mardi 28 juin 2016

SALUT L'AMI ADIEU LE TRESOR


                                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"Chi trova un amico, trova un tesoro" de Sergio Corbucci. 1981. Italie. 1h44. Avec Bud Spencer, Terence Hill, Sal Borgese, John Fujoka, Luise Bennett, Terry Moni Papuana.

Sortie salles France: 16 Décembre 1981. Italie: Décembre 1981

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Sergio Corbucci est un réalisateur et scénariste italien, né le 6 Décembre 1927 à Rome, décédé le 1er Décembre 1990.
1962: Romulus et Remus. 1963: Danse Macabre (co-réalisé avec Antonio Margheriti). 1966: L'Homme qui rit. 1966: Django. 1966: Ringo au pistolet d'or. 1966: Navaja Joe. 1968: Le Grand Silence. 1969: Le Spécialiste. 1970: Companeros. 1972: Mais qu'est ce que je viens foutre au milieu de cette révolution ? 1978: Pair et Impair. 1980: Un Drôle de flic. 1981: Salut l'ami, adieu le trésor. 1989: Night Club.


Gros succès en salles à sa sortie, Salut l'ami adieu le trésor est aujourd'hui l'occasion pour moi de rendre hommage à la disparition de Bud Spencer avec un brin de nostalgie depuis que j'ai eu l'opportunité de découvrir le film dans une salle de ciné. Accompagné de mon père un samedi après-midi à l'Apollo Lens, c'est un souvenir d'ado mémorable que je garde en mémoire quand bien même aujourd'hui je le redécouvre pour la 3è fois avec un enthousiasme ému. Tant pour la perte de l'acteur de seconde zone aussi modeste qu'introverti que pour la disparition d'un genre de comédie épique dont les italiens s'étaient faits une spécialité. Car il faut l'avouer, les films du duo Bud Spencer / Terence Hill ne brillaient pas par leur subtilité pour provoquer le rire mais fonctionnaient plutôt sur leur simplicité narrative et surtout sur la bonhomie de nos "gros durs" avec une tendresse et une sincérité qu'on ne retrouve plus (ou rarement) aujourd'hui.

                                       

A la recherche d'un trésor dans une île du pacifique, Alan (Terence Hill) s'invite en passager clandestin sur le bateau de Charlie O'Brien (Bud Spencer). Après leurs récurrentes mésententes qui leur valu d'abandonner le navire, nos deux touristes sont contraints de rejoindre à la nage l'île autrefois résidée par l'armée japonaise de l'après-guerre. Au moment d'amorcer leur chasse aux trésors, ils sont accueillis par les natifs indigènes alors que des pirates et gangsters vont rapidement s'interposer pour la quête du magot. Parmi l'insolence de quiproquos, gags et rebondissements improbables, Salut l'ami, adieu le trésor compte beaucoup sur l'extravagance puérile des personnages secondaires et sur l'inimitié amicale du duo héroïque pour susciter la réjouissance. Terence Hill invoquant un personnage espiègle et chafouin afin de titiller les nerfs de son partenaire autonome ! Fort d'un rythme nerveux ne cédant jamais à l'ennui, l'intrigue alterne les rivalités avec des antagonistes forts en gueule afin que nos héros inflige mandales et grosses baffes avec une inventivité insatiable. Dépaysant par son climat tropical solaire et entêtant sous l'impulsion ringarde d'une partition antillaise, Salut l'ami, adieu le trésor dégage un charme aussi folingue que surréaliste sous l'autorité intègre de Sergio Corbucci (cinéaste notoire affichant à son curriculum les signatures de Django et du Grand Silence !).


Spectacle familial débordant de fantaisie sous le ressort d'une naïveté bon enfant, Salut l'ami, adieu le trésor constitue une perle Bis de la comédie italienne que le duo légendaire Bud Spencer / Terence Hill est parvenu à immortaliser dans leur concours de baffes décoiffantes !

A Bud Spencer (31.10.29 / 27.06.16)

lundi 27 juin 2016

Frogs

  
                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de George Mc Cowan. 1972. U.S.A. 1h32. Avec Ray Milland, Sam Elliott, Joan Van Ark, Adam Roarke, Judy Pace, Lynn Borden, Mar Mercer, David Gilliam.

