mardi 18 juin 2013

SUPERMAN, LE FILM

                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site forum.nanarland.com

de Richard Donner. 1978. U.S.A/Angleterre. 2h31. Avec Christopher Reeve, Marlon Brandon, Gene Hackman, Ned Beatty, Jackie Cooper, Glenn Ford, Trevor Howard, Margot Kidder.

Sortie salles France: 26 Janvier 1979. U.S: 15 Décembre 1978

FILMOGRAPHIE: Richard Donner (Richard Donald Schwartzberg) est un réalisateur et producteur américain, né le 24 Avril 1930 à New-York. 1961: X-15. 1968: Sel, poivre et dynamite. 1970: l'Ange et le Démon. 1976: La Malédiction. 1978: Superman. 1980: Superman 2 (non crédité - Richard Lester). 1980: Rendez vous chez Max's. 1982: Le Jouet. 1985: Ladyhawke, la femme de la nuit. 1985: Les Goonies. 1987: l'Arme Fatale. 1988: Fantômes en Fête. 1989: l'Arme Fatale 2. 1991: Radio Flyer. 1992: l'Arme Fatale 3. 1994: Maverick. 1995: Assassins. 1996: Complots. 1998: l'Arme Fatale 4. 2002: Prisonnier du temps. 2006: 16 Blocs. 2006: Superman 2 (dvd / blu-ray).


Découvrir à l'âge de 8 ans les premiers exploits de Superman à travers l'écran géant tient du prodige pour les yeux d'un enfant, ébloui de pouvoir enfin s'exaucer un rêve qui n'existait que dans les pages de BD ou dans ses songes les plus fous. Observer avec émerveillement les pouvoirs d'un homme surhumain vêtu d'une combinaison bleue et d'une cape rouge, capable de voler dans les airs à une vitesse supersonique ! Ce moment de grâce irréelle se révèle devant l'innocence d'un bambin une expérience atypique à jamais gravée dans son coeur et sa mémoire ! C'est en 1978 que Superman sort sur les écrans et pulvérise les records du box-office face à un public médusé ! Pourvu d'un budget de 55 000 000 de dollars, Richard Donner s'est acquis les gros moyens pour retranscrire avec ambition les aventures de l'homme volant, préalablement dessinées à travers la BD de Jerry Siegel et Joe Shuster. C'est notamment grâce à cette superproduction puissamment orchestrée par John Williams que les films de super-héros vont pouvoir se concrétiser afin d'exploiter le filon et tenter de réitérer le même exploit cinégénique. Se replonger 35 ans plus tard dans cette odyssée féerique inscrite dans la noblesse prouve à quel point l'oeuvre de Richard Donner est touchée par la grâce. Car Superman  suscite avec autant de poésie que de souffle épique un pouvoir d'enchantement immaculé. Cette tendresse immodérée que le réalisateur accorde à son personnage héroïque, partagé entre le devoir d'équité et la raison de ses sentiments, transcende des séquences d'une acuité émotionnelle rare ! A l'instar de cette envolée lyrique accomplie au dessus d'un ciel étoilé entre Superman et Lois Lane !


Cette séquence exaltante à la naïveté fantaisiste, à deux doigts de chavirer dans le ridicule, s'achemine pourtant en moment magistral d'émotion pure de par la magie de ces trucages, son sens d'émerveillement et la tendre complicité des amants. Quand aux scènes d'action spectaculaires qui émaillent et servent le récit, inspirées de la mouvance "catastrophe", elles s'avèrent encore impressionnantes (à deux, trois plans de carton pâte près) et réussissent aussi malgré le poids des années à crédibiliser les exploits aériens de notre super-héros parti combattre le génie du crime, Lex Luthor ! (Gene Hackman composant un numéro jubilatoire de méchant sardonique et mégalo !). Si Superman s'avère en l'occurrence toujours aussi prodigieusement exaltant, il le doit autant à la révélation saillante du mastard Christopher Reeve ! Cet acteur novice dont il s'agit ici de son second rôle à l'écran retransmet avec humilité le portrait d'un super-héros entièrement érigé sur les valeurs de vérité, de justice et d'idéal américain. Cette notion de héros idéaliste, le comédien la transcende avec une conviction naturelle trouble épaulée d'une touche d'humour particulièrement attendrie ! Il EST superman et aucun acteur au monde ne parviendra à accomplir cette même performance auprès du genre ludique. Quand à la prestance de sa compagne enjouée, Margot Kidder véhicule un charme de séduction badin de par son jeu spontané et sa douce naïveté en journaliste insolente. A eux deux, ils forment un duo émouvant proprement proverbial où la dimension humaine prime avant les élans de bravoure homériques.


