jeudi 4 février 2016

LE CAVEAU DE LA TERREUR

                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site adventuresinpoortaste.com  

"Vault of Horror" de Roy Ward Baker. 1973. Angleterre. 1h23. Avec Terry-Thomas, Curd Jürgens, Tom Baker, Dawn Addams, Denholm Elliott, Michael Craig

Sortie salles Angleterre: Mars 1973

FILMOGRAPHIE PARTIELLE: Roy Ward Baker est un réalisateur, producteur, scénariste anglais, né le 19 Décembre 1916 à Londres (Royaume-Uni), décédé le 5 Octobre 2010.
1947: L'Homme d'Octobre. 1952: Troublez moi ce soir. 1968: Les Champions. 1969: Mon ami le fantôme. 1970: The Vampire Lovers. 1970: Les Cicatrices de Dracula. 1971: Dr Jekyll et Sr Hyde. 1972: Asylum. 1973: Le Caveau de la Terreur. 1973: And now the Screamin starts. 1974: Les 7 vampires d'or. 1980: Le Club des Monstres. 1984: Les Masques de la mort (télé-film).


Hommage:
Réalisé entre Histoires d'outre-Tombe et Frissons d'outre-tombe, Le Caveau de la Terreur continue d'exploiter le filon du film à sketchs inspirés des bandes dessinés EC. Comics des années 50. Sous la houlette de l'illustre Roy Ward Barker, cette nouvelle anthologie de l'horreur relate avec un habituel sens de l'humour sardonique 5 histoires plus ou moins originales autour d'une galerie peu recommandable d'antagonistes mesquins. Si le premier segment imparti au thème du vampirisme s'avère peut-être le plus faible, son ambiance feutrée et inquiétante confinée au sein d'une bourgade anglaise puis celle d'un restaurant, le cynisme accordé au meurtrier parental ainsi que l'ironie débridée de son destin ne manquent pas de piquant. Passionnant de cocasserie pour dépeindre la dérive conjugale d'un couple néophyte (le mari étant un maniaque du rangement et de la propreté alors que l'épouse s'avère contrairement désordonnée) et véhiculant une intensité exponentielle autour de la condition parano de cette dernière, la seconde histoire s'avère sans doute la plus jouissive pour sa peinture ubuesque allouée au matérialisme du machiste intarissable.


Nanti d'une ambiance exotique parmi la contrée touristique de l'Inde, le 3è sketch s'intéresse aux villégiatures d'un couple cupide avant d'improviser leurs stratégies meurtrières autour des pouvoirs surnaturels d'une magicienne. Un récit assez captivant se jouant avec dérision du simulacre et de l'authenticité de la magie avant qu'une sorcellerie d'outre-tombe ne vienne rendre des comptes aux oppresseurs. D'une durée concise, le 4è sketch affiche un esthétisme gothico-macabre autour d'une scénographie sépulcrale depuis qu'un duo de malfrats ont élaboré un plan machiavélique afin d'empocher une prime d'assurance. L'un d'eux ayant décidé de simuler sa mort dans le caveau d'un cimetière ! Bien rythmée, cette farce claustro surprend et amuse, notamment grâce à l'intervention impromptue de deux étudiants lors de son final fertile en rebondissements et subterfuge. Enfin, le dernier segment renoue avec l'ambiance exotique du 3è lorsqu'un artiste peintre décide de s'exiler sur une île afin d'élaborer une vengeance auprès de ses commanditaires. Après avoir participé à une séance vaudou lui permettant de s'octroyer d'un sort, il repart au pays natal afin de parfaire sa cruelle punition. Une intrigue soigneusement charpentée laissant libre court à l'inventivité gore des diverses mises à mort, quand bien même sa chute potentiellement prévisible parvient tout de même à nous surprendre pour le châtiment réservé au sorcier comme le souligne la règle élémentaire de chaque anthologie.