Sortie salles France: 2 Octobre 1974. U.S: 10 Mars 1972

FILMOGRAPHIE PARTIELLE: George Mc Cowan est un réalisateur canadien né le 27 Juin 1927, décédé le 1er Novembre 1995. 1971: Face-Off. 1972: Frogs. 1972: La Chevauchée des 7 mercenaires. 1974: The Inbreaker. 1974: To kill the King. 1976: Shadow of the Hawk. 1979: Alerte dans le cosmos. 1990: Sanity clause (télé-film).


Série B horrifique réalisée par un artisan de séries TV (l'île Fantastique, Drôle de dames, Shannon, l'Homme à l'orchidée, Starsky et Hutch, Cannon, les Envahisseurs, etc...), Frogs emprunte la thématique des animaux meurtriers sous couvert de manifeste anti-pollution (les pesticides employées ici à outrance par un propriétaire cossu). D'une simplicité narrative, de riches résidents d'une bâtisse insulaire se voient agressés par des animaux à proximité de leurs étangs et de la forêt. Quand bien même un journaliste écolo tente de leur prêter main forte malgré l'intransigeance du patriarche à ne pas céder à l'affolement. Avec son affiche cartoonesque aussi grotesque que pittoresque, Frogs cultive l'esprit Bis d'un nanar ricain assez fallacieux. Dans la mesure où malgré leur omniprésence à l'écran (croassement rébarbatif à l'appui !), ni grenouilles ni crapauds éprouvent une pulsion meurtrière si on excepte l'ultime séquence lorsqu'ils se réunissent en masse pour provoquer une attaque cardiaque chez le propriétaire. Outre cet écart de conduite, nos batraciens occupent leur temps à observer inlassablement les exactions meurtrières de leurs congénères. 


A savoir, serpents, lézards, crocodiles et volatiles communément complices pour se venger de la morale irrévérencieuse de l'homme. Si l'intrigue sans surprises tourne à vide et que la direction d'acteurs est inégale de par l'aspect attachant des personnages parfois crétins dans leur maigre effort à repousser la menace, les séquences chocs qui empiètent le récit font preuve d'une certaine vigueur dans leur mise à mort à la fois viscérale et malsaine. Non pas que le cinéaste ne cède aux effusions de sang mais qu'il insiste à décrire de manière documentée l'agonie cruelle des victimes lorsqu'elles sont sauvagement prises à parti avec les reptiles. Et à ce niveau on ressent bien la patine  insalubre d'une oeuvre plutôt réaliste (tous les animaux, omniprésents et repoussants, sont authentiques !) symptomatique de l'époque des Seventies. En prime, le cadre insécure de l'environnement naturel dans lequel évoluent les animaux insuffle un climat hostile assez envoûtant (bruitages dissonants à l'appui fonctionnant à merveille). Si 1 ou 2 attaques chocs sombrent un peu dans le ridicule, faute du comportement incohérent ou ridicule des protagonistes (une des victimes s'efforçant maladroitement de se défendre contre un alligator au sein d'un étang, une autre se vautrant bêtement dans une fumée toxique au lieu de s'en écarter !), les animaux charismatiques, car bien communément réels, provoquent terreur et répulsion viscérale prégnantes !


Day of the Animals
Série B mineure à la réalisation stérile et à la distribution timorée bien qu'attachante (Ray Milland  cabotine aimablement dans sa prestance patriarcale) mais néanmoins rehaussée d'un climat anxiogène constamment inquiétant, Frogs constitue un fort sympathique divertissement pour les amateurs de relique bisseuse à l'aura génialement licencieuse (marque de fabrique des Seventies pour le genre).  

*Bruno
24.01.23. 5èx
27.06.16
10.03.10

vendredi 24 juin 2016

SEVERANCE

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site aureliehuet.com 

de Christopher Smith. 2006. Angleterre. 1h30. Avec Danny Dyer, Laura Harris, Tim McInnerny, Toby Stephens, Claudie Blakley, Andy Nyman.

