mardi 19 mars 2013

LA FERME DE LA TERREUR (Deadly Blessing)

                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site manisthewarmestplacetohide.com

de Wes Craven. 1981. U.S.A. 1h40. Avec Maren Jensen, Sharon Stone, Susan Buckner, Jeff East, Colleen Riley, Douglas Barr, Lisa Hartman, Lois Nettleton, Ernest Borgnine, Michael Berryman.

Sortie salles France: 14 Avril 1982. U.S: 14 Août 1981

FILMOGRAPHIE: Wesley Earl "Wes" Craven est un réalisateur, scénariste, producteur, acteur et monteur né le 2 Aout 1939 à Cleveland dans l'Ohio.
1972: La Dernière maison sur la gauche, 1977: La Colline a des yeux, 1978: The Evolution of Snuff (documentaire), 1978: l'Eté de la peur. 1981: La Ferme de la Terreur, 1982: La Créature du marais, 1984: Les Griffes de la nuit, 1985: La Colline a des yeux 2, 1986: l'Amie mortelle, 1988: l'Emprise des Ténèbres, 1989: Schocker, 1991: Le Sous-sol de la peur, 1994: Freddy sort de la nuit, 1995: Un Vampire à brooklyn, 1996: Scream, 1997: Scream 2, 1999: la Musique de mon coeur, 2000: Scream 3, 2005: Cursed, 2005: Red eye, 2006: Paris, je t'aime (segment), 2010: My soul to take, 2011: Scream 4.


Sorti 4 ans après l'Eté de la peur, la Ferme de la terreur renoue avec la série B horrifique matinée de sorcellerie. L'action du film prend pour cadre une campagne clairsemée auquel une communauté intégriste de Hittites se partagent les terrains avec deux familles issues de la société moderne. Alors qu'un meurtre vient d'être commis, la veuve Martha Schmidt est témoin d'étranges évènements inexpliqués. Deux proches amies viennent la rejoindre afin de la soutenir.


Production modeste au casting féminin particulièrement séduisant, la Ferme de la Terreur empreinte le schéma du slasher au sein d'une bourgade champêtre d'où plane l'ombre de l'incube. Si le film réserve peu de surprises narratives en dehors de son point d'orgue révélateur, il gagne en efficacité par son habileté à insuffler une angoisse diffuse. De manière intense, Wes Craven nous concocte des petits moments de frissons parfois percutants (le serpent venu s'introduire entre les jambes de Martha durant son bain, l'araignée précipitée dans la bouche de Lana pendant un cauchemar onirique, le meurtre cinglant du couple en étreinte à l'intérieur de leur véhicule) en misant d'abord sur une notion de suspense savamment distillée. Son climat ombrageux rehaussé de choeurs d'outre-tombe instaure une inévitable inquiétude alors qu'un rituel de meurtres est perpétré auprès des campagnards. Mais qui peut bien commettre ces crimes gratuits dénués de mobile ?
Par ailleurs, le réalisateur insiste à dépeindre les activités archaïques des Hittites gouvernés par un leader fanatique. Une communauté sectaire comparable aux Amish présents en Amérique du Nord, vivant exclusivement en autarcie pour leur éthique catholique. Sous couvert d'incidents morbides où plane l'influence de Satan, Wes Craven dénonce le totalitarisme de cette confrérie obsédée par la superstition du Mal. Si les hommes dociles s'avèrent sexuellement refoulés, faute de leur dictature imposée, nos héroïnes issues du monde moderne s'émancipent dans une liberté sexuelle assumée. On appréciera également le portrait asséné à ces femmes autonomes beaucoup moins potiches que dans les produits standardisés, car ici pourvues de caractère et de bravoure, surtout quand il s'agit d'affronter le danger (mention spéciale aux harmonieuses Susan Buckner et surtout Maren Jensen).


En dépit d'un épilogue peu crédible faisant intervenir inutilement les forces surnaturelles, La Ferme de la terreur est un excellent slasher à l'ambiance bucolique assez insolite dans son aura de mysticisme frelaté. Le caractère attachant des personnages, le charme lascif de nos héroïnes et l'angoisse distillée avec efficacité confinant au petit classique du genre. 

