vendredi 27 octobre 2017

LE TOBOGGAN DE LA MORT

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemotions.com

"Rollercoaster" de James Goldstone. 1977. U.S.A. 1h58. Avec George Segal, Richard Widmark, Timothy Bottoms, Henry Fonda, Harry Guardino, Susan Strasberg, Helen Hunt.

Sortie salles France: 28 Décembre 1977. U.S: 10 Juin 1977

FILMOGRAPHIE: James Goldstone est un réalisateur et producteur américain né le 8 juin 1931 à Los Angeles et décédé le 5 novembre 1999 à Shaftsbury. 1968: Les Complices. 1969 : Virages. 1969 : A Man Called Gannon. 1970 : A Clear and Present Danger (en) (TV). 1971 : Brother John. 1971 : Red Sky at Morning. 1971 : The Gang That Couldn't Shoot Straight. 1972 : They Only Kill Their Masters. 1974 : Cry Panic (TV). 1974 : Dr. Max (TV). 1974 : Things in Their Season (TV). 1975 : Journey from Darkness (TV). 1975 : Eric (TV). 1976 : Le Pirate des Caraïbes. 1977 : Le Toboggan de la Mort. 1980 : Le Jour de la fin du monde. 1981 : Kent State (TV). 1982 : Charles & amp; Diana: A Royal Love Story (TV). 1983 : Rita Hayworth: The Love Goddess (TV). 1984 : Calamity Jane (TV). 1984 : Voyage sentimental (TV). 1984 : Le soleil se lève aussi (TV). 1986 : Dreams of Gold: The Mel Fisher Story (TV). 1988 : Les Voyageurs de l'infini (TV). 1990 : Mariage en noir(TV).


Plutôt oublié de nos jours en dépit de sa récente sortie commerciale en Blu-ray, Le Toboggan de la Mort est un excellent film catastrophe mené sur un rythme haletant si bien qu'il ne laisse que peu de répit au spectateur observant sans réserve les stratégies terroristes d'un dangereux maître chanteur spécialiste en explosif dans les manèges à sensations. Son attraction de prédilection, le Rollercoaster, montagne russe vertigineuse d'une envergure assez impressionnante si je la compare à nos manèges français un peu plus modérés. Sans jamais s'embarrasser de séquences inutiles conforme au schéma du genre catastrophe (la caractérisation d'une foule de protagonistes stéréotypés en 1er lieu), James Goldstone démarre sur les chapeaux de roue avec l'unique séquence catastrophe, l'explosion d'un rollercoaster lors d'une nuit bondée de touristes. Une séquence spectaculaire d'une violence assez impressionnante même si l'on parvient à discerner quelques mannequins lorsque les wagons détachés viennent se projeter sur des stands ou se retourner avant d'écraser chaque passager sur le sol. La suite du récit se focalise ensuite sur le chantage du tueur exigeant une rançon d'un million de dollars, auquel cas il poursuivra une deuxième action terroriste auprès d'un autre rollercoaster.


Dépêché sur les lieux, Harry Calder, contrôleur de sécurité, doit lui rapporter la valise en plein coeur de la fête foraine et parmi la filature des policiers maladroitement fondus dans la foule. Remarquablement mené grâce à son rythme oppressant balisé de fausses alertes, James Goldstone réussit à rendre palpitant son suspense policier auprès d'une réalisation efficace brodant un jeu de cache-cache entre le tueur et le héros mis à rude épreuve car gentiment brimé. Quant à la seconde partie, un peu plus tendue et nerveuse pour son nouvel enjeu dramatique, elle renoue avec la menace d'une troisième attaque terroriste après que les ouvriers d'un parc d'attraction soient parvenus à désamorcer une seconde bombe en dernier ressort. Outre son suspense émoulu instauré autour d'une scénographie festive efficacement exploitée (notamment ces multiples tours de montagne russe filmés en caméra subjective afin de nous donner le vertige !), le Toboggan de la mort est également rehaussé d'un casting 3 étoiles typique de sa décennie florissante. Principalement Richard Widmark en agent de police bourru constamment sur le qui-vive à coordonner ses plans d'action afin d'appréhender le tueur, et surtout le méconnu George Segal très à l'aise dans celui d'un émissaire de fortune s'efforçant sans relâche de déjouer les plans sournois du terroriste dont il ignore l'identité. Ce dernier étant endossé par le troublant Timothy Bottoms tout à fait machiavélique dans la peau d'un terroriste assez vaniteux car d'apparence faussement rassurant, plutôt retors et déterminé dans ses lâches stratagèmes.


