vendredi 5 avril 2019

Suspiria (2018)

                                                                        Photo empruntée sur Facebook

de Luca Guadagnino. 2018. U.S.A/Italie. 2h32. Avec Dakota Johnson, Tilda Swinton, Mia Goth, Chloë Grace Moretz, Angela Winkler, Ingrid Caven, Elena Fokina, Sylvie Testud.

Sortie salles France: 14 Novembre 2018. Italie: 1er Septembre 2018

FILMOGRAPHIELuca Guadagnino est un réalisateur scénariste et producteur italien, né le 10 août 1971 à Palerme en Sicile. 1999 : The Protagonists. 2001 : Sconvolto così. 2003 : Mundo civilizado (documentaire). 2004 : Cuoco contadino (documentaire). 2005 : Melissa P. 2009 : Amore. 2015 : A Bigger Splash. 2017 : Call Me by Your Name. 2018 : Suspiria. 2018 : Rio (postproduction). ? : Call Me by Your Name 2. ? : Blood on the Tracks.


Vilipendé par les fans indéfectibles du mastodonte cabalistique d'Argento (personnellement il s'agit du film de ma vie !) avant même sa sortie inévitablement controversée, Suspiria nouvelle mouture fait l'effet d'une bombe déroutante sitôt le générique écoulé. Dans la mesure où Luca Guadagnino  nous cueille par la main 2h30 durant dans les entrailles d'un Enfer ésotérique avec un réalisme diaphane incroyablement perturbant. Ainsi, se démarquant de son modèle avec une ambition disproportionnée (ses détracteurs lui évoqueront une disgracieuse prétention), Lucas Guadgnino se réapproprie du matériau initial en y imprimant sa personnalité auteurisante. Et ce afin d'élever le genre horrifique à un niveau de grâce inouïe tout en y réfutant brillamment le copié-collé standardisé (rien que pour ça respect pour son audace et son intelligence hors-norme). Tant auprès du langage des corps contorsionnés lors de ballets baroques sensoriels que de son atmosphère feutrée à la fois sensiblement angoissante et malsaine que le spectateur redoute avec une irrévocable fascination contradictoire. Comme si lui même se retrouvait impuissant à la merci des 3 mères d'une vérité humaine délétère, de par leur regard fétide et leurs pouvoirs perfides. Il faut d'ailleurs remonter au chef-d'oeuvre indétrônable Rosemary's Baby (voir aussi à Lord of Salem) pour y retrouver une aussi flagrante expressivité à travers l'identité sournoise de sorcières décaties faussement avenantes !


Et donc à travers un cheminement narratif nébuleux où y évoluent des personnages équivoques, pour ne pas dire sibyllins (je m'y suis d'ailleurs perdu lors de son dernier quart d'heure abscons pour les diverses mutabilités identitaires), Suspiria parvient à l'aide de sa vénéneuse atmosphère anxiogène à magnétiser l'attention du spectateur dans une forme alchimique et viscérale parfois proche du malaise. Tant auprès de l'atrocité de meurtres graphiques d'une souffrance insupportable (la mise à mort liminaire d'une des danseuses et le sabbat orgasmique faisant office d'anthologies à marquer d'une pierre noire) que de l'aspect cérébral pour la caractérisation démunie des danseuses à la merci des sorcières impérieuses. Et donc, on a beau se perdre dans la confusion de son intrigue sinueuse faisant notamment intervenir les fantômes du nazisme (le Dr Jozef Klemperer hanté par la disparition de son épouse anciennement déportée) et le terrorisme de la bande à Baader durant leur prise d'otages vers la fin des seventies, on reste scotché à l'écran de par son esthétisme grisonnant (tant auprès de l'enceinte nécrosée de l'école que des extérieurs urbains) où tout semble livré à la merci d'un Mal austère. En background, on peut d'ailleurs y déduire à travers les connivences de cette caste féministe à la fois autonome et cynique une certaine métaphore sur l'émancipation féminine durant la période frondeuse des années 70.


Dérangeant, morbide et terrifiant dans un contexte occulte d'un réalisme hypnotique; beau, sensible et majestueux à travers l'acuité d'une émotion élégiaque que les protagonistes féminines retransmettent avec une force d'expression dépressive (pour ne pas dire suicidaire pour certaines d'entres elles), Suspiria version 2018 demeure un objet horrifique insaisissable de par son pouvoir de fascination aussi éthéré qu'imperturbable. Le spectateur contemplatif (les yeux capiteux de stupeur déconcertée) assistant impuissant à un spectacle de cauchemar aussi bien pervers que barbare. Et de s'y laisser emporter dans un maelstrom d'émotions brutes où les explosions de violence nous laissent un goût amer de fascination véreuse, d'injustice, voir aussi d'incompréhension. Expérience de cinéma à la fois dégingandée et contrairement maîtrisée (la mise en scène hallucinée est une véritable leçon expérimentale à faire rougir le Climax de Noe), Suspiria fait office de pierre angulaire au sein du remake novateur. Une date au demeurant dont les multiples visionnages n'auront de cesse de nous surprendre en nous dévoilant assurément un regard neuf sur certaines questions restées en suspens au 1er abord. En tout état de cause, que l'on adore ou que l'on rejette en bloc l'objet funeste, Suspiria ne laisse indifférent, tant et si bien qu'il s'apprivoise et s'adopte au second et troisième visionnage sous l'impulsion mélodieuse du magnifique score de Thom Yorke.

*Bruno

                                            Ci-joint en exclusivité, la chronique de Jorik V

 A ceux qui pensent que les remakes de films d’horreur sont condamnés à être broyés dans le moule hollywoodien et aseptisés à l’extrême dans un but mercantile en seront pour leur argent avec ce « Suspiria ». Luca Guadagnino réussit à apposer sa patte et sa vision au film culte de Dario Argento faisant de ce « Suspiria » nouvelle génération un sommet d’épouvante et d’horreur en tous points qui ne ressemble à rien de connu et c’est tant mieux. Dans le genre horrifique, on se souvient à la limite du remake de « Massacre à la tronçonneuse » de Marcus Nispel qui parvenait à faire entendre sa propre voie dans une version gore et sans concession d’excellente mémoire. Mais ici, c’est tout autre chose. On est dans un film d’auteur pur jus auxquelles les visions de terreur et l’ambiance malsaine donnent une patte encore plus singulière à une bobine hors du temps. Et on ne peut que saluer le cinéaste qui passe en un an du chef-d’œuvre romantique et éthéré « Call me by your name », chronique sentimentale gay et intello inoubliable, à ce film fantastique où seule la trame et l’histoire générale du film culte de Dario Argento sont reprises mais fondues dans une vision totalement neuve et impressionnante par sa radicalité. Alors peut-être que cette version peut sembler chargée pour les fans de l’original qui était plus un simple film d’horreur, un giallo comme on disait à l’époque, ayant acquis sont statut culte davantage pour ses qualités formelles et ses exubérances esthétiques. Ici, Guadagnino emmène le spectateur dans une histoire qui convoque la Seconde Guerre Mondiale, la bande à Baader, le féminisme actuel et même l’ascétisme Amish ! C’est parfois un peu trop fort en symbolisme et « Suspiria » 2018 pourrait être désigné par certains comme un film prétentieux à tous niveaux. On choisira plutôt de scanner cette relecture comme un proposition de cinéma inédite, audacieuse et passionnante dont on ne réussira pas toujours à déceler les signes et ponts dressés lors de la première vision. Tout comme certaines clés de l’intrigue resteront opaques, notamment dans le dénouement et le but réel des incantations des sorcières. C’est donc parfois frustrant mais totalement addictif à tel point qu’on a envie de vite revoir le film pour en saisir certaines nuances. Mais ce mystère qui entoure l’intrigue et dont une partie restera en suspens est finalement en totale adéquation avec les fondamentaux du fantastique et les velléités du cinéaste qui a conçu cette mosaïque comme un labyrinthe mental obsédant mais tout sauf limpide et confortable. Le seul réel reproche que l’on pourra apporter au film est sa durée hors de toute logique pour un film de ce genre (plus de deux heures et demie !) et que, par ricochet, sa première demi-heure patine. C’est effectivement long à démarrer et on se dit qu’on est parti pour une projection pénible, mais il ne faut justement pas lâcher au regard de ce qui nous attend après et du film dans sa globalité. Loin de tous les sursauts de bas étage en cours dans la plupart des films d’horreur et d’épouvante actuels généralement bas de gamme, Guadagnino préfère instaurer une atmosphère délétère, malsaine et putride qui nous colle aux basques dès les premières images. Nous faire sursauter, il n’en a cure. Il préfère nous mettre mal à l’aise et nous offrir sporadiquement des visions d’horreur totalement délirantes. La première, où on voit le corps de cette danseuse en fuite malmené jusqu’à l’écœurement accroche l’œil durablement et nous remue les tripes. Quant à l’orgie horrifique et sanglante finale, si elle aurait pu sombrer dans le grand-guignol et le risible, elle nous scotche à notre siège grâce à cette ambiance répugnante et tous ces personnages fous à lier. C’est un choc, certainement l’une des séquences les plus folles au cinéma cette année. Encore pire, car plus dingue et surréaliste que la seconde partie de « Climax ». Guadagnino y va même un peu fort (il a du mal à contrôler les effusions de sang et certains délires de caméra) mais les visions d’épouvante qu’il nous inflige durant quinze minutes glacent d’effroi à tel point qu’on est content lorsque ça se termine. Un peu l’opposé de la sublime séquence de danse précédente qui range « Black Swan » au rayon crèche et nous hypnotise complètement. D’ailleurs ici la danse est un vecteur puissant de l’intrigue, parfaitement intégré à l’image. En plus de ses plans très travaillés et d’une mise en scène pleine de tours de passe-passe, le cinéaste transalpin réussit un monument de terreur, unique en son genre, qui divisera certainement. Mais « Suspiria » ne laissera personne indifférent par son fond très dense et les visions inédites qu’il propose. Les sorcières n’auront jamais autant fait peur ! Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.



