mercredi 14 août 2013

La Promise / The Bride

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site flickfacts.com

de Franc Roddam. 1985. Angleterre. 1h58. Avec Sting, Jennifer Beals, Anthony Higgins, Clancy Brown, David Rappaport, Geraldine Page, Cary Elwes.

Sortie salles France: 4 Septembre 1985. U.S: 16 Août 1985

FILMOGRAPHIE: Franc Roddam est un réalisateur, scénariste et producteur anglais, né le 29 Avril 1946.1977: Dummy (télé-film). 1979: Quadrophenia. 1983: La Loi des Seigneurs. 1985: La Promise. 1988: War Party. 1991: K2, l'ultime défi.


"Un attachant conte romantique injustement oublié, pour ne pas dire parfois méprisé. Et c'est bien dommage tant la déclinaison demeure rigoureusement sincère et sensuelle."
Déclinaison de la Fiancée de Frankenstein, la Promise est un joli conte romantique hélas resté dans l'oubli depuis sa sortie au milieu des années 80. Avec, en têtes d'affiche, le chanteur Sting et la débutante Jennifer Beals (révélée 2 ans au préalable dans Flashdance), il y avait de quoi rester dubitatif à l'annonce de cette réactualisation d'un des plus célèbres mythes de l'épouvante. Et pourtant, avec une certaine ambition esthétique et une volonté narrative de se démarquer du roman de Mary Shelley, le britannique  Franc Roddam réalise un divertissement particulièrement attachant autour de ces protagonistes molestés, véritables moteurs du récit. Le PitchAlors que le baron Frankenstein vient de créer une compagne pour sa créature, une violente altercation s'ensuit entre les deux hommes suite à une trahison. Durant cette confrontation, un incendie se propage au sein du laboratoire permettant à la créature de s'échapper dans la nature. Sur son chemin bucolique, il sympathise avec un nain avec qui il décide de collaborer pour pouvoir travailler dans un cirque. Pendant ce temps, la promise découvre les joies de l'existence en s'éduquant auprès des enseignements du docteur. Mais un jeune dom Juan commence à s'intéresser à cette jolie inconnue venue de nulle part. Photo éclatante, costumes élégants, décors d'architecture grandioses régis autour d'une magnifique nature verdoyante du Sud de la France, La Promise s'alloue d'un soin formel pour nous séduire avec cette nouvelle confrontation entre un Baron condescendant et ses deux créatures modèles. Dans un premier temps, le réalisateur s'attache à nous décrire le cheminement indécis du monstre rapidement épaulé d'un nain affable avec qui il amorcera une complicité amicale. Toutes les séquences où nos deux compagnons sont solidaires de leur commune confiance sont soigneusement illustrées avec un sens pittoresque et chaleureux (le feu de camp autour du poulet grillé, la beuverie dans l'auberge, les représentations du numéro de trapèze) mais aussi dramatique pour leurs mésaventures à venir (leur séparation prévisible s'avérant poignante) avec un patron de cirque sans scrupule. 


Bien qu'en parallèle, d'une séquence à l'autre, nous suivons également l'apprentissage d'Eve, la nouvelle créature entretenue par un Frankenstein enseignant, adepte d'une éducation inscrite dans l'indépendance féministe. Une idéologie contradictoire si bien que le réalisateur nous caractérise ensuite un baron autoritaire particulièrement jaloux et terriblement possessif depuis qu'un don Juan eut décidé de courtiser sa jeune promise. A travers ce rôle antagoniste, Sting s'emploie avec cynisme à exprimer le plus naturellement ses sentiments orgueilleux dans une silhouette angélique hautaine (visage pastel et chevelure dorée). Peut-être le plus grand rôle de sa carrière. En créature soumise mais toujours plus frondeuse, Jennifer Beals s'approprie son rôle avec sobriété d'une sensualité immaculée en abordant un jeu contestataire pour  y défendre son autonomie existentielle impartie au féminisme. Enfin, le robuste Clancy Brown se camoufle sous l'apparence du monstre avec un maquillage modéré afin d'y représenter sa physionomie discrètement difforme. La encore, on se laisse facilement convaincre par ses expressions dociles mises en valeur par un jeu de mime jamais ridicule. Il faut le souligner. Par conséquent, autour de ce trio infortuné, Franc Roddam parvient à nous brode un conte fantastique où la romance occupe une place de choix (la quête amoureuse et désespérée de la créature pour la promise) mais auquel l'autorité d'hommes égoïstes, machistes, perfides (le baron dictateur et le séducteur usurpateur) vont venir compromettre sa nature virginale. A la résolution finale, on s'étonne du happy-end prodigué par le réalisateur tout en  approuvant l'audace de son souffle romantique (jamais sirupeux) impartie à deux créatures candides auquel l'apparence ne dispose plus d'intérêt.


