vendredi 7 juin 2013

STOKER

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Park Chan-wook. 2013. U.S.A/Angleterre. 1h39. Avec Mia Wasikowska, Nicole Kidman, Matthew Goode, Dermot Mulroney, Lucas Till, Alden Ehrenreich, Jacki Weaver.

Sortie salles France: 1er Mai 2013. U.S: 1er Mars 2013

FILMOGRAPHIE: Park Chan-wook est un réalisateur et scénariste sud-coréen, né le 23 Août 1963 à Séoul. 1992: Moon is the Sun's Dream. 1997: 3 members. 2000: Joint Security Area. 2002: Sympathy for Mister Vengeance. 2003: Old Boy. 2005: Lady Vengeance. 2006: Je suis un Cyborg. 2009: Thirst. 2013: Stoker.


"J'entends ce que d'autres n'entendent pas. D'infimes choses que les gens ne voient pas normalement me sont visibles. Ces sens sont le fruit du désir de toute une vie. Le désir d'être sauvée. D'être accomplie. Comme la jupe a besoin du vent, je suis faite de choses qui sont aussi à d'autres. Je porte la ceinture de mon père sur le chemisier de ma mère... et les chaussures venant de mon oncle. Je suis ainsi. Toute comme la fleur ne choisit pas ses couleurs, on n'est pas responsable de ce qu'on devient. Une fois que l'on a compris ça on est libre. Devenir adulte, c'est devenir libre."

Thriller vénéneux chargé d'amertume, d'étrangeté indicible et de nonchalance, Stoker joue dans la cour des grands pour tenter de renouer avec l'esprit hitchcockien dans une mise en scène aussi stylisée qu'épurée. Si bien qu'à partir d'une intrigue sinueuse où nos protagonistes sont indirectement mêlés à un passé tragique, Park Chan-wook ausculte un portrait de famille meurtri par le deuil. 

Le Pitch: A la suite de la mort de son père auquel elle fut très proche, la jeune India n'éprouve que peu d'empathie pour sa mère. Avec l'arrivée de son oncle qu'elle n'a jamais connu, une étrange relation va se nouer entre eux.


De façon circonspecte et avec l'alchimie d'un climat diaphane toujours plus baroque et étouffant, Stoker est conçu à la manière d'un puzzle où les thèmes de la suspicion, de la jalousie, de la rancoeur nous sont établis à travers l'introspection douloureuse d'une adolescente timorée. Park Chan-wook prenant son temps à broder son intrigue interlope en se focalisant essentiellement sur l'ambiguïté psychologique (lourde de sens) de ses personnages. C'est d'abord les rapports difficiles entre une veuve accablée et sa fille inconsolable qu'on nous présente studieusement à travers l'intimisme de leur foyer gothique. C'est ensuite avec l'arrivée fortuite d'un oncle distingué que le récit amorcera une ambivalence pour les relations charnelles qu'il va compromettre auprès de ces deux veuves contrariées. Ainsi, dans une mise en scène aussi raffinée qu'extrêmement inspirée auprès de son inventivité stylisée, Stoker nous dévoile au compte goutte le cheminement torturé de cette jeune fille introvertie, difficilement sociable envers la gente masculine de ses camarades de classe. On en dira pas plus afin de ne pas ébruiter le moindre indice de son canevas charpenté mais sachez que le réalisateur Park Chan-wook nous dresse ici le tableau peu reluisant d'un trio d'amants en perte de valeurs morales. L'impact émotionnel narratif et l'acuité qui en émane résidant non seulement dans la psychologie meurtrie de ses protagonistes mais aussi dans la confection (oh combien !) scrupuleuse d'un climat lestement poisseux en ascension. L'aura malsaine sous-jacente qui s'y dégage de manière exponentielle nous collant à la peau en s'infiltrant insidieusement en notre conscience à l'instar d'un poison létal. Sachant ici que les notions de bien et de mal n'ont plus d'éthique ! Si tous les interprètes attestent une conviction imperturbable dans leurs rôles respectifs (Nicole Kidman insuffle un naturel subtilement aigre dans sa douleur maternelle, Matthew Goode redouble d'ambiguïté dans son élégance longiligne particulièrement flegme), il faut surtout saluer le jeu équivoque de l'étrange Mia Wasikowska de par sa prestance versatile d'adolescente en perdition. Sa froideur innocente galvaudée de mauvaise influence puis la rancoeur ainsi que le charme de son visage opalin nous pénétrant l'esprit dans une confusion dérangée.


Magnifiquement photographié au sein des décors gothiques d'une demeure feutrée mais aussi à travers sa nature apaisante d'un onirisme solaire enchanteur, Stoker véhicule avec subtilité et élégance fastueuse une ambiance crépusculaire autour d'un trio maudit inconsolable. Park Chan-wook concluant avec une audace anticonformiste (pour ne pas dire jusqu'au-boutiste) un splendide épilogue (toujours aussi magnifiquement cadré en mode alambiqué) à la fois censé et terriblement crépusculaire.

*Bruno
24.11.24. Vostf
07.06.13.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire