mercredi 8 mars 2017

Maniac

                                                              Photo emprunté sur Google, appartenant au site videodrome666.tumblr.com

de William Lustig. 1980. U.S.A. 1h28. Avec Joe Spinell, Caroline Munro, Abigail Clayton, Kelly Piper, Rita Montone, Tom Savini, Hyla Marrow, James Brexster, James Brewster, Tracie Evans, Sharon Mitchell.

Sortie salles en France le 09 mars 1982 / U.S: 26 Décembre 1980.

FILMOGRAPHIE: William Lustig est un réalisateur américain né le 1er février 1955 dans Le Bronx à New York. Il est le neveu du boxeur Jake La Motta.
1980: Maniac. 1983: Vigilante. 1988: Maniac Cop. 1990: Maniac Cop 2. 1993: Maniac Cop 3.
1997: Uncle Sam.


Gestation d'un mythe contemporain.
Au lendemain de Noël 1980 et cinq mois avant le 1er volet de la saga Vendredi 13 sort sur les écrans Maniac réalisé par le novice William Lustig. Un pavé dans la marre, une expérience déviante faisant office d'électro-choc au sein du paysage ludique du psycho-killer. Genre familièrement intitulé "slasher" et démocratisé deux ans au préalable par John Carpenter avec l'immuable Baby-sitter murder (ça c'était pour le clin d'oeil car rebaptisé depuis sa sortie par le titre celte Halloween). Frank Zito est un solitaire vivant reclus dans son appartement en compagnie de mannequins de vitrine. Leur visage sanguinolent est entaché de perruques qu'il s'applique à clouer sur leur crane. Ces chevelures sont à l'origine de véritables scalps qu'il perpétue sur des proies féminines durant ses errances nocturnes. Frank rodant dans la ville de New-York pour punir toutes les femmes qu'il aborde incidemment.


Scènes de crimes
Sans concession, le préambule rentre dans le vif du sujet pour illustrer sous une photo granuleuse blafarde un double meurtre crapuleux (strangulation et égorgement). Sous l'intempérie d'un ciel nuageux, un couple d'amants se prélasse sur une plage déserte. Sans rémission, une présence hostile à la respiration pondéreuse s'avance vers eux pour les assassiner avec une rare sauvagerie ! L'ambiance mortifère qui s'y dégage s'infiltre déjà à travers la pellicule maculée de sang ! Mais tout ceci n'était qu'une réminiscence ! Un cauchemar à nouveau fantasmé par le tueur au sein de l'intimité de sa chambre. C'est ensuite vers une cité urbaine malfamée qu'il déambule pour trouver refuge dans une chambre de motel en compagnie d'une jeune prostituée. Furtivement, elle finira étranglée et scalpée ! La brutalité graphique de cette longue séquence éprouvante foudroie par son réalisme âpre en insistant notamment sur les visages horrifiés des protagonistes (plans serrés à l'appui !). Un sentiment suffocant renforcé de la physionomie spectrale du tueur ruisselant de perles de sueur car s'acharnant de ses mains béantes sur le cou de la victime pour l'étouffer ! Ce premier homicide au climat de folie tangible dérange à point tel qu'aucun cinéaste n'était allé aussi loin pour le retranscrire aussi explicitement. Un autre exemple illustre bien le parti-pris à la fois ostentatoire et radical de Lustig avec la poursuite dans le métro au cours duquel notre tueur coursera sans répit une infirmière avant de la trucider. Un morceau d'anthologie au climat de claustration singulier si bien qu'il provoque le marasme, autant pour la victime effarouchée s'efforçant de retenir son souffle dans une cabine de toilette, que pour le spectateur voyeur tétanisé par la perméabilité de sa terreur épidermique !


Un tueur dans la ville
Sans perdre de vue ses pérégrinations nocturnes, Lustig continuera de se focaliser sur ses monstrueuses exactions perpétrées dans une mégalopole new-yorkaise tangiblement hostile, car d'autant plus asservie par l'emprise du tueur qu'il semble en être le taulier des lieux. Lustig cultivant avec souci documentaire le sentiment d'insécurité omniprésent régi au sein d'un dédale urbain en déliquescence morbide. Dans une ambiance opaque irrésistiblement magnétique, il dessine en parallèle l'introspection pathologique du criminel en sondant notamment ses pensées licencieuses sous l'impulsion de monologues patauds. Le spectateur observant attentivement ses tourments et ses cauchemars nocturnes résultants d'une profonde solitude et d'un trauma infantile en mettant en évidence sa culpabilité mélancolique de n'avoir pu combler sa mère abusive. De ses névroses et de sa déréliction émanent un refoulement sexuel, une profonde misogynie envers les femmes qui empiètent son chemin. Sa rancoeur et sa haine de sa mère autrefois punitive le contraignant à se transformer en ogre vindicatif contre la gente féminine, et ce en dépit de sa brève liaison amiteuse avec une photographe de mode (endossée par la prêtresse Caroline Munroe) qu'il s'efforce vainement de nouer.


Dans la tête du tueur
Si Maniac fascine et dérange de façon aussi épidermique, c'est également grâce à la prestance hallucinée de Joe Spinell littéralement habité par ses démons internes. Une présence viscérale sidérante de naturel que renforce en prime son physique adipeux et vérolé, sa chevelure croulante et son regard noir habité par la psychose. Qui plus est, ses longs râles plaintifs ne cessent d'hanter la pellicule durant son cheminement autodestructeur noyé de sang mais aussi de larmes. Car malgré tout, et par intermittence, on se surprend à lui tolérer une certaine empathie lors de moments intimes d'une quotidienneté ennuyeuse où ce dernier se parle à lui même pour regretter la disparition de sa mégère autrefois catin. Par le truchement de son passé de maltraitance infantile (il porte des stigmates de sévices corporels sur le corps et on apprend qu'il fut souvent confiné au fond d'un placard en guise de châtiment), Joe Spinell nous insuffle de la compassion dans sa fonction de victime sacrifiée.

                          
Une expérience de cinéma extrême, un choc visuel halluciné, une épreuve immorale en compagnie intime d'un comparse incurable !  
Par son ambiance mortifère à couper au rasoir émanant d'une virée urbaine criminelle, Maniac semble paradoxalement encore plus trouble, fascinant et immersif qu'à l'époque de sa sortie ! Une descente aux enfers jusqu'au-boutiste qui aligne sans modération des scènes gores graphiques d'un réalisme cinglant (respect Mr Savini !), quand bien même sa bande-son stridente aux percussions électros (Jay Chattaway à son apogée!) décuple son sentiment endémique d'insécurité. Eprouvant, angoissant, dérangeant mais éminemment fascinant, Maniac cultive en prime un réalisme parfois surréaliste (à l'instar de son final apocalyptique des plus perturbants !) auprès du psyché torturé du tueur tentant désespérément de fonder un semblant d'harmonie autour de mannequins en berne 

Note: En France, le film, interdit au moins de 18 ans, dû attendre deux ans pour pouvoir accéder à nos salles, faute des démêlés intransigeants d'une censure Giscardienne. Il fut en outre interdit en Australie et en Allemagne de l'est.

Bruno Matéï
08.03.17. 5èx
27.02.11. (472 vues)

mardi 7 mars 2017

I AM NOT A SERIAL-KILLER

                                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemaclubfr.fr

de Billy O'Brien. 2016. Irlande/Angleterre. 1h43. Avec Christopher Lloyd, Max Records, Laura Fraser, Tim Russell, Christina Baldwin, Karl Geary

Sortie Dtv France: 7 Mars 2017. salles Irlande: 9 Décembre 2016

FILMOGRAPHIE: Billy O'Brien est un réalisateur irlandais.
2005: Isolation. 2016: I am not a serial-Killer.