Bien qu'inférieur aux Histoires d'Outre-Tombe et à Frissons d'outre-tombe, Le Caveau de la Terreur ne manque toutefois pas de charme dans son lot de suspense, d'humour macabre et de fantaisie rocambolesque afin de se gausser de l'appétence criminelle de cinq condamnés trop orgueilleux pour se convaincre de leurs bassesse. Un sympathique divertissement rehaussé d'une ambiance horrifique vintage inscrite dans la dérision du gag saignant !

B.M

mardi 2 février 2016

MADE IN FRANCE

                                                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allociné.fr

de Nicolas Boukhrief. 2014. France. 1h29. Avec Malik Zidi, Dimitri Storoge, François Civil,
Nassim Si Ahmed, Ahmed Dramé, Franck Gastambide, Judith Davis.

Inédit en salles en France.

FILMOGRAPHIENicolas Boukhrief est un réalisateur et scénariste français né le 4 juin 1963 à Antibes. 1995 : Va mourire. 1998 : Le Plaisir (et ses petits tracas). 2003 : Le Convoyeur. 2008 : Cortex. 2009 : Gardiens de l'ordre. 2015 : Made in France. 



Hommage: 
Prévu à l'origine pour une sortie salles le 18 novembre 2015 mais repoussé à Janvier 2016 puis annulé en raison des tragiques attentats ayant secoué la France le 13 Novembre 2015, Made in France passa finalement par la case VOD ce 29 Janvier 2016. Thriller choc s'attardant scrupuleusement sur les stratégies terroristes d'une cellule djihadiste au sein de la capitale parisienne, alors qu'un journaliste musulman est parvenu à s'y infiltrer afin de les déjouer, Made in France insuffle une atmosphère crépusculaire autour de leurs agissements délétères. Fort d'une mise en scène stylisée renouant avec l'âpreté des polars modernes des années 80, Nicolas Boukhrief redouble d'ambition et de sincérité à fignoler un thriller politique d'une brûlante actualité. Soutenu d'une partition électro entêtante, cette plongée ténébreuse dans l'univers du djihadisme nous dépeint sobrement les motivations morales, l'apprentissage et le passage à l'acte du terrorisme de jeunes intégristes agrégés à leur guerre sainte d'Allah.


Sans chercher à parfaire un documentaire sur l'islamisme radical, Nicolas Boukrhief privilégie avant tout la forme cinégénique d'un thriller vénéneux remarquablement troussé. Par le biais du personnage de l'indic contraint de collaborer avec le chantage policier, Made in France cultive un suspense sous-jacent autour de sa fausse identité. Outre le fait de redouter sa culpabilité aux yeux de ces adjoints, l'intrigue met en exergue les projets insensés d'attentats meurtriers, un terrorisme interne (mais aussi autonome) faisant écho à la triste actualité du 13 Novembre 2015. Si son cheminement narratif peut s'avérer inévitablement prévisible, Nicolas Boukrhief parvient habilement par l'habileté de sa réalisation à se défaire des clichés lors d'une dernière partie émaillés d'incidents aléatoires tout en soulignant la mauvaise conscience impartie aux plus jeunes d'entre eux ! Ces djihadistes en herbe faisant preuve de contrariété, d'indécision et de remords à ne pas connaître l'unique identité de leur porte-parole et à oser franchir les limites de l'intolérable (tuer innocemment femmes et enfants au nom de leur religion). De par ses rebondissements inopinés, la caractérisation fragile des éléments les plus influençables et le sort indécis réservé au journaliste infiltré, Made in France injecte une tension oppressante autour de leur projet terroriste. Sans faire preuve de complaisance pour la cruauté de certaines scènes, le cinéaste mise notamment sur la suggestion du hors-champ afin de ne pas sombrer dans la facilité putassière des agissements les plus barbares. On est également surpris de la facture émotive de son épilogue prodiguant un message de tolérance, d'amour et de paix vis à vis de l'idéologie religieuse (quand bien même certains reprocheront peut-être son côté moralisateur).


Hypnotique, captivant et envoûtant par son onirisme crépusculaire, Made in France renoue avec les ambiances noires et oppressantes des fleurons policiers des années 80. Outre le brio indiscutable de son auteur à exploiter sans esbroufe une intrigue politico-religieuse sur l'endoctrinement de la violence chez de jeunes recrues (tout en soulevant la question d'un terrorisme indépendant), la spontanéité des comédiens renforce la facture réaliste d'un évènement aussi prémonitoire.   