19.03.13. 4èx
Bruno Matéï

lundi 18 mars 2013

Rollerball

                            Photo empruntée sur Google appartenant au site certifiedoriginals.blogspot.com

de Norman Jewison. 1975. U.S.A. 2h05. Avec James Caan, John Houseman, Maud Adams, John Beck, Moses Gunn, Pamela Hensley, Barbara Trentham, Ralph Richardson.

Sortie salles France: 12 Novembre 1975. U.S: 25 Juin 1975

FILMOGRAPHIE: Norman Jewison est un réalisateur, acteur, producteur et scénariste canadien, né le 21 Juillet 1926 à Toronto (Canada). 1962: Des ennuis à la pelle. 1963: Le Piment de la vie. 1964: Ne m'envoyez pas de fleurs. 1965: The Art of love. 1965: Le Kid de Cincinnati. 1966: Les Russes Arrivent. 1967: Dans la chaleur de la nuit. 1968: l'Affaire Thomas Crown. 1969: Gaily, gaily. 1971: Un violon sur le toit. 1973: Jésus Christ superstar. 1975: Rollerball. 1978: F.I.S.T. 1979: Justice pour tous. 1982: Best Friends. 1984: A Soldier Story. 1985: Agnès de Dieu. 1987: Eclair de lune. 1989: Un Héros comme tant d'autres. 1991: Larry le liquidateur. 1994: Only you. 1996: Bogus. 1999: Hurricane Carter. 2003: Crime contre l'humanité.


"La brutalité est en chaque être humain. Plus un sport est violent, plus il paraît attirant. Notre histoire suit simplement la logique de cette tendance. Plus les gens sont à l'aise, plus leur besoin de violence augmente. D'ici la fin de ce siècle, la société aura donné aux gens le plus de confort possible, mais elle leur aura également ôté toute liberté personnelle. A l'instar de Rome, lorsqu'elle était au sommet de sa gloire tant au niveau politique, économique qu'artistique. C'était à cette période que, dans l'arène, le samedi après-midi, la violence éclatait."
Norman Jewison

Film culte générationnel, chef-d'oeuvre d'anticipation dystopique, Rollerball traite de notre rapport émotif face à la violence dans le milieu du spectacle. En l'occurrence, il s'agit d'un jeu sportif le "Rollerball". Sorte de football américain combiné au hockey où chaque adversaire doit récupérer une boule d'acier projetée à vive allure pour la déposer dans un panier aimanté. Chaussés de patins à roulette et affublés de casques et gants cloutés, les joueurs circulent à pied ou en moto autour d'une piste afin de marquer le plus de points. Dans une société corporatiste sans guerre ni pauvreté, un jeu est créé afin de satisfaire les instincts pervers de sa population. Faute de son immense popularité, Jonathan, champion américain du Rollerball, est subitement contraint de démissionner sous les conseils du dirigeant Bartholomew. Déjà contrarié par la séparation orchestrée de sa femme, le joueur décide de braver les règles pour comprendre la raison de son expulsion et imposer sa dignité humaine. 


Film d'action illustrant sans concession des matchs sportifs ultra violents sous couvert de réflexion alarmiste stigmatisant la société spectacle, Rollerball fascine autant qu'il inquiète sur ces dérives primitives. Car comparable aux jeux cruels du cirque romain, Norman Jewison conçoit ce jeu futuriste afin de mettre en exergue notre rapport voyeuriste face à la violence et notre goût addictif pour le risque du danger. Ainsi, à travers ce loisir dont les normes y sont sans cesse remaniées afin de dissuader le joueur d'accéder au rang de héros, le spectateur moderne y éprouve son intérêt après avoir été comblé dans le confort matériel grâce à une corporation impérialiste. Dans une ambiance austère rythmée d'une mélodie classique élégiaque, le réalisateur met en lumière les effets pervers de cette multinationale déshumanisant ses honnêtes citoyens par le divertissement trivial. Avec ces séquences d'action d'une intensité rigoureuse, Rollerball oppose de furieuses rixes sanglantes et explosives que se disputent chaque membre de l'équipe au sein des matchs internationaux. Les combats échevelés s'avérant davantage homériques au fil d'un enjeu où les règles deviennent plus intolérantes afin d'acheminer ces gladiateurs au sacrifice. De par son habileté à façonner un spectacle bougrement excitant, Norman J. Warren souhaite donc nous interpeller sur notre rapport intrinsèque au loisir épique et le pouvoir de fascination qu'il exerce sur notre inconscient. La force du film résidant aussi dans cette ambivalence que nous entretenons face à l'imagerie violente d'un spectacle stimulant mais oh combien cynique, vulgaire, complaisant, gratuit