Révélé par le formidable Isolation (Grand Prix, Gérardmer 2006), l'irlandais Billy O'Brien nous revient 11 ans plus tard avec une nouvelle oeuvre indépendante traitant modestement du thème du serial-killer avec ultra réalisme et originalité. Tant et si bien qu'il risque de déconcerter une partie du public peu habitué à son climat d'étrangeté indicible culminant avec un final des plus extravagants (certains n'hésiteront sans doute pas à taxer sa conclusion de ridicule). Employé à ses heures perdues dans une morgue par l'entremise de sa mère, le lycéen John Wayne Cleaver voue une passion pour les serial-killers. Néanmoins fragile et névrosé, il suit un psychologue depuis qu'il est persuadé d'être un dangereux sociopathe. Un jour, il est témoin d'une agression meurtrière perpétrée par l'un de ses voisins, un septuagénaire gravement malade du coeur. Réalisé en 16 mm afin de renforcer le caractère granuleux de sa photo, I am not a serial-killer épouse un réalisme glauque à la limite du reportage (façon Deranged, Henry ou Maniac) afin de transfigurer ce curieux pitch dans une texture cinégénique n'ayant rien à envier aux prods des années 70.


Au niveau de sa forme documentée, nous parvenons agréablement à nous immerger dans l'action sous le pilier d'une atmosphère feutrée assez envoûtante, et ce en dépit d'une rythme langoureux qui risquerait d'en décourager plus d'un. Quand bien même certaines longueurs viennent un peu ternir son suspense latent imparti autour des pérégrinations du jeune héros épiant obsessionnellement son voisin du 3è âge. Néanmoins, grâce aux prestances très convaincantes de Max Records (impressionnant par l'intensité de son regard pervers ou apeuré, et attachant dans son désir d'équilibre moral en quête d'absolution) et de Christopher Lloyd (étonnant en faire-valoir taiseux traînant la patte dans une posture sclérosée), I am not a serial-killer parvient à maintenir l'attention en dépit du peu de surprises que nous réserve l'intrigue (exit son twist final). Emaillé d'éléments potentiellement surnaturels, l'intrigue sème le doute et la confusion durant le cheminement initiatique de John Wayne surveillant son voisin depuis que ce dernier s'adonne au crime gratuit en arrachant le coeur de ses victimes. Le réalisateur s'attardant majoritairement à autopsier le profil psychologique de cet adolescent morbide avec l'appui d'un psychologue et de sa mère prévenante en inquiétude, quand bien même en parallèle spoil ! une romance assez poignante viendra pointer le bout de son nez au moment le plus inopportun fin du Spoil.


Mon voisin le tueur
En dépit d'un rythme atone et d'un cheminement investigateur quelque peu redondant, I am not a serial-killer surprend et déroute par sa facture ultra réaliste de brosser sans fioriture les portraits de deux antagonistes s'opposant avec une distinction caractérielle assez ambiguë. Une découverte intéressante que cette expérience à la fois insolite et magnétique, à réserver toutefois à un public contemplatif. 

Eric Binford

lundi 6 mars 2017

EXTREMITIES

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site imdb.com

de Robert M. Young. 1986. U.S.A. 1h29. Avec Farrah Fawcett, James Russo, Alfre Woodard, Diana Scarwid, Sandy Martin

Sortie salles France: 11 Mars 1987. U.S: 22 août 1986.

FILMOGRAPHIE: Robert Milton Young, plus connu sous le nom de Robert M. Young, est un scénariste et réalisateur américain, né le 22 novembre 1924 à New York. 1956 : Secrets of the Reef.
1960 : World Wide '60. 1967 : At the Winter Sea Ice Camp: Part 4. 1969 : J.T. 1970 : The Eskimo: Fight for Life. 1973 : Children of the Fields. 1977 : Short Eyes. 1977 : Alambrista! 1978 : NBC Special Treat. 1979 : Rich Kids. 1980 : One-Trick Pony. 1982 : The Ballad of Gregorio Cortez. 1982 : American Playhouse. 1986 : Saving Grace. 1986 : Extremities. 1987 : We Are the Children. 1988 : Nicky et Gino. 1989 : Triumph of the Spirit. 1991 : Talent for the Game. 1993 : Children of Fate: Life and Death in a Sicilian Family. 1993 : Roosters. 1995 : Solomon & Sheba. 1995 : Slave of Dreams. 1996 : Caught. 1997 et 1998 : Une sacrée vie. 2001 : Expédition panda en Chine. 2004 : Below the Belt. 2004-2009 : Battlestar Galactica. 2011 : The Maze coréalisé avec David Grubin.


Modeste série B réalisée avec simplicité, Extremities tire parti de son efficacité grâce à l'interprétation viscérale de Farrah Fawcett (nominée aux Golden Globes !) délivrant ses émotions à nu sans effet de manche, et à son concept inopiné d'un jeu de soumission auquel les rôles vont subitement interférer. A la suite d'une agression avec un motard à visage couvert, Marjorie porte plainte au commissariat sans pouvoir porter l'affaire au tribunal, manque de preuve et de l'identité du présumé coupable. Quelques jours plus tard, ce même agresseur décide de rendre visite à son domicile après lui avoir dérobé ses papiers d'identité. Mais au moment de sa nouvelle tentative de viol, Marjorie finit par se défendre et séquestre son ravisseur en attendant l'arrivée de ses 2 amies colocataires. 


Alternant le drame et le suspense parmi la juste mesure d'interprètes communément convaincants (notamment James Russo jonglant non sans charisme le jeu insidieux du bourreau et de la victime avec cynisme arrogant !), Extremities maintient la tension durant son cheminement vindicatif si bien que la victime profondément traumatisée de deux agressions devra hésiter d'épargner ou d'assassiner son bourreau sous l'influence de ses acolytes. C'est donc une épreuve psychologique que Robert Young nous relate efficacement au sein d'un huis-clos aussi étouffant que malsain et parmi le témoignage démuni d'un trio féminin en questionnement moral. Nanti d'un climat anxiogène perpétuel, tant pour sa 1ère partie assez éprouvante lorsque la victime encaisse humiliations et sévices avec un réalisme dérangeant, que de la seconde quant au sort éventuellement morbide du présumé condamné, Extremities parvient à provoquer l'émotion chez nos témoins féminins en constante remise en question d'une telle extrémité. Abordant les réflexions sur le laxisme du système judiciaire (les agresseurs sexuels trop rapidement lâchés dans la nature après y avoir purgé leur peine et leur libre arbitre de continuer à menacer leurs victimes) et l'auto-justice, Robert Young nous interpelle sur notre instinct primitif et rebelle lorsque nous avions la possibilité de séquestrer notre agresseur et juger de son sort après un traumatisme moral.


Simple, efficace et intense, Extremities aborde la tentative de viol avec l'intelligence d'un contexte retors auquel victime et témoins devront mesurer leur indulgence pour tolérer ou non l'auto-justice au risque d'y perdre leur âme. Pour parachever, rien que pour la prestance éprouvante de Farrah Fawcett (franchement poignante en condition soumise dans son visage marqué de larmes), le film mérite que l'on s'y attarde. 

