dr T pour interpréter communément un concerto musical. 
D'après un récit de Theodore Geisel, célèbre écrivain pour littérature infantile (le Grinch), Les 5000 Doigts du Dr T fut un cinglant échec commercial lors de sa sortie officielle. On peut comprendre que le film ait déçu le public traditionnel, peu habitué à fréquenter un spectacle hybride alternant la comédie musicale, la féerie et le fantastique cauchemardesque. Véritable ovni excentrique projetant les fantasmes utopiques d'un jeune garçon asservi par son professeur mélomane, Les 5000 Doigts du Dr T émerveille à travers son imaginaire désinhibé. Car exaspéré du travail intensif qu'il doit entreprendre pour satisfaire son professeur de piano, le petit Bart se retrouve plongé dans un rêve insensé afin de se dépêtrer des griffes du Dr T. Madame Collins et leur fidèle plombier étant également embrigadés dans la forteresse labyrinthique. Ainsi, l'ambition de ce professeur déluré est de daigner réunir 500 enfants autour d'un gigantesque piano pour y interpréter un concerto 24 heures sur 24, 365 jours annuels durant !


Autant dire que la trame débridée demeure une perpétuelle fantaisie sardonique si bien que l'antagoniste pernicieux s'en donne à coeur joie afin de brimer ses écoliers ! Visuellement splendide de par son technicolor clinquant, et inquiétant pour l'expressionnisme de ses décors baroques, l'aventure trépidante de ce gamin endeuillé d'une mort paternelle s'avère un enchantement atypique. Emaillé de péripéties fantaisistes (la course en patin à roulette, la tentative de vol de la clef, la chute dans le souterrain des esclaves) et de rencontres saugrenues (les deux hommes à barbe, les musiciens prisonniers, les geôliers de cachot), les 5000 Doigts du Dr T est une invitation au rêve pour y dénoncer toute forme d'autorité despotique lorsqu'un bambin y est destitué d'absence parentale. Les numéros musicaux harmonieusement chantonnés et dansés se coordonnant pour mettre en exergue un environnement échevelé généré par l'entreprise du sardonique Dr T. L'acteur Hans Conried s'autorisant un malin plaisir masochiste à incarner un musicien adepte de sorcellerie, particulièrement railleur et indocile de par ses ambitions mégalos. On pense aussi parfois à l'univers de Tim Burton pour l'accoutrement vestimentaire des protagonistes, ses idées démentielles (la potion magique qui absorbe l'audition, la chute dans le vide de Bart amortie par son simple tee-shirt) ainsi que la verve macabre émanant de certaines claustrations (le père du Dr T prisonnier en interne d'un immense tambourin ou encore le cachot biscornu auquel Bart et le plombier y sont embrigadés !).

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Inventif en diable, espiègle, coloré et totalement débridé, les 5000 Doigts du Dr T constitue une merveille de féerie et d'insolence. Hymne à la chimère de par la candeur d'un enfant endeuillé, quête initiatique pour le droit à sa reconnaissance, cette fantaisie musicale véhicule un pouvoir d'évasion renouant avec nos songes les plus fous et affranchis.

*Bruno
07.06.12. 2èx


mercredi 6 juin 2012

THE SECRET LIFE OF WORDS (La Vida secreta de las palabras). Meilleur film GOYAS 2005.

Photo empruntée sur Google, appartenant au site cartelespeliculas.com   
d'Isabel Coixet. 2006. Espagne/U.S.A. 1h52. Avec Sarah Polley, Tim Robbins, Javier Camara, Eddie Marsan, Steven Mackintosh, Julie Christie, Danny Cunningham, Emmanuel Idowu, Dean Lennox Kelly, Daniel Mays.