Sortie salles France: 18 Octobre 2006. Angleterre: 25 Août 2006

FILMOGRAPHIE: Christopher Smith est un réalisateur et scénariste britannique, né le 16 Août 1970 à Bristol. 2004: Creep. 2006: Severance. 2009: Triangle. 2010: Black Death. 2011: Paris I'll Kill You. 2014: Get Santa.


Empruntant le schéma du survival dans la tradition du genre (chasse à l'homme en milieu forestier), le réalisateur british Christopher Smith (révélé par l'excellent Creep !) parvient à contourner les clichés par le biais d'un humour sardonique particulièrement féroce. Car outre les situations aussi extravagantes qu'inventives et les comportements décalés des personnages, Severance se laisse également influencé par le Tortur'Porn (en vogue) avec un réalisme viscéral. Sept managers partent en week-end pour une partie de Pain-ball en pleine forêt hongroise. Epiés par une présence invisible et sévèrement mis à mal par moult pièges implantés dans les sentiers, ils deviennent la cible d'un groupuscule terroriste délibéré à les pourchasser jusqu'à ce que mort s'ensuive. Satire du milieu de l'entreprise auquel 7 employés n'auront de cesse de tester leur performance morale et physique avec un esprit d'équipe anarchique, Severance amorce la descente aux enfers d'un jeu de massacre où les coups les plus couards seront permis. En comptant notamment sur la spontanéité attachante des personnages (notamment la romance improvisée entre le duo héroïque), Christopher Smith divertit généreusement avec l'habileté d'un script détonnant embrayant avec la montée en puissance d'un rythme homérique. Ce dernier exploitant également habilement les lieux-clos et son espace naturel pour les allés et venus de nos touristes s'efforçant de contourner la mort à travers les chausse-trapes et courses-poursuites.


En dépit de la modestie du réalisateur à façonner un divertissement de série B, Severance constitue un spectacle retors constamment plaisant et haletant dans son lot de gags sardoniques et d'ultra-violence vitriolée.  

jeudi 23 juin 2016

INCASSABLE

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site fmaker.unblog.fr

"Unbreakable" de Night M. Shyamalan. 2000. U.S.A. 1h47. Avec Bruce Willis, Samuel L. Jackson, Robin Wright Penn, Spencer Treat Clark, Charlayne Woodard, Eamonn Walker, Leslie Stefanson

Sortie salles France: 27 Décembre 2000. U.S: 22 Novembre 2000

FILMOGRAPHIE: M. Night Shyamalan est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain, d'origine indienne, né le 6 Août 1970 à Pondichéry.
1992: Praying with Angers. 1998: Eveil à la vie. 1999: Sixième Sens. 2000: Incassable. 2002: Signs. 2004: Le Village. 2006: La Jeune fille de l'eau. 2008: Phenomènes. 2010: Le Dernier maître de l'air. 2013: After Earth. 2015: The Visit.


Un an après le succès notoire du 6è SensM. Night Shyamalan recrute à nouveau Bruce Willis pour le glisser dans la peau d'un super-héros hétérodoxe. Car à travers ce thème mythologique, l'intrigue audacieuse fait fi de surenchère homérique afin de privilégier la dimension torturée de deux personnages en discorde morale. David Dunn poursuivant durant son cheminement existentiel une quête identitaire sous l'influence d'un féru de bande dessinée. Miraculeusement indemne après un tragique accident ferroviaire, il rencontre Elijah Price, artiste peintre de BD atteint d'une maladie rare, l'ostéogenèse (grande fragilité des os dû à une anomalie congénitale). Ce dernier tente de convaincre David, agent de sécurité dans un stade de foot, qu'il est affublé de pouvoirs surhumains à l'instar d'un super-héros. Réfutant cette théorie improbable mais hanté par son don pour la survie, David ne cesse de se remettre en question parmi le témoignage de son fils toujours plus intrigué par sa santé prospère. Mais comme tous les personnages super-héroïques, ce dernier pâti d'un point faible qu'Elijah va tenter d'élucider.