Bruno Matéï
3èx

vendredi 3 mars 2017

L'AUBERGE ESPAGNOLE

                                                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

de Cédric Klapisch. 2002. France. 2h02. Avec Romain Duris, Judith Godrèche, Audrey Tautou, Cécile de France, Kelly Reilly, Cristina Brondo, Federico D'Anna, Barnaby Metschurat, Christian Pagh.

Sortie salles France: 19 Juin 2002

FILMOGRAPHIE: Cédric Klapisch est un réalisateur, scénariste et producteur français, né le 4 Septembre 1961 à Neuilly-sur-Seine (France).
1989: Maasaïïtis. 1991: Riens du tout. 1994: Le Péril Jeune. 1996: Chacun cherche son chat. 1996: Un air de famille. 1999: Peut-être. 2001: L'Auberge Espagnole. 2002: Ni pour ni contre. 2005: Les Poupées Russes. 2008: Paris. 2011: Ma part du Gâteau. 2013: Casse-tête chinois. 2017: Ce qui nous lie.


Révélé en 1994 avec le cultissime Le Péril JeuneCédric Klapisch n'en finit pas de dépeindre les tranches de vie d'une jeunesse insouciante au sein de L'Auberge Espagnole. Vaudeville truffé de tendresse, de fraîcheur, de drôlerie et de romance, Cédric Klaplisch nous déclare sa flamme à la vie, à l'amour, au jeunisme, aux voyages, à l'amitié, à la différence, à l'indépendance et à l'émancipation (n'écouter que soi pour accomplir son destin !), au désordre et à la fête à travers le regard apprenti de Xavier. Un jeune étudiant de 25 ans délibéré à s'installer un an en Espagne afin de décrocher plus tard une embauche chez le ministère des Finances, et ce en dépit de la réticence de sa petite amie. Sur place, il établit la rencontre de jeunes étudiants d'origine étrangère se partageant le loyer d'un appartement. Après une transaction, il accepte de vivre en colocation.


Dans une mise en scène aussi inventive qu'inspirée (voire parfois même expérimentale), Cédric Klaplisch s'y connait pour nous familiariser avec une troupe d'étudiants avides de nouvelles rencontres et de désir d'épanouissement à un âge aussi instable qu'inexpérimenté si bien que les infidélités sont facilement influentes lorsque vous vous retrouvez en terre inconnue à l'abri des témoins familiers. D'un réalisme plus vrai que nature, tant auprès de la visite touristique de Barcelone que d'une galerie de personnages au caractère bien trempé, l'Auberge Espagnole insuffle une palette d'émotions exaltantes oscillant le comique de situation et la douce tendresse sous le pilier de l'amitié et de la tolérance (en particulier l'homosexualité). Illuminé par la présence de comédiens épatants de peps mais aussi confondants de naturel (Romain Duris, Judith Godrèche, Audrey Tautou, Cécile de France, Kelly Reilly magnétisent l'écran sans jamais se complaire dans le stéréotype !), les seconds-rôles méconnus (Cristina Brondo, Federico D'Anna, Barnaby Metschurat et Christian Pagh) ne sont pas en reste pour nous séduire et nous dépayser. Avec la subtilité d'un humour verbal, d'une expression faciale et d'instants de cocasserie émanant d'une quotidienneté gaillarde (beuverie du samedi soir, infidélité avec une femme mariée, maîtresse planquée sous le lit, scènes de jalousie, conflits de culture), Klaplisch nous narre leurs vicissitudes au coeur d'une capitale chaleureuse réputée pour son sens de la fête.


Mené sur un rythme soutenu au fil d'une intrigue rocambolesque impromptue, l'Auberge Espagnole se déguste comme une coupe de champagne en la charmante compagnie d'une génération d'acteurs époustouflants de spontanéité dans leur humanisme à la fois fragile et badin (l'américain et son bagout vexant). Constamment drôle, tendre, pétillant, émouvant, et parfois même sensuel et érotique (la sublime Judith Godrèche irradie l'écran en introvertie coquine, sans compter les yeux clairs de la suave Kelly Reilly !), cette bouffée d'air frais se permet en sous-texte de scander un manifeste pour une Europe cosmopolite quand bien même les nostalgiques des vacances estivales se remémoreront leurs plus beaux souvenirs juvéniles. Bref, un moment de bonheur en apesanteur, un anti-dépresseur à consommer sans modération !

Eric Binford
3èx 

Box-Office: 2 966 271 entrées en salles en France et 4 852 366 en Europe.

mercredi 1 mars 2017

TROLL

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site charlesband-empire.blogspot.fr

de John Carl Buechler. 1986. U.S.A. 1h22. Avec Noah Hathaway, Michael Moriarty, Shelley Hack, Jenny Beck , Sonny Bono

Sortie salles U.S: 17 Janvier 1986

FILMOGRAPHIE: John Carl Buechler (né à Belleville, Illinois) est un réalisateur, maquilleur et technicien d'effets spéciaux américain. 1984 : Ragewar. 1986 : Troll. 1988 : Cellar Dweller. 1988 : Vendredi 13, 7. 1991 : Ghoulies III. 1998 : Les Proies : La Résurrection. 2002 : Curse of the Forty-Niner. 2003 : Deep Freeze. 2003 : A Light in the Forest. 2004 : Grandpa's Place. 2006 : The Strange Case of Dr. Jekyll and Mr. Hyde. 2011 : Dark Star Hollow


Production au rabais commanditée par nos illustres Albert et Charles Band, Troll porte la signature de John Carl Buechler, spécialiste de séries Z souvent exploitées en DTV. Conjuguant la Fantasy avec un soupçon d'horreur (comme le souligne la délirante séquence qui voit un homme transformé en monstre pendant que son visage se tuméfie tel une baudruche !), le cinéaste nous concocte une série B aussi maladroite qu'attachante dans sa succession d'incidents domestiques instaurés chez les locataires d'un immeuble. Pour cause, après des siècles d'emprisonnement, un troll et ses sbires ont décidé de prendre leur revanche sur l'homme pour tenter de reconquérir notre monde. Mais au sein de l'immeuble, une fée déguisée en sexagénaire va tenter de s'interposer afin de protéger les résidents. Particulièrement la famille Potter dont leur fille cadette est soumise à l'emprise de Torok, leader des trolls prenant malin plaisir à prendre possession de son corps (la jeune actrice Jenny Beck gesticulant et grimaçant auprès de ses parents avec une outrance à la limite du supportable !). Par l'entremise d'un pitch aussi grotesque qu'original, John Carl Buechler nous concocte un ovni improbable comparable à peu de chose près à une production Amblin au vitriol.


Si le récit linéaire s'avère sans surprise et plutôt redondant (jeu de cache-cache et de brimades entre Trolls et humains au sein d'une ambiance à la fois bigarrée et festive), le caractère aussi attachant que gogo des personnages amiteux, le dépaysement végétatif implanté dans l'immeuble en mutation et la galerie de monstres ricaneurs multipliant méfaits diaboliques auprès des humains rendent l'aventure gentiment déjantée. Si bien qu'il se dégage parfois de ses confrontations grotesques une certaine forme de poésie à travers le design des créatures de Fantasy confectionnées à l'ancienne par des FX perfectibles mais bourrés de charme. Truffé d'incohérences et de situations involontairement ridicules (certains seconds-rôles en font des tonnes dans leur posture erratique comme je l'ai déjà susmentionné !) dans un montage approximatif, Troll parvient encore à nous divertir sous l'autorité d'aimables seconds-couteaux (on y croise Noah Hathaway/L'Histoire sans Fin, Shelley Hack/la série Drôles de dames-Le Beau-Père, Michael Morriarty/Epouvante sur New-York) se prêtant à l'aventure avec une bonhomie dénuée de prétention. On peut d'ailleurs en dire autant du responsable de cette mascarade impayable si bien que John Carl Buechler semble éprouver un plaisir intègre à graver sur pellicule un B movie uniquement conçu sur la douce fantaisie d'une féerie horrifique.