Soigneusement mis en scène (l'anthologie spectaculaire accordée au prélude), formellement poétique (la festivité du bal de confettis confine au sublime, aussi concise soit-elle) et largement privilégié de la présence notable de comédiens dirigeant la narration dans une psychologie torturée, La Promise  demeure indiscutablement sincère et attachant à s'approprier le mythe en affichant les nobles valeurs de l'amour, de l'éducation et de la tolérance sur fond d'émancipation féminine. A redécouvrir sans préjugé. 

*Bruno
16.02.23. 4èx
14.08.13. 

mardi 13 août 2013

The last will and Testament of Rosalind Leigh

                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site solarvip.info

de Rodrigo Gudino. 2012. Canada. 1h24. Avec Aaron Poole, Vanessa Redgrave, Julian Richings, Stephen Eric McIntyre, Mitch Markowitz.

FILMOGRAPHIE: Rodrigo Gudino est un réalisateur, scénariste et producteur canadien. 
The last will and Testament of Rosalind Leigh est son premier long-métrage.


Première oeuvre de Rodrigo Gudino directement passée par la case "DTV", The last will and Testament of Rosalind Leigh risque sévèrement de diviser le cinéphile averti et d'ennuyer le public lambda par sa lenteur imposée auprès d'une ambiance latente dénuée d'artifices. 

Suite à l'héritage de sa mère récemment disparue, Léon se retrouve isolé dans sa vaste demeure remplie de sculptures divines. Rapidement, d'étranges évènements vont ébranler la tranquillité du nouvel hôte réfutant toute croyance religieuse. 


Sous le concept éculé d'un cas de hantise, ce petit essai indépendant n'a pas pour ambition de renouer aux traditionnelles apparitions fantomatiques à base d'effets-spéciaux spectaculaires et/ou de gore explicite. Le réalisateur préférant se focaliser sur l'aura spirituelle d'une demeure opaque et de nous y balader parmi la présence d'un non-croyant. Avec son rythme languissant quasi fastidieux, nombre de spectateurs risquent fort de décrocher l'expérience par son absence de surprises émanant d'un scénario linéaire uniquement inscrit dans la foi religieuse. Sous l'entremise d'un athée ayant préalablement abdiqué sa propre mère, le récit nous plonge dans une promenade existentielle auquel des esprits ont décidé de le narguer afin de tester sa rationalité. Esthétiquement soigné dans ses décors d'architecture et ses éclairages pastels et assidûment réalisé, The last will and Testament of Rosalind Leigh dégage un charme d'étrangeté où le poids du silence et de la solitude ont une place primordiale. Par intermittence, il faut aussi relever le côté horrifique de quelques rares apparitions monstrueuses provoquant une certaine appréhension dans leur physionomie indiscernable. Je parle bien sûr de la créature animale qui hante la forêt où celles qui ont réussi à s'engouffrer dans certaines pièces de la demeure.  
Néanmoins, pour apprécier à sa juste valeur cette oeuvre originale difficilement accessible mais pleine de bonnes intentions, il faut indubitablement s'y préparer et accepter sa monotonie perpétuelle pleinement assumée par un réalisateur en pleine réflexion mystique. Y'a t'il une vie après la mort ? l'âme y survit-elle ? Dieu est-il responsable de l'univers et notre entité corporelle ? 
Avec simplicité et sensibilité, The last will and Testament of Rosalind Leigh adopte une démarche personnelle pour tendre à prouver qu'il suffit de croire à son destin et aimer son prochain pour pouvoir perdurer après le trépas. 
Après cette expérience ésotérique avec les voix d'outre-tombe et notre questionnement sur la foi, le film se clôt sur un rebondissement inopiné chargé d'une mélancolie incurable. Véritable moment d'émotion d'une intensité toute fragile, le poème prend subitement une ampleur tragique pour mettre en exergue la douleur insurmontable de la solitude ATTENTION SPOILER !!! en relation avec une démission parentale FIN DU SPOILER. Avec le poids de ce twist soudainement révélé, le spectateur semble perdre pied avec la réalité (c'est à dire tout ce qu'il venait d'endurer avec Leon !) et tente de se remémorer son cheminement pour mieux comprendre les tenants et aboutissants du point de vue d'un autre témoin éloquent. 