La chronique du site "Avoir-alire": 
Une relecture passionnante et oppressante du chef d’oeuvre d’Argento qui distille une angoisse permanente avec ses corps malmenés et son atmosphère malsaine. Un véritable tour de force.

Notre avis : Dire que l’on redoutait le projet, c’est un euphémisme. Pourquoi donc oser s’en prendre au chef d’oeuvre magnétique de Dario Argento ? En intégrant le surnaturel au giallo dont il se rendit maître après Mario Bava, Argento transcendait son style avec une œuvre hypnotique et effrayante dont l’esthétique reste incomparable.
Son film, comme chacun s’en doute, a marqué et inspiré de nombreux cinéastes. Luca Guadagnino est de ceux-là, lui qui fut tout d’abord frappé par l’affiche à l’âge de 10 ans. Quand il découvre enfin le film à l’adolescence, c’est une révélation autant qu’un choc esthétique, et déjà il se rêve en réalisateur qui proposerait sa propre version de l’oeuvre d’Argento et de Daria Nicolodi, scénariste, avec le maître, de l’original. Alors quand, il y a plus de 10 ans, il se met à penser le projet avec son producteur, c’est un rêve d’enfant qui se réalise. 
En revanche, pour tous les cinéphiles et surtout les admirateurs du cinéaste Argento, c’est un peu le cauchemar. Déjà parce que le film n’a nul besoin d’être refait ou modernisé, c’est une bulle de cauchemar intemporelle dont l’esthétique si particulière fascine encore. Et puis, l’idée d’une version emmenée par le réalisateur du pourtant célébré Call me by your name ou encore A Bigger splash (déjà la relecture d’un classique de Jacques Deray, La Piscine, et déjà écrit par David Kajganich, scénariste sur ce nouveau Suspiria) avait de quoi largement inquiéter.

Et pourtant, le cinéaste, visiblement passionné par son sujet, réussit finalement à se détacher de l’oeuvre originale avec une vision radicale. Il déplace l’intrigue, initialement située à Fribourg, dans le Berlin de 1977, soit l’année de sortie du Suspiria d’Argento. De fait, il ouvre cette histoire qui se déroulait en vase clos aux remous politiques d’une ville coupée en deux, sous le coup de la guerre froide et des attentats politiques de la bande à Baader .
L’intrigue, découpée en 6 actes, suit toujours une jeune américaine venue pour intégrer une compagnie de danse, qui se révèle être un repère de sorcières et dont la fameuse Helena Markos, qui donne son nom à la troupe, serait la « Mère Supérieure ».
Dakota Johnson, surtout connue pour la série des Cinquante nuances… mais qui a déjà travaillé avec Guadagnino (A bigger splash), trouve ici un rôle physique qui enfin lui donne l’occasion d’exprimer une palette de jeu plus intéressante. Tour à tour timide, apeurée puis volontaire et déterminée, son personnage n’est plus la silhouette qu’esquissait Jessica Harper (que l’on retrouve ici) mais un pilier pour le film et surtout le spectateur. Passée par un entraînement intensif à la danse contemporaine pendant de longs mois, elle livre une performance impressionnante, entre la danse et la possession démoniaque, deux facettes que le film explore.
Après un prologue qui instille l’atmosphère de sourde angoisse du long-métrage (amenée à exploser sur sa fin) et emmené par l’excellente Chloë Grace Moretz et le psychiatre qui sert de fil rouge à l’histoire autant qu’à incarner la rationalité du spectateur (interprété par… oh et puis non, découvrez-le vous-même), Suspiria entame une lente et progressive descente aux enfers.

Si le contexte politique, amorcé par les plans en extérieur sur le mur et développé par les nombreux reportages radio ou télévisés, reste plutôt théorique dans sa mise en scène, il a le mérite d’expliciter, à l’échelle historique, l’aliénation des corps et des esprits que subissent les gens de l’époque et ainsi, en miroir, celle des femmes qui viennent chercher dans la danse ou chez ces sorcières un pouvoir de libération total. Ce n’est sans doute pas un hasard si le réalisateur situe l’académie face au mur, souvent le film joue de cette frontière imposée à traverser, par le parcours du psychiatre surtout. Frontière que l’on retrouve à l’intérieur de l’académie, entre le visible et l’invisible, les locaux accessibles et les cachettes secrètes qui se dérobent. 
La danse, si elle n’était qu’un décor dans l’original, est ici au coeur du film. Les ballets sont puissants, chorégraphiés avec précision par Damien Jalet, chorégraphe franco-belge, et développent la thématique visuelle de l’antagonisme entre puissance de vie et puissance de mort. À l’image de l’audition de Susie, en montage alterné avec une autre danseuse, ailleurs dans le bâtiment, spectaculaire et repoussante à la fois. Des liens surnaturels qui unissent les mouvements, avec d’un côté le pur spectacle de l’expression du corps et de l’autre l’effroi que celui-ci peut susciter lorsque l’on pousse la logique des mouvements extrêmes jusqu’au bout (lorsque l’on sait que Dakota Johnson elle-même a terminé aux urgences pendant le tournage d’une scène de danse où elle projette violemment son torse en arrière, on se dit que la séquence vaut aussi comme commentaire des violences que l’on s’inflige pour la beauté d’une performance artistique.) 
Au dessus de tout cela, comme une ombre projetée sur les personnages avant qu’il soit évident qu’elle-même subit un pouvoir supérieur, il y a Madame Blanc, glaciale et tranchante mais aussi maternelle et qui suscite l’admiration de ses danseuses. Elle est la puissance hypnotique du film. Silhouette à la fois gracile, sèche et glaciale, Tilda Swinton ressemble à Pina Bausch. Le cinéaste s’est bien sûr inspiré de la célèbre chorégraphe allemande, mais aussi de Sasha Waltz, autre chorégraphe allemande que le scénariste David Kajganich suit et interroge longuement pour réussir à écrire ce personnage. 
Si Madame Blanc paraît vampire à se nourrir des émotions suscitées par les danses de ses élèves, elle les libère aussi et surtout de la pesanteur – littéralement – d’un monde extérieur fait par et pour les hommes.