Chef-d'oeuvre du film de super-héros, Superman constitue un miracle cinématographique ayant marqué de son empreinte lyrique la génération 80. En l'occurrence, cette même génération ayant su préserver son âme d'enfant continuera de rêvasser (jusqu'aux larmes de mélancolie !) des exploits aériens du plus grand super-héros de sa précieuse enfance ! C'est en tous cas le point de vue subjectif d'un cinéphile émotif qui vous le proclame si bien que son émotion vibrante perdure au-delà des décennies et des progrès numériques. 
Alors ce soir contemplez bien le ciel ! Un Kryptonien volant veille sur notre terre primitive, si cruelle et fragile ! 

Cette critique est dédiée à la mémoire de Christopher Reeve, sans qui nous n'aurions jamais cru qu'un homme était capable de voler...

La critique de Superman 2http://brunomatei.blogspot.fr/2013/06/superman-2-la-version-de-richard-donner.html

Dédicace à Olivier Dussart
18.06.13. 4èx
Bruno Matéï

vendredi 14 juin 2013

THE KISS (The Host)

                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site todoelterrordelmundo.blogspot.com

de Pen Desham. 1988. U.S.A/Canada. 1h40. Avec Joanna Pacula, Meredith Salenger, Mimi Kuzyk, Nicholas Kilbertus, Sabrina Boudot.

FILMOGRAPHIE: Pen Desham est un réalisateur, scénariste et producteur, né en 1947 en Angleterre.
1998: Houdini (télé-film). 1996: Moll Flanders. 1988: The Kiss. 1985: The Zoo Gang.


L'arrivée fortuite d'une tante au sein d'une famille endeuillée va provoquer une succession d'étranges incidents meurtriers afin d'intenter à la jeunesse d'Amy par le biais d'un baiser !


B movie symptomatique des années 80 dans son esprit ludique dénué de prétention, The Kiss est une petite production horrifique érigée sur le principe du vaudou parmi la présence symbolique d'un chat maléfique. Si sa réalisation maladroite et le jeu superficiel des comédiens accusent d'autant plus le poids des années, cette oeuvre mineure dégage tout de même un charme non négligeable dans sa naïveté ainsi que l'attitude attachante des protagonistes. Que ce soit l'adolescente candide incarnée par la jolie Meredith Salenger, le paternel versatile passablement interprété par Nicholas Kilbertus ou la mégère perfide campée par une Joanna Pacula ensorcelante. Si cette ancienne mannequin d'origine polonaise s'avère plutôt fade pour interpréter son rôle de mécréante, le charisme sensuel qu'elle y insuffle, renforcé par un regard félin, réussit néanmoins à imposer une posture hostile.
Outre la futilité d'une intrigue rebattue mais assez efficacement menée, The Kiss déploie une petite montée progressive d'un suspense haletant vers sa dernière demi-heure. Si les 2/3 du récit se cantonnent à un jeu de suspicion entre une jeune fille pubère et l'arrivée surprise de sa tante, Pen Desham agrémente ce conflit familial de séquences chocs spectaculaires parfois sanglantes (à l'image de cette mère de famille violemment projetée contre une vitrine par une voiture pour y être ensuite encastrée !). Si les apparitions délirantes du chat erratique prêtent plutôt à sourire, ses exactions furibondes s'avèrent assez bien rendues par l'efficacité d'un montage véloce. Enfin, le soin alloué à sa photographie chargée de nuances chaudes laisse parfois transparaître une photogénie lyrique (à l'image de son préambule solaire !).