Dieu e(s)t la solitude
Languissant et laborieux mais inévitablement étrange et fantasmatique, The last will and Testament of Rosalind Leigh ne pourra sans doute séduire que l'amateur de curiosité singulière pour peu qu'il ait été averti de son rythme ardu et de son absence de terreur escomptée. Sa réflexion spirituelle sur notre foi en l'au-delà et l'importance divine impartie à la reconnaissance de l'amour ne nous laissent pas indifférents et nous bouleversent avec l'accablement d'une conclusion funèbre !    

Dédicace au geek canadien indétrônable, Steven Lefrançois !
13.08.13
Bruno Matéï


lundi 12 août 2013

NO PAIN NO GAIN

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site nopainnogain.fr

de Michael Bay. 2013. U.S.A. 2h09. Avec Mark Wahlberg, Dwayne Johnson, Anthony Mackie, Ed Harris, Tony Shalhoub, Ken Jeong, Rob Corddry.

Sortie salles France: 11 Septembre 2013. U.S: 26 Avril 2013

FILMOGRAPHIE: Michael Bay est un réalisateur et producteur américain, né le 17 Février 1965
1995: Bad Boys. 1996: Rock. 1998: Armageddon. 2001: Pearl Harbor. 2003: Bad Boys 2. 2005: The Island. 2007: Transformers. 2009: Transformers 2. 2011: Transformers 3. 2013: No Pain No Gain.


Ce sont les choses simples qui comptent dans la vie. Daniel voulait seulement être comme tout le monde. Tous ces gens qui veulent leur part du rêve américain.

"Tout ce que je voulais c'était avoir la même chose que tous les autres. Pas plus, mais pas les miettes que j'avais l'habitude d'avoir. Bon j'ai vraiment tenté le tout pour le tout vous savez ! Mais pendant un moment j'ai vécu comme j'ai toujours voulu vivre. J'étais l'un de vous et ça faisait du bien. Les gens me voyaient enfin comme je m'voyais et on ne peut rien demander de plus. Mais j'ai demandé plus ! A un moment donné ça ne m'a plus suffit d'être l'égal des autres. Je voulais être mieux que les autres. Et c'est le meilleur moyen de se faire mal. Ca ne veut pas dire qu'on baisse les bras. On se repose, on panse ses plaies et on reprend les altères. Je sais que la vie va me donner une autre série et je vais y aller à fond parce que je m'appelle Daniel Lugo et je vis pour la culture physique !"

Spécialiste de l'actionner bourrin décérébré, Michael Bay s'accorde une pause avec No Pain No Gain, comédie caustique tirée d'un fait-divers improbable survenu à Miami entre 1994 et 1995. Le film relatant les vicissitudes incongrues d'un groupe de bodybuilders délibérés à escroquer des gens fortunés par simple esprit de cupidité. Leur leader, un manager culturiste utopiste, finira par mener ses deux comparses vers une dérive meurtrière particulièrement crapuleuse.