Harry Potter and co.
A redécouvrir avec mansuétude et nostalgie d'une époque révolue où l'artisanal était capable d'enfanter ce genre de production hybride teintée d'audaces saugrenues.

Eric Binford

mardi 28 février 2017

QUE DIOS NOS PERDONE. Prix du meilleur scénario, San Sebastien, 2016.

                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site cartelera.elperiodico.com

de Rodrigo Sorogoyen. 2016. Espagne. 2h06. Avec Antonio de la Torre, Roberto Álamo, Javier Pereira, Luis Zahera, José Luis García Pérez, Alfonso Bassave.

Sortie salles Espagne: 28 Octobre 2016

FILMOGRAPHIERodrigo Sorogoyen est un réalisateur espagnol né le 16 septembre 1981 à Madrid. 2008 : 8 citas. 2013 : Stockholm. 2016 : Que Dios nos perdone.


Thriller ibérique à couper au couteau dans sa science d'un suspense émoulu émaillé de cruels rebondissements, Que dios nos perdone (que Dieu nous pardonne) nous prend aux tripes avec une vigueur hautement dérangeante. De par le portrait conféré à un maniaque sexuel s'en prenant uniquement aux retraitées septuagénaires, et les profils instables de deux flics aussi désorientés que démunis par leur déveine infatigable. Baignant dans un climat fétide à la fois pervers et vénéneux, Que dios nos pedonne parvient à se démarquer de la production courante grâce à son refus de concession si bien que son cheminement narratif a de quoi dérouter lorsque le réalisateur s'attache en parallèle de l'enquête à dépeindre les contrariétés de deux flics discrédités par leur profession mais aussi leur relation conjugale. L'un taiseux, introverti, sexuellement refoulé, s'efforçant avec une extrême maladresse d'entamer une romance avec sa voisine de palier, l'autre, dangereusement irascible et trapu, tentant fébrilement de canaliser sa violence interne. Autour de ces profils psychologiques de prime abord peu sympathiques et amicaux, le réalisateur va néanmoins parvenir à les rendre attachants au fil de leurs problèmes familiaux et d'une enquête venimeuse d'une audace narrative inouïe quant à leur destinée incertaine.


En prime, pour corser l'affaire criminelle, le contexte social d'une récession et la visite populaire du pape Benoit XVI vont influencer la hiérarchie policière à taire les détails sordides de ces homicides au mépris de l'investigation décousue. Avec le parti-pris d'un réalisme sordide éludant toutefois toute forme de complaisance, Que dios nos perdone hypnotise et suscite le malaise face aux exactions crapoteuses d'un serial-killer retors dont nous finirons par connaître les tenants et aboutissants auprès de sa pathologie mentale. Et si le réalisateur parvient intelligemment à écarter la violence graphique, une séquence effroyable nous ébranle malgré tout sous le pilier du hors-champs, de par sa situation scabreuse qu'une personne âgée endure face aux coups répétés de son agresseur. Superbement filmé dans la démographie urbaine d'un Madrid jalonné de touristes, les poursuites qui empiètent l'intrigue sont savamment chorégraphiées au rythme d'un bande son percutante, telle un battement de coeur entêtant ! Servi par une distribution méconnue (du moins dans l'hexagone), le film renforce son authenticité par leur présence aussi affirmée que naturelle et par le truchement d'une caméra mobile employant parfois le cadre subjectif.


Thriller méphitique d'une belle maturité dans son refus du conformisme et du manichéisme, Que dios nos perdonne tire parti de sa vigueur et de son aura de fascination sous l'impulsion d'une galerie de personnages torturés combattant leurs propres démons depuis un passé galvaudé. Native d'Espagne, cette nouvelle référence aussi ludique qu'auteurisante est à ne rater sous aucun prétexte. 

Remerciement à Pascal Frezzato.
Bruno Dussart

Récompenses: Prix du meilleur scénario au Festival international du film de Saint-Sébastien 2016
Goya du meilleur acteur pour Roberto Álamo

lundi 27 février 2017

MA VIE DE COURGETTE. César du Meilleur film d'animation, 2017.

                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site www.cineman.ch

de Claude Barras. 2016. France/Suisse. 1h06. Avec Gaspard Schlatter, Sixtine Murat, Paulin Jaccoud, Michel Vuillermoz, Raul Ribera, Estelle Hennard, Elliot Sanchez.

Sortie salles France: 16 Octobre 2016.

FILMOGRAPHIE: Claude Barras, né en 1973, est un réalisateur de film d'animation suisse.


Les enfants du désordre
Entièrement réalisé en stop motion avec prouesse infaillible et souci du détail, Ma vie de courgette dépeint sobrement la nouvelle quotidienneté d'icar dit "Courgette" dans un orphelinat après avoir incidemment tué sa mère alcoolique. En dépit de l'intimidation de la tête de turc Simon, Courgette finit par se lier d'amitié avec ses nouveaux camarades jusqu'au jour où se présente une nouvelle locataire, Camille. Production franco-suisse auréolée d'une pluie de récompenses, Ma Vie de courgette fait parti de ses rares métrages où la magie du cinéma s'opère avec une grâce épurée si bien que l'on sort de la projo littéralement sonné ! Car à titre personnel, j'ai eu beaucoup de difficulté à m'extraire du générique de fin, de par sa conclusion sensiblement amère où s'opposent à la fois avantage et injustice, et la vigueur musicale de la chanson de Sophie Hunger reprenant avec ténuité un tube mélancolique de Noir Désir ! D'une simplicité extrême, l'intrigue parvient à captiver et faire naître une émotion à fleur de peau dans sa faculté à saisir, via le délicat outil d'une fiction animée, les tourments intrinsèques d'enfants précaires réduits à l'abandon et l'isolement depuis la démission parentale. Entièrement dédié à leur candeur humaine en quête de rédemption, Ma Vie de courgette bouleverse nos sentiments sans nous prévenir car sans se fourvoyer dans l'émotion programmée du pathos et de la sinistrose. Claude Barras traitant notamment des thèmes de la drogue, de l'alcool, de la pédophilie et de la violence conjugale et infantile à travers la suggestion d'un ton réaliste parfois dur quant aux conséquences psychologiques de ces orphelins profondément perturbés par leur condition sacrifiée.