Plaisir coupable gentiment attractif ou nanar rigolard selon l'humeur du jour, The Kiss est une production mineure des eighties n'ayant pour but que de distraire son public dans un procédé éculé. Néanmoins, la bonhomie des comédiens, le charme singulier de Joanna Pacula, l'efficacité modeste de sa structure narrative et des scènes chocs (supervisées par Chris Wallas !) réussissent à rendre sympathique ce pur produit d'exploitation.

14.06.13. 3èx
Bruno Matéï

jeudi 13 juin 2013

V/H/S 2

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site collider.com

de Simon Barrett (Tape 49), Jason Eisener (Slumber party alien abduction), Gareth Evans (Safe Haven), Gregg Hale (A ride in the park), Eduardo Sanchez (A ride in the park), Timo Tjahjanto (Safe Haven), Adam Wingard (Phase 1 Clinical Trials). 2013. U.S.A. 1h35. Avec Kelsy Abbott, Hannah Al Rashid, Fachry Albar, Oka Antara, Devon Brookshire, Samantha Gracie, L.C. Holt, Hannah Hughes.

Sortie salles US: 6 Juin 2013

Ce found foutage de gueule bat tous les records de la nullité !
1H35 de vacuité abyssale !
Les amateurs de gore hardcrad façon Ogrish trouveront tout de même matière à sauter des pieds joints !
Bon courage pour la découverte et bonne sieste pour ceux qui avaient déjà rendu les armes avec son modèle.

Bruno Matéï
13.06.13

mercredi 12 juin 2013

THE CALL

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinema.jeuxactu.com

de Brad Anderson. 2013. U.S.A. 1h35. Avec Halle Berry, Abigail Breslin, Morris Chestnut, Michael Imperioli, Ella Rae Peck, Michael Eklund.

Sortie salles France: 29 Mai 2013. U.S: 15 Mars 2013

FILMOGRAPHIE: Brad Anderson est un réalisateur, scénariste et monteur américain, né en 1964 à Madison (Connecticut).
1995: Frankenstein Planet Monster. 1996: The Darien Gap. 1999: Et plus si affinités. 2001: Session 9. 2001: Happy Accidents. 2005: The Machinist. 2008: Transsibérien. 2010: L'empire des ombres. 2013: The Call.


Réalisateur inégal à qui l'on doit au moins deux réussites perfectibles, Session 9 et The Machinist, Brad Anderson renoue au principe traditionnel du thriller effréné avec The Call afin de maintenir en haleine son spectateur.  

Par l'entremise du téléphone, une opératrice des urgences va tenter de porter secours à une jeune fille kidnappée par un maniaque. 

Dans la lignée des thrillers horrifiques initiés par Black Christmas, Terreur sur la Ligne,  ou encore Appels au meurtre, The Call étire sur une heure de métrage le concept de la victime démunie, oppressée par un maniaque et n'ayant comme seul recours un téléphone pour tenter d'invoquer de l'aide. Il ne s'agit donc pas ici du traditionnel harcèlement téléphonique conformément établi par un serial-killer mais de l'appel désespéré d'une otage auprès du service administratif des urgences.
Avec une efficacité infaillible et l'empathie éprouvée pour la complicité des interlocutrices (deux séquences s'avèrent même assez poignantes !), Brad Anderson exploite ce filon afin de mettre en place un suspense anxiogène quand une victime décide d'accorder sa confiance auprès d'une opératrice hésitante. Embrigadée dans le coffre d'un véhicule circulant sur autoroute, l'adolescente va tenter par tous les moyens d'invoquer sa présence parmi les automobilistes puis de s'y extraire afin d'échapper à une sentence inévitable.
Avec la tonitruance de sa bande son technoïde, le réalisateur insuffle une tension permanente dans cette situation alerte auquel nombre de rebondissements vont venir motiver l'intrigue avec vélocité. Et cela, en dépit de quelques grossières incohérences, comme le fait que le tueur laissera le soin à la victime de conserver son portable (potentiellement défectueux) durant la quasi totalité de sa séquestration !