Bloodsport: tous les coups sont permis
Toujours aussi actuel et donc prophétique, Rollerball n'a rien perdu de sa fulgurance visuelle et de son impact psychologique pour dénoncer l'avilissement de l'être humain conditionnée par la suprématie des médias. Au-delà de sa mise en scène sagace transcendant des combats anthologiques dans toutes les mémoires, il faut louer la prestance de James Caan dégageant une belle densité cérébrale à travers sa réminiscence existentielle sur la notion d'amour et de regain humanitaire. Indétrônable. 

*Bruno
18.03.13. 3èx

jeudi 14 mars 2013

FRANKENSTEIN JUNIOR (Young Frankenstein)

                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site cine-sanctuary.com

de Mel Brooks. 1974. U.S.A. 1h46. Avec Gene Wilder, Marty Feldman, Peter Boyle, Madeline Kahn, Cloris Leachman, Teri Garr, Kenneth Mars, Gene Hackman, Richard Haydn.

Sortie salles U.S: 15 Décembre 1974

FILMOGRAPHIE: Mel Brooks (Melvin Kaminsky) est réalisateur, acteur, scénariste, compositeur et producteur américain, né le 28 Juin 1926 à New-York. 1968: Les Producteurs. 1970: Le Mystère des 12 Chaises. 1974: Frankenstein Junior. 1974: Le Shérif est en prison. 1976: La Dernière folie de Mel Brooks. 1977: Le Grand Frisson. 1981: La Folle Histoire du monde. 1987: La Folle Histoire de l'Espace. 1991: Chienne de vie. 1993: Sacré Robin des Bois. 1995: Dracula, mort et heureux de l'être.


Classique de la parodie réalisé par un spécialiste en la matière, Frankenstein Junior reste l'éternel chef-d'oeuvre de Mel Brooks d'avoir su combiner humour débridée et tendresse élégiaque pour son hommage sincère emprunté au roman de Shelley. D'une drôlerie extravagante irrésistible, l'académisme de l'oeuvre, admirablement photographiée en noir et blanc, est notamment une réussite esthétique prégnante. Car terriblement consciencieux, Mel Brooks a véritablement effectué un travail d'orfèvre pour restituer à merveille l'ambiance chère de la Universal héritée de la trilogie gothique des Frankenstein. D'ailleurs, dans son souci perfectionniste, il réutilisa le même château et laboratoire qui servirent préalablement de décors aux classiques précités. Si en l'occurrence Frankenstein Junior n'a rien perdu de son pouvoir attractif à travers sa succession de sketchs parodiques, il le doit autant à ces protagonistes excentriques jamais irrévérencieux pour tourner en dérision les vicissitudes du monstre bourru.


Tant auprès du Dr Frankenstein (prononcez Frankensteen !) et de sa créature pourvue d'un cerveau "anormal", de sa fiancée prude Elisabeth, de l'assistant Igor à la bosse amovible, de la servante Frau Blücher (dont les chevaux hennissent à la moindre exclamation de son patronyme !) que de Inga, l'assistante docile secrètement amoureuse du docteur. Oserai-je oublier l'intervention de l'inspecteur Han Wilhelm Friederich Kem affublé d'un bras mécanique et s'exclamant avec un accent autrichien quasi inaudible ! Pour incarner ses rôles délurés, Gene Wilder, Peter Boyle, Marty Feldman, Madeline Kahn, Cloris Leachman, Teri Garr et Kenneth Mars débordent de fougue et de bonhomie pour nous communiquer leurs pitreries impayables. Sans oublier la présence inopinée de Gene Hackman en aveugle empoté lors d'une confrontation anthologique avec la créature ! Si Frankenstein Junior regorge d'inventivité pour provoquer l'hilarité, Mel Brooks n'oublie pas pour autant d'insuffler une véritable tendresse afin de rendre hommage au monstre de son enfance. La séquence du music-hall au sein de l'auditoire (clin d'oeil évident à King-Kong pour l'exploitation de la créature) en est un exemple révélateur. Le Docteur et son modèle infantile swinguant avec éloquence un concours de claquettes devant un public médusé ! Il y a notamment cette manière doucereuse (au son des cordes d'un violoncelle) dont Frankenstein s'applique afin de refréner la colère du monstre.