B.M

lundi 1 février 2016

BONE TOMAHAWK. Grand Prix, Gérardmer 2016.

                                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site standbyformindcontrol.com

de S. Craig Zahler. 2015. U.S.A. 2h12. Avec Kurt Russell, Patrick Wilson, Matthew Fox, Richard Jenkins, Lili Simmons, Evan Jonigkeit,

Sortie salles U.S: 23 Octobre 2015

FILMOGRAPHIES. Craig Zahler est un réalisateur et scénariste américain né en 1973 à Miami, Floride. 2015: Bone Tomahawk


Hommage:
En jumelant les codes du western et de l'horreur, le néophyte S. Craig Zahler surprend agréablement avec Bone Tomahawk si bien que les membres du Jury de Gérardmer lui décernèrent le Grand Prix. Une odyssée sauvage que vont arpenter un shérif et ces trois acolytes depuis que la femme d'Arthur O'Dwyer et un adjoint de l'ordre ont été kidnappés par des indiens anthropophages. En s'inspirant de deux classiques au genre contradictoire (la Prisonnière du désert et Cannibal Holocaust), Bone Tomohawk bouscule nos habitudes de spectateur immergé malgré lui dans un voyage vers l'enfer où le danger palpable fait irruption sans ménagement. Principalement vers sa seconde partie lorsque le réalisateur exploite sans complexe une poignée d'affrontements gores d'une cruauté inouïe alors que les indiens aux aguets surgissent de leur tanière de manière totalement improvisée !


De par son réalisme cru à la limite du soutenable et ses effets de surprise, la tension engendrée émane du sentiment de stupeur et d'impuissance des victimes avant d'endurer désespérément des souffrances corporelles. Mais bien avant ce déchaînement de violence viscérale d'un autre âge, le cinéaste aura pris soin de nous attacher à la cohésion de nos protagonistes sévèrement châtiés par un concours de circonstances infortunées. Sillonnant les collines du Nouveau-Mexique avec un courage déterminant, ils vont être amenés à réviser leur jugement sur la condition estropiée d'un de leurs camarades, Arthur. Ce dernier ralentissant sa troupe depuis le grave handicap de sa jambe alors qu'il s'évertue de suivre ses comparses afin de retrouver son épouse en vie. Cette situation de survie houleuse s'avère l'un des pivots dramatiques de l'intrigue, Spoil ! sachant que le groupe sera contraint de se diviser Fin du Spoil alors que le danger tangible se rapproche inexorablement. Cette tension sous-jacente découlant de la précarité physique d'Arthur et l'expectative de retrouver les disparus en vie permettent au spectateur de provoquer l'anxiété au sein de leur intimité amicale. Par son rythme languissant ne laissant rien présager des prochains incidents, Bone Tomohawk sème le terrain avec l'habileté sardonique d'embrayer sur une seconde partie horrifique en crescendo. Quasiment exclu de score musical et soutenu du jeu viscéral des comédiens, S. Craig Zahler privilégie un climat réaliste de mystère lattent au sein d'un décorum photogénique (les collines du Nouveau-mexique éclairées d'une photo sépia) auquel la menace hostile se symbolise par le cri primal d'indiens spectraux.


Captivant, angoissant, parfois terrifiant et éprouvant, de par le ressort d'un suspense en ascension, sa dramaturgie sans concession et sa violence jusqu'au-boutiste, Bone Tomohawk nous achemine au survival d'une descente aux enfers sous l'impulsion de comédiens d'une digne densité humaine. 
A réserver néanmoins à un public averti

B.M.

Récompenses:
Festival international du film de Catalogne 2015 : meilleur réalisateur pour S. Craig Zahler et prix « José Luis Guarner » de la critique
Festival international du film fantastique de Gérardmer 2016 : Grand Prix

vendredi 29 janvier 2016

Le Couloir de la Mort / The Evil


"The Evil" de Gus Trikonis. 1978. U.S.A. 1h29. Avec Richard Crenna, Joanna Pettet, Andrew Prine, Lynne Modie, Cassie Yates, George O'Hanlon Jr.

