vendredi 3 février 2012

WE NEED TO TALK ABOUT KEVIN. Prix du Meilleur film au Festival de Londres.


de Lynne Ramsay. 2011. UK/U.S.A. 1h52. Avec John C. Reilly, Tilda Swinton, Ezra Miller, Siobhan Fallon, Joseph Melendez, Ashley Gerasimovich, Suzette Gunn, Leslie Lyles, Lauren Fox, Ursula Parker.

Sortie Salles France: 28 Septembre 2011. U.S: 2 Décembre 2011
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FILMOGRAPHIE: Lynne Ramsay est une réalisatrice et scénariste britannique, né le 5 Décembre 1969 à Glasgow (Royaume-Uni). 1999: Ratcatcher. 2002: Morvern Callar. 2011: We need too Talk About Kevin


D'après le roman de Lionel Shriver paru en 2003, la réalisatrice Lynne Ramsay nous illustre ici l'introspection d'une cellule familiale lorsqu'un enfant dénué de moralité est mis au monde au sein d'une éducation orthodoxe. Ce rapport de force équivoque entre un adolescent inflexible et sa mère démunie qui nous ait démontrée ici de manière abrupte sans toutefois stigmatiser la cause parentale. Eva met au monde un jeune garçon qu'elle prénomme Kevin. Dès la naissance, leur rapport conflictuel est à rude épreuve. La mère supportant mal pleurs et hurlements du bambin irascible, leur relation s'achemine dans une impasse. Attentive, déférente et aimante, Eva a beau faire preuve de patience et persévérance, Kevin a délibérément décidé d'accomplir sa future besogne mortuaire. 
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Dans une mise en scène inventive et auteurisante, multipliant les incessants allers-retours entre passé et présent, We need to talk about Kevin provoque d'emblée notre curiosité face à une succession d'évènements insolites imbriqués de façon anarchique. La réalisation très travaillée accumulant les effets de style alambiqués autour d'une partition braque et l'épure une photographie picturale au design géométrique (le foyer domestique sécurisant). Cette oeuvre glaçante et acérée, baignant dans un climat ombrageux sous-jacent réussit facilement à nous pénétrer en interne d'une descente aux enfers décrétée par un ado interlope. De la naissance à sa majorité, nous suivons l'évolution d'un garçon délibéré à haïr sa propre mère pour une raison intrinsèque qui n'appartient qu'à lui. Mère prévenante même si contrariée, voire irritée de prime abord par les caprices du nouveau né, Eva va tout entreprendre pour tenter d'améliorer ses relations rigides avec son bambin versatile. Néanmoins, Kevin accorde une amabilité (sournoise) avec son paternel flegmatique (John C. Reilly, épatant de bonhomie ingénue). Un père passif incapable de déceler les motivations perfides de l'adolescent en phase d'indiscipline, faute de son instinct paternel engagé dans l'amour. C'est à la suite de la naissance de leur deuxième enfant, une petite fille amiteuse et épanouie que Kevin va entreprendre sa croisade funèbre consolidée dans la rancoeur.


Si le film se révèle si captivant et machiavélique, c'est en priorité grâce à la ferme ténacité du personnage de la mère, entièrement dévouée à daigner combler son fils grâce à son inlassable indulgence. Un ado exécrable incapable de lui éprouver la moindre empathie, multipliant provocations et rancunes tenaces dans l'unique but de l'asservir. Avec subtilité et sans aucune outrance, la narration pernicieuse nous dirige lentement vers un point d'orgue que l'on présage fatalement tragique puisque son préambule nous avait préalablement évoqué un semblant de fait divers sordide. Avec son physique exsangue et famélique, Tilda Swinton magnétise son rôle de mère dépréciée, constamment fustigée par un fils aussi vil qu'arrogant. Avec une aversion en crescendo, nous ne sommes pas prêt d'oublier l'interprétation monolithique du jeune Ezra Miller (comédien novice mais aussi chanteur et batteur du groupe Sons of an Illustrious Father), terrifiant d'austérité dans son regard stérile et d'une froideur implacable par son caractère insidieux. Spoiler !!! Sa lente dérive vindicative dans la folie meurtrière nous saisissant d'effroi quand à la révélation de ses véritables exactions. Fin du SpoilCe rapport trouble mère/fils donne donc lieu à un affrontement psychologique d'une acuité subtilement oppressante confinant au malaise latent.


L'Enfant du diable
Mis en scène sans fioriture et baignant dans un climat baroque davantage étouffant, We need to talk about Kevin est un thriller psychologique transcendé par les dissensions sinueuses entre une mère et son fils. Le réalisateur prenant soin d'illustrer le saisissant portrait d'un sociopathe juvénile dénué de mobile alors que sa génitrice meurtrie, conspuée par une population réactionnaire, aura toujours la patience de l'amour maternel pour tenter de comprendre les tenants fielleux du fils infortuné. En ce sens, sommes nous responsables de la déchéance morale d'un enfant lorsqu'il semble inné à nuire à autrui ? 

03.02.12
Bruno Matéï

Récompenses: Prix du Meilleur film au festival du film de Londres en 2011.
Prix de la Meilleure Actrice Européenne pour Tilda Swinton


2 commentaires:

  1. Le film le plus bouleversant que j'ai vu...

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  2. Il ne m'a pas du tout bouleversé personnellement, il m'a terrifié et beaucoup dérangé.

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