Récit d'anticipation émaillé de rebondissements (l'évolution morale de David et Elijah donne lieu à une complicité ambivalente !) et de plages d'intimité d'une pudeur fragile (la complicité autant amicale que paternelle de David avec son fils, ses rapports conjugaux en quête de réconciliation), Incassable prend le contre-pied du divertissement lambda pour transcender le mythe du super-héros avec sobriété imperturbable. Dénué d'aucune prétention, M. Night Shyamalan exploite tous les codes du genre avec une rare subtilité (la prise de conscience surhumaine de David avec la séance des haltères) tout en offrant au passage une déclaration d'amour à la bande dessinée (le générique introductif, l'analyse d'un dessin pictural !). A l'aide d'une réalisation alambiquée, le cinéaste prend son temps pour peaufiner un récit diaphane à travers les profils contrariés de personnages en proie à la délivrance. Réflexion sur l'identité, la rédemption, le but de notre destinée mais aussi celui du sacrifice (sur ce dernier terme, le point de vue est établi par le "méchant"), Incassable oppose les sentiments contradictoires de vengeance et de justice avec singularité. Shyamalan multipliant les rivalités psychologiques avec un humanisme fragile plutôt que la tradition des confrontations musclées (un seul pugilat est à relever !). Tant pour la remise en question de David hanté par sa condition surhumaine (une tare l'empêchant de façonner sa vie de famille), la posture admirative du fils puis sa crise morale à vouloir démasquer l'identité de son père, que de la condition versatile d'Elijah depuis son handicap congénital.


Avec le parti-pris de déconcerter le grand public, M. Night Shyamalan a pris d'énormes risques à traiter sobrement de l'univers des super-héros et de la bande dessinée en misant essentiellement sur la dimension humaine de personnages partagés entre révolte et reconnaissance ou quête de rédemption et quiétude existentielle. Outre le brio technique du cinéaste conteur, on peut également prôner le jeu flegme des comédiens communément impliqués dans la vigueur émotionnelle. Déroutant mais passionnant sous le pilier de ses thèmes universels.  

2èx

mercredi 22 juin 2016

LA SECTE SANS NOM. Prix du jury, prix de la critique, prix du jury jeune et Prix de la découverte, Gerardmer 2000.

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site papystreaming.com

"Los sin nombre" de Jaume Balagueró. 1999. Espagne. 1h39. Avec Emma Vilarasau, Karra Elejalde, Tristán Ulloa, Toni Sevilla, Brendan Price, Jordi Dauder

Sortie salles France: 23 Août 2000. Espagne: 19 Novembre 1999

FILMOGRAPHIE: Jaume Balaguero est un réalisateur et scénariste espagnol d'origine catalane, né le 2 Novembre 1968 à Lérida.
1999: La Secte sans Nom. 2002: Darkness. 2005: Fragile. 2006: A Louer (moyen métrage). 2007: REC (co-réalisé avec Paco Plaza). 2009: REC 2 (co-réalisé avec Paco Plaza). 2011: Malveillance. 2014: REC Apocalypse.


Premier long-métrage oh combien éprouvant du prodige Jaume Balaguero, la Secte sans nom fut salué à travers le monde par de multiples récompenses. En témoigne son accueil reçu en France lorsqu'il s'est vu attribué le Prix du jury, le Prix de la Critique, le Prix du Jury Jeune et le Prix de la Découverte Ciné-Live au Festival de Gérardmer. Thriller horrifique sans doute influencé par Rosemary's Baby, Seven et le Silence des Agneaux, la Secte sans nom fait parti de ses rares métrages où l'atmosphère putride et la terreur cérébrale nous saisissent à la gorge sans jamais lâcher prise ! A l'instar de son prélude auquel une fillette tuméfiée est retrouvée vitriolée après avoir été plongée dans un bain d'acide ! Une séquence morbide d'un réalisme halluciné d'autant plus dérangeante que le symbole candide est immolé au nom d'une confrérie néo-nazie.