Et l’horreur dans tout ça ? Suspiria ne joue pas la carte de la frayeur. Il distille le malaise et l’angoisse le long d’un film qui se veut descendant des drames chocs de Fassbinder. C’est dans des inserts, des contrechamps ou des images brèves distillées dans un cauchemar que l’atmosphère s’épaissit, et ne rassure jamais. 
Le film s’éloigne donc du style de son modèle, mais privilégie lui aussi son atmosphère. Hors de question de tenter de reproduire la photographie de Luciano Tovoli, qui à l’aide du Technicolor composait son image avec les couleurs primaires. Ici, Sayombhu Mukdeeprom, déjà à l’oeuvre sur Call me by your name et responsable de la très belle photographie d’Oncle Boonmee d’Apichatpong Weerasethakul, choisit avec son réalisateur les couleurs du Berlin gris et froid des années 70. Relevé de quelques verts pâles et marrons terreux, l’ensemble évoque en effet certains films de Fassbinder dont ils se sont inspirés, mais aussi des peintures de Balthus.
Le rouge quant à lui survient par petites touches, autant d’indices visuels qui annoncent le final, notamment dans la séquence du ballet avec ces cordelettes rouges nouées sur le corps des actrices qui évoquent évidemment la pratique du bondage, à nouveau cette opposition visuelle entre corps empêché et corps délivré.
La musique de Thom Yorke, leader du groupe Radiohead dont c’est la première bande originale, vient nimber le tout d’une mélancolie étonnante, avec ses chansons magnifiques au piano sur lesquelles se pose sa voix hantée, et contribue à distiller l’angoisse par ses nappes de synthé tantôt indus, tantôt aériens. 
Guadagnino explore l’ambiguïté humaine, son côté sombre, mis en scène dans cette micro société de femmes qui voudrait échapper à un monde violemment patriarcal. Des femmes, il célèbre aussi la puissance mais, comme toute puissance, il montre l’envers ténébreux, destructeur.
S’il ménage quelques séquences de body-horror éprouvantes, le film évite pendant une bonne partie la surenchère. Il culmine cependant dans un final rouge qui serait le versant grand-guignol de Climax, signe du jusqu’au boutisme d’un cinéaste qui n’a pas peur de sombrer en cours de route (et réussit à passer en force !). Un rituel païen que l’on peut voir comme une reprise (ou correction) d’une séquence similaire de Mother of tears d’Argento, la pitoyable conclusion de sa trilogie des Trois Mères entamée donc par Suspiria et poursuivie par le beau Inferno.

Suspiria est donc une « reprise », pour employer le mot de Tilda Swinton, absolument passionnante qui n’a pas longtemps à souffrir d’une comparaison avec l’original. Un travail incarné qui, s’il s’éloigne de son modèle, sait lui rendre hommage en reprenant et actualisant quelques séquences. On ne criera pas non plus au chef-d’oeuvre, l’ensemble est un peu trop long et le rythme parfois lambine, mais on peut le célébrer comme étant une véritable réussite, même un tour de force compte tenu de tous les risques évoqués plus haut.

jeudi 4 avril 2019

Le Cirque de la Peur

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Circus of Fear / Pyscho-Circus" de John Llewellyn Moxey. 1966. Allemagne/Angleterre. 1h31. Avec Christopher Lee, Leo Genn, Anthony Newlands, Heinz Drache, Eddi Arent, Klaus Kinski

Sortie salles U.S: Mai 1967. Angleterre: Novembre 1967

FILMOGRAPHIE: John Llewellyn Moxey est un réalisateur de cinéma et de télévision britannique, né le 26 février 1925 en Argentine.1960 : La Cité des morts. 1960 : Coronation Street. 1961 : Foxhole in Cairo. 1961 : Chapeau melon et bottes de cuir . 1962 : Le Saint  TV. 1965 : Strangler's Web. 1966 : Mission impossible TV. 1966 : Le Cirque de la peur . 1967 : Mannix, TV. 1968 à 1980 : Hawaï police d'État, TV. 1969-1970 : Les Règles du jeu. 1971 : The Night Stalker. 1972 : Kung Fu, TV. 1973 à 1977 : Police Story, TV. 1973 : Shaft (en), TV. 1976 : Drôles de dames TV. 1979 : The Solitary Man. 1980: Magnum, TV. 1981 : Hôpital sous surveillance. 1983 : Les deux font la paire, TV. 1984 à 1989: Deux flics à Miami (Miami Vice), TV. 1984 : Arabesque (Murder, She Wrote), TV. 1988 : La Vengeance de l'héritière, TV.


Inédit en salles en France et exhumé de l'oubli par l'éditeur Le Chat qui Fume dans une superbe copie HD, Le Cirque de la peur constitue une sympathique curiosité en dépit de son titre fallacieux suggérant une série B horrifique sans doute influencée par une autre production british, le Cirque des horreurs tourné 6 ans au préalable. Surtout si je me réfère à son affiche référentielle calquée sur celui-ci ! Le pitch: A la suite d'un braquage meurtrier, l'Inspecteur Elliott tente de retrouver les coupables des billets volés au sein d'un cirque, quand bien même 2 cadavres sont rapidement dépêchés sur les lieux. Série B d'exploitation à la réalisation aussi classique que (soigneusement) bricolée, le Cirque de la peur joue efficacement avec les codes du film policier, et à moindre échelle avec ceux du thriller à travers une intrigue criminelle inutilement décousue, pour ne pas dire capillotractée.


Le récit pour autant jamais ennuyeux s'articulant autour de l'investigation assidue de l'inspecteur Elliott avide d'y démasquer le criminel, quand bien même le cinéaste John Moxey s'attache à mettre en parallèle une sous-intrigue familiale afin de mieux maintenir en éveil le spectateur. Emprunt de facilités et de grosses ficelles (notamment auprès de la résolution trop expéditive du coupable lors d'une conclusion exubérante), le Cirque de la Peur ne s'embarrasse pas trop de vraisemblance à travers sa galerie de personnages couards ou maîtres chanteurs plus ou moins complices du braquage. Pour autant; l'attrait fantaisiste de son cheminement dramatique binaire (non emprunt parfois de traits d'humour gratuits mais plutôt cocasses pour les brimades entre 2 clowns) et la conviction des comédiens anglais (principalement Christopher Lee sobrement convaincant dans un rôle bicéphale alors que l'inquiétant Klaus Kinski s'avère résolument discret en figurant vénal !) nous laissent finalement une agréable impression de divertissement sans prétention même si rapidement oubliable passé le générique de fin.


A découvrir avec curiosité, à condition toutefois d'être résolument averti du contenu trompeur de l'écrin forain aux antipodes du genre horrifique.

*Bruno

mercredi 3 avril 2019

Glass

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de M. Night Shyamalan. 2019. U.S.A. 2h09. Avec Samuel L. Jackson, James McAvoy, Bruce Willis, Anya Taylor-Joy, Sarah Paulson, Spencer Treat Clark.

Sortie salles France: 16 Janvier 2019 (Int - 12 ans)

FILMOGRAPHIE: M. Night Shyamalan est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain, d'origine indienne, né le 6 Août 1970 à Pondichéry. 1992: Praying with Angers. 1998: Eveil à la vie. 1999: Sixième Sens. 2000: Incassable. 2002: Signs. 2004: Le Village. 2006: La Jeune fille de l'eau. 2008: Phenomènes. 2010: Le Dernier maître de l'air. 2013: After Earth. 2015: The Visit. 2017: Split. 2019: Glass.


                             Une chronique exclusive de EricDebarnot reprise sur le site Senscritique.

The house that M. Night lost
Il y a clairement deux manières de regarder "Glass", et le plaisir qu'on en tirera variera du tout au tout. La première est en passionné de culture de super-héros et de blockbusters parfaitement exécutés : dans ce cas, passée une première demi-heure impeccable qui fait l'unanimité, on s'ennuiera vite devant des dialogues interminables, des facilités scénaristiques un peu indignes du riche passé de Shyamalan, et une certaine lourdeur dans la démonstration de ses théories sur la vraie nature du super-héros américain (obsession infantile allant jusqu'à la maladie mentale ou bien réalité soigneusement dissimulée derrière une culture faussement régressive, la question posée par "Incassable" est ici creusée "jusqu'à l'os" !). Sans parler d'un double twist final certes efficace, mais qui fait quand même "effet de signature", signalant le vrai retour aux affaires du créateur du "Sixième Sens". On sortira du film frustrés et un peu déçus... Sauf qu'on n'aura pas vu le film que notre ami M. Night a voulu faire, celui pour lequel il a hypothéqué sa maison, c'est à dire un vrai film d'auteur - appellation facilement dévoyée et enfin parfaitement appropriée avec "Glass".