Sortie salles France: 15 Juillet 1981

FILMOGRAPHIE: Gus Trikonis est un acteur, danseur et réalisateur américain, né à Manhattan (New York) le 21 novembre 1937. 1997: Insel der Furcht1991: The Great Pretender. 1985 Délit de fuite (TV Movie).  1985 Midas Valley (TV Movie). 1985 Malice in Wonderland (TV Movie). 1983 First Affair (TV Movie). 1983 Dempsey (TV Movie). 1983 Pris au piège. 1982 Miss All-American Beauty (TV Movie). 1981 Twirl (TV Movie). 1981: Ca passe ou ça casse. 1981 Elvis and the Beauty Queen (TV Movie). 1980 Touched by Love. 1979: She's Dressed to Kill (TV Movie).  1979 The Last Convertible (TV Mini-Series) (part 3). 1979 The Darker Side of Terror (TV Movie). 1978 Le couloir de la mort. 1977 Moonshine County Express. 1976 The Student Body. 1976 Nashville Girl. 1975 The Swinging Barmaids. 1975 Supercock. 1969 Five the Hard Way.


Hit Vhs des années 80 sous l'étendard étoilé d'Hollywood Video, Le Couloir de la mort fit autant les beaux jours des rats des vidéos que ceux des cinéphiles lors de sa ressortie en salles au début des années 80. J'en suis d'ailleurs la preuve même puisque après l'avoir loué, je me rendis un samedi après-midi dans mon ciné du coin afin de m'y replonger avec ferveur ! Pure série B d'exploitation surfant sur la vague des demeures hantées, Le Couloir de la Mort ne prétend pas révolutionner le genre avec son intrigue éculée dénuée de surprises (hormis un final délirant à la limite du grotesque selon l'humeur du jour) car entièrement bâtie sur le caractère spectaculaires des séquences chocs. Epaulé d'effets spéciaux artisanaux souvent soignés et efficaces, les mises à mort qui empiètent le récit font preuve d'un réalisme parfois étonnant, à l'instar de cette main découpée à la scie circulaire, de l'éjection d'un corps dans les airs ou du viol d'une afro ballottée par l'entité invisible. Le pitch nous ressasse donc sur la période d'un week-end la réunion d'une dizaine de personnes au sein d'un manoir scellé depuis 25 ans. Alors que le gardien devait s'y présenter dès leur arrivée, ce dernier fit les frais d'un inexplicable incendie dans la cave de la bâtisse (seul, le spectateur sera témoin de son agonie).


A travers cette séquence assez cruelle, on peut déjà relever l'aura feutrée de son atmosphère gothique lorsque ce dernier inspecte les lieux vétustes avec l'appréhension d'avoir entendu des bruits suspicieux. Passé ce prologue particulièrement ombrageux, nos hôtes vont vite s'opposer aux manifestations surnaturelles de la demeure sans pouvoir s'échapper de l'intérieur. Un à un, ils feront face aux estocades d'une force démoniaque jusqu'à ce que leur mort s'ensuive. Nanti d'un rythme haletant n'accordant aucun répit pour les péripéties diaboliques, le Couloir de la Mort parvient à distraire le spectateur embarqué dans un train fantôme où l'esbroufe reste le pivot alimentaire. En prime de ces effets spectaculaires bien troussés, la caractérisation attachante des personnages parvient réellement à nous impliquer dans leur désarroi, et ce, en dépit du comportement naïf, voir parfois incohérent de certains protagonistes. Tant par la prestance affirmée de Richard Grenna en psychologue rationnel réfutant toute théorie surnaturelle, que par les seconds-rôles s'efforçant maladroitement à contredire la présence du mal. Hormis cette lacune comportementale, le Couloir de la Mort captive facilement le spectateur par le biais d'un charme Bis irrésistible, notamment grâce au savoir-faire du réalisateur s'efforçant de distiller une ambiance démoniaque parfois tangible. Quant au final incongru laissant apparaître le diable en personne sous l'influence fantaisiste de Victor Buono, le climat fantasmagorique qui s'y dégage ose se démarquer de la conformité à travers la scénographie d'un au-delà limpide ! Le spectateur dépaysé étant partagé entre fascination et sourire amusé, notamment parmi l'appui d'un fantôme charitable lors de son dernier clin d'oeil.