Cinq ans après ce tragique évènement, Claudia reçoit un appel de sa défunte fille lui suppliant de partir à sa recherche. Oh départ dubitative mais gagnée par la curiosité et une soif de vérité, elle se lance à sa recherche avec l'aide d'un ex policier. Au même moment, un journaliste enquête en parallèle pour tenter de lever le voile sur ces sinistres disparitions d'enfants auquel Santini et un médecin nazi en seraient les principaux commanditaires. Prenant pour thème le satanisme (même si le mot n'est jamais ou si peu prononcé me semble t'il !), la pédophilie et le snuff movie, La Secte sans nom baigne dans un climat malsain difficilement respirable. Epaulé d'une photo désaturée et de décors désaffectés où plane une ombre hostile, l'ambiance poisseuse que Jaume Balaguero façonne scrupuleusement nous magnétise l'esprit sans complaisance. En dépit d'une intrigue complexe conçue comme un puzzle à devinettes, le cinéaste sème doute, trouble et confusion pour mieux nous plonger dans le désarroi sous l'impulsion délétère d'un ésotérisme parareligieux en concertation avec le nazisme. Cette secte ayant pour mission de synthétiser la pureté du mal autour des personnages martyrs d'Angela et de sa mère. Remarquablement interprété, les comédiens s'investissent dans leur rôle avec une mine aussi contrariée que sentencieuse. Les protagonistes avides de vérité s'efforçant de résoudre l'énigme avec une foi mêlée d'appréhension et de désespoir.


Une pellicule impure habitée par le Mal. 
Profondément malsain, trouble, dérangeant et réellement terrifiant lors de moments d'intimité chargés d'ambiguïté (l'aparté avec Santini, la posture gouailleuse et viciée du gourou), La Secte sans nom laisse des séquelles psychologiques sitôt le générique écoulé. De par son effrayante conclusion bâtie sur le nihilisme et son réalisme cru conféré aux faits de société tels que les enlèvements d'enfants et le satanisme. Epaulé d'une bande-son stridente, il en émane un chef-d'oeuvre du genre d'une angoisse dépressive dans sa manière capiteuse de susciter l'émoi au coeur d'un surnaturel laissé en suspens. 

3èx

Récompenses: Meilleure actrice pour Emma Vilarasau, meilleure photo pour Xavi Giménez au Festival international du film de Catalogne de Sitges. Prix du meilleur film international au festival FanTasia de Montréal.
Prix du jury, prix de la critique, prix du jury jeune et Prix de la découverte Ciné-Live au festival de Fantastic'Arts 2000 de Gérardmer.
Corbeau d'or au Festival international du film fantastique de Bruxelles.
Prix de la critique et prix du meilleur réalisateur du meilleur film international fantastique au Fantasporto à Porto.

mardi 21 juin 2016

SSSSnake

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Sssssss" de Bernard L. Kowalski. 1973. U.S.A. 1h39. Avec Strother Martin, Dirk Benedict, Heather Menzies-Urich, Richard B. Shull, Tim O'connor.

Sortie salles France: 8 Mai 1974

FILMOGRAPHIE: Bernard L. Kowalski est un réalisateur et producteur américain, né le 2 Août 1929 à Brownsville, Texas, décédé le 26 Octobre 2007 à Los Angeles, Californie. 1958: Hot car girl. 1958: Night of the Blood Beast. 1959: Attack of the Giant Leeches. 1959: Blood and Steel. 1961: Las Vegas Beat. 1968: Krakatoa à l'est de Java. 1969: Stiletto. 1970: Macho Callahan. 1971: Panique en plein ciel (télé-film). 1971: Black Noon (télé-film). 1972: Women in chains (télé-film). 1972: Two for the Money (télé-film). 1972: The New Healers (télé-film). 1972: The Woman Hunter (télé-film). 1973: SSSnake. 1975: The Supercops (télé-film). 1976: Risko. 1977: Flight to holocaust (télé-film). 1978: The Nativity (télé-film). 1979: Marciano (télé-film). 1980: Nick and the Dobermans (télé-film). 1980: Turnover Smith (télé-film). 1980: Patrouille de nuit à Los-Angeles (télé-film). 1983: Johnny Blue (télé-film). 1988: Miracle at Beekman's Place (télé-film). 1989: Nashville Beat (télé-film).