Le vent nous portera
Bourré d'humanisme et d'instants d'émotion pure, l'étonnante réussite de Ma vie de courgette émane donc de sa grande simplicité, de sa modestie, de son refus du misérabilisme et surtout de son immense attention à capter les émotions des personnages (enfants mais aussi adultes) avec une extrême pudeur. De par leur comportement à la fois candide et si fragile s'y extrait des moments intimistes poignants, voirs autrement bouleversants quant au déchirant final somme toute optimiste si j'ose dire. Plein de poésie mais aussi d'humour, ce témoignage douloureux sur l'enfance galvaudée se permet notamment de transcender un hymne à l'amitié et à la fraternité afin d'oublier la désillusion d'un amour parental en berne. Pour ma part, et sans me laisser gagner par la dithyrambe, il s'agit du métrage d'animation le plus juste et émouvant que j'ai pu voir depuis Mary et Max et le Tombeau des Lucioles

Dédicace à Alain Kaehr.
Bruno Dussart

Récompenses: Cristal du long métrage, Prix du public au Festival international du film d'animation d'Annecy, 2016.
Festival du film francophone d'Angoulême 2016 : Valois de diamant.
Festival international du film de Saint-Sébastien 2016 : Meilleur film européen.
Festival international du film francophone de Namur 2016 : Bayard d’Or de la meilleure photographie pour David Toutevoix.
Prix du cinéma européen du meilleur film d'animation 2016
Prix Lumières 2017 :
Meilleur film d'animation
Meilleur scénario pour Céline Sciamma
César 2017 :
Meilleur film d'animation
Meilleure adaptation

jeudi 23 février 2017

DARK CITY

                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site dcmain.deviantart.com

d'Alex Proyas. 1998. U.S.A/Australie. 1h52 (Director's Cut). Avec Rufus Sewell, William Hurt, Kiefer Sutherland, Jennifer Connelly, Richard O'Brien, Ian Richardson, Bruce Spence.

Sortie salles France: 20 Mai 1998. U.S: 27 Février 1998

FILMOGRAPHIE: Alex Proyas est un réalisateur, producteur et scénariste australien, né le 23 Septembre 1963 en Egypte. 1994: The Crow. 1998: Dark City. 2002: Garage Days. 2004: I, Robot. 2009: Prédictions. 2012: Paradise Lost. 2016 : Gods of Egypt.


Echec commercial inéquitable toutefois contrebalancé par les avis plutôt élogieux de la presse spécialisée, Dark City oeuvre dans la cour des grands dans sa cristallisation d'univers singulier aux influences de film noir, d'expressionnisme allemand et d'anticipation métaphysique. Une nuit, un homme se réveille dans une baignoire incapable de se remémorer son identité. Dans sa chambre, le corps d'une femme est retrouvée assassinée. La police et d'étranges hommes vêtus de noir le traquent sans relâchent car présumé coupable d'être un dangereux tueur en série. A partir de cette trame policière somme toute classique, Alex Proyas, génial auteur du requiem The Crow, redouble à nouveau d'ambition pour nous déconnecter de notre réalité à travers les thème spirituels de la mémoire et du souvenir. Sans déflorer les tenants et aboutissants d'une intrigue de prime abord hermétique (le parfum de l'âme est le souvenir !), Dark City est construit à l'instar d'un puzzle que notre héros investigateur va tenter de remodeler en arpentant les lieux nocturnes d'une ville en léthargie contrôlée par des hommes en noir.


Fasciné par la nuit (comme il nous l'avait préalablement démontré avec The Crow) et la nature de la conscience, Alex Proyas nous évoque avec souci formel un poème spirituel sur la création divine et l'origine existentielle lorsque les citadins d'une métropole deviennent cobayes afin de percer le mystère (impénétrable) de nos âmes. Parmi ces thèmes aussi éthérés qu'obscurs (notamment la nature du Mal à travers les exactions d'un tueur en série), le cinéaste en extrait au final un hymne à la vie, à l'amour et à la clarté quant à l'issue rédemptrice d'une confrontation musclée avec des étrangers fascistes. Le secret de notre humanisme résidant non pas dans l'âme mais dans le coeur. Toujours plus rigoureusement fascinant, Dark City nous communique le désir d'en apprendre sur nous même (notre quête identitaire si parfois difficile à élucider) si bien qu'il parvient à réveiller en nous des questions philosophiques sur la réalité de notre quotidienneté. Dans le sens mystique où nos pensées intrinsèques seraient aptes à produire et matérialiser un monde psychotique ou contrairement optimiste selon notre point de vue torturé ou serein. Autrement dit, la réalité de nos actes réside dans les pensées qui les produisent. A moins qu'un savant fou ou un créateur en tirerait les ficelles en modifiant à sa guise les intrigues de notre destin durant notre sommeil. Outre la densité d'un scénario passionnant jalonné de rebondissements dignes d'un épisode de La 4è Dimension, Dark City tire parti d'un esthétisme crépusculaire littéralement ensorcelant. Alex Proyas soignant méticuleusement le cadre d'une infrastructure urbaine à la fois gothique et expressionniste au sein d'une cité en (constante) mutation inspirée des années 40.


Nous sommes les créateurs de notre monde.
Aux décors stylisés se combinent harmonieusement les présences délétères d'antagonistes étonnamment iconiques sans compter quelques idées astucieuses (l'harmonisation télépathique des étrangers) empruntées aux références telles Métropolis, Nosferatu, Blade Runner et même Scanners ! Ajoutez à cela une distribution aussi solide qu'impliquée (Rufus Sewell, William Hurt, Kiefer Sutherland et la suave Jennifer Connelly se partagent la vedette avec une autorité contrariée) et vous obtenez un diamant noir schizo habité par une entité démiurge.

La Chronique de The Crow: http://brunomatei.blogspot.fr/2012/02/the-crow.html

Bruno Matéï.
3èx

Récompenses:
Festival du film fantastique d'Amsterdam 1998 : prix du meilleur film
Saturn Award du meilleur film de science-fiction 1999
Prix Bram Stoker 1999 : meilleur scénario
Festival international du film fantastique de Bruxelles : prix du public

mercredi 22 février 2017

MUTATIONS

                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site elabismodelcine.blogspot.fr

"Slugs, muerte viscosa" de Juan Piquer Simon. 1988. Espagne. 1h32. Avec Michael Garfield, Kim Terry, Philip MacHale, Alicia Moro, Santiago Álvarez.

Sortie salles U.S: 5 Février 1988

FILMOGRAPHIEJuan Piquer Simón est un réalisateur et scénariste espagnol né le 16 Février 1935 à Valence (Espagne), décédé le 8 janvier 2011. 1964 : España violenta : Scénariste et réalisateur
1965 : Vida y paz  : Scénariste et réalisateur. 1976 : Le Continent fantastique. 1979 : Supersonic Man 1980 : Au-delà de la terreur. 1981 : Le Mystère de l'île aux monstres. 1982 : Los diablos del mar. 1982 : Le Sadique à la tronçonneuse. 1983 : L'Éclosion des monstres ou Visitor. 1984 : Guerra sucia. 1988 : Mutations. 1990 : Magie noire. 1990 : L'Abîme. 1999: la ciudad de oro.


Série B horrifique réalisée par le modeste artisan ibérique Juan Piquer Simon, Mutations constitue un hommage aux films de monstres et insectes mutants qui fleurissaient dans les années 50. Dans une petite bourgade ricaine, les citadins sont envahis par des limaces mutantes et carnivores à la suite de déchets toxiques déversés dans les égouts. Dépêché sur les lieux, un inspecteur sanitaire va tenter d'enrayer la menace. Bien que son schéma narratif ultra prévisible et éculé ne cesse d'exploiter les clichés aux classiques du genres, Mutations dégage une ambiance à la fois pittoresque et inquiétante sous l'impulsion de protagonistes peu expressifs et dénués de charisme. Inévitablement naïfs et crétins, ces personnages insufflent toutefois une bonhomie attachante dans leur persuasion sincère de nous faire croire à l'improbable. Car aussi incongrues soit ses attaques de masse de mollusques invertébrés, Juan Piquer Simon croit suffisamment en son sujet pour nous divertir avec une certaine habileté, notamment grâce à l'efficacité de séquences chocs franchement impressionnantes. Tant et si bien que le cinéaste ne lésine pas non plus sur la complaisance gore par le truchement de zooms grossiers que n'aurait pas renié Fulci ou D'Amato ! Les FX en latex percutants et réalistes nous suscitant un dégoût viscéral lorsque les victimes impuissantes sont sauvagement agressées par ses loches visqueuses. En dépit de certaines situations ridicules si je me réfère au cabotinage de certains seconds-rôles à tenter de s'extirper de la mort, Mutations amuse et effraie grâce à son rythme soutenu, comme le confirme aussi son final homérique empruntant au genre catastrophe.