Plaisir innocent du samedi soir au travers d'une série B sans prétention, le Couloir de la mort n'a rien perdu de son charme naïf à tenter de provoquer l'angoisse parmi l'efficacité de séquences-chocs et la saveur vintage d'une atmosphère délétère souvent persuasive. Outre l'intégrité de son auteur à façonner un pur divertissement horrifique, ajoutez la spontanéité communicative des comédiens de seconde zone et vous obtenez un petit classique du genre, aussi mineur soit-il.  

B.M
5èx
29.01.16
25.02.11


jeudi 28 janvier 2016

THE ASPHYX (l'esprit de la mort)

                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmscoremonthly.com

"Spirit of the dead / L'Esprit de la Mort" de Peter Newbrook. 1972. U.S.A. 1h39. Avec Robert Stephens , Robert Powell , Jane Lapotaire , Alex Scott , Ralph Arliss.

Sortie salles U.S: Février 1973

FILMOGRAPHIE: Peter Newbrook est un réalisateur, producteur et scénariste anglais, né le 29 Juin 1920, décédé le 19 Juin 2009 à Norwich (Angleterre). Il est l'unique metteur en scène de The Asphyx.


Perle maudite inédite en salles dans l'hexagone mais exhumée de l'oubli par l'éditeur (en berne) Neo Publishing, The Asphyx traite de l'immortalité avec une audace et une originalité sans égales. Dans une ambiance gothique proche d'un Hammer Film, cet ovni horrifique tire parti de son pouvoir vénéneux grâce à la fantaisie de son concept singulier surfant sur une réflexion spirituelle et la soif d'une jeunesse insatiable. En 1875, un scientifique épaulé de son adjoint tentent des expériences occultes en prenant en photo des personnes sur le point de mourir. Par le biais d'une tâche noire inscrite sur la pellicule, Sir Hugo Cunningham pense avoir démasqué le Asphyx. Un esprit de la mort qui, selon une légende grecque, s'emparerait de notre âme au moment de trépasser. Fascinés par cette stupéfiante découverte, nos apprentis sorciers élaborent une machine capable de capturer l'asphyx afin de permettre à la victime mise en cause de se libérer du trépas et ainsi accéder à l'immortalité. 


Ce scénario saugrenu émaillé de rebondissements décapants s'avère d'une redoutable efficacité sous l'impulsion impétueuse de comédiens s'en donnant à coeur joie dans leur utopie immorale. En dépit d'une mise en scène académique, Peter Newbrook parvient pour son unique réalisation à fasciner le spectateur impliqué dans une épreuve scientifique aussi passionnante que débridée. La scénographie minimaliste du huis-clos permettant d'autant mieux de nous familiariser avec nos protagonistes confinés dans leur laboratoire victorien. Multipliant leurs expériences morbides auprès d'un mammifère puis ensuite avec des cobayes humains, nos compères se retrouvent en proie à leur obsession divine afin de permettre à l'homme d'accéder à l'immortalité sur terre. Si les effets cheap peuvent prêter à sourire quant aux diverses apparitions de l'Asphyx, sa résultante visuelle s'avère si incongrue et hallucinée que le spectateur parvient sans difficulté à croire à l'improbable lorsque l'entité parvient à s'animer sous les effets d'un faisceau de projecteur tout en exclamant un braillement primal ! Qui plus est, la spontanéité pétulante des comédiens (second point majeur après sa densité narrative) parvient sans retenue à nous convaincre de leurs expériences avec l'au-delà parmi l'appui d'un appareil photo et d'une caméra.