                                            

Autrefois inédit en Vhs et mais diffusé à l'époque sur la chaîne TV6 au coeur des années 80, SSSSnake marqua une génération de téléspectateurs pour ceux ayant eu l'opportunité de le découvrir un dimanche soir. Réalisateur prolifique ayant aussi bien oeuvré au cinéma qu'à la TV (on lui doit des épisodes de Magnum, K2000, Supercopter, Tonnerre de Feu, Mike Hammer, Simon et Simon, les Petits génies, Chips, Barreta, etc...), Bernard L. Kowalski réalise en 1973 une série B horrifique plutôt efficace par son rythme soutenu largement rehaussé du réalisme documenté imparti aux reptiles. Car comme le souligne son avertissement liminaire, tous les serpents sont bel et bien d'authentiques spécimens ramenés de Bangkok (les Cobras royaux) et de Singapour (le Python) et non de vulgaires effets spéciaux façonnés à base de prothèses et latex. 155 étaient d'ailleurs présents sur le tournage dont la moitié venimeux ! Quant à la métamorphose de David en reptile humain, si les effets cheap peuvent timidement prêter à sourire, le réalisme imparti à sa souffrance physique (râles d'agonie à l'appui !) finit rapidement par provoquer l'effroi avec une empathie teintée de désespoir. Certaines séquences fortement dérangeantes insufflant d'ailleurs un climat résolument malsain, tant pour la déchéance humaine des sujets (le héros en mutabilité puis celui exposé dans un cirque !) que du combat réalisé sans trucage entre une mangouste et un cobra royal ! Ainsi, en fustigeant la moralité du cinéaste, on peut donc se scandaliser de cette éventuelle maltraitance animale !

                                         

Prenant pour thème le savant fou délibéré ici à expérimenter du venin reptilien sur un cobaye humain au profit de notre survie (c'est à dire s'immuniser contre la pollution, les fléaux, la famine et l'holocaust), SSSnake emprunte le schéma classique d'une série B horrifique à l'aura de souffre perméable. De par ces quelques situations et clichés éculées (le rival aux gros bras molestant la tranquillité du couple avant une riposte punitive) et ses séquences chocs censées provoquer l'effroi (l'agression sous la douche puis celle dans la cave), SSSnake ne peut laisser indifférent l'amateur de déviance horrifique. Et en dépit de son cheminement inévitablement prévisible entrecoupé d'une situation sentimentale censée dramatiser la romance (la fille du docteur ne doit pas avoir de rapport sexuel avec David au risque d'être contaminée !), SSSSnake insuffle un suspense anxiogène quand au sort de ses amants (sobrement incarnés par Dirk Benedict et Heather Menzies-Urich) soumis à l'influence paternelle de Stoner. Ce dernier rivalisant de cynisme et sournoiserie à parfaire ses expérimentations inhumaines après avoir osé improviser une vendetta meurtrière. Tout un programme expéditif donc dénué de moralité. Strother Martin endossant avec charisme l'archétype du savant faussement affable habité d'un dessein littéralement exubérant pour notre grand bonheur de récit vrillé. Si la première partie n'apporte pas grand chose à l'évolution du récit (en dépit des enjeux humains pour l'idylle du couple), les personnages s'avèrent suffisamment attachants et la mise en scène assez adroite, notamment lorsqu'elle s'efforce de crédibiliser numéros d'exhibition et expérimentations avec les reptiles. Mais c'est lors de son second acte que SSSSnake renchérit dans l'effroi viscéral avec la condition torturée de David réduit à l'état de Cobra royal ! La encore, les effets spéciaux artisanaux parviennent sobrement à transcender l'improbable en insistant sur la dimension humaine de la créature soumise. Le final franchement malsain et audacieux s'avérant par ailleurs d'une grande cruauté dans son refus de compromis, sachant que l'image se fige sur un hurlement insoutenable.

                                           

En dépit de son aspect télévisuel (non dénué de charme) et du manque d'ambition d'un concept aussi saugrenu que débridé (Bernard L. Kowalski survole à mon sens le potentiel de son intrigue), SSSSnake parvient sans peine à fasciner, terrifier, révulser et impressionner par son climat malsain où (l'omniprésence) de réels reptiles se prêtent à la complicité des comédiens avec troublante hostilité ! A l'instar du combat final imparti entre le savant et le cobra domestique. Une authentique perle culte donc rehaussée d'une aura de soufre toujours plus tangible (la dernière demi-heure est immanquable) si bien qu'il m'a aujourd'hui beaucoup plus impressionné que lors de sa diffusion TV dans les années 80. 