Sortie salles France: 19 Avril 2006. U.S: 15 Décembre 2006

Récompenses: Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario aux GOYAS 2005

FILMOGRAPHIE: Isabel Coixet est une réalisatrice, scénariste et productrice espagnole, née le 9 avril 1960 à Barcelone.
1989: Demasiado viejo para morir joven
1996: Des choses que je ne t'ai jamais dites
1998: XII Premios Goya (TV). L'Heure des nuages.
2003: Ma vie sans moi
2005: The Secret Life of Words
2008: Lovers
2009: Map of the Sounds of Tokyo
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Sur une plate-forme pétrolière, une jeune infirmière est enrôlée pour soigner un grand brûlé. Entre les deux inconnus, une complicité amicale va se nouer et dévoiler leur secret les plus inavouables. 
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A travers le portrait de deux êtres laminés par la honte et la culpabilité, la réalisatrice Isabel Coixet nous illustre avec pudeur leur amitié naissante pour finalement nous acheminer vers une réminiscence traumatisante. Hanna, infirmière mutique, introvertie et taciturne, se morfond dans une solitude aigrie devant ses camarades de travail, réfractaires à son attitude impassible. Déléguée par son patron durant un mois sur une plate-forme pétrolière, elle y fait la connaissance de Josef. Un homme gravement brûlé par la cause d'un incendie industriel, faute d'avoir tenter de porter secours à son meilleur ami. Allongé sur un lit, affaibli par ses diverses plaies et contusions, Josef est également atteint de cécité le temps de deux semaines de convalescence. C'est par l'intermédiaire de cette infirmière timorée et mystérieuse, recrutée pour le soigner de ses blessures, que Josef va peu à peu tenter d'instaurer une complicité amicale.


Avec la candeur d'une une mise en scène épurée exploitant la beauté naturelle de la mer et scrutant progressivement les états d'âme bafoués de nos deux protagonistes, The Secret Life of Words s'emprunt d'une poésie lancinante à travers leurs intimes confidences. La réalisatrice insufflant ici judicieusement le pouvoir de suggestion comme cet éloge culinaire dialogué par Josef pour tenter de désnihiber Annah d'un silence trop pesant. Mais quand les langues se familiarisent et se délient au fil de leur connivence, la douleur meurtrie, décrite de façon textuelle, nous glace le sang pour le souvenir d'une affliction.
A travers leur sombre confidence emplie de rancoeur et culpabilité, la réalisatrice porte finalement un témoignage accablant sur les victimes avilies par la barbarie inhumaine de la guerre. Les tortures et viols infligées sur les victimes les plus démunies nous sont mis en exergue par la suggestion des dialogues énoncés pas la victime. L'impact verbal de l'horreur décrite n'en n'est que plus abjecte, car jusqu'au-boutiste dans l'imaginaire vécu. Et la narration préalablement contenue dans un altruisme vertueux se transforme dès lors en tragédie humaine à la porté émotionnelle déchirante.
Par la densité humaine de ces deux interprètes principaux (Tim Robbins et Sarah Polley, époustouflants de vérité endolorie, se livrent corps et âme avec une pudeur à fleur de peau !), cette amitié naissante entre deux inconnus va finalement tenter de s'uniformiser vers une rédemption amoureuse.


Pour ne jamais oublier !
Dénonciation de la barbarie pour toutes les victimes asservies par le trauma de la guerre, The Secret Life of Words est un éloge périlleux à la vie. A travers l'amitié candide de deux êtres brisés par un drame incurable, Isabel Coixet en tire une leçon de tolérance sur l'aspiration au bonheur déchu par la grâce amoureuse. En résulte un conte bouleversant à la fantasmagorie sous-jacente (l'esprit spirituel d'une âme infantile plane sur le récit !), nous laissant dans une acuité émotionnelle emplie de fragilité et de prostration. Attention Spoiler ! Et cela juste avant l'ultime révélation fracassante d'une catharsis maternelle. Fin du spoiler. Inoubliable !
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Dédicace à Jérome Roulon
07.06.12
Bruno Matéï