Par sa dimension visuelle aussi fantaisiste qu'hallucinée, The Asphyx décuple son pouvoir de fascination par l'entremise d'un scénario atypique et le brio d'interprètes totalement impliqués dans leur fonction insidieuse de savants fous. Honteusement méconnue et oubliée (bien que certains spécialistes le sacralisent comme l'un des films essentiels des années 70 !), cette merveille d'insolence macabre redore ses lettres de noblesse au terme "culte". 

Un grand merci au regretté Neo...

B.M 

mercredi 27 janvier 2016

THE DANISH GIRL. Queer Lion à la Mostra de Venise 2015.

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site actu-film.com

de Tom Hooper. 2015. U.S.A/Angleterre/Allemagne. 2h00. Avec Eddie Redmayne, Alicia Vikander, Matthias Schoenaerts, Ben Whishaw, Amber Heard, Sebastian Koch

Sortie salles France : 20 janvier 2016. U.S: 27 Novembre 2015

FILMOGRAPHIE: Thomas George « Tom » Hooper est un réalisateur britannique, né le 1er octobre 1972 à Londres. 2004 : Red Dust. 2009 : The Damned United. 2010 : Le Discours d'un roi. 2012 : Les Misérables. 2016 : The Danish Girl.


Mélodrame inspiré de l'histoire vraie de Lili Elbe, premier cobaye masculin à avoir subi une opération chirurgicale pour un changement de sexe ("chirurgie de réassignation sexuelle" nommeront les thérapeutes !), The Danish Girl aborde le thème du transgenre (confusion de l'identité sexuelle) avec pudeur d'émotion dans son refus de pathos, Spoil ! et ce en dépit de la tournure inopinée du dénouement dramatique Fin du Spoil. Par le biais de son profil psychologique singulier prônant notamment un hymne à la féminité, Tom Hooper transfigure une leçon de tolérance et d'amour du point de vue de l'épouse délaissée qu'endosse brillamment Alicia Vikander.


Cette dernière insufflant avec humanisme vaillant une grande dignité pour son sens de l'empathie, de la considération et de la passion pour la condition pathologique de son mari. Alors que certains médecins et psychiatres conservateurs diagnostiquerons le sort de leur patient d'homosexualité ou de maladie mentale (la schizophrénie), Gerda ne cessera de respecter sa nouvelle raison d'être et de soutenir son choix ardu avec constance et tendresse intarissables. Car au-delà de l'introspection poignante établie sur l'ambivalence morale de Lili, partagé entre sa peur de perdre l'être aimé, le désir viscéral de changer de corps et la crainte de se prêter à une chirurgie novatrice, The Danish Girl cultive une magnifique histoire d'amour autour de leur solidarité indéfectible. Situé à l'aube des années 30, la reconstitution soignée et les sublimes décors contrastent à merveille avec la quotidienneté intime de Lili et Gerda. Cette dernière exerçant dans son foyer la profession de peintre pendant que son mari lui sert de modèle en adoptant le rôle d'un travesti. Se focalisant sur leur rapports intimes à travers des discordes conjugales et une irrésistible cohésion amoureuse The Danish Girl distille une émotion prude sous l'impulsion de deux comédiens en émoi. Eddie Redmayne se fondant dans la peau du transsexuel avec une séduction naturelle et une ambiguïté de personnalité souvent bouleversantes.


Abordant sans racolage les tabous du transgenre et de l'homophobie autour d'une histoire d'amour pleine de passion et de tolérance, Tom Hooper nous offre un témoignage digne sur le droit à la différence du point de vue du premier patient à s'être prêté à la chirurgie de réattribution sexuelle. Outre le brio de sa mise en scène à la forme esthétisante (photo et éclairages limpides pour transfigurer la reconstitution historique des années 30), le film doit beaucoup de sa poésie et de son intensité dramatique grâce au duo magnanime Eddie Redmayne/Alicia Vikander (celle-ci volant quasiment la vedette à son acolyte au travers d'un superbe portrait de femme constante !).