Car peu importe si Shyamalan, féru de culture populaire et horrifié - comme toute personne à peu près sensée et ayant dépassé l'adolescence - par les imbécilités décérébrées des maisons Marvel et DC, s'est attelé à proposer une alternative adulte à leurs "univers" : on peut très bien vivre sans ça. Par contre, deux heures dix minutes d'émotion brûlante, de mélancolie asphyxiante, de pure poésie populaire, mises en scène, non, plutôt orchestrées avec une intelligence et un brio inégalés dans le cinéma commercial (une fois encore, on peut parler de la continuation, en plus ambitieux, du meilleur travail d'un Steven Spielberg...), ça ne se refuse pas. Comme dans chacun de ses films, les moins bons comme les meilleurs, Shyamalan filme ici l'humanité dans sa souffrance quotidienne, le long d'un véritable chemin de croix : enfances massacrées, aspirations et talents méprisés et qui deviennent d'insupportables fardeaux, identités annihilées par des systèmes politiques totalitaires, maladie puis vieillesse détruisant le corps et bientôt l'esprit, impossibilité de dépasser la tragédie individuelle. Il nous raconte ce que nous sommes, comment nous vivons, avec une sensibilité aiguë, une empathie flamboyante, mais il filme aussi la sublime déchirure de l'Amour - plutôt filial, maternel ou fraternel que sexuel... (mais ce n'est que le début d'une longue carrière, non ? A quand un vrai, un pur mélodrame à la Douglas Sirk, Night ?). Il porte ses acteurs à l'excellence absolue, avec une sorte d'évidence terrassante : James McAvoy est ici bouleversant, dépassant la pure virtuosité de l'incarnation de ses multiples personnalités, pour devenir une sorte de représentation totale de l'humanité déchirée, de l'enfant à "la bête".


On sait, depuis la magistrale dénonciation des mensonges bushiens qu'était "le Village", que le cinéma de Shyamalan est également un commentaire politique sur son époque : le final de "Glass" - et son fameux double twist - est avant tout une déclaration de guerre aux mensonges de ceux qui nous gouvernent, qui prétendent savoir mieux que nous ce qui est "bon pour nous", et une célébration - un tantinet idéaliste, oserais-je dire "capraesque" ? - du pouvoir de la Connaissance, de la Vérité lorsqu'elles réussissent à émerger, et à réunir d'abord trois personnes aussi dissemblables que les personnages que Shyamalan a repris de "Incassable" et "Split", et ensuite, peut-être, l'humanité entière. Dans son habituelle vision "new age", souvent raillée mais indéniablement sincère, Shyamalan nous affirme croire encore à notre évolution, tant spirituelle que physique, nous permettant de dépasser enfin cette solitude originelle qui est la malédiction de ses héros.


Ce dialogue jamais vraiment résolu entre une maîtrise formelle à nouveau exceptionnelle du médium cinéma et un excès dérangeant - et, c'est vrai, assez naïf - d'ambition thématique, fait du cinéma de Shyamalan une extraordinaire aberration. "Glass" ne peut que diviser le public entre sceptiques n'y trouvant pas leur compte et adeptes sortant de là profondément bouleversés et stimulés. Il a donc tout d'un film condamné à l'échec commercial malgré sa puissance et à cause de sa singularité, et on a bien peur que Shyamalan ne perde sa maison. Il ne perdra pas notre amour.

8/10 [Critique écrite en 2019]

mardi 2 avril 2019

Bumblebee

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Travis Knight. 2018. U.S.A. 1h54. Avec Hailee Steinfeld, John Cena, Jorge Lendeborg Jr., Pamela Adlon, Jason Drucker, Stephen Schneider, Glynn Turman

Sortie salles France: 26 Décembre 2018

FILMOGRAPHIETravis Knight est né en 1973 à Hillsboro dans l'Oregon aux États-Unis. Il est un artiste animateur, producteur, réalisateur et ancien rappeur. Il est le fils du magnat d'affaire Philip Knight. 2016 : Kubo et l'Armure magique (Kubo and the Two Strings). 2018 : Bumblebee.


Spin-off de la célèbre saga Transformers, Bumblebee accomplit en 1h54 d'entertainment familial tout ce que Michael Bay n'eut pu entreprendre au profit de ses budgets standing. Car jouant la carte de l'humour, de l'émotion puis enfin de l'action (quel feu d'artifice final aux FX numériques irréprochables !) à travers l'humanisme candide d'une jeune fille en berne (l'actrice Hailee Steinfeld porte le film sur ses épaules de par son regard luminescent), Bumblebee renoue avec l'esprit féerique des productions Amblin. Notamment en y localisant l'action de sa bourgade solaire au coeur des années 80. Et c'est avec un coeur gros comme ça que son concepteur, Travis Knight, s'entreprend de rendre hommage à travers l'ascension héroïco-amicale d'une jeune fille (à l'orée de sa maturité !) partagée entre ses sentiments pour un robot sauveur de l'humanité et son compagnon afro secrètement amoureux d'elle.


Alors oui, le film a beau flirter avec les bons sentiments au travers de séquences intimistes d'une si attachante simplicité, on marche à fond auprès de leur complicité affectueuse inscrite dans l'amitié, la tendresse, la confiance et la pédagogie communicative (les phases d'éducation avec Bee et ses maladresses infantiles nous remémorant un certain E.T, voir également Short Circuit). Truffé de tubes pop-rock entêtants prioritairement natifs d'Angleterre (on y croise The Smiths, The Cure, Simple Minds, Tears for Fears) Bumblebee fait d'autant plus vibrer nos esgourdes avec une acuité émotionnelle épanouissante. Et si inévitablement, le pitch fantaisiste s'avère naïf pour y regorger de clichés et illustrer certains personnages caricaturaux (surtout les "méchants militaires"), Travis Knight parvient efficacement à exploiter les codes sous l'impulsion humaine de nos 3 héros d'une solidarité résolument expressive. Tant auprès des rapports timorés entre Charlie et son compagnon Memo en éveil amoureux que du robot Bee en voix de maturité et de rébellion au gré des intimidations bellicistes incarnées par deux de ses plus couards rivaux.


"Don't You"
Clins d'oeil émouvants à E.T, Short Circuit et tous ces dérivés intègres pétries de tendresse, d'attention et de générosité aussi bien féeriques qu'explosives, Bumblebee renoue avec l'émoi des premières émotions vécues par un ado à travers le prisme du grand écran. Et l'adulte qui l'accompagne de renouer par cette occasion familiale avec son âme d'enfant en y contemplant (la tête étoilée !) les tribulations galvanisantes de Charlie et Bee. Couple aussi hybride que singulier rattaché par les notions d'humanisme, d'espoir, de catharsis et d'initiation héroïque lorsqu'il s'agit d'y sauver la terre d'une menace humanoïde outre-mesurée ! Un fabuleux spectacle inscrit dans la modeste simplicité, le coeur (palpitant) sur la main ! 

*Bruno

jeudi 28 mars 2019

Highwaymen : La Poursuite infernale

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Robert Harmon. 2004. U.S.A/Canada. 1h20. Avec Jim Caviezel, Rhona Mitra, Frankie Faison, Colm Feore, Gordon Currie, Andrea Roth, Noam Jenkins.

Sortie salles France: 4 Août 2004. U.S: 13 Février 2004

FILMOGRAPHIE: Robert Harmon est un réalisateur américain. 1986: Hitcher. 1993: Cavale sans issue. 1996: Gotti (télé-film). 2000: The Grossing. 2002: Astronauts (télé-film). 2002: Le Peuple des Ténèbres. 2004: Highwaymen. 2004: Ike: opération overlord (télé-film). 2005: Stone Cold (télé-film). 2006: Jesse Stone: Night Passage (télé-film). 2006: Jesse STone: Death in paradise (télé-film). 2007: Jesse Stone: Sea Change (télé-film). 2009: Jesse Stone: Thin Ice (télé-film). 2010: Jesse Stone: sans remords (télé-film). 2010: Une lueur d'espoir (télé-film). 2012: Jesse Stone: Benefit of the Doubt (télé-film).


Vengeance bicéphale.
Synopsis: à la suite de la mort de sa femme, James s'efforce d'y traquer le responsable, un serial-killer routier lui même féru de vengeance depuis leur antécédente confrontation musclée.
Par le réalisateur du mythique Hitcher, Highwaymen emprunte clairement la démarche de la série B du samedi soir à travers son lot de cascades et poursuites en règle qu'un conducteur estropié renchérit sur sa route en guise de vengeance et d'orgueil sadique. Et si l'impressionnante 1ère demi-heure fait mouche dans son enchaînement d'explosion et tôles froissées aussi bien meurtrières qu'inédites (et ce même si le montage pâtit d'autorité), la suite s'avère beaucoup moins passionnante lorsqu'on y lève le voile sur la caractérisation limite grotesque du serial-killer (sorte de robocop paraplégique, ancien assureur gagné par la psychopathie).