Chef-d'oeuvre parodique (parmi ses acolytes Le Bal des Vampires et Dr Jerry et Mr Love) et hommage poétique à une trilogie légendaire, Frankenstein Junior allie avec juste équilibre fantaisie et tendresse parmi la complicité de comédiens expansifs. Si bien qu'en réalisateur tatillon épris de nostalgie, Mel Brooks n'aura jamais fait preuve d'autant d'influence et d'inspiration pour déclarer sa flamme à la créature candide de la Universal. 

14.03.14. 4èx
Bruno Matéï


mercredi 13 mars 2013

RUNAWAY TRAIN (A bout de course)

                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site journalcinephilelyon.com

d'Andrei Konchalovsky. 1985. U.S.A. 1h51. Avec Jon Voight, Eric Roberts, Rebecca De Mornay, John P. Ryan, Kyle T. Heffner, T.K. Carter, Kenneth McMillian.

Sortie salles France: 21 Mai 1986. U.S: 6 Décembre 1985

FILMOGRAPHIE: Andreï Sergueievitch Mikhalkov-Kontchalovski (en russe : Андрей Сергеевич Михалков-Кончаловский), est un réalisateur, scénariste, producteur, acteur et compositeur russe, né le 20 août 1937 à Moscou. 1965: Le Premier Maître. 1966: Le Bonheur d'Assia. 1969: Le Nid de Gentilshommes. 1970: Oncle Vania. 1974: Romans o vlioublionnykh. 1979: Sibériade. 1984: Maria's Lovers. 1982: Split Cherry Tree. 1985: Runaway Train. 1986: Duo pour un soliste. 1987: Le Bayou. 1989: Voyageurs sans permis. 1989: Tango et Cash. 1991: Le Cercle des intimes. 1994: Riaba ma poule. 2002: La Maison de fous. 2007: Gloss. 2010: The Nutcracker in 3D.


"La bête la plus féroce connait la pitié". "Mais je ne la connais point, et ne suis donc pas une bête". Richard III - William Shakespeare. 

En 1985 déboule un film d'action réfrigérant élaboré par un réalisateur russe, d'après un scénario du grand Akira Kurosawa ! En têtes d'affiche, le vétéran John Voight se partage la vedette avec Eric Roberts ainsi que la jeune débutante Rebecca De Mornay. A l'arrivée, ce film d'aventures tourné dans les contrées neigeuses de l'Alaska emprunte le schéma du genre catastrophe pour nous confiner vers un (inépuisable) survival auquel trois individus vont finir par se confronter en interne ferroviaire. Manny et Buck sont deux évadés de prison ayant réussi à embarquer à bord d'un train. Le hic, c'est que l'engin se retrouve sans conducteur depuis que ce dernier succomba à une crise cardiaque. Avec l'entremise d'une employée, les deux hommes vont tenter par tous les moyens de stopper le train lancé à vive allure vers une destination inconnue. La réussite majeure de ce métrage aussi homérique qu'éprouvant réside dans l'intelligence de son scénario réfutant à tous prix l'esbroufe gratuite en se focalisant sur l'étude caractérielle de ses personnages. Mené sur un rythme effréné et pourvu d'un souffle épique vertigineux, Andrei Konchalovsky nous illustre une confrontation au sommet entre un taulard opiniâtre, véritable légende marginale, et son directeur de prison drastique.