*Bruno
02.11.22
21.06.16

"Tous les reptiles montrés dans ce film sont réels. Les cobras royaux ont été importé de Bangkok, le python de Singapour. Nous souhaitons remercier l'équipe et les acteurs pour leur courage... car ils ont été exposés à des conditions très dangereuses."

jeudi 16 juin 2016

EMPRISE. Prix du Meilleur Film, Horror Guild Awards, 2003

                                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

"Frailty" de Bill Paxton. 2002. U.S.A. 1h39. Avec Bill Paxton, Matthew McConaughey, Levi Kreis, Powers Boothe, Matt O'Leary, Jeremy Sumpter

Sortie salles France: 15 Mai 2012. U.S: 12 Avril 2002

FILMOGRAPHIE: Bill Paxton est un acteur et réalisateur américain, né le 17 mai 1955 à Fort Worth (Texas). 1982: Fish Heads (court métrage). 2002: Emprise. 2005: Un parcours de légende.


Premier et avant-dernier métrage de l'acteur Bill Paxton, Emprise aborde les thématiques de la superstition et du fanatisme religieux avec une ambiguïté dérangeante. Spoil ! A l'instar de son final révélateur à contre emploi de tout ce que le réalisateur semblait nous dénoncer ! Par ce revirement inopiné, le film adopte dès lors une tournure beaucoup plus effrayante pour mettre en exergue une réflexion sur l'existence du Mal et la foi catholique depuis une injonction divine. Fin du Spoil ! Profondément malsain par son climat étouffant souvent régi en vase clos, par son idéologie religieuse rappelant un célèbre précepte de la bible (la tâche d'Abraham et son fils) et la barbarie qui émane des sacrifices humains (même si le hors-champs est louablement prescrit !), Emprise nous immerge dans la mission divine d'un père persuadé de sacrifier des quidams depuis une vision angélique. Selon une liste ciblée de personnes, il est contraint de les assassiner à la hache depuis que les démons les habitent. Dans son délire mystique, il s'efforce d'endoctriner ses deux fils vers l'initiation criminelle afin de contenter la parole de Dieu.


Remarquablement interprété, tant par la prestance parano de Bill Paxton en paternel castrateur, le  flegme rassurant de Matthew McConaughey en narrateur que par le duo infantile que forment spontanément Jeremy Sumpter et (surtout) Matt O'Leary, Emprise honore le genre horrifique sous le pilier du drame psychologique. D'une intensité cruelle, l'intrigue ne cesse de nous déstabiliser lorsque ces enfants candides témoignent impuissants à la gratuité d'une série de crimes sauvages. Ce sentiment anxiogène de fragilité et de perplexité qu'ils nous insufflent se traduit surtout en la présence de Fenton persuadé que son père n'est qu'un charlatan depuis ses exactions barbares. Multipliant vainement les tentatives d'évasion et de révolte alors que son frère cadet se conforte à l'emprise du père, Fenton provoque une digne empathie quant à sa pugnacité et son courage juvéniles (notamment son épreuve de force endurée dans le cachot). Outre ses moments horrifiques où le suspense ne cesse de rebondir quant aux tentatives désespérées de Fenton à s'extraire de la folie homicide (notamment lorsque son père lui ordonne de tuer un otage), Emprise se permet en prime de parachever cette sordide affaire familiale par le biais d'un thriller perfide quant aux tenants et aboutissants des personnages. Sa conclusion délétère s'avérant aussi salvatrice que perturbante !


La Nuit du Chasseur
Onirique (les allers-retours dans le jardin des roses, la reconversion de Fenton au travers de plans chimériques), dérangeant et machiavélique pour son final retors où Bien et Mal se contredisent, et d'une densité psychologique éprouvante quant à la condition soumise d'enfants innocents, Emprise transcende l'horreur réaliste en oscillant les composantes du drame, du fantastique et du thriller. Fort d'un scénario solide bâti sur le sens du sacrifice et la fraternité familiale, il en émane un manifeste (équivoque) sur la foi religieuse et notre conviction morale à tolérer l'obédience divine. 

Récompenses: Prix du meilleur film, lors des International Horror Guild Awards en 2003.
Prix Bram Stoker du meilleur scénario en 2003.