Quand bien même le couple incarné par Jim Caviezel  (son rôle le plus fade de sa carrière) / Rhona Mitra peine à convaincre dans leur concertation héroïque conjointement lié au traumatisme routier. On est d'ailleurs surpris de la facilité à laquelle cette dernière se laisse influencer pour accompagner le veuf revanchard sur son périple routier. Pour autant, si l'ensemble bonnard se suit sans ennui et amuse la galerie sous l'impulsion de son intrigue capillotractée effleurant régulièrement le grotesque (la dernière image s'avère même hilarante à force d'outrance prétentieuse, surtout venant de la part d'un flic !) et abordant les clichés (notamment lorsque Caviezel se fait bêtement appréhender par le tueur à plusieurs reprises ou lorsqu'il amorce une course-poursuite urbaine avec le chef de la police de manière irresponsable ! Sacrée contradiction de se comporter à l'instar de son antagoniste !), Highwaymen s'oublie fissa sitôt le générique écoulé.

*Bruno
2èx

mercredi 27 mars 2019

Les Aventures du baron de Munchausen

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Adventures of Baron Munchausen" de Terry Gillian. 1988. Allemagne/Angleterre. 2h06. Avec John Neville, Eric Idle, Sarah Polley, Oliver Reed, Jonathan Pryce, Winston Dennis, Charles McKeown, Jack Purvis, Robin Williams, Bill Paterson, Uma Thurman, Ray Cooper, Sting, Terry Gillian.

Sortie salles France: 8 Mars 1989

FILMOGRAPHIE: Terry Gilliam est un réalisateur, acteur, dessinateur, scénariste américain, naturalisé britannique, né le 22 Novembre 1940 à Medicine Lake dans le Minnesota. 1975: Monty Python: Sacré Graal ! (co-réalisé avec Terry Jones). 1976: Jabberwocky. 1981: Bandits, bandits. 1985: Brazil. 1988: Les Aventures du Baron de Munchausen. 1991: The Fisher King. 1995: l'Armée des 12 Singes. 1998: Las Vegas Parano. 2005: Les Frères Grimm. 2006: Tideland. 2009: L'imaginarium du docteur Parnassus. 2013: Zero Theorem. 2018 : L'Homme qui tua Don Quichotte.


Spectacle de la démesure aux ruptures de ton parfois déconcertantes, les Aventures du baron de Munchausen se solda par un cuisant échec commercial en dépit de ces critiques globalement fructueuses. Ce qui n'est guère étonnant de la part de l'électron libre Terry Gilliam à nouveau terriblement inspiré pour réactualiser cette aventure baroque au sein d'un contexte historique sciemment théâtral, décomplexé, décalé, déjanté, pétulant, débridé. Fourmillant de personnages génialement barrés sous l'impulsion de super-héros du 3è âge (l'homme qui court plus vite que son ombre nous vaut 2 séquences d'anthologie - notamment grâce au dynamisme du montage et de ses FX retors -, le nabot au souffle tempétueux, le nègre encore plus mastard que l'incroyable Hulk et enfin le tireur avisé à faire pâlir de jalousie Luky Luke !), les Aventures du baron de Munchausen nous embarque dans un périple capiteux eu égard de la folie créatrice de son auteur militant pour le droit au rêve et à l'évasion sous couvert d'une diatribe acerbe contre le conformisme (notamment en y singeant les conflits guerriers à travers leur égocentrisme et leur idéologie ultra conservatrice). 


Et donc à travers les thèmes de la vieillesse et du goût du risque pour l'aventure, l'intrigue omnibus se ramifie en divers épisodes tantôt inégaux, surtout si je me réfère à l'amerrissage sur la lune, faute de la posture d'un Robin Williams irritant en roi de la lune, pour ne pas dire assommant à force d'outrance simiesque et de réparties saugrenues qu'il se chamaille avec son épouse et qu'il intimide auprès de nos héros. Pour autant, transcendé par ces sublimes décors aussi bien surréalistes, stellaires, féeriques ou tropicaux, et à travers le souci du détail de moult trucages (notamment auprès d'une magnifique matérialisation de la Faucheuse en personne !), les Aventures du baron de Munchausen fleure bon la sincérité et la générosité en dépit de son intrigue perfectible pas si passionnante que prévu (voire même un peu fourre-tout en y empruntant la mise en abyme). Outre son impressionnant budget colossal témoignant également d'une foule de figurants frétillants, on se rattache souvent à la fraternité amicale de nos héros en voie de renaissance qu'une fillette leur incite à réanimer avec son attachante innocence. Tant et si bien qu'à travers son parti-pris auteurisant, Terry Gilliam conjure son amour immodéré pour le pouvoir du rêve et de l'évasion à travers l'esprit fougueux de ces vieillards peu à peu délibérés à se laisser influencer par l'ambition de leur mentor (affabulateur ?) afin de retrouver leur éternelle jeunesse.  


Grand spectacle atypique conçu à l'instar d'un rêve éveillé si bien que fiction et réalité s'uniformisent pour le meilleur et le moins attractif, les Aventures du baron de Munchausen n'en demeure pas moins un divertissement adulte assez excitant à travers l'exubérance de son univers hybride voué à nous évader auprès des divagations d'un Baron obnubilé par la fulgurance de ces mémoires utopiques.  

*Bruno
4èx

Récompenses
BAFTA Awards 1990 :
Meilleurs décors
Meilleurs costumes
Meilleurs maquillages
Ruban d'argent 1990 :
Meilleure photographie
Meilleurs costumes
Meilleurs maquillages

mardi 26 mars 2019

Bienvenue à Marwen

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"Welcome to Marwen" de Robert Zemeckis. 2019. U.S.A. 1h56. Avec Steve Carell, Leslie Mann, Diane Kruger, Falk Hentschel, Janelle Monáe, Eiza González.

Sortie salles France: 2 Janvier 2019. U.S: 21 Décembre 2018

FILMOGRAPHIE: Robert Zemeckis est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 14 Mai 1951 à Chicago (Illinois). 1978: Crazy Day. 1980: La grosse Magouille. 1984: A la Poursuite du diamant vert.1985: Retour vers le Futur. 1988: Qui veut la peau de Roger Rabbit. 1989: Retour vers le Futur 2. 1990: Retour vers le Futur 3. 1992: La Mort vous va si bien. 1994: Forrest Gump. 1997: Contact. 2000: Apparences. 2000: Seul au monde. 2004: Le Pôle Express. 2007: La Légende de Beowulf. 2009: Le Drôle de Noël de Mr Scrooge. 2013: Flight. 2015: The Walk. 2018: Bienvenue à Marwen.


Merveille de féerie et de romantisme éperdu que l'éminent Robert Zemeckis illustre à nouveau avec un sens onirique singulier (épaulé de trucages en "performance capture" irréprochables !), Bienvenue à Marwen renoue avec le cinéma le plus épuré lorsqu'il s'agit d'immerger le spectateur à travers la douloureuse introspection d'une victime traumatisée par sa brutale agression. Et pour cause, souffrant d'amnésie à la suite d'un coma, Mark, autrefois dessinateur de talent, se réfugie dans la chimère de sa nouvelle passion pour les figurines qu'il photographie dans un village miniaturisé, Marwen durant la période de la seconde guerre mondiale. Constamment harcelé par des soldats SS férus de haine, il compte pour autant sur la solidarité indéfectible de 5 guerrières farouches afin de venir à bout de ces tortionnaires. Or, de retour dans la solitude de sa réalité quotidienne, Mark parvient difficilement à renouer avec l'équilibre d'une vie sociale harmonieuse, quand bien même son addiction pour les anti-dépresseurs lui engendre diverses hallucinations (que Zemeckis parvient brillamment à mettre en exergue au gré d'un montage véloce conjuguant fiction et réalité au sein du même cadre).