Une série B bonnard donc tout à fait ludique par son sens de dérision sarcastique et viscéralement répugnante quant aux exactions meurtrières des limaces noires rampant sur leur victimes avec un appétit inopinément vorace ! 

Eric Binford.
3èx



mardi 21 février 2017

GLORIA. Lion d'Or, Mostra de Venise, 1980.

                                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Fan-de-cinema

de John Cassavetes. 1980. U.S.A. 2h01. Avec Gena Rowlands, John Adames, Julie Carmen, Tony Knesich, Buck Henry, Lupe Garnica, Jessica Castillo, Lawrence Tierney.

Sortie salles France: 31 Décembre 1980. U.S: 1er Octobre 1980

FILMOGRAPHIE: John Cassavetes est un réalisateur, scénariste et acteur américain, né le 9 Décembre 1929 à New-York, décédé le 3 Février 1989 à Los Angeles.
1959: Shadows. 1961: Too late blues. 1963: Un Enfant attend. 1968: Faces. 1970: Husbands. 1971: Minnie et Moskowitz. 1974: Une Femme sous Influence. 1976: Meurtre d'un bookmaker chinois. 1978: Opening Night. 1980: Gloria. 1984: Love Streams. 1985: Big Trouble.


Cassavetes a mis du temps avant d'accepter Gloria. Il a longtemps décrié le film, le considérant comme un "accident" à l'intérieur de sa filmographie. Il ne faut pas écouter les cinéastes: ils sont bien moins placés qu'on ne le croit pour juger de leurs oeuvres. Devant l'effet tétanisant que produit Gloria sur le spectateur, personne ne peut supputer la moindre trahison de Cassavetes envers son cinéma.
Philippe Azoury.


Thriller à suspense oppressant où se télescope le drame psychologique, Gloria constitue un grand moment de cinéma sous l'impulsion impérieuse de la divine Gena Rowlands ! Crevant l'écran à chacune de ses apparitions, l'actrice insuffle un jeu fébrile d'autorité aussi poignant que viscéral dans sa constance désespérée de protéger un jeune orphelin, témoin gênant du massacre de sa famille par la pègre mafieuse. Possédant un important calepin de son défunt père où sont répertoriés les numéros de compte et leurs identités, le gosse devient une cible capitale pour ses tueurs sans vergogne. Mais juste avant le carnage familial, la mère de Phil pu contacter une amie call-girl pour lui confier la garde. Dès lors, dans un jeu du chat et de la souris, une traque infernale s'engage entre le duo impromptu et les tueurs.


Par le biais de ce pitch simpliste toutefois original, John Cassavetes en extirpe un survival haletant d'une efficacité optimale si bien que sous couvert de divertissement grand public le cinéaste se permet d'y cultiver sa patte personnelle ! A savoir, authentifier le cadre (détaillé) de son action urbaine en magnifiant la ville de New-York telle un dédale de tous les dangers. Dans son parti-pris d'ultra réalisme hérité du documentaire, Cassavetes enrichit l'intensité dramatique des évènements et relance l'action des confrontations par la cause instable de Phil particulièrement entêté et versatile à se laisser dompter par la blonde inconnue (sa fugue dans les cités new-yorkaises puis un peu plus tard son égarement dans le métro). Sous le pilier du thriller palpitant émaillé d'éclairs de violence, Cassavetes renchérit pour transcender le portrait à la fois fragile et pugnace d'une escort-girl réfractaire à la maternité. Récit initiatique où la perte de l'innocence du bambin influera la rédemption maternelle de sa protégée, Gloria conjugue tension et bouffées de tendresse avec une pudeur détonante. Car autour de ses échanges intimistes l'intrigue ne cède jamais aux bons sentiments d'une émotion programmée et encore moins aux dérives d'une violence injustifiée grâce à son ossature narrative dédiée aux profils du duo caractériel en apprentissage amoureux et héroïque. Outre la performance très intense de Gena Rowlands en justicière stoïque, le jeune John Adames lui partage la vedette avec un naturel, une innocence et un semblant d'autorité (il joue souvent au machiste inflexible comme son père lui a préalablement conseillé !) souvent émouvants.


Thriller à suspense d'un réalisme inopinément documenté, portrait fulgurant de femme désenchantée mais redoutablement impérieuse, Gloria dilue une intensité émotionnelle bouleversante sous l'impulsion galvanisante du duo marginal à bout de souffle. Un chef-d'oeuvre hybride d'une grande sensibilité (à l'instar de la mélodie fragile de Bill Conti aux accents lyriques proches de Rocky !) où la passion des sentiments se mêle à une révolte fielleuse. 

Bruno Dussart. 4èx

lundi 20 février 2017

STRYKER

                                                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Ohmygore

de Cirio H. Santiago. 1983. Philippines. 1h24. Avec Steve Sandor, Andrea Savio, William Ostrander
Julie Gray, Monique St. Pierre, Mike Lane.

Sortie salles France: 9 Mai 1984. U.S: 9 Février 1983


Surfant sur la vague du western post-nuke initié par Mad-Max 2, Stryker est une production Z native des philippines. Réalisateur prolifique (jetez un oeil sur son incroyable filmographie au terme de l'article), Cirio H. Santiago pompe allègrement le scénario de Mad-Max 2 (la quête de l'essence étant substituée par l'eau) avec une paresse impayable. Après la 3è guerre mondiale, divers clans s'affrontent pour la denrée de l'eau. Surgit de nulle part, le ranger solitaire Stryker vient en aide à un groupe de survivants pacifistes propriétaires d'une source. Série Z au rabais comme il en pullulait à l'orée des années 80 depuis la référence inégalée de George Miller, Stryker tente avec un minimum d'efficacité de façonner un film d'action moderne émaillé de traditionnelles poursuites et cascades de pacotille. Avec sa réalisation scolaire, ses dialogues risibles, ses trognes inexpressives et son héros taiseux aseptique dont on éprouve aucune sympathie, Stryker affiche un esprit Bis typiquement transalpin si bien que le philippin Cirio H. Santiago a bien du mal à insuffler une quelconque vigueur aux enjeux humains et héroïques en dépit d'un final belliciste. Mais au-delà de ses défauts précités et d'un manque évident de moyens (l'unité de l'action se déroulant dans des carrières en plein désert), cet épigone s'avère gentiment bonnard si on sait faire preuve d'indulgence et que l'on soit un inconditionnel du sous-genre. Certains personnages dans leur défroque excentrique (les nains badins, le "méchant" tyran aussi impassible et concis que notre héros, les amazones guerrières échappées de Mad-Max 2 !) et certaines réparties involontairement drôles valant notamment le détour par leur aspect premier degré aussi grotesque que (futilement) attachant. A voir de préférence entre amis un samedi soir arrosé ! ^^