Parmi le réalisme d'une succession de péripéties impromptues, Runaway Train demeure une course contre la mort culminant la destination des prisonniers vers un ultime baroud d'honneur. Le combat pour la survie de deux évadés burnés mais au caractère distinct, embarqués malgré eux à bord d'un monstre d'acier ! L'un est un jeune loup fort en gueule, l'autre un baroudeur inflexible à la bravoure surhumaine ! Au centre de leur dissension fondée sur l'esprit de dignité et le courage de vaincre la peur, la présence inopinée d'une jeune employée va tenter d'apaiser leur rancoeur. Dans le rôle du taulard forcené, Jon Voight livre une performance inoubliable dans sa verdeur viscérale. L'acteur déployant une énergie proprement primitive afin de justifier ses excès de haine parfois erratiques et son sens noble du sacrifice. Dans celui du jeune rebelle obtus et empoté, Eric Roberts insuffle une franche spontanéité à imposer ses choix contradictoires contre l'autorité de son associé. La néophyte Rebecca De Morney endosse une femme loyale à la spontanéité humaniste afin d'assagir l'animosité de ces deux rivaux. Enfin, John P. Ryan excelle dans celui du gardien-chef présomptueux incapable d'accepter une quelconque défaite et donc délibéré à neutraliser son pire ennemi. Si l'humanisme désespéré des personnages véhicule une forte intensité, le réalisateur exacerbe leurs enjeux en exploitant à merveille le cadre de son environnement naturel. Nos héros se démenant sans cesse à combattre le blizzard auquel la vitesse effrénée du convoi va décupler sa basse température (- 35 à - 50 degrés !). On sent que les conditions de tournage devaient être particulièrement houleuses par ce climat hivernal atypique, sachant notamment qu'un pilote d'hélicoptère aura tragiquement expiré durant un repérage en amont d'un glacier.


Film d'action catastrophiste tourné au sein d'une nature sauvage indomptable, Runaway Train décoiffe en diable pour mettre les nerfs à rude épreuve avant de nous achever lors d'un baroud d'honneur inconsolable. Un des plus grands films d'action des années 80 illustrant avec intelligence une parabole humaniste sur le sens de la bravoure et du sacrifice. 

13.03.13. 4èx
Bruno Matéï


mardi 12 mars 2013

LE DOCTEUR ET LES ASSASSINS (The Doctor and the devils)

                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site backtothemovieposters.blogspot.com

de Freddie Francis. 1985. U.S.A/Angleterre. 1h33. Avec Timothy Dalton, Jonathan Pryce, Twiggy, Julian Sands, Stephen Rea, Phyllis Logan, Lewis Fiander, Beryl Reid.

Sortie salles France: 29 Janvier 1986. U.S.A: 4 Octobre 1985

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Freddie Francis est un réalisateur, directeur de photographie et scénariste britannique, né le 22 Décembre 1917 à Londres, décédé le 17 Mars 2007 à Isleworth (Royaume-Uni). 1962: La Révolte des triffides. 1963: Paranoiac. 1964: Meurtre par procuration. 1964: l'Empreinte de Frankenstein. 1965: Le Train des Epouvantes. 1965: Hysteria. 1965: The Skull. 1966: The Deadly Bees. 1966: Poupées de cendre. 1967: Le Jardin des Tortures. 1968: Dracula et les Femmes. 1970: Trog. 1972: Histoires d'Outre-Tombe. 1973: La Chair du Diable. 1973: Les Contes aux limites de la folie. 1974: Son of Dracula. 1975: La Légende du Loup-Garou. 1975: The Ghoul. 1985: Le Docteur et les Assassins. 1987: Dark Tower.


Mon nom est flétri, ridiculisé par les enfants. Me suis-je placé comme dieu au dessus de la mort ? Me suis-je placé au dessus de la pitié ? Oh mon dieu, je savais ce que je faisais...

Avant dernier film du notable Freddie Francis qui se solda par un flop commercial cinglant, le Docteur et les Assassins est la sixième adaptation de l'histoire véritable des tueurs en série William Burke et William Hare. Si John Gilling avait magistralement illustré ce fait divers sordide dans son chef-d'oeuvre l'Impasse aux Violences, Freddie Francis livre également une pièce maîtresse de l'horreur réaliste sous l'entremise d'un médecin humaniste entièrement voué aux progrès de la recherche scientifique. Sous l'époque anglaise du 19è siècle, un médecin ambitieux s'entreprend de payer des déterreurs de cadavres afin de pouvoir les disséquer pour sa cause scientifique. Appâté par un gain fructueux s'il s'agit de ramener des cadavres frais, deux ivrognes sans vergogne vont se transformer en odieux assassins. 