C'est alors qu'il fait la connaissance de Nicol, sa nouvelle voisine de palier fascinée par le réalisme de son village miniature auquel y évoluent des figurines d'un sens du détail naturel. Ode au rêve et au goût de l'évasion à travers le refuge de l'art, manifeste pour le droit à la différence (Mark adore porter des talons de femmes par engouement passionnel), Bienvenue à Marwen dégage une sensibilité inusitée à travers sa scénographie flamboyante alternant séquences d'animation tantôt belliqueuses, tantôt romantiques, et situations intimistes d'une réalité anxiogène que Mark endure quotidiennement en dépit du soutien de ses 5 amies attentionnées. Ainsi donc, à travers le vibrant portrait de ce dessinateur traumatisé par la violence de l'homme (ici symbolisé par des fascistes avinés), Robert Zemeckis y radiographie sa fragile schizophrénie avec une émotion candide bouleversante. Dans la mesure où s'y déroule intensément devant nos yeux, et avec une étonnante alchimie féerique, la lente thérapie de Mark combattant ses démons les plus préjudiciables (la fameuse sorcière belge Deja Thoris, métaphore de ses pilules bleues). Tant auprès de son imagination florissante qu'il parvient à matérialiser à travers l'univers rassurant de ses figurines que de l'amour en herbe que sa nouvelle voisine Nicol pourrait probablement lui réveiller avec une attention profondément humaine.


"Notre douleur est notre carburant"
Débordant de romantisme, de fragilité et de sensibilité torturée sous l'impulsion névralgique d'une victime en quête de catharsis (que Steve Carell insuffle avec un incroyable naturel introverti), Bienvenue à Marwen traite avec une douloureuse acuité humaine des thèmes de la résilience et du dépassement de l'affres à travers le gain de la création artistique et du pouvoir salvateur de l'amour. Moment de cinéma personnel en apesanteur, Bienvenue à Marwen renoue avec le 7è art le plus candide à travers l'incandescence du surréalisme métaphorique. Infiniment bouleversant, ténu et magique (si bien qu'on lui pardonne une situation de procès tirant légèrement sur la corde sensible, menu reproche à murmurer auprès de ce futur classique). 

*Bruno

lundi 25 mars 2019

Onde de choc

                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site gzhorreurfilmvhs.blogspot.com

"Blind Date" de Nico Mastorakis. 1984. Grèce. 1h46. Avec Joseph Bottoms, Kirstie Alley, James Daughton, Lana Clarkson.

Sortie salles France: 24 Avril 1985

FILMOGRAPHIE: Nico Mastorakis est un réalisateur, scénariste et producteur grec né le 28 Avril 1941 à Athènes. 1976: Ta paidia tou Diavolou. 1976: To koritsi vomva. 1990: In the Cold of the Night. 1990 Hired to Kill. 1989 Ninja Academy. 1988 Glitch! 1988 Nightmare at Noon. 1987: Meurtre dans l'objectif. 1986 The Wind (Video). 1986 Heros Boys. 1985 Sky High. 1984 To kynigi tou ekatommyriou (Video). 1984 The Time Traveller. 1984 Onde de choc. 1992: The Naked Truth. 2002: .com for Murder.


Synopsis: Après un choc violent, Jonathan Ratcliffe perd la vue. Alors, il accepte d'être le cobaye d'un système expérimental qui lui permettra, à l'aide d'une interface informatique et de capteurs cérébraux, de percevoir son environnement sous forme de traits lumineux.
Pendant ce temps un dangereux psychopathe, chauffeur de taxi, enlève des filles pour se livrer à quelques dissections mortelles à coup de scalpels. Les chemins de Jonathan et du psycho-killer vont se croiser, et l'homme aveugle va tout faire pour arrêter le tueur...

Un thriller d'anticipation soporifique ne possédant aucun sens du rythme à travers son suspense aseptique ni de maîtrise technique (notamment cette vue subjective informatisée que l'aveugle perçoit à l'instar d'un jeu video). La faute à une mise en scène à la fois obsolète et bâclée, et à une direction d'acteurs plutôt maladroite en dépit de la bonne volonté des acteurs exprimant des répliques d'une rare banalité.
Bref, Circulez y'a rien à voir !

*Bruno

vendredi 22 mars 2019

Opération Peur

                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site scoreexperience.blogspot.com

"Operazione paura / Kill Baby Kill" de Mario Bava. 1966. Italie. 1h23. Avec Giacomo Rossi-Stuart, Erika Blanc, Fabienne Dali, Piero Lulli, Luciano Catenacci.

Inédit en salles en France. U.S: 8 Octobre 1968

FILMOGRAPHIE:  Mario Bava est un réalisateur, directeur de la photographie et scénariste italien, né le 31 juillet 1914 à Sanremo, et décédé d'un infarctus du myocarde le 27 avril 1980 à Rome (Italie). Il est considéré comme le maître du cinéma fantastique italien et le créateur du genre dit giallo. 1946 : L'orecchio, 1947 : Santa notte1947 : Legenda sinfonica1947 : Anfiteatro Flavio1949 : Variazioni sinfoniche1954 : Ulysse (non crédité),1956 : Les Vampires (non crédité),1959 : Caltiki, le monstre immortel (non crédité),1959 : La Bataille de Marathon (non crédité),1960 : Le Masque du démon,1961 : Le Dernier des Vikings (non crédité),1961 : Les Mille et Une Nuits,1961 : Hercule contre les vampires,1961 : La Ruée des Vikings, 1963 : La Fille qui en savait trop,1963 : Les Trois Visages de la peur, 1963 : Le Corps et le Fouet, 1964 : Six femmes pour l'assassin, 1964 : La strada per Fort Alamo, 1965 : La Planète des vampires, 1966 : Les Dollars du Nebraska (non cédité), 1966 : Duel au couteau,1966 : Opération peur 1966 : L'Espion qui venait du surgelé, 1968 : Danger : Diabolik ! , 1970 : L'Île de l'épouvante ,1970 : Une hache pour la lune de miel ,1970 : Roy Colt e Winchester Jack1971 : La Baie sanglante, 1972 : Baron vampire  , 1972 : Quante volte... quella notte1972: Lisa et le Diable, 1973 : La Maison de l'exorcisme, 1974 : Les Chiens enragés,1977 : Les Démons de la nuit (Schock),1979 : La Venere di Ille (TV).


Inédit en salles chez nous mais exhumé de l'oubli quelques décennies plus tard grâce à une émission TV sollicitée par Jean Pierre Dionnet (Quartier Interdit), Operation Peur demeure une clef de voûte singulière du gothisme transalpin. Car sous prétexte d'une histoire de fantôme infantile terrorisant les villageois d'un quartier maudit, Mario Bava se voue corps et âme en artiste prodige afin de façonner un florilège d'images picturales tout droits sorties d'un cauchemar éveillé. Le cheminement narratif adoptant une tournure d'avantage surréaliste de par la perte des répères des protagonistes ne sachant plus distinguer l'illusion de la réalité. Le pitch: Dans un village reculé du Nord de l'Italie, le médecin Eswai est recruté par l'inspecteur Kruger afin de tenter d'éclaircir une succession de morts inexpliquées. Effrayés par l'apparence spectrale d'une fillette, les villageois semblent à la merci de son emprise diabolique. Dénué de croyance spirituelle, Eswai va tenter de découvrir l'horrible vérité. A partir d'un synopsis conventionnel bâti sur les thèmes de la sorcellerie et de la hantise spectrale, notre éminent réalisateur nous livre à nouveau une oeuvre d'une fulgurance macabre littéralement capiteuse. Véritable déclaration d'amour au gothisme baroque au sein d'une époque séculaire aux croyances superstitieuses, Mario Bava envoûte subtilement les sens du spectateur, délicieusement embarqué dans un chassé croisé incessant avec la mort. Ou plus précisément avec le revenant d'une fillette exsangue délibérée à soutirer la vie des paysans superstitieux par le truchement de l'hypnose et des forces occultes. D'une étonnante efficacité, notamment à travers la maîtrise de la caméra expérimentale, les vicissitudes allouées à chacun des protagonistes se décline en partie de cache-cache parmi la présence inquiétante de cette gamine revancharde.