Mené sans répit durant ses 2/3 de métrages, The Call renforce son caractère acerbe par une terreur persuasive (son prologue cinglant s'avère aussi intense que radical !) une violence parfois brutale  (deux meurtres nous sont illustrés avec un réalisme assez cru) et le jeu dépouillé des deux comédiennes principales. En priorité Halle Berry incarnant ici avec autant de fragilité humaine que de vaillance le rôle d'une opératrice préalablement contrariée par la culpabilité d'une faute professionnelle. En victime oppressée, contrainte de se terrer dans le coffre d'un véhicule, Abigail Breslin retransmet avec un désarroi fébrile son calvaire incessant ainsi qu'un désespoir de cause de daigner faire front à son tortionnaire.
Malheureusement, si The Call avait réussi jusque là à maintenir son intérêt dans l'agencement d'un suspense oppressant, sa dernière demi-heure retombe dans les ficelles balisées du genre avec nombre de revirements éculés (le trauma lié à l'enfance du tueur, sa confrontation dantesques avec ces deux  dernières victimes) et d'invraisemblances outrées (la facilité à laquelle l'héroïne trouve la planque du criminel). Qui plus est, son prélude militant pour l'apologie de la vengeance (les féministes pourront tout de même trouver matière à fantasmer d'une telle idéologie réac !) sombre vulgairement dans le ridicule. Néanmoins, cette dernière partie privilégiant une angoisse sous-jacente et l'action spectaculaire nous égaye l'esprit et parvient même à quelques occasions d'intensifier le jeu offensif d'affrontements sanglants.


Série B du samedi soir à voir entre amis ou de préférence avec sa nouvelle copine, The Call peut autant se savourer comme un thriller haletant en demi-teinte qu'un plaisir coupable entièrement bâti sur l'efficacité d'une réalisation alerte et de clichés rebattus (à l'instar du sympathique et rigolard Cellular). 

12.06.13
Bruno Matéï


MEME LA PLUIE


Changer le monde commence par changer soi même !

Un très beau film humaniste sur le peuple Bolivien asservi par une multinationale délibérée à confisquer l'eau. En dépit d'une première partie laborieuse et peu captivante, le film prend son envol au bout de 45 minutes pour ne plus lâcher la pression avec l'introspection d'un mouvement de foule hurlant sa révolte contre l'intolérance de leur état despotique. Avec une belle dimension humaine, Iciar Bollain dépeint ici le portrait d'un cinéaste et de son équipe partis tourner un long-métrage à valeur historique au sein d'un pays en crise. L'homme intransigeant pour la hiérarchie de son entreprise va se retrouver davantage contrarié par des dilemmes moraux pour la sauvegarde d'une famille bolivienne et le conflit caractériel du père de famille en situation précaire.
Poignant, intense et jamais larmoyant, cette oeuvre naturaliste ne cesse de nous questionner sur notre éthique confrontée à l'affres du danger et la sauvegarde d'un peuple famélique. Enfin, Même la pluie peaufine également avec sobriété une belle histoire d'amitié entre deux hommes de culture et classe sociale distincte.

12.06.13
Bruno Matéï

lundi 10 juin 2013

Hysterical

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au sitfilmaffinity.com

de Chris Bearde. 1983. U.S.A. 1h30. Avec Bill Hudson, Mark Hudson, Brett Hudson, Cindy Pickett, Richard Kiel, Bud Cort, Julie Newman.