Eric Binford. 3èx


FILMOGRAPHIE: Cirio H. Santiago est un réalisateur, producteur et scénariste né le 18 Janvier 1936 à Manila, Philippines, décédé le 26 Septembre 2008 à Makati City, Philippines.
2014: Water Wars. 2005 Bloodfist 2050 (TV Movie).  2003 When Eagles Strike.  2000 Aladdin and the Adventure of All Time (Video).  1997 Nagmumurang kamatis (as Cirio Santiago).  1997 Vulcan
1997 Anak ng bulkan. 1994 Stranglehold. 1994 Caged Heat II: Stripped of Freedom. 1994: Ultimatum. 1994 One Man Army.  1993 Live by the Fist .  1993 Kickangels .  1993 Kill Zone .  1993 Firehawk (Video).  1992 Beyond the Call of Duty .  1992 Raiders of the Sun .  1991 Field of Fire
 1991 Dune Warriors .  1989 Silk 2 .  1989 Les damnés de Lang Mei .  1989 Nam Angels .  1988 The Expendables .  1988 Fast Gun .  1988 The Sisterhood .  1987 Killer Instinct .  1987 Demon of Paradise .  1987 Apocalypse Warriors .  1987 Eye of the Eagle .  1986 Future Hunters .  1986 Silk . 1986 The Destroyers .  1985 Vengeance .  1985 Les guerriers du futur .  1984 Mission finale .  1983 Caged Fury .  1983 Stryker .  1981 Attaque à mains nues .  1980 Ang galing-galing mo, Mrs. Jones
 1980 Gabi ng lagim ngayon .  1979 Modelong tanso .  1978 Hell Hole .  1978 Le samouraï noir
 1978 Vampire Hookers .  1978 Doble kara .  1976 The Muthers .  1976 3 panthères au combat
 1976 Call Me Direnz! .  1975 Cover Girl Models .  1974 Happy Days Are Here Again .  1974 Carnival Song .  1974 TNT Jackson (as Cirio Santiago) .  1974 Fe, Esperanza, Caridad (segment "Fe") .  1974 El negro .  1973 Savage! .  1973 Impossible Dream .  1973 Fly Me (as Cirio Santiago)
 1971 Once Upon a Time   1969 Panagupa .  1967 Ang limbas at ang lawin .  1967 Alamid .  1967 Bravados .  1967 Marko aintado .  1967 Operation Impossible  . 1966 Tiagong Lundag .  1966 Room 69 .  1966 Wanted: Johnny L .  1966 Kardong Kaliwa .  1966 Pistolero .  1965 Hanapin si Leo Baron
 1965 7 Mukha ni Dr. Ivan .  1965 Darna at ang Babaing Tuod .  1965 Kaaway Bilang Uno .  1964 Scorpio.  1964 Saan Mang Sulok ng Daigdig .  1964 Bakas ng dragon .  1964 Lagalag .  1964 Ging
1963 Magnong Mandurukot .  1963 Los palikeros .  1962 Leon Marahas .  1962 Masikip ang  1962 Walang Susuko .  1961 Mga yapak na walang bakas .  1961 Nagbabagang Lupa .  1961 Konsiyerto ng kamatayan (segment "Lumuluhang Bangkay") .  1960 Sa Ibabaw ng aking Bangkay .  1960 Pagsapit ng Hatinggabi .  1960 Pautang ng Langit .  1960 Sandakot na Alabok .  1959 Hawaiian Boy .  1959 Ultimatum .  1958 Pusang itim .  1958 Laban sa lahat .  1958 Water Lily .  1958 Pepeng Kaliwete
 1957 Pusakal .  1957 Bicol Express . . 1956 Apat na Kasaysayang Ginto (30 Sandali) . 1955 Paltik

vendredi 17 février 2017

DETOUR

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmosphere.com

de Christopher Smith. 2016. U.S.A. 1h41. Tye Sheridan, Emory Cohen, Stephen Moyer, Bel Powley,
Gbenga Akinnagbe, John Lynch, Jenna Saras.

Sortie salles U.S: 20 Janvier 2017. VOD France: 17/02/2017

FILMOGRAPHIE: Christopher Smith est un réalisateur et scénariste britannique, né le 16 Août 1970 à Bristol. 2004: Creep. 2006: Severance. 2009: Triangle. 2010: Black Death. 2011: Paris I'll Kill You. 2014: Get Santa. 2016: Détour.


"Quand un homme a un meurtre sur la conscience, il doit creuser deux tombes. Une pour la victime et une pour lui".

VOD honteusement banni de nos salles obscures, Détour est un thriller vitriolé redoutablement efficace sous le pilier d'une narration déstructurée truffée de fausses pistes et rebondissements. Quasi irracontable, le pitch se focalise sur la virée sauvage d'un couple de marginaux embarquant parmi eux un jeune étudiant indécis d'assassiner son beau-père, faute d'une adultère et du coma de sa mère gravement accidentée par ce dernier. Alternant continuellement flash-back et moment présent afin de confondre deux intrigues en une, Christopher Smith prend malin plaisir à brouiller les pistes, perdre nos repères et dissoudre nos hypothèses sous pivot d'un road movie fétide à la fois oppressant et malsain si bien qu'aucun personnage n'en sortira indemne. Soignant le cadre photogénique de son environnement solaire sur bitume et ses escales dans les bars à effeuilleuse, et empruntant en intermittence le procédé du Split-screen afin d'amplifier la tension des évènements imprévisibles, Christopher Smith redouble d'habileté pour charpenter un récit vénéneux sous l'autorité d'anti-héros en perdition. Le personnage coupable et victimisé (remarquablement endossé par le nouveau talent Tye Sheridan dans un jeu contrarié!) sombrant malgré lui dans une déliquescence morale à la suite d'un concours de circonstances aussi accidentelles qu'infortunées. Emaillé de saillies d'humour noir par le truchement d'un jeu de manipulation et de faux semblant, Detour surprend et captive sans jamais lâcher prise, et ce avec le ressort d'un suspense en roue libre.


Cumulant les réussites à rythme métronomique depuis le début de sa carrière, Christopher Smith nous délivre à nouveau avec Détour une excellente (pochette) surprise tirant parti de sa vigueur et de son efficacité grâce à l'audace d'une narration à la fois vrillée et ramifiée. Pour parachever sur une note suave, on peut notamment prôner la contribution musicale de Pablo Clements, James Griffith et Toydrum insufflant par moment un onirisme élégiaque autour de la destinée (précaire) du trio maudit ! 

P.S: Ne stoppez pas le film durant le générique de fin, une ultime surprise vous est réservé !

Bruno Dussart.

jeudi 16 février 2017

BOULEVARD DE LA MORT

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site www.comingsoon.net

"Death Proof" de Quentin Tarantino. 2007. U.S.A. 1h54. Avec Kurt Russell, Zoë Bell, Rosario Dawson, Vanessa Ferlito, Sydney Tamiia, Tracie Thoms, Rose McGowan.

Sortie salles France: 6 Juin 2007. U.S: 6 Avril 2007

FILMOGRAPHIE: Quentin (Jérome)Tarantino est un réalisateur, scénariste, producteur et acteur américain, né le 27 Mars 1963 à Knoxville dans le Tennessee.
1992: Réservoir Dogs. 1994: Pulp Fiction. 1995: Groom Service (segment: The Man from Hollywood). 1997: Jacky Brown. 2003: Kill Bill 1. 2004: Kill Bill 2. 2007: Boulevard de la Mort. 2009: Inglorious Basterds. 2012: Django Unchained. 2015: Les 8 Salopards.