Constamment haletant grâce à l'ossature de son suspense inquiétant fertile en rebondissements, et rehaussé du jeu viril des comédiens d'un charisme buriné, Le Toboggan de la Mort parvient d'autant mieux à nous tenir en haleine sans jamais user de bravoure si on écarte l'inévitable scène catastrophe de son introduction criminelle. 
A noter les furtives apparitions de Steve Guttenberg, Craig Wasson (Body Double) et Helen Hunt âgée de 14 ans !

Bruno Matéï
3èx

jeudi 26 octobre 2017

LA DERNIERE MAISON SUR LA GAUCHE

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site pinterest.fr

"The Last House on the Left" de Wes Craven. 1972. U.S.A. 1h25. Avec Sandra Cassel, Lucy Grantham, David Hess, Fred J. Lincoln, Jeramie Rain, Marc Sheffler.

Inédit en salles en France. Sortie U.S: 30 Août 1972

FILMOGRAPHIE: Wesley Earl "Wes" Craven est un réalisateur, scénariste, producteur, acteur et monteur né le 2 Aout 1939 à Cleveland dans l'Ohio. 1972: La Dernière maison sur la gauche, 1977: La Colline a des yeux, 1978: The Evolution of Snuff (documentaire), 1981: La Ferme de la Terreur, 1982: La Créature du marais, 1984: Les Griffes de la nuit, 1985: La Colline a des yeux 2, 1986: l'Amie mortelle, 1988: l'Emprise des Ténèbres, 1989: Schocker, 1991: Le Sous-sol de la peur, 1994: Freddy sort de la nuit, 1995: Un Vampire à brooklyn, 1996: Scream, 1997: Scream 2, 1999: la Musique de mon coeur, 2000: Scream 3, 2005: Cursed, 2005: Red eye, 2006: Paris, je t'aime (segment), 2010: My soul to take, 2011: Scream 4.


Quintessence d'une horreur pestilentielle, un film monstre sur la nature perverse du plus redoutable des prédateurs: l'homme. 
Fer de lance du Rape and Revenge crapoteux interdit en salles en France et durant 30 ans au Royaume-Uni, La Dernière maison sur la gauche révolutionna le cinéma d'horreur, et ce bien avant que Tobe Hooper ne le marque également de son empreinte 2 ans plus tard avec l'électrisant Massacre à la Tronçonneuse. Sordide, poisseux, ultra glauque et malsain, La Dernière maison sur la gauche doit sa réputation scandaleuse grâce à l'aspect docu-vérité de sa réalisation amateuriste (il s'agit du 1er essai de Wes Craven derrière la caméra) illustrant durant sa 1ère partie (la plus réussie !) le chemin de croix de deux lycéennes prises à parti avec un quatuor de marginaux sans vergogne. Au coeur d'une forêt, et ironiquement à pied d'oeuvre de la maison des parents de l'une d'elles, elles subiront humiliations, sévices sexuels et tortures corporelles jusqu'à ce que mort s'ensuive. Sans user de débauche d'hémoglobine, Wes Craven parvient résolument à distiller un malaise à la fois psychologique et viscéral en privilégiant une violence crue d'une intensité rarement égalée au cinéma, et en optant pour une caméra à l'épaule usant parfois de gros plans sur les visages apeurés ou orduriers. Qui plus est, oscillant efficacement une bande-son dissonante, joviale et élégiaque afin de perdre nos repères, nous nous laissons emportés dans un vertige moral à la limite du malaise.