Il y a des oeuvres essentielles qui marquent durablement les esprits dans le paysage du cinéma horrifique. Et en dehors d'une ambition artistique, certains réalisateurs s'engagent à nous interpeller par leur réflexion existentielle sur le sens du Bien et du Mal, tout en délivrant un constat amer sur une société obscurantiste. Totalement oublié de nos jours, Le Docteur et les Assassins fait parti de ses perles noires injustement méprisées, alors que l'intelligence du propos et sa densité psychologique forcent autant de respect que d'admiration. Avec sa photo sépia flamboyante et sa scénographie historique fidèlement reconstituée, on se croirait revenu à la période faste des productions Hammer de l'ancienne époque ! Mais ce qui intéresse avant tout Freddie Francis, outre de nous relater avec souci de réalisme un fait divers crapuleux, c'est de délivrer le portrait déchu d'un médecin humaniste entièrement consacré à sa recherche médicale. Un anticonformiste délibéré à enfreindre les lois séculaires faisant obstacle à ses progrès scientifiques. En tant que frondeur autonomiste, le docteur Rock (Timothy Dalton, voué corps et âme dans un rôle poignant et équivoque) décide finalement de déterrer la dépouille de cadavres sous l'entremise de lurons habitués à fréquenter les bars malfamés. Seulement, ses ambitions immorales (se placer au dessus de Dieu en violant l'âme des défunts reposant sous terre) vont le conduire à un terrible préjudice par la cupidité de deux alcooliques ignares. Par leurs exactions crapuleuses uniquement motivées par le gain, le réalisateur dépeint sans concession le portrait glaçant de deux tueurs impitoyables tributaires de leur dégénérescence morale. Des marginaux englués dans leur condition désoeuvrée et donc mieux aptes à perpétrer sans scrupule leurs homicides sur des vieillards et catins défavorisés. Incarnés par Jonathan Ryce et Stephen Rea, les deux acteurs campent à merveille un duo d'assassins impassibles, davantage épris d'un penchant pour le sadisme engendré par la folie meurtrière.


Sous le mode de l'horreur réaliste (et chirurgicale), Le Docteur et les Assassins est avant tout un drame profondément humain, fort et poignant, d'un anatomiste trop ambitieux finalement rongé par le remord d'une conscience pervertie. Magnifiquement photographié et fidèlement reconstitué, le film nous replonge avec une flamboyante âpreté à l'aube de l'Angleterre victorienne, sous son aspect le plus dépravé. Là où l'alcoolisme, la prostitution et le crime (payant) faisaient partis du morne quotidien des petites gens réduits à leur déchéance et la mendicité. 

Dédicace à Sebastien De Jesus
12.03.13
Bruno Matéï



lundi 11 mars 2013

DRACULA. Licorne d'Or au Festival du Film Fantastique de Paris

                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site forum.nanarland.com

de John Badham. 1979. U.S.A/Angleterre. 1h49. Avec Frank Langella, Laurence Olivier, Donald Pleasence, Kate Nelligan, Trevor Eve.

Sortie salles U.S.A: 20 Juillet 1979

Récompense: Licorne d'Or au Festival du film fantastique de Paris

FILMOGRAPHIE: John Badham est un réalisateur et producteur britannique, né le 25 Août 1939 à Luton.
1976: Bingo. 1977: La Fièvre du samedi soir. 1979: Dracula. 1981: C'est ma vie après tout. 1983: Tonnerre de feu. 1983: Wargames. 1985: Le Prix de l'exploit. 1986: Short Circuit. 1987: Etroite Surveillance. 1990: Comme un oiseau sur la branche. 1991: La Manière Forte. 1992: Nom de code: Nina. 1993: Indiscrétion Assurée. 1994: Drop Zone. 1995: Meurtre en suspens. 1997: Incognito. 1998: Road Movie.


Couronné de la Licorne d'Or au Festival du film fantastique de Paris, le troisième film de John Badham est une énième transposition du célèbre roman de Bram Stoker. Honteusement occulté aujourd'hui et réduit à l'indifférence par la nouvelle génération, Dracula est pourtant l'une des plus belles variations du mythe vampirique. Epris de romantisme lyrique dans la relation sensuelle entretenue avec le prince des ténèbres et sa muse, et pourvu d'un esthétisme onirique prégnant, ce conte baroque est notamment transcendé par la présence magnétique de Frank Langella, époustouflant de charisme en dandy maléfique. Alors qu'un bateau échoue au large des côtes anglaises, une femme sauve de l'équipage l'unique survivant. Ce miraculé n'est autre que le Comte Dracula, délibéré à trouver sa nouvelle maîtresse et ainsi procréer sa race diabolique. Après la mort mystérieuse de sa fille, le professeur Van Helsing décide de se rendre sur place auprès du docteur Jack Sward, Jonathan Harker et sa fiancée Lucy. 