B.M

mardi 26 janvier 2016

BEASTS OF NO NATION

                                                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site goldposter.com

de Cary Joji Fukunaga. 2015. U.S.A. 2h16. Avec Abraham Attah, Idris Elba, Emmanuel Nii Adom Quaye, Ama K. Abebrese, Richard Pepple, Francis Weddey, Opeyemi Fagbohungbe, Andrew Adote.

Sortie salles France: INEDIT. U.S: 16 Octobre 2015

FILMOGRAPHIECary Joji Fukunaga est un réalisateur américain, né le 10 juillet 1977 à Oakland en Californie. 2009: Sin Nombre. 2011: Jane Eyre. 2012: Sleepwalking in the Rift. 2015: Beasts of No Nation.


Inédit en salles en France et directement sorti en VOD, Beasts of no nation relate avec un réalisme documenté le conditionnement d'un enfant en machine à tuer au coeur d'une guerre civile Africaine. Enrôlé par un commandant drastique dirigeant de main de fer son armée rebelle, le jeune Agu s'embourbe rapidement dans un univers de violence barbare après avoir été séparé de sa mère puis témoin du massacre de sa famille. Par l'alibi de la vengeance, son leader en profite pour l'initier à l'apprentissage de l'autorité, du combat et des armes avant de le mettre à l'épreuve du rituel criminel. Cette innocence déflorée, Agu l'endure avec courage et détermination d'une vendetta avant de saisir la manoeuvre de son mentor, gourou sans vergogne exploitant son armée dans un but égotiste.


Âpre, ultra violent, malsain, nauséeux, Cary Joji Fukunaga n'y va pas par quatre chemin pour décrier l'animosité primitive d'une guerre civile parmi l'appui d'enfants martyrs aveuglés par la haine et le sang. Voyage au bout des ténèbres, odyssée funèbre d'où plane les effluves de macchabées fraîchement assassinés ou putréfiés par le soleil, Beasts of no nation nous retranscrit avec vigueur dramatique l'introspection meurtrie d'un enfant orphelin, témoin de massacres en règle sous l'allégeance d'un dictateur obnubilé par le pouvoir. Idris Elba endossant avec sobriété un rôle perfide où la manigance de ces stratégies bellicistes Spoiler ! finit mener sa troupe vers la déroute fin du Spoiler. Poignant et bouleversant pour la dérive sanguinaire de ces enfants endoctrinés à la déchéance criminelle, Beasts of no nation ne nous laisse peu de répit pour manifester de leur déliquescence morale à exterminer sans fléchir femmes et enfants parmi la complicité tantôt indulgente d'Agu. Par un vibrant monologue alternant ses sentiments d'espoir et de désespoir face à sa foi divine, Agu devient un adulte aguerri apte à discerner la monstruosité qui vient de naître en lui. Ce message d'espoir intenté à sa parcelle d'humanité tend à rassurer sur sa destinée galvaudée parmi son souvenir traumatique d'une guerre d'un autre âge. Outre l'esthétisme crépusculaire de ces affrontements chaotiques épargnés de vainqueurs, le film gagne en intensité sous l'impulsion équivoque du jeune Abraham Attah. Ce dernier se fondant dans la peau d'un soldat infantile derrière un regard impassible peu à peu rattrapé par le regain de conscience.


Dur et sans concession car d'un réalisme parfois éprouvant pour le cheminement criminel de cette génération sacrifiée, Beasts of no nation laisse un goût de souffre dans la bouche lorsqu'il fait écho aux exactions barbares du djihadisme terroriste (Boko Haram en tête !). Poignant et bouleversant parmi le témoignage de ces enfants de la honte, l'absurdité de la guerre nous est ici illustrée sous son aspect le plus sordide lorsque ces derniers sont prêts à payer de leur âme pour se soumettre à l'idéologie la plus extrémiste. Hanté par le score envoûtant de Dan Romer, il en émane un vibrant plaidoyer contre la haine infantile dont on ne sort pas indemne... 

B.M

Récompenses: Mostra de Venise 2015 : Prix Marcello-Mastroianni du meilleur espoir pour Abraham Attah.
National Board of Review Awards 2015 : Meilleur espoir pour Abraham Attah.