Prétendre à dire que No Pain No Gain s'avère le meilleur film de son auteur n'est pas pléthorique tant cette comédie débridée surprend par son judicieux rapport entre humour noir et dramaturgie. Sans rire aux éclats (à quelques gags près !), l'aspect pittoresque des multiples péripéties engagées par nos pieds nickelés nous amuse par leurs inépuisables maladresses émanant d'une totale inconscience. Avec sa mise en scène alerte et inventive, on sent un Michael Bay particulièrement inspiré à retranscrire l'incroyable odyssée de ces bodybuilders compromis au kidnapping et l'assassinat par simple motivation du gain. Outre son rythme parfaitement équilibré n'accordant pour le coup aucune outrance spectaculaire (l'action s'avère discrète et clairsemée !), le film joue intelligemment sur notre empathie accordé aux protagonistes rétrogrades avec une antinomie contraignante. Puisque cet alliage de délire caustique et d'authenticité dramatique nous distille une certaine forme de malaise toujours plus palpable au fil de leurs exactions dénuées de morale (si ce n'est une éthique opportuniste inscrite dans la mégalomanie individuelle).
Mais outre la qualité de son scénario fortuit fondé sur l'arrivisme et l'apparence du luxe, la réussite de ce divertissement peu commun est notamment impartie à la complicité amicale de comédiens à la verve impayable ! Dans celui du dirigeant inébranlable, Mark Whalberg fulmine avec spontanéité pour dicter ses ambitions cupides érigés sous le symbole du "rêve américain". Dans celui de l'ancien détenu dévot à la bonhomie nigaude, Dawyne Johnson lui partage la vedette avec une dérision irrésistible tant le comédien s'amuse à se parodier de son personnage viril à la posture herculéenne. Enfin, le troisième allié est incarné par Anthony Mackie, jeune black reconverti dans la musculation pour l'handicap de son impuissance sexuelle, mais en pleine ascension amoureuse avec une secrétaire ventripotente.


L'Ivresse de l'Argent
Satire acerbe du rêve américain et des paillettes de silicone pour la cristallisation d'un empire en carton, No Pain No Gain détonne et bouscule le spectateur dans son cocktail explosif de situations scabreuses et de délires saugrenues. Et il faut remonter à The Island pour retrouver l'éloquence d'un Michael Bay aussi leste, parodiant ici l'odyssée grossière d'un impensable fait-divers ! 

12.08.13
Bruno Matéï

vendredi 9 août 2013

Drugstore Cowboy

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site tvclassik.com

de Gus Van Sant. 1989. U.S.A. 1h40. Avec Matt Dillon, Kelly Lynch, James LeGros, Heather Graham, William S. Burroughs.

FILMOGRAPHIE: Gus Van Sant est un réalisateur, directeur de photo, scénariste et musicien américain, né le 24 Juillet 1952 à Louisville dans le Kentucky. 1985: Mala Noche. 1989: Drugstore Cowboy. 1991: My Own Private Idaho. 1993: Even Cowgirls get the blues. 1995: Prête à tout. 1997: Will Hunting. 1998: Psycho. 2000: A la rencontre de Forrester. 2002: Gerry. 2003: Elephant. 2005: Last Days. 2007: Paranoid Park. 2008: Harvey Milk. 2011: Restless. 2012: Promised Land.


Adapté du livre éponyme de James Fogle, Drugstore Cowboy retrace l'équipée échevelée de deux couples de junkies adeptes des cambriolages auprès de pharmacies et hôpitaux du coin afin de se ravitailler en drogue. Mais la mort par overdose d'une de leur camarade contraint leur leader de décrocher pour s'éloigner vers un centre de désintoxication. En réfutant les habituelles conventions du genre, Gus van Sant réalise ici un drame social peu commun à travers son traitement infligé à l'addiction des psychotropes, et ce en privilégiant un climat hermétique émaillé de plages de poésie (les délires éthérés de Bob sous l'emprise des pilules bleues) et d'une certaine dérision (la cohérence de ses superstitions et ses duperies amorcées contre les flics). En l'occurrence, pas de toxico famélique en état de manque ni de deal entre acheteurs et encore moins de sniff de cocaïne ou d'héroïne. Mais une équipe soudée de jeunes marginaux particulièrement véloces dans leur habileté à forcer les portes de pharmacies ou d'hôpitaux afin de se procurer médocs et pilules antalgiques. Ainsi, avec une rare intensité et un semblant de véracité fascinant, nous suivons dans un premier temps l'escapade délinquante de ce groupe de junkies mené par un leader imperturbable. Le réalisateur nous relatant leurs tribulations frénétiques avec souci de réalisme introspectif pour mettre en exergue leur angoisse paranoïaque émanant d'une routine insécuritaire. Dans la mesure où nous sommes véritablement immergés dans leur contrainte de s'adonner aux fraudes de stupéfiants et diverses magouilles pour déjouer les perquisitions policières. 