Avec la splendeur d'une photo désaturée aux teintes sépia et blafardes, John Badham s'éprend d'une ambition formelle pour nous livrer un spectacle flamboyant mené sur un rythme sans faille. Déployant des images poétiques diaphanes ou limpides à travers sa nature crépusculaire, mais aussi dans l'antre d'un vaste château illuminé de bougies, Dracula est une véritable invitation au voyage jusqu'au bout de la nuit. La force de ces images picturales, la richesse de ces décors tributaires d'une réalisation rigoureuse ainsi que le souffle exaltant qui en émane sont notamment exacerbés par la conviction d'illustres comédiens. Que ce soit le notable  Laurence Oliver dans le rôle d'un Van Helsing faillible, Donald Pleasance dans celui, secondaire mais attachant, du dirigeant d'un asile psychiatrique, la ravissante Kate Nelligan pourvue de volupté charnelle pour endosser la maîtresse corrompue, ou encore l'assistance vigoureuse de Trevor Eve dans celui de l'amant téméraire ! Mais c'est indéniablement la personnalité de Frank Langella qui marque durablement les esprits dans sa posture de prince des ténèbres à l'apparence beaucoup plus élégante que de coutume. Avec son regard noir étrangement trouble, l'acteur impose un jeu perfide et délétère accentuant avec un naturel confondant le pouvoir de séduction qui enveloppe le film. Jalonné de péripéties bondissantes (l'héroïsme pugnace dont nos héros font preuve pour annihiler le comte) ou d'évènements parfois insolites (le prologue meurtrier que l'équipage du bateau est contraint de subir, la découverte du tunnel construit sous le cimetière et la première apparition spectrale de Mina !), Dracula s'alloue aussi d'une teneur érotique baroque (l'étreinte sexuelle des deux amants illustrée sous la texture rutilante d'un crépuscule carmin !). Enfin, il culmine sa traque intrépide vers un point d'orgue diaboliquement cruel (et oh combien inventif !) pour la mise à mort du vampire réfugié en interne d'un bateau !


D'une beauté plastique fulgurante dans son gothisme épuré et mené de main de maître par un John Badham particulièrement ambitieux, Dracula est un conte horrifique à la charge romantique irrésistiblement fascinante. L'une des meilleures déclinaisons du célèbre mythe, aussi moderne qu'archaïque, injustement passée dans l'oubli. A (re)découvrir d'urgence !

11.03.13. 4èx
Bruno Matéï

samedi 9 mars 2013

Vampyres (Daughters of Darkness)

                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site melonesoldmovie.blogspot.com

de José Ramón Larraz. 1974. Angleterre. 1h27. Avec Marianne Morris, Anulka, Murray Brown, Michael Byrne, brian Deacon, Sally Faulkner, Karl Lanchbury.

FILMOGRAPHIE: José Ramón Larraz, dit parfois Gil, Dan Daubeney ou Watman (né en 1929 à Barcelone en Espagne) est un auteur de bande dessinée et réalisateur espagnol. 1970: l'Enfer de l'Erotisme. 1971: Déviation. 1973: La Muerte Incierta. 1974: Emma, puertas oscuras. 1974: Les Symptomes. (Symptoms/The Blood Virgin). 1974: Vampyres. 1974: Scream... and die ! 1977: Luto Riguroso. 1977: Le Voyeur. 1977: La Fin de l'Innocence. 1978: l'Occasion. 1978: La Visita del vicio. 1979: The Golden Lady. 1979: l'Infirmière a le feu aux fesses. 1980: Estigma. 1981: Las Alumnas de madame Olga. 1981: La Momia Nacional. 1982: Les Rites sexuels du diable. 1983: Polvos Magicos. 1983: Juana la loca... de vez en cuando. 1987: Repose en paix. 1988: Al filo del hacha. 1990: Deadly Manor. 1992: Sevilla connection.


