de Jim Mickle. 2013. France/U.S.A. 1h45. Avec Kelly McGillis, Michael Parks, Wyatt Russell, Ambyr Childers, Julia Garner, Bill Sage.
Sortie salles France: Prochainement. U.S: 18 Janvier 2013
FILMOGRAPHIE: Jim Mickle est un réalisateur et scénariste américain.
2006: Mulberry Street. 2010: Stake Land. 2013: We are what we are.
Jim Mickle nous avait déjà surpris avec Mulberry Street, un premier film maladroit et redondant mais prometteur dans sa vision apocalyptique d’un monde contaminé par un mystérieux virus. Son second essai, Stake Land, proposait un survival post-apo perfectible mais plein de bonnes intentions, réactualisant le mythe vampirique tout en dressant le portrait de fuyards farouches. Avec We Are What We Are, le réalisateur franchit un palier dans sa maîtrise, pour raconter une histoire de cannibalisme ancrée dans notre époque contemporaine : faute d’une vieille tradition, une famille doit perpétuer, une fois par an, un acte de cannibalisme pour assurer la survie de ses descendants. Mais une tempête torrentielle dévoile à la police des indices - des ossements retrouvés au bord d’une rivière.
Partant de l’idée originale du film mexicain Ne nous jugez pas, Mickle réexploite intelligemment le filon, sans céder à la mode du remake. Les 45 premières minutes peinent à démarrer (n'y voyez rien de péjoratif), le rythme languissant et l’ambiance dépressive accentuant le sentiment de désuétude, mais la narration gagne en densité dans la caractérisation interlope d’une famille religieuse. Avec l’élégance d’une photo limpide aux teintes grises et blanches, We Are What We Are explore le fondamentalisme sous l’autorité d’un patriarche entièrement voué à Dieu et à sa théorie du cannibalisme. Rongées par le chagrin depuis la mort accidentelle de Mme Parker, ses deux filles et le fils cadet doivent se confronter à son intransigeance pour perpétuer cette tradition filiale.
Le film exploite habilement ce thème grand-guignolesque pour dénoncer l’intégrisme, mais le traite surtout avec une densité psychologique, révélant la posture démunie des enfants et l’isolement réaliste de cette lignée recluse. Mickle s’attarde sur le fardeau désespéré des sœurs Parker, dont le jeu glaçant et anémique traduit la fragilité ; elles obéissent au père pour assassiner de sang-froid une jeune captive, mais rongées de remords et de honte, leur pudeur renaissante semble un pas vers la rédemption - d’autant que l’innocence du petit frère reste à protéger. Émaillé de séquences-chocs inattendues, We Are What We Are malmène notre empathie et suscite un malaise latent face au repli des sœurs. Porté par une musique monotone, le film instaure un climat diaphane en osmose avec la pluie battante et la rivière jonchée d’ossements. Plongé dans l’existence esseulée de cette famille, le spectateur partage, à l’instar des deux filles, l’abandon et la solitude, même si l’une d’elles cherche un réconfort dans les bras de l’adjoint du shérif. Et Mickle pousse le drame jusqu’au paroxysme, jusqu’à l’affrontement final où l’horreur éclate, ébranlant les plus sensibles.
15.11.13
28.08.25.
Le film exploite habilement ce thème grand-guignolesque pour dénoncer l’intégrisme, mais le traite surtout avec une densité psychologique, révélant la posture démunie des enfants et l’isolement réaliste de cette lignée recluse. Mickle s’attarde sur le fardeau désespéré des sœurs Parker, dont le jeu glaçant et anémique traduit la fragilité ; elles obéissent au père pour assassiner de sang-froid une jeune captive, mais rongées de remords et de honte, leur pudeur renaissante semble un pas vers la rédemption - d’autant que l’innocence du petit frère reste à protéger. Émaillé de séquences-chocs inattendues, We Are What We Are malmène notre empathie et suscite un malaise latent face au repli des sœurs. Porté par une musique monotone, le film instaure un climat diaphane en osmose avec la pluie battante et la rivière jonchée d’ossements. Plongé dans l’existence esseulée de cette famille, le spectateur partage, à l’instar des deux filles, l’abandon et la solitude, même si l’une d’elles cherche un réconfort dans les bras de l’adjoint du shérif. Et Mickle pousse le drame jusqu’au paroxysme, jusqu’à l’affrontement final où l’horreur éclate, ébranlant les plus sensibles.
En cinéaste avisé, réfractaire aux artifices du divertissement, Jim Mickle livre avec We Are What We Are son film le plus abouti et original, dans une démarche auteurisante portée par une interprétation hors pair. Le résultat est une œuvre austère, emplie de mélancolie et de silences lourds, à mi-chemin entre le conte social - le père, ogre insatiable - et l’horreur extrême, où la barbarie hallucinée surgit face à l’achèvement punitif. Fort et poignant.
— le cinéphile du cœur noir
15.11.13
28.08.25.
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