Porté à bout de bras par la prestance exceptionnelle de Matt Dillon, Drugstore Cowboy est érigé sous sa hiérarchie avec une stoïcité implacable afin de mieux régir son groupe d'associés. En junkie superstitieux (il craint la malédiction des chapeaux, des chiens et des miroirs !) redoublant de risques insensés, l'acteur est notamment habité d'une lassitude sous-jacente dans sa quête d'abdiquer son existence illusoire bâtie sur le mensonge et le vol. Spoil ! Enfin, la dernière partie, plus abstraite et moins accessible, nous illustre la repentance de Bob afin de fuir sa sombre destinée à la suite du décès par overdose de sa collègue nadine. De retour vers sa contrée, il renoue avec une vieille connaissance, un philosophe décrépit toujours avide de shoot à l'hydromorphone (dérivé semi-synthétique de la morphine établi sous l'enseigne de Dilaudid), et tente de retrouver une existence docile dénuée d'oppression. Avec une ambition personnelle, Gus Van Sant nous illustre son sevrage d'une manière hétérodoxe en évitant une fois encore le traitement académique. Délibéré à changer de vie, Bob renoue avec l'existence banale du prolétaire dans l'étroitesse de son appartement en espérant peut-être un jour revoir débarquer sa dulcinée. Fin du Spoil. Sur le papier, cela peut paraître aseptique mais Gus Van Sant l'arbore avec l'art de sa mise en scène.  Avec lucidité abstraite, il met en avant la délicate réinsertion du malade dans une société fluctuante (nous sommes en 1971 et la politique commence à exploiter le sujet de la drogue pour leur campagne électorale) et cette (fausse) liberté de renouer avec une existence morose. En résulte une ambiance diaphane difficilement discernable et un sentiment de nonchalance suggéré par l'ancien drogué pour ses années de galère dépendantes d'emprise de drogues. La quête d'un semblant d'épanouissement mais l'essentialité de pouvoir vivre libre avant que le passé des mauvaises fréquentations ne revienne faire surface...


J'étais toujours en vie. J'espère qu'ils m'empêcheront de mourir...
Superbement mis en scène par un auteur inspiré d'expérimentation onirique et de souci d'authenticité pour l'encadrement familier géré autour des quatre junkies en perdition, Drugstore cowboy confine au chef-d'oeuvre désabusé. Le plus singulier des drames existentiels abordant sans effet de fioriture le tabou de la drogue avec un pouvoir d'immersion prédominant. 

*Bruno
09.08.13. 3èx


jeudi 8 août 2013

L'ANGE DE LA VENGEANCE (MS. 45)

                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site blackcatboneseditions.blogspot.com

d'Abel Ferrara. 1981. U.S.A. 1h20. Avec Zoë Lund, Albert Sinkys, Darlene Stuto, Helene McGara, Nike Zachmanoglou, Abel Ferrara.

Sortie salles France: 18 Août 1982. Sortie salles U.S: 24 Avril 1981

FILMOGRAPHIE: Abel Ferrara est un réalisateur et scénariste américain né le 19 Juillet 1951 dans le Bronx, New-York. Il est parfois crédité sous le pseudo Jimmy Boy L ou Jimmy Laine.
1976: Nine Lives of a Wet Pussy (Jimmy Boy L). 1979: Driller Killer. 1981: l'Ange de la Vengeance. 1984: New-York, 2h du matin. 1987: China Girl. 1989: Cat Chaser. 1990: The King of New-York. 1992: Bad Lieutenant. 1993: Body Snatchers. Snake Eyes. 1995: The Addiction. 1996: Nos Funérailles. 1997: The Blackout. 1998: New Rose Hotel. 2001: Christmas. 2005: Mary. 2007: Go go Tales. 2008: Chelsea on the Rocks. 2009: Napoli, Napoli, Napoli. 2010: Mulberry St. 2011: 4:44 - Last Day on Earth.


