vendredi 15 mars 2019

Les Chatouilles

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Andréa Bescond et Éric Métayer. 2018. France. 1h43. Avec Andréa Bescond, Cyrille Mairesse, Karin Viard, Clovis Cornillac, Pierre Deladonchamps, Grégory Montel

Sortie salles France: 14 Novembre 2018

FILMOGRAPHIE: Andréa Bescond, née le 12 juin 1979 en Bretagne, est une danseuse, comédienne, metteuse en scène, scénariste et réalisatrice française. 2018: Les Chatouilles.
Éric Métayer est un comédien et metteur en scène de théâtre français né le 23 janvier 1958 à Paris.


"1 enfant sur 5 est victimes de violences sexuelles selon le conseil de l'Europe. 
700 enfants par an meurent des suites de maltraitance en France."
Electro-choc d'une rigueur émotionnelle proche du malaise (tout du moins auprès du public le plus sensible), Les Chatouilles traite de la pédophilie avec un vérisme hallucinant de vérité. Tant auprès de la prestance écorchée vive de la réalisatrice et actrice André Bescond, (elle même victime d'abus sexuels durant son enfance), puisque portant le film sur ses épaules avec une puissance d'expression quasi névralgique; que de la mise en scène aussi bien inventive que chiadée naviguant avec les ruptures de ton sous l'impulsion d'un montage d'une fluidité géométrique (on peut même parler de modèle du genre !). D'ailleurs, à travers la féerie d'un climat tantôt surréaliste dégageant une énergie inouïe autour du personnage instable d'Odette, André Bescond nous radiographie un portrait sensible résolument pulsatile. De par son tempérament à la fois volcanique et pétulant émanant de son trauma infantile et de son appréhension timorée d'hurler sa douleur, son désespoir auprès d'un entourage (familial/amical/conjugal/thérapeutique) contradictoire. Notamment auprès des rapports conflictuels avec sa mère aveuglée par l'orgueil, la condescendance, l'égoïsme et la vanité que Karin Viard (César du Meilleur Second Rôle) exprime avec une conviction infiniment détestable.


Inévitablement bouleversant, parfois même insoutenable sans céder une seule seconde à la complaisance auprès d'un sujet aussi dérangeant (et dieu sait si certaines situations malsaines provoquent la nausée jusqu'au malaise cérébral, voir même viscéral !), Les Chatouilles nous immerge de plein fouet dans l'introspection morale d'Odette (de son enfance martyr à sa maturité troublée) en quête de catharsis. Une danseuse marginale férue d'ambition et tentant d'exorciser ses démons à travers le rythme de son corps épileptique constamment habité par le tempo musical. Ainsi donc, en alternant présent et passé jusqu'à parfois les confondre au sein d'un seul et même plan onirique, les Chatouilles dégage un sentiment de liberté et de légèreté hyper communicatif si bien que la joie "bipolaire" d'Odette nous distille une amère gaieté déstabilisante. Pour autant suffoquant (au sens le plus large) et hyper dérangeant au fil d'un cheminement dramatique davantage ombrageux, les Chatouilles nous met en état de transe de par sa faculté à suggérer de manière aussi singulière que crue le thème de la pédophilie au gré d'un vénéneux climat de liberté permissive. Et ce afin de mieux retranscrire les états d'âme bafoués d'Odette se comportant telle une punkette frondeuse pour pallier  sa détresse morale.


Une Etoile est née.
Sommet d'intensités fébriles à travers la frénésie d'émotions aussi bien vertigineuses que décontractées, Les Chatouilles emprunte de manière audacieusement lunaire les ruptures de ton afin de mieux traduire la fracture morale d'une femme violentée en reconstruction identitaire. Traumatisant autant que libérateur, les Chatouilles a beau être glaçant d'horreur innommable, il n'en demeure pas moins digne, salutaire, arc en ciel car porteur d'espoir auprès du fragile témoignage d'Odette timidement délibérée à transcender son handicap moral pour se forger une seconde renaissance. Attention toutefois à la méchante gueule de bois sitôt le générique écoulé ! 

*Bruno

Récompenses: Festival du cinéma américain de Deauville 2018 : Prix d'Ornano-Valenti pour Andréa Bescond et Éric Métayer
Festival du film de Hambourg 2018 — « Voilà! » : Prix du meilleur film pour Andréa Bescond et Éric Métayer
César 2019:
César de la meilleure adaptation pour Andréa Bescond et Éric Métayer
César de la meilleure actrice dans un second rôle pour Karin Viard

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