Et Wes Craven a beau introduire (maladroitement) des séquences cocasses avec l'intervention de deux flics empotés afin de désamorcer l'horreur des situations, le spectateur ne parvient pas relativiser depuis le choc des images barbares et du jeu aussi bien approximatif que convaincant des acteurs méconnus d'un charisme hallucinant de perversité ! Mentions spéciales à David Hess en raclure impérieuse éprouvant pour autant un regain de compassion après avoir commis un meurtre aussi lâche que gratuit ("Les véritables monstres ne sont jamais totalement dépourvus de sentiments. Je crois qu'en fin de compte c'est ça, et non pas leur aspect, qui les rend si effrayants" pour reprendre un aphorisme de Stephen King), et à Fred J. Lincoln (acteur porno à la carrière prolifique !) aussi dérangeant en tortionnaire sadique nanti de penchants masochistes. Parfois un chouilla complaisant (l'éviscération concise d'une des victimes, l'entaille au couteau lentement perpétrée sur le torse d'une autre martyr), La Dernière maison sur la gauche échappe pour autant au racolage, et ce en dépit de la gratuité des exactions tirées d'un fait-divers (nous précisera le post-générique) que l'on croirait tiré du "nouveau détective". Et si la seconde partie moins convaincante et percutante (notamment le peu d'empathie éprouvée auprès des parents lorsqu'ils découvrent trop rapidement leur fille moribonde près du lac !) ne possède pas cette même aura putride et ce degré de réalisme insupportable (photo granuleuse à l'appui), le climat malsain quasi irrespirable ressenti en interne du huis-clos familial (notamment auprès des postures sournoises des ploucs insalubres) et la vengeance putassière des parents redoublant d'idées saugrenues pour parvenir à leur fin perdurent une nouvelle descente aux enfers à la violence finalement paroxystique.


Réflexion sempiternelle sur l'instinct bestial/primitif de l'homme aussi véreux que son meurtrier depuis la déchéance de ses pulsions justicières, la Dernière maison sur la Gauche perdure son pouvoir de fascination, sommet d'horreur pestilentielle d'une intensité brut de décoffrage. Et ce même si certains cinéphiles lui préfèrent aujourd'hui La Bête tue de sang froid d'Aldo Lado (beaucoup mieux maîtrisé et interprété je dois avouer), remake transalpin gagnant en estime au fil des décennies. Quoiqu'il en soit, la Dernière maison sur la gauche restera une pierre angulaire d'un genre marginal et couillu, pionnier d'une horreur documentée où l'horreur est simplement humaine. 
Pour public averti.

Bruno Dussart

mercredi 25 octobre 2017

TOOTSIE. Oscar de la Meilleure Actrice pour Jessica Lange.

                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemotions.com

de Sydney Pollack. 1982. U.S.A. 1h55. Avec Dustin Hoffman, Jessica Lange, Teri Garr, Dabney Coleman, Charles Durning, Bill Murray, Sydney Pollack.

Sortie salles France: 2 mars 1983. U.S: 17 Décembre 1982

FILMOGRAPHIE: Sydney Pollack est un acteur, réalisateur et producteur américain, né le 1er juillet 1934 à Lafayette, dans l'Indiana (États-Unis) et mort à Los Angeles le 26 mai 2008. 1965: The Slender Thread. 1966 : Propriété interdite. 1968 : Les Chasseurs de scalps. 1968 : Le Plongeon de Frank Perry, terminé par Pollack non crédité. 1969 : Un château en enfer. 1969 : On achève bien les chevaux. 1972 : Jeremiah Johnson. 1973 : Nos plus belles années. 1975 : Yakuza. 1975 : Les Trois Jours du condor. 1977 : Bobby Deerfield. 1979 : Le Cavalier électrique. 1981 : Absence de malice. 1982 : Tootsie. 1985 : Out of Africa. 1990 : Havana. 1993 : La Firme. 1995 : Sabrina. 1999 : L'Ombre d'un soupçon. 2005 : L'Interprète. 2005 : Esquisses de Frank Gehry.