Inspiré par les célèbres Un Justicier dans la Ville et Crime à FroidAbel Ferrara nous propose en 1981 un rape and revenge singulier dans son alliage de violence crue (viol sordide exécuté au coin d'une décharge, citadins froidement canardés par balles !), d'horreur et de fantastique (son point d'orgue onirique au sein du bal costumé est entaché de la folie meurtrière d'une nonne vengeresse !). 
Autour de la présence de la néophyte Zoë Lund (née Zoë Tamerlis), l'Ange de la vengeance révèle une actrice d'une beauté charnelle voluptueuse auquel son magnétisme trouble est exacerbé d'un regard glacial inscrit dans le mutisme. Profondément traumatisée à la suite de son double viol, cette jeune couturière va sombrer dans une folie meurtrière irréversible après avoir découpé en morceau sa première victime. En ange exterminatrice, Thana décide de s'afficher en vamp lascive dans un New-York décrépit afin d'attirer les mâles lubriques issus des bas-quartiers. 


Avec réalisme glauque et souci documentaire pour mieux retranscrire l'urbanisation d'un New-York insalubre, Abel ferrara redouble de provocation en iconisant une féministe atteinte d'aphasie. Une justicière des temps modernes délibérée à reprendre sa revanche sur les machistes impénitents avec la violence d'un calibre 45. Auparavant objet de pureté dans sa virginité introvertie, Thana décide aujourd'hui de se substituer en nonne véreuse. L'aura de souffre qui émane de ses exactions mesquines, l'accoutrement aguicheur de sa posture sensuelle et la figure symbolique allouée à une religieuse maléfique marquent durablement les esprits dans un pouvoir de fascination diaphane. La puissance d'évocation de ces images blasphématoires (Thana embrassant d'un rouge à lèvre scintillant chaque balle de son revolver) est d'autant plus irréelle qu'Abel Ferrara utilise une dissonance musicale particulièrement dérangeante dans ces échos à répétition. Parfois, il s'emploie également à provoquer un malaise tangible quand un déséquilibré dépressif décide d'emprunter l'arme de son interlocutrice pour se suicider d'une balle dans la tête devant son témoignage médusé ! Sans concession, Ferrara perdure dans l'oppression avec un final anthologique au paroxysme de l'horreur. Au sein d'un bal costumé arborant la fête d'Halloween, il improvise la technique du slow motion afin de chorégraphier une tuerie sanglante perpétrée par notre nonne endiablée ! Spoiler !!! Et ce juste avant que cette dernière, mortellement blessée par un tiers, s'exclame de douleur pour lui proférer le mot "soeur" ! Fin du SPOILER


Sous l'impulsion archétypale de Zoë Tamerlis et autour du thème religieux violemment singé, Abel Ferrara transcende l'adaptation d'un rape and revenge féministe. Emaillé de fulgurances visuelles par le biais d'une maîtrise technique assez inventive, l'Ange de la vengeance symbolise le culte d'une chasteté sous l'égide d'une vengeance criminelle.

08.08.13. 4èx
B-M

mercredi 7 août 2013

LA BETE DE GUERRE (The Beast of War). Meilleur film du Festival international du film de Cleveland, 1988

                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemapassion.com

de Kevin Reynolds. 1988. U.S.A. 1h51. Avec George Dzundza, Jason Patric, Steven Bauer, Stephen Baldwin, Don Harvey, Kabir Bedi, Erick Avari.

Sortie salles: 7 Septembre 1988

Récompense: Meilleur film du Festival international du film de Cleveland, 1988.