Echec commercial à sa sortie quand bien même la presse fut plutôt partagée (bien que Wikipedia aurait tendance à me contredire), Boulevard de la Mort fait parti d'un diptyque formé avec le jouissif Planet Terror. Hommages au Grindhouse, ces cinémas de quartiers spécialisés dans les films d'exploitation, Boulevard de la mort est une éloge aux cascadeurs des Seventies cultivant des risques inconsidérés lorsqu'ils furent contraints de doubler les acteurs de séries B dans des bobines d'action aussi décomplexées qu'homériques. Signalant à moult reprises les références du genre que symbolisent La Grande Casse, Larry le dingue, Mary la garce, l'Equipée du Canonbal et Point Limite Zero, Quentin Tarantino dédie son amour à ces productions artisanales avec une sincérité qui impose le respect, sachant notamment que l'infographie des productions mainstream est ici écartée. Car en dépit d'une première partie futilement languissante s'appuyant trop sur la redondance de dialogues interminables, Boulevard de la Mort est un trip aussi biscornu que singulier. Empruntant les genres du psycho-killer et du road movie musclé, Tarantino jumelle ses composantes avec une détonante alchimie. Avec ses têtes d'affiche féminines viriles au caractère bien trempé, le climat d'insolence et de douce folie qui émanent de leur posture rebelle s'avère irrésistiblement attrayant lorsqu'un cascadeur psychotique sexuellement frustré décide de s'en prendre à elles avec couardise.


Scindé en deux parties distinctes, Boulevard de la mort s'avère en premier lieu parfois terrifiant et réaliste lors des impressionnantes scènes de violences graphiques expurgées de dérision. Je cite prioritairement l'anthologique crash automobile filmé sous divers angles (et selon moult points de vue) afin d'ébranler le spectateur immergé dans l'habitacle du véhicule des victimes tout en observant de l'extérieur l'impact cinglant des bolides se percutant de plein fouet ! Gore et sans concession, le climat subitement malsain de cette première partie déroute le spectateur quand bien même au préalable les échanges de discussion des garçonnes réunies autour d'un bar ne manquaient pas de causticité pour brocarder la gente masculine. Outre l'aspect insolite de l'intrigue (un cascadeur sclérosé prend son pied en coursant sur bitume des donzelles avec son véhicule customisé !) et le charisme proéminent de ses comédiennes pétulantes, la présence insidieuse de Kurt Russel s'en donnant à coeur joie en misogyne pervers exacerbe la facture baroque d'un climat hostile préalablement sous-jacent. Quant à la seconde partie beaucoup plus trépidante et littéralement jouissive, Quentin Tarantino nous sert généreusement une course poursuite aussi effrénée que débridée si bien que les rôles subitement inversés vont insuffler chez le spectateur un sentiment de jouissance réactionnaire lorsque nos héroïnes pugnaces auront décidé de contre-attaquer sans répit leur bourreau. Décomplexées, cocasses et déjantées, ses nouvelles héroïnes avides de vitesse et de rancoeur insufflent un sentiment euphorique de liberté lors des affrontements automobiles que Tarantino coordonne avec une maestria ébouriffante ! A l'instar de cette folle séquence au cours duquel l'une des héroïnes se cramponne désespérément sur le capot de sa voiture coursée à vive allure, la main attachée à une lanière !


Visuellement rutilant (Tarantino est pour la 1ère fois de sa carrière directeur de la photo !), référentiel comme de coutume et musicalement entraînant, Boulevard de la mort fait presque office d'ovni dans sa structure hybride et l'aura indicible d'un psycho-killer routier inscrit dans l'excentricité. En dépit de ses maladresses et d'un rythme défaillant (les dialogues néanmoins inventifs et pittoresques s'avèrent ici moins efficaces et percutants qu'au préalable durant sa première partie), Boulevard de la mort est un savoureux moment de peloche toujours plus insolent et frénétique sous le pivot d'un affrontement de survie à perdre haleine. A redécouvrir d'urgence si j'ose dire si bien qu'au second visionnage le spectacle s'avère beaucoup plus apprivoisable ! 

B-D. 2èx

mercredi 15 février 2017

ALLIES

                                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"Allied" de Robert Zemeckis. 2016. U.S.A. 2h05. Avec Brad Pitt, Marion Cotillard, Simon McBurney, Lizzy Caplan, Jared Harris, Matthew Goode, Anton Lesser, August Diehl

Sortie salles France/U.S: 23 Novembre 2016

FILMOGRAPHIE: Robert Zemeckis est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 14 Mai 1951 à Chicago (Illinois). 1978: Crazy Day. 1980: La grosse Magouille. 1984: A la Poursuite du diamant vert.1985: Retour vers le Futur. 1988: Qui veut la peau de Roger Rabbit. 1989: Retour vers le Futur 2. 1990: Retour vers le Futur 3. 1992: La Mort vous va si bien. 1994: Forrest Gump. 1997: Contact. 2000: Apparences. 2000: Seul au monde. 2004: Le Pôle Express. 2007: La Légende de Beowulf. 2009: Le Drôle de Noël de Mr Scrooge. 2013: Flight. 2015: The Walk. 2016: Alliés.


Après nous avoir époustouflé avec le vertigineux The Walk, Robert Zemeckis change de registre pour renouer avec les productions hollywoodiennes d'après-guerre avec Alliés. Un thriller à suspense où se jumellent avec bonheur guerre, romance et espionnage sous l'impulsion d'un couple glamour que forment spontanément Brad Pitt (petit bémol toutefois pour son jeu contracté de mécontentement trop permanent) et l'immense Marion Cotillard (divine de naturel mais aussi bouleversante dans le rôle équivoque d'un potentielle espionne allemande). 1941, Casablanca. Après avoir achevé leur dangereuse mission d'éradiquer un ambassadeur allemand au cours d'une soirée mondaine, un couple d'espions (l'un canadien, l'une française), tombent communément amoureux. Exilés à Londres, ils se marient et donnent naissance à une fille, quand bien même l'un des supérieurs de Max lui annonce que son épouse serait probablement une espionne Nazi ! 


Entièrement bâti sur l'interrogation morale du héros à suspecter l'identité de son ancienne adjointe, Alliés insuffle un suspense remarquablement latent sous le pivot d'une paranoïa exponentielle que celui-ci tente de canaliser. Robert Zemeckis s'appuyant sur la passion des sentiments qu'ils se partagent afin d'intensifier les enjeux dramatiques culminant à une éventuelle exécution sommaire. Visuellement flamboyant, tant pour le sens consciencieux de sa reconstitution historique que de ces décors classieux, Alliés renoue avec les spectacles d'antan afin de contenter le grand public amateur de romance et de suspense quelque peu hitchcockien. Ponctué de scènes d'action percutantes, Zemeckis assure le spectacle avec vigueur sans jamais céder à la gratuité de l'esbroufe si bien que la plupart des éclairs de violence qui irriguent l'intrigue dépendent d'une mission et des motivations rebelles de Max en investigation illégale car en quête de vérité afin de disculper sa dulcinée. Qui plus est, en intensifiant les enjeux humains du couple en crise, Zemeckis se permet de clore son histoire (basée sur des faits réels !) sur une note romantique Spoiler ! littéralement bouleversante si je me réfère à la notion de sacrifice découlant d'un des protagonistes ! Fin du Spoiler.


Sans volonté de révolutionner le genre ou de parfaire un chef-d'oeuvre, Robert Zemeckis se contente de nous servir avec efficacité, formalité et sincérité un formidable divertissement avant tout bâti sur la densité morale du couple ombrageux Brad Pitt/Marion Cotillard impliqué dans la tourmente d'une éventuelle félonie. 

B-D