Gros succès international des années 80 (en France il engrange 3 840 083 entrées) si bien qu'aujourd'hui il est répertorié comme un classique du genre, Tootsie est une comédie pétillante comme on n'en voit plus (ou alors si peu) de nos jours. Acteur au chômage débordant de talent et d'ambition, Michael Dorsey risque le tout pour le tout en se fondant dans le corps d'une sexagénaire prénommée Dorothy afin de mieux convaincre les producteurs d'un soap. Et le succès inespéré de se produire si bien que ce dernier, amoureux de sa partenaire à l'écran, essaie désespérément de s'extraire de la célébrité en osant dévoiler en dernier ressort son véritable visage ! Dirigé par l'éminent Sydney Pollack se refusant à vulgariser le thème du travestissement avec subtile émotion et parmi l'humilité de ses acteurs, Tootsie est justement l'occasion de mettre en valeur une pléiade de comédiens aux tempéraments sémillants, et ce jusqu'aux seconds-rôles. Tant auprès de Dabney Coleman en metteur en scène vaniteux, de Charles Durning en veuf subitement aimant de Dorothy, de Bill Murray en acolyte conciliant, de George Gaynes en acteur sclérosé gagné par la galanterie (car lui aussi épris de Dorothy !) que de l'explosive Teri Garr dans un rôle taillé sur mesure de maîtresse infortunée.


Outre l'intensité attachante de ces derniers issus de l'ancienne école, Tootsie décuple le pouvoir attractif de sa tendre fantaisie sous l'abattage de Dustin Hoffman partagé entre l'impudence de son personnage fictif, ses réels sentiments auprès de sa tendre partenaire hors écran et ses remords à oser duper son entourage dans celle d'une actrice autoritaire au tempérament autonome. A ses côtés, lui partageant sobrement la vedette du soap, la radieuse Jessica Lange (justement récompensée de l'oscar de la meilleure actrice dans un second-rôle) illumine l'écran dans sa fonction d'aimable confidente sitôt le tournage achevé car peu à peu enivrée par le magnétisme (masculin) de sa partenaire Dorothy. Débordante de charme et d'innocence, Jessica Lange insuffle une sensuelle affection, de par ses soupçons de sentiments véhiculés par son éventuelle homosexualité qu'elle se refuse à accepter. Sa délicate relation entamée avec Dorothy prouvant par cette occasion frauduleuse que l'amour ne se commande pas lorsque les sentiments restent plus forts que la raison quelque soit notre orientation sexuelle.


A travers ce jeu de cache-cache romantique compromis au vaudeville rocambolesque (les gags arborant une cocasserie toujours révérencieuse eu égard du tendre humanisme d'Hoffman), Tootsie traite des délicats problèmes du chômage, de la gestion de la starisation, de la quête identitaire, de l'affirmation de soi et de l'émancipation féminine avec une émotion subtilement poignante. Le divertissement efficacement structuré alternant mutuellement drôlerie, charme et romance parmi la motricité d'un scénario retors et celle d'un casting en roue libre. Un excellent anxiolytique aussi frais et pétillant qu'une coupe de champagne ! 

Eric Binford
3èx

Récompenses: Oscars 1983 : meilleure actrice dans un second rôle pour Jessica Lange
Golden Globes 1983 : meilleur film musical ou de comédie, meilleur acteur dans un film musical ou une comédie pour Dustin Hoffman, meilleure actrice dans un second rôle pour Jessica Lange
British Academy Film Awards 1984 : meilleur acteur pour Dustin Hoffman, meilleurs maquillages

mardi 24 octobre 2017

WIND RIVER. Prix de la mise en scène, Cannes 2017.

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site teaser-trailer.com

de Taylor Sheridan. 2017. U.S.A. 1h50. Avec Jeremy Renner, Elizabeth Olsen, Kelsey Chow, Jon Bernthal, Graham Greene, Julia Jones, Gil Birmingham.

Sortie salles France: 30 Août 2017. U.S: 4 Août 2017

FILMOGRAPHIE: Taylor Sheridan est un acteur, scénariste et réalisateur américain, né le 21 mai 1970 à Cranfills Gap au Texas, . 2011: Vile. 2017: Wind River.