FILMOGRAPHIE: Kevin Reynolds est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 17 Janvier 1952 à San Antonion, Texas.
1985: Une Bringue d'enfer. Histoires Fantastiques (Epis, vous avez intérêt à me croire). 1988: La Bête de Guerre. 1991: Robin des Bois, prince des voleurs. 1993: Rapa Nui. 1995: Waterworld. 1998: 187 Code Meurtre. 2002: La Vengeance de Monte Cristo. 2006: Tristan et Yseult.


Quand, blessé et gisant dans la plaine Afghane, tu vois bondir la femme coupeuse d'entrailles. Saisis ton fusil, fais-toi sauter la cervelle. Et rends-toi à Dieu en soldat.
Rudyard Kipling

Bien avant sa réactualisation de Robin des Bois et le mésestimé Waterworld, Kevin Reynolds s'était tenté au film de guerre avec La Bête de Guerre. D'après une pièce de théâtre de William Mastrosimone, le pitch nous relate l'expédition meurtrière d'un groupe de soldats russes équipés d'un char d'assaut pour massacrer un village afghan durant la guerre en 1981. Egarés en plein désert aride, ils vont devoir faire face à la résistance des Moudjahiddins, délibérés à se venger avec une rancoeur inébranlable. Mais durant cette traque sans relâche, un conflit d'autorité éclate entre le soldat Koverchenko et son commandant tyrannique, Daskal. 


Avec la densité d'un scénario charpenté multipliant les revirements fortuits, la Bête de Guerre joue la carte du film d'action en privilégiant l'humanité conflictuelle entre ethnie distincte. Tant du côté des russes auquel un commandant opiniâtre va risquer d'entraîner son équipe vers une déroute que du côté des Moudjahiddins, afghans motivés par la vengeance mais dont leurs femmes rebelles sont encore plus engagées d'un fiel expéditif. Au prémices de son prologue ultra violent, une inévitable empathie se créé avec le spectateur, témoin malgré lui d'un carnage commis par les soviets sur des civils afghans. La faute en incombe principalement à l'autorité impitoyable du leader particulièrement égotiste et sanguinaire. Alors qu'une course poursuite est entamée à travers le désert entre afghans et russes pour regagner leur frontière, le soldat Koverchenko finit par discerner la hiérarchie dictatoriale de son commandant. Leur discorde va d'ailleurs éclater à la suite de la mort de l'un d'eux volontairement exécuté par ce dernier ! Abandonné des siens et prisonnier des rebelles, Koverchenko va devoir négocier sa survie auprès des Moudjahiddins et élaborer parmi leur soutien sa propre vendetta. Cet enchaînement de situations improvisées où un jeune soldat russe est contraint de se solidariser avec le camp ennemi donne lieu à une réflexion sur la vengeance et l'absurdité des conflits guerriers où la moralité n'a plus lieu d'être. Car comme l'évoquera Koverchenko, il n'y a pas de bons soldats dans une sale guerre ! Seulement des anti-héros combattant l'ennemi avec une haine contagieuse pour le prix du déshonneur ! Avec maîtrise technique et emploi leste de sa scénographie, Kevin Reynolds sait distiller le danger sous-jacent et dose habilement l'action avec une efficacité compromise aux motivations mesquines de nos militaires. Parfois atmosphérique, l'ambiance solaire et crépusculaire renforce l'aspect photogénique du désert au son feutré d'un score envoûté. Enfin, la présence dantesque, quasi indestructible du fameux tank auquel nos soldats russes ont l'aubaine de se protéger renforce le côté homérique d'une situation de crise où l'enjeu n'est qu'une question de survie. 


Spectaculaire, intense et épique, La bête de Guerre fait la part belle à l'aventure belliqueuse et l'humanité de ces résistants pugnaces confrontés entre le devoir de justice par leur rancoeur meurtrie mais aussi l'amnistie chez la repentance du rival. 

07.08.13
B-M

mardi 6 août 2013

Le Monstre du Train / Terror Train

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Roger Spotiswoode. 1980. U.S.A/Canada. 1h37. Avec Jamie Lee Curtis, Ben Johnson, Hart Bochner, David Copperfield, Derek McKinnon, Sandee Currie.