Ainsi donc, à l'aide d'une photo sépia aux éclairages ciselés (les tâches orangers, le jaune, le vert, le bleu et le rouge s'harmonisent parfois au sein du même cadre !), le réalisateur transcende ces décors gothiques (cimetière et forêt nappés de brume, chapelle, ossuaire et demeures mutiques) par le biais d'une architecture picturale (les sculptures d'enfants longeant le jardin). Alors qu'au sein d'une chambre d'enfant poussiéreuse, d'étranges poupées de porcelaines, de vieux cadres de défunts, des candélabres emmêlés de toiles d'araignées et des rideaux usés par la froideur du vent y sont exposés dans une lumière nocturne ensorcelante ! Sans pour autant provoquer une terreur implacable, Mario Bava priorise un climat anxiogène sous-jacent au travers de son énigme suspicieuse plutôt bien construite et semée de rebondissements. L'ambiance feutrée émanant du village clairsemé plongeant le spectateur dans une sorte de cauchemar ésotérique où la temporalité s'avère altérée d'une emprise démoniale (tant auprès d'une sorcière suspicieuse, d'une étrange veuve au passé torturé que du fantôme de Melissa). A la manière irréelle de cette hallucinante séquence déroutante illustrant le parcours récursif du médecin coursant Monica disparue derrière la porte d'une chambre. Ainsi, ouvrant la porte pour pouvoir y pénétrer, il tente à chaque reprise de l'appréhender en vain. Et donc, à chaque fois qu'il quitte la salle, le médecin perdure sa course effrénée auprès des cris de Monica pour se retrouver au même point de départ, c'est à dire au même point de départ de la porte d'entrée ! Il continuera sa poursuite à perdre haleine au point d'y croiser son propre double qu'il finira par agripper par l'épaule ! Une autre séquence intemporelle illustre également Monica dévalant un escalier en colimaçon sans jamais pouvoir parvenir à atteindre l'ultime marche ! Et si le scénario adopte un schéma classique autour de l'archétype du fantôme persécuteur, Mario Bava est suffisamment habile, inventif, inspiré, transi de persuasion pour nous broder une perfide histoire de vengeance spectrale usant à merveille du dédale d'une villa tentaculaire (on peut d'ailleurs parler de rôle à part entière !).


Superstitions
De par sa poésie sépulcrale prédominante où le spectateur s'avère aussi désorienté que les protagonistes épeurés, Mario Bava y transfigure une mécanique d'angoisse diffuse traversée de visions d'effroi à travers la posture impassible d'une fillette mesquine. Exacerbé d'une bande son dissonante émaillé de râles d'outre-tombe et de gloussements railleurs, Opération Peur se décline en chef-d'oeuvre expérimental de par la vigueur de sa persuasion à matérialiser un univers parallèle dénué de raison. D'une série B d'apparence triviale, le maître du gothique en cristallise donc une authentique oeuvre d'art infiniment diaphane et ensorcelante sous l'impulsion d'un casting contracté transi d'émoi.  

*Bruno
22.03.19. 4èx
08.01.13. (78 v)

jeudi 21 mars 2019

Larry le dingue, Mary la garce

Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Dirty Mary Crazy Larry" de John Hough, 1973. U.S.A. 1h33. Avec Peter Fonda, Susan George, Adam Roarke, Vic Morrow, Roddy McDowall.

Sortie salles France: 3 Octobre 1974. U.S.A. 17 Mai 1974.

FILMOGARPHIEJohn Hough est un réalisateur britannique, né le 21 novembre 1941 à Londres (Royaume-Uni). 1969 : Wolfshead : The Legend of Robin Hood, 1970 : Eyewitness, 1971 : Les Sévices de Dracula, 1972 : L'Île au trésor , 1973 : La Maison des damnés, 1974 : The Zoo Gang (série TV) , 1974 : Dirty Mary, Crazy Larry , 1975 : La Montagne ensorcelée , 1978 : Les Visiteurs d'un autre monde, 1978 : La Cible étoilée , 1980 : Les Yeux de la forêt , 1981 : Incubus , 1982 : Le Triomphe d'un homme nommé cheval , 1985 : Black Arrow (TV) , 1985 : Mission casse-cou (série TV) , 1986 : Biggles , 1987 : Les Hasards de l'amour , 1988 : Hurlements IV , 1988 : American Gothic , 1989 : Le Cavalier masqué (TV) , 1990 : A Ghost in Monte Carlo (TV) , 1992 : Duel of Hearts (TV) , 1998 : Something to Believe In , 2002 : Bad Karma.

                                       

Trois ans après Point Limite Zero, John Hough réalise en 1974 un road movie autrement décomplexé et ludique, Larry le dingue, Mary la garce, tiré du roman de Richard UnekisThe Chase. On peut d'ailleurs rappeler que la même année sortit à quelques mois d'intervalle un autre métrage bien connu des amateurs et ayant fait l'objet d'un remake aseptique, la Grande Casse (Gone in 60 seconds), quand bien même deux ans plus tard explose sur les écrans Cannonbal, suivi d'un modèle du genre; Driver de Walter Hill ! Mais la mode des films de course-poursuites sur bitume atteindra son apogée en 1979 avec un premier film issu d'Australie, une bombe ayant défrayé la censure de l'époque, j'ai nommé  Mad-Max ! Le pitch: Un pilote de course et son co-équipier cambriolent un supermarché afin de pouvoir financer leur participation à un célèbre circuit de championnat automobile. Ils prennent la fuite à bord de leur voiture en compagnie de Mary, une jeune aguicheuse d'un soir que Larry aborda avec regret. Rapidement, la police locale est lancée à leur trousse sous la houlette d'un capitaine irascible ayant juré d'avoir leur peau à bord de son hélico. Véritable objet de culte depuis sa sortie  (Starfix le nomma d'ailleurs dans leur revue comme l'un des 100 meilleurs films d'action américains !), Larry le dingue, Mary la garce (quel titre génialement provoc !) est une bouffée d'air frais dans le cinéma de genre politiquement incorrect hérité du courant contre-culturel d'Easy Rider. Superbement incarné par un trio de comédiens en roue libre (Peter Fonda / Susan George dans son meilleur rôle en potiche au grand coeur / Adam Roarke), ce road movie rondement mené sur rythme trépidant constitue un pur plaisir de cinéma "grindhouse" pour l'amateur d'action virile menée par des anti-héros à la p'tite semaine ! Car coordonnée par deux malfrats accompagnés d'une attachante tête à claque, leur virée champêtre est autant compromise par leur discorde amicale (principalement auprès des chamailleries houleuses entre Mary et Larry) que par les force de l'ordre lancés à leur trousse durant 1h30 de courses-poursuites aux cascades sans faille.

                                      

Tant et si bien que durant leur traque incessante avec la police, le spectateur témoin de leurs faits et gestes s'identifie aimablement à leur insouciance libertaire. Comme si nous étions également devenus des marginaux anarchistes complices de leur périple aux actions truffées de dérision. En prime, les réparties pleine d'humour sardonique entre Larry et Mary et le sérieux alloué à Deke, témoin malgré lui de leur crise conjugale (Larry n'en n'a que faire de Mary !) insufflent une ambiance décomplexée, tantôt cocasse, tantôt délirante, notamment lors de leurs prises de risques inconscientes pour l'adrénaline de la vitesse. Quand bien même les policiers, impuissants et constamment ridiculisés, n'auront de cesse de les pourchasser avec une hargne aussi déjantée Spoil ! Si bien que ces derniers constamment raillés n'avaient pas non plus prévu que nos malfrats étaient équipés d'un radio émetteur afin de connaître en direct quel point d'itinéraire ceux-ci pourraient envisager de les appréhender. Fin du Spoil. Mais depuis l'intrusion rigoureuse d'un chef de police chevronné et obtu, Franklyn (endossé par le renfrogné Vic Morrow), la course poursuite s'exacerbera d'un cran lors du survol d'un hélicoptère les traquant sans relâche durant toute l'aventure. Spoiler ! On sera d'ailleurs bougrement surpris du brutal revirement de ton auprès de son estocade finale aussi glaçante que poignante, car d'une noirceur franchement inattendue ! Une forme de rappel, un retour à la triste réalité des conséquences de l'insouciance, une mise en garde auprès des casse-cous que la vie n'est pas du cinéma, tant et si bien que la vitesse illégale peut se solder par une tragédie ! Fin du spoilerJe tiens encore à rappeler que l'épatante Susan George (les Chiens de Paille / Venin) dégage un formidable naturel dans sa prestance de garce survoltée à la fois désinvolte et insolente car souvent ridiculisée par son amant de fortune que Peter Fonda endosse avec un machisme à la fois impérieux, gouailleur et présomptueux. Pour autant as du volant aussi bien belliqueux que véloce, Peter Fonda se fond dans le corps d'un pilote intraitable avec une fringance constamment jubilatoire.

                                      

Un pur trip du road movie "grindhouse" d'une énergie et d'une insolence à tombeau ouvert !
Classique vintage des années 70, Larry le dingue, Mary le dingue garde intact son pouvoir attractif de par la spontanéité pétulante des comédiens aussi insolents que burnés et des poursuites automobiles impeccablement orchestrées. Bref une toute autre époque subversive résolument vériste si bien que les nouveaux anti-héros tape à l'oeil, musclés et tatoués et leurs bimbos siliconées font bien pâle figure chez la saga Fast and Furious (alors qu'elle multiplie par 10 son lot de cascades numériques improbables afin de combler l'ado en mal de sensation !). 