Sortie salles France: 16 Mars 1983. U.S: Juillet 1983

FILMOGRAPHIE: Chris Beard est un réalisateur et scénariste (essentiellement des séries TV) anglais. 1983: Hysterical



"A la limite, j't'emmerde"
Oublié de tous aujourd'hui chez nous alors qu'à l'époque de sa sortie il rencontra un timide accueil public, Hysterical est une parodie horrifique conçue par les "Hudson Brothers". Durant les années 70, ces trois compères se firent connaitre auprès des téléspectateurs américains en tant qu'humoristes et chanteurs. Ici, il s'attellent donc à tenter l'expérience cinégénique en occupant les postes consécutifs de scénaristes et d'interprètes. Chris Beard, dont il s'agit ici de sa première (et unique !) réalisation, s'est entrepris de revisiter les classiques de l'horreur (mais aussi d'autres genres) sous le mode parodique avec l'entremise clins d'oeil supposés hilarants. Ceux qui, à l'époque de sa sortie, s'étaient quelque peu enjaillés de sa douce fantaisie lors des séquences les plus réussies risquent un peu (beaucoup ?) aujourd'hui de faire grise mine tant Hysterical finit par susciter consternation et brin de lassitude lors de son final poussif. La faute incombant au trio de comédiens générant un humour constamment lourdingue, à une réalisation néophyte (à l'instar de son montage déstructuré) et à une intrigue approximative dénuée de surprise (un couple de revenants sèment le zouc sur une station balnéaire et contaminent un à un les vivants en zombies sans aucun motif !).


Sur ce dernier point, sa structure narrative semble indécise afin de coordonner des situations cohérentes si bien qu'elle ne fait qu'empiler maladroitement une succession de gags débridées sans véritable fil conducteur. On pastiche donc dans une chronologie sporadique des idées empruntées aux classiques genre parmi lesquels les Aventuriers de l'arche perdue, les Dents de la mer, Duel, l'Exorciste, Shining, les Chariots de Feu, ou encore la Nuit des Morts-vivants. Alors que les comédiens mal dirigés gesticulent comme des attardés azimutés pour provoquer les fou-rires escomptés. Seule, l'apparition récurrente du sexagénaire à bicyclette (répétant incessamment : "ça couve !") suscite une certaine drôlerie, quand bien même avec une certaine indulgence sa première partie demeure gentiment facétieuse, voir même charmante à travers son esprit bisseux ! Mais le peu d'empathie éprouvée pour chacun de nos héros régresse l'entreprise jusqu'à la lassitude de son ultime demi-heure. Ainsi, on suit donc ces aventures horrifiques avec parfois un brin de curiosité amusée si bien que l'ambiance festoyante qui y règne prête au climat gentiment bonnard en dépit de l'inanité du de ses ressorts comiques.  


Pour les nostalgiques des années 80 qui, comme moi, s'étaient rués en salles pour le voir (personnellement, j'y étais allé accompagné de camarades de collège un samedi soir bondé), Hystérical risque hélas de vous laisser sur une impression de frustration ou (et) d'amertume en dépit de son esprit bon enfant et de la facétie de certains moments bonnards (par intermittence). Pour autant, avec indulgence, et en privilégiant la séance entre amis, cette parodie sans prétention peut faire son p'tit effet de séduction ludique de par son ambiance ubuesque de contamination festive. 

*Bruno
11.05.20. 4èx
10.06.13. 3èx

                                    

vendredi 7 juin 2013

STOKER

                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site popculturekeys.blogspot.com

de Park Chan-wook. 2013. U.S.A/Angleterre. 1h40. Avec Mia Wasikowska, Nicole Kidman, Matthew Goode, Dermot Mulroney, Lucas Till, Alden Ehrenreich, Jacki Weaver.

Sortie salles France: 1er Mai 2013. U.S: 1er Mars 2013

FILMOGRAPHIE: Park Chan-wook est un réalisateur et scénariste sud-coréen, né le 23 Août 1963 à Séoul.
1992: Moon is the Sun's Dream. 1997: 3 members. 2000: Joint Security Area. 2002: Sympathy for Mister Vengeance. 2003: Old Boy. 2005: Lady Vengeance. 2006: Je suis un Cyborg. 2009: Thirst. 2013: Stoker.