Sortie salles France: 17 Juin 1981 (Int - 18 ans). U.S: 3 Octobre 1980

FILMOGRAPHIERoger Spottiswoode est un réalisateur, monteur, producteur et scénariste canadien, né le 5 Janvier 1945 à Ottawa (Canada). 1980: Le Monstre du Train. 1981: 200 000 Dollars en cavale. 1983: Under Fire. 1986: La Dernière Passe. 1988: Randonnée pour un Tueur. 1989: Turner et Hooch. 1990: Air America. 1992: Arrête ou ma mère va tirer ! 1994: Mesmer. 1997: Demain ne meurt jamais. 2000: A l'aube du 6è jour. 2003: Spinning Boris. 2005: Ripley Under Ground. 2007: J'ai serré la main du Diable. 2008: Les Orphelins de Huang Shui.


En plein essor du psycho-killer, le néophyte Roger Spottiswoode (futur réal d'Under Fire) profite du filon commercial lancé par Carpenter avec Halloween pour entreprendre ses premières armes derrière la caméra. Slasher académique au canevas éculé émaillé de situations décousues (à l'instar du procès intenté au magicien en guise de culpabilité), le Monstre du Train réussit néanmoins à sortir son épingle du jeu de par sa scénographie restreinte allouée au chemin de fer superbement exploité lors du réveillon de la nouvelle année. Qui plus est, afin d'y pimenter l'horreur ludique et sortir quelque peu des sentiers battus, le réalisateur nous caractérise habilement un tueur fou multiforme à travers l'accoutrement de ses déguisements afin de mieux duper ses prochaines victimes (et le spectateur). Enfin, c'est la scream queen des eighties, Jamie Lee Curtis, qui endosse à nouveau l'archétype de la victime pourchassée par le maniaque avec un sens de bravoure pugnace véritablement convaincant. Ainsi, en dépit d'une première demi-heure un peu languissante (se contenter d'observer les pitreries de jeunots en état d'ébriété la veille du nouvel-an pendant qu'un magicien - David Copperfield himself - compose ses tours de prestige), la modeste série B finit par prendre son envol au fil du troisième homicide.


C'est à dire au moment où le conducteur de train (le vétéran Ben Johnson se livre avec probité) s'aperçoit que deux crimes ont été sauvagement perpétrés et lorsque Alana (Jamie Lee Curtis) présage le danger en étroit rapport avec une réminiscence intrinsèque. Pour ce faire, le prologue nous eut averti qu'à la suite d'une macabre blague de potache initiée de son gré, un jeune puceau timoré se retrouva finalement interné en cellule psychiatrique pour raison traumatique. Trois ans plus tard, celui-ci refoulé décide ainsi d'accomplir sa vengeance auprès de ses anciens camarades, accoutrés pour l'occasion festive de masques de carnaval dans l'enceinte d'un train. Sur ce dernier point, Roger Spottiswoode exploite donc à bon escient le cadre restreint de ces compartiments si bien qu'un effet de claustration nous est habilement rendu. Les courses poursuites amorcées à travers les corridors et les altercations en interne des chambres provoquant d'autre part une certaine angoisse en dépit de quelques incohérences téléphonées (telle cette victime préalablement appréhendée par les pieds et n'apportant ensuite aucune résistance au meurtrier après avoir réussi à s'en dépêtrer). Toujours affublé d'un déguisement distinct, notre tueur insuffle notamment une petite tension paranoïde auprès des voyageurs toujours plus contrariés par sa présence insidieuse ! D'ailleurs, le final haletant entamé avec Alena nous accorde un rebondissement inopiné vis à vis de sa supercherie d'y duper à nouveau son entourage sous un habile camouflage !


Psycho killer mineur au sein de la décennie 80, Le Monstre du Train reste toutefois suffisamment efficace, sympathique, atmosphérique et donc quelque peu ombrageux pour contenter l'amateur en dépit d'une première partie un tantinet inféconde. La présence lascive de Jamie Lee Curtis, l'utilisation amusée de 2/3 jump scares, l'ambiance claustro régie au sein du wagon et la manière habile dont le tueur protéiforme est mis en évidence demeurant d'honorables ressources. 

*Bruno 
03.02.23. 4èx. vf
06.08.13.