*Bruno
21.03.19. 4èx
31.03.11. 678 v

                                   

NoteAttention Spoiler !! La scène du crash final avec le train apparaît dans le générique liminaire de la série tv des 80's L'homme qui tombe à pic avec Lee Majors. Ne me demandez pas pour quelle raison, je n'en n'ai aucune idée !

mercredi 20 mars 2019

The Candy Snatchers

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site blu-ray.com

de Guerdon Trueblood. 1973. U.S.A. 1h33. Avec Tiffany Bolling, Ben Piazza, Susan Sennett, Brad David, Vince Martorano, Bonnie Boland.

Sortie salles France: Inédit. U.S: Juin 1973

FILMOGRAPHIE: Guerdon Trueblood est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 3 Novembre 1933 à San Jose, Costa Rica. 1977: Barnaby Jones (TV Series) (1 episode). - The Inside Man. 1973: The Candy Snatchers


Pur série B d'exploitation surfant sur le succès de la Dernière maison sur la gauche sorti un an au préalable (suffit de zieuter son affiche ultra référentielle !), The Candy Snatchers relate dans une facture "grindhouse" le rapt (oh combien laborieux !) d'un trio de malfrats décervelés délibérés à faire chanter le père de la victime en l'échange d'une traditionnelle rançon (ici des diamants). Or, celui-ci cupide et sans vergogne réfute à sauver sa propre fille pour l'enjeu d'un juteux héritage. Au bord de la crise de nerf dans leur soif de liberté et de fortune, le trio complote alors d'autres stratégies pour parvenir à leurs fins. Si on songe finalement à un croisement entre Chiens Enragés de Bava et à la Rançon de la peur de Lenzi, de par la caractérisation immorale d'une galerie de salopards tous plus fétides les uns les autres, la réalisation approximative du méconnu Guerdon Trueblood (c'est d'ailleurs son unique métrage), sa violence irréaliste et surtout le surjeu amateur des acteurs bisseux finissent par plomber le potentiel de son suspense pervers. Dans la mesure où l'intrigue itérative se délite progressivement pour tourner en rond, notamment à force des divergences que s'échangent inlassablement les malfrats gogos, si bien que l'auto-parodie est souvent effleurée à force d'outrances tantôt verbales tantôt sauvages (principalement son final en roue libre). On se réconforte toutefois auprès de quelques situations couillues d'un humour noir plutôt corsé (l'attitude perverse du marmot mutique refusant de porter assistance à la victime inhumée vivante et Spoil ! le coup de théâtre final qui s'ensuit de par son action criminelle fin du Spoil, le paternel toujours plus délétère au fil d'un cheminement brutal où tous les coups sont permis, l'épouse se laissant sexuellement séduire par l'un des violeurs), tant et si bien qu'avec indulgence les fans de curiosités introuvables (il fut d'ailleurs inédit en salles en France si je ne m'abuse) devraient néanmoins y trouver leur compte à condition de s'en distraire au 10è degré.


*Bruno

mardi 19 mars 2019

La Mule

                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"The Mule" de Clint Eastwood. 2018. U.S.A. 1h56. Avec Clint Eastwood, Bradley Cooper, Laurence Fishburne, Michael Peña, Dianne Wiest, Andy García, Clifton Collins Jr., Alison Eastwood

Sortie salles France: 23 Janvier 2018. U.S: 9 Septembre 2016

FILMOGRAPHIE: Clint Eastwood est un acteur, réalisateur, compositeur et producteur américain, né le 31 Mai 1930 à San Francisco, dans l'Etat de Californie. 1971: Un Frisson dans la Nuit. 1973: L'Homme des Hautes Plaines. 1973: Breezy. 1975: La Sanction. 1976: Josey Wales, Hors la Loi. 1977: L'Epreuve de Force. 1980: Bronco Billy. 1982: Firefox, l'arme absolue. 1982: Honkytonk Man. 1983: Sudden Impact. 1985: Pale Rider. 1986: Le Maître de Guerre. 1988: Bird. 1990: Chasseur Blanc, Coeur Noir. 1990: Le Relève. 1992: Impitoyable. 1993: Un Monde Parfait. 1995: Sur la route de Madison. 1997: Les Pleins Pouvoirs. 1997: Minuit dans le jardin du bien et du mal. 1999: Jugé Coupable. 2000: Space Cowboys. 2002: Créance de sang. 2003: Mystic River. 2004: Million Dollar Baby. 2006: Mémoires de nos pères. 2006: Lettres d'Iwo Jima. 2008: L'Echange. 2008: Gran Torino. 2009: Invictus. 2010: Au-delà. 2011: J. Edgar. 2014: Jersey Boys. 2015: American Sniper. 2016: Sully. 2017: 2018: Le 15h17 pour Paris. 2018: La Mule. 2021: Cry Macho. 


Inspiré de l'histoire vraie de Leo Sharp, ancien militaire retraité, passeur de drogue pour le compte d'un puissant cartel, le dernier des géants Clint Eastwood s'offre une nouvelle renaissance à travers La Mule. Un road movie existentiel d'une acuité fragile à travers son manifeste pour les valeurs familiales que Clint Eastwood incante avec une prude émotion. Car maîtrisé de bout en bout, tant auprès de sa direction d'acteurs dénué de prétention (même Bradley Cooper s'avère dépouillé de force tranquille en agent de la DEA partageant d'ailleurs un point commun d'ordre familial avec le passeur !) que de la réalisation posée prenant son temps à conter son récit, La Mule y dépeint l'introspection morale d'un nonagénaire rongé de honte et de regret faute de sa démission à la fois parentale et conjugale. J'ignore le passé secrètement intime de Clint Estwood mais j'ai la trouble impression qu'à travers son personnage singulier de pourvoyeur il eut probablement vécu une même situation de dissension familiale, faute d'y avoir privilégié son illustre carrière professionnelle que l'on connait. Pour autant, à travers ce passéiste inopinément marginal, et au vu du dénouement inévitablement dramatique, l'argent ne fera que renchérir sa profonde solitude et son malaise existentiel. Dans la mesure également du contexte social qu'Eastwood pointe du doigt en filigrane pour alerter de la condition précaire des retraités chargé de dettes et dénués de subvention.


Outre son cri d'amour et de désespoir scandé à l'honneur de la famille (un des plus justes et bouleversants vus depuis des lustres sur un écran !), Eastwood s'avère résolument émouvant lorsqu'il traite également de la vieillesse (notamment à travers le choc des générations où le modernisme - cellulaire / informatique - asservit les plus influents) et de la peur de la maladie à travers son âge avancé. Ainsi, sans verser dans le mélo standard, et par le biais de brèves séquences intimistes d'une sensibilité épurée, il parvient à capter l'émotion la plus honnête lorsque la mule témoigne impuissant de l'injustice du cancer sur le point d'achever une nouvelle victime. Une séquence pénible, tant auprès des confidences intimes que des silences entre les mots afin d'ausculter sans complaisance les regards démunis. Pour autant, et en conjuguant avec une étonnante alchimie les composantes du polar et du drame psychologique, La Mule n'est point couvert de sinistrose et encore moins de pessimisme si bien que Eastwood ne manque pas d'humour, de dérision et de légèreté à décrire l'improbable itinéraire de ce passeur burné du 3è âge comptant potentiellement renouer avec sa famille avec ses nouvelles liasses de dollars. C'est donc un récit initiatique plein d'imprévus et de ruptures de ton (auprès de sa trajectoire dramatique expiatrice) que nous dépeint Clint Eastwood plus vigoureux et frétillant que jamais (contrairement à ses apparences sclérosés). Notamment lorsqu'il y fustige sobrement en filigrane le racisme et l'abus de pouvoir du corps policier par de brèves séquences de contrôle identitaire.


Le chant du Cygne
Poème funèbre pour autant profondément humain, salutaire et d'une sensibilité quasi écorchée vive, la Mule revigore la personnalité d'Eastwood, acteur et réalisateur du 3è âge, à travers sa thématique universelle sur la famille que celui-ci scande tacitement (et ouvertement) à travers chaque plan. Ainsi donc, avec la grâce humaine qu'on lui connaît tant, probablement venions nous d'assister à son ultime chef-d'oeuvre d'une florissante carrière aussi bigarrée et décomplexée qu'émancipée et personnelle ! (?). 

*Bruno