J'entends ce que d'autres n'entendent pas. D'infimes choses que les gens ne voient pas normalement me sont visibles. Ces sens sont le fruit du désir de toute une vie. Le désir d'être sauvée. D'être accomplie. Comme la jupe a besoin du vent, je suis faite de choses qui sont aussi à d'autres. Je porte la ceinture de mon père sur le chemisier de ma mère... et les chaussures venant de mon oncle. Je suis ainsi. Toute comme la fleur ne choisit pas ses couleurs, on n'est pas responsable de ce qu'on devient. Une fois que l'on a compris ça on est libre. Devenir adulte, c'est devenir libre. 

Thriller vénéneux chargé d'amertume et de nonchalance, Stoker joue dans la cour des grands pour tenter de renouer avec l'esprit hitchcockien dans une mise en scène aussi stylisée qu'épurée. A partir d'une intrigue tortueuse où nos protagonistes sont indirectement mêlés à un passé tragique, Park Chan-wook ausculte un portrait de famille meurtri par le deuil au cours duquel une jeune fille dépitée ATTENTION SPOILER !!! finira par se laisser berner par l'influence d'un ange exterminateur. FIN DU SPOILER

A la suite de la mort de son père auquel elle était très proche, la jeune India n'éprouve que peu d'empathie pour sa mère. Avec l'arrivée de son oncle qu'elle n'a jamais connu, une étrange relation va se nouer entre eux.


De façon circonspecte et avec l'alchimie d'un climat diaphane toujours plus étouffant, Stoker est conçu à la manière d'un puzzle où les thèmes de la suspicion, la jalousie, la rancoeur nous sont établis à travers l'introspection douloureuse d'une adolescente timorée. Park Chan-wook prend son temps à broder son intrigue interlope en se focalisant essentiellement sur l'ambiguïté psychologique (lourde de sens !) de ses personnages. C'est d'abord les rapports difficiles entre une veuve accablée et sa fille inconsolable qu'on nous présente studieusement dans l'intimisme d'une demeure gothique. C'est ensuite avec l'arrivée fortuite d'un oncle distingué que le film va amorcer une ambivalence pour les relations charnelles qu'il va compromettre avec ces deux veuves contrariées. Dans une mise en scène aussi raffinée qu'inventive, Stoker nous dévoile ensuite au compte goutte le cheminement torturé de cette jeune fille introvertie, difficilement sociable envers la gente masculine de ses camarades de classe.
On en dira pas plus afin de ne pas ébruiter le moindre indice de son canevas charpenté mais sachez que le réalisateur Park Chan-wook nous dresse ici le tableau peu reluisant d'un trio d'amants en perte identitaire. L'impact émotionnel du film et l'acuité qui en émane réside non seulement dans la psychologie meurtrie de ses protagonistes mais aussi dans la confection scrupuleuse d'un climat poisseux en ascension. L'aura malsaine sous-jacente qui s'y dégage de manière exponentielle nous colle à la peau et s'infiltre insidieusement en notre conscience à la manière d'un poison mortel, sachant ici que les notions de bien et de mal n'ont plus d'éthique !
Si tous les interprètes attestent d'une conviction imperturbable dans leurs rôles respectifs (Nicole Kidman insuffle un naturel aigre dans sa douleur maternelle et Matthew Goode redouble d'ambiguïté  dans son élégance flegme), il faut surtout saluer le jeu équivoque de l'étrange Mia Wasikowska pour sa prestance versatile d'adolescente en perdition. Sa froideur innocente galvaudée par la mauvaise influence puis la rancoeur ainsi que le charme de son visage opalin nous pénètre l'esprit dans une confusion dérangée.


Magnifiquement photographié dans les décors gothiques d'une demeure feutrée mais aussi sa nature entâchée, Stoker véhicule avec subtilité et élégance formelle une ambiance crépusculaire autour d'un trio maudit inconsolable. Si on devine le clou de son dénouement c'est qu'il était également irréversible dans sa fatalité et que Park Chan-wook conclut magistralement son épilogue fétide ATTENTION SPOILER !!! dans l'achèvement d'une puberté désaxée.FIN DU SPOILER

07.06.13.
Bruno Matéï