La Chair et le Sang.
Auteur de bandes dessinées, l'espagnol José Ramon Larraz est aussi le cinéaste méconnu de plusieurs longs-métrages quasi introuvables en France comme le souligne le film qui nous intéresse ici. D'ailleurs, l'un de ses premier essais présenté à cannes, Les Symptomes, reste une oeuvre aujourd'hui invisible car faisant partie du Top 10 des 75 films les plus recherchés par le FBI. La même année, il entreprend  donc Vampyres, un film d'exploitation alliant sans vergogne sexe et horreur sous un mode auteurisant. Largement occulté depuis des décennies par les spécialistes du genre, cette série B british demeure pourtant une véritable perle d'étrangeté à situer entre le cinéma onirique de Jean Rollin (voir aussi de Jess Franco pour son érotisme à l'orée de la pornographie) et celui, plus trivial, de Norman J. Warren (notamment pour sa dernière partie étonnamment plus violente et gorasse). Ainsi, le scénario linéaire est un prétexte pour aligner des séquences érotico-gores particulièrement corsées. Deux femmes autrefois assassinées par un mystérieux individu reviennent sous l'apparence de vampires pour assassiner les automobilistes égarés. Propriétaires d'un manoir, nos châtelaines entraînent quelques quidams esseulées dans leur gothique demeure pour s'adonner au plaisir de la chair et du sang. Ce qui frappe d'emblée dans ce conte fantasmatique où le temps semble dilué, c'est le soin alloué à l'atmosphère opaque irrésistiblement envoûtante. Tant auprès de sa nature crépusculaire en clair-obscur, de l'intérieur du manoir gothique où les chambres tamisées y prédominent le cadre, ou du sous-sol étroit d'une cave éclairée de bougies. Avec l'apparition onirique de deux beautés charnelles entr'aperçues aux abords d'une forêt mais natives de nulle part, José Ramon Larraz joue la carte de la poésie lascive. 


Bien que ce soit l'érotisme ardent qui prédomine toute l'intrigue si bien que ces femmes vampires vêtus de cape noire (mais éludées de canines aiguisées !) occupent leur temps à l'échangisme d'ébats sexuels au sein de leur manoir reculé. La mise en scène soignée palliant la minceur de l'intrigue au gré d'une ambition formelle à façonner un climat d'étrangeté particulièrement prégnant. En prime, la verdeur des attaques sanglantes commises par les lesbiennes sur les mâles démunis s'avèrent davantage cruelles auprès de leur hargne incontrôlée. Superbement campées par Marianne Morris et Anulka (que l'on  retrouve par ailleurs quelques décennies plus tard en interview croisé dans le Blu-ray Blue Underground), nos deux nymphettes impudentes parviennent aisément avec un naturel trouble à nous aguicher par leur silhouette voluptueuse, leur regard magnétique et leur poitrine opulente. Les séquences érotiques généreusement explicites accusant une certaine redondance que le spectateur contemple sans jamais se laisser distraire par l'ennui. Leur efficacité renouvelée résultant surtout dans la variante des victimes masculines, dans l'élaboration d'un climat gothique chargé de mystère diffus, dans ses éclairs de violence inopinés et dans le pouvoir de fascination imparti aux maîtresses insatiables avides d'étreintes sanglantes. Spoil !!! Quant au final caustique, il surprend une ultime fois pour sa teneur fantaisiste et son originalité à justifier les motivations revanchardes des vampires réduites à l'état d'ectoplasme comme le sous-entendait son prologue criminel. Fin du Spoil


Erotisme de la mollesse offerte.
En dépit d'un cheminement narratif tantôt elliptique (mais facilement pardonnable de par son vénéneux charme rétro de nos jours révolus), le jeu perfectible de quelques rôles masculins (pour autant attachants) et ces dialogues standards (non préjudiciables), Vampyres fascine, trouble et envoûte sans modération le spectateur plongé dans un enivrant rêve érotico-sanglant régi par des nymphomaniacs ! A découvrir sans hésiter donc auprès des fans d'OVNI indépendant avides d'ambiance ésotérique à la sauce British.  

Eric Binford
01.12.21
09.03.13