de Narcisso Ibañez Serrador. 1969. Espagne. 1h40. Avec Lilli Palmer, Christina Galbo, John Moulder Brown, Pauline Challoner, Tomas Blanco, Candida Losada, Mary Maude.
Sortie salles France: 9 Août 1972
FILMOGRAPHIE: Narciso Ibanez Serrador est un scénariste, producteur et réalisateur uruguayen, né le 4 Juillet 1935 à Montevideo (Uruguay).
1969: La Résidence. 1976: Les Révoltés de l'An 2000
Chef-d'œuvre d'épouvante gothique à l’aura perverse, d’autant plus troublante qu’elle découle du refoulement de jeunes collégiennes (défilé d’actrices particulièrement vénéneuses), La Résidence est un acmé de l’angoisse où l’ombre d’un tueur giallesque rôde derrière les murs d’une geôle scolaire.
Le pitch : Thérèse, nouvelle pensionnaire d’un internat du sud de la France, affronte la discipline sadique d’une directrice qui n’hésite pas à flageller les insolentes. Une nuit, Isabelle disparaît sans laisser de traces après avoir tenté de rejoindre le fils de l’administratrice…
Pour les amoureux d’épouvante séculaire à l’ambiance littéralement ensorcelante, La Résidence est une clef de voûte ibérique, traversée d’une puissance émotionnelle diaphane. Car à travers la claustration d’un pensionnat rongé par l’autoritarisme d’une matriarche (en tenue étriquée façon Ilsa, la louve SS, Lilli Palmer vampirise, éructe d’ambiguïté masochiste), Narciso Ibáñez Serrador nous plonge dans les racines de la perversité, sous l’emprise du conservatisme et de la sociopathie. Préfigurant les figures baroques de Suspiria (scénographie dominée par un univers presque exclusivement féminin, directrice raide comme Miss Tanner, meurtres stylisés), La Résidence dégage ce même magnétisme environnemental, où le mal semble infiltré jusque dans les murs.
En pleine possession de son talent de conteur (cheminement ombrageux en crescendo) et de sa maîtrise technique (caméra fluide, regard aiguisé), Serrador transcende un univers mortifère profondément immersif — autant par l’effronterie de ses personnages que par le point de vue d’un assassin invisible, voyeur permanent. Entre l’ombre du suspect et l’austérité glaçante de l’enseignante, le sentiment d’oppression, latente mais constante, prime sur la cruauté des exactions. Flagellations punitives sur les indociles, meurtres vertigineux sur les plus candides : tout concourt à l’étreinte.
Sur le même mode opératoire que Psychose, Serrador distille une montée progressive du suspense, s’abreuvant d’une menace sourde. Il tisse aussi une relation quasi incestueuse entre la directrice et son rejeton pubère — et va même plus loin qu’Hitchcock, avec une audace plus crue, plus insolente. Le climat malsain instauré par cette directrice saphique (quinquagénaire attirée par les jeunes collégiennes, éprise de sa comparse sadienne) contamine peu à peu les pensionnaires. Fantasmes lors d’une séance de couture, coucheries avec un paysan, scène de douche troublante sous l’œil humide d’une gouvernante : derrière ce portrait de jeunes filles insidieuses se cache un malaise existentiel, nourri par l’intolérance, le fanatisme religieux et le fétichisme d’une mégère interlope.
Le point d’orgue, d’un nihilisme foudroyant, scelle une véritable anthologie de l’effroi obscurantiste (un certain Lucky McKee s’en est peut-être inspiré pour façonner May). Quant à l’ultime image, littéralement dérangeante, elle hantera longtemps au-delà du générique final.
*Bruno
14.11.13. 3èx
Chef-d'oeuvre d'épouvante gothique découvert grâce a toi ... oohhh merci
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