Thriller choc d'une intensité dramatique aussi bouleversante qu'impitoyable, Wind River n'a pas volé son prix de la mise en scène à Cannes alors qu'il s'agit de la seconde réalisation du néophyte Taylor Sheridan. Ce dernier parvenant à tailler un suspense anxiogène autour d'un sordide fait divers (la découverte du cadavre d'une jeune indienne) qu'une agent du FBI et un chasseur vont tenter d'élucider en plein coeur de montagnes enneigées (magnifique paysages épurés). Intense et poignant quant à l'humanisme fragile que nos protagonistes véhiculent sans fard de par leur pudeur contenue et leur non-dit, Wind River nous immerge dans leur état de désagrément et d'impuissance morale sitôt les circonstances de la mort dévoilées ainsi que le chemin de croix que cette dernière parcourut en lieu et place de survie durant 10 kms dans une nature réfrigérante à - 30° ! Un exploit héroïque tenant du surpassement de soi auquel son ectoplasme va planer sur les épaules de nos héros durant leur investigation émaillée de rencontres ombrageuses cédant parfois aux brutaux éclairs de violence d'une vibrante intensité dramatique. Cet alliage d'émotions fulgurantes suscitant le vertige au spectateur (le + sensible) impliqué dans un règlement de compte d'une folie suicidaire !


Un peu comme l'avait d'ailleurs magnifiquement opéré Stanley Kubrick avec Full Metal Jacket (ou Spielberg avec le soldat Ryan...) lorsque les impacts de balles perforaient les chairs des victimes en émoi ou à l'agonie. La encore j'insiste sur le caractère éprouvant, voir résolument bouleversant de cette brutalité incisive que le réalisateur parvient à mettre en exergue avec un réalisme aride, et ce sans parti-pris racoleur. Notamment en tenant compte du caractère sournois du (ou des) coupable(s) compromis à la discrimination raciale et de rendre hommage avec vibrante humilité à cette victime sacrifiée en tenant compte de son exploit surhumain. Véritable oraison funèbre auprès des familles de défuntes tentant rigoureusement de se reconstruire après une tragédie aussi inique qu'impromptue, Wind River traite des thèmes douloureux du souvenir, de la survie, de la résilience, du dépassement de la souffrance avec une pudeur à fleur de peau et une ambiguïté morale quant à l'illégalité de l'auto-justice. Car outre la subtilité de sa mise en scène à sacraliser le "thriller" par le biais d'une caractérisation psychologique fouillée (et limpide) engendrant une réflexion sur la perte de l'être aimée, la providence et la canalisation de la souffrance, Wind River est illuminé par les présences des comédiens Jeremy Renner (un regard viril chargé de cicatrices morales derrière sa carapace stoïque) et Elizabeth Olsen (poignante d'empathie auprès de la victime et de son co-équipier puis de pugnacité durant son ascension professionnelle). Ces derniers formant de manière impromptue un duo commun de justiciers solidaires impliqués dans l'instinct de vengeance et l'initiation d'une survie propre à l'héroïsme.


Un coup de poignard en plein coeur, inextinguible. 
Hommage déchirant à la communauté amérindienne du point de vue d'une jeune martyr d'une endurance physique et morale symbolique, Wind River laisse en état de mutisme sitôt le générique écoulé. Le film s'édifiant en bouleversant requiem auprès des victimes sacrifiées au moment où leur famille se résigne à se reconstruire, entre fragilité démunie et regain de résilience. De mon point de vue personnel (puisque j'en sors traumatisé et que rares sont les films où leur saillie de brutalité me bouleverse aux larmes), Wind River constitue sans doute un chef-d'oeuvre intimiste sur la gestion de la souffrance et de la déveine, faute de la lâcheté de l'homme incapable de réprimer ses bas instincts. 

Bruno Dussart.

Récompenses: Prix Un certain regard, Prix de la mise en scène, Cannes 2017
Festival international du film de Karlovy Vary 2017 : prix du public pour Taylor Sheridan, prix du président pour Jeremy Renner

vendredi 20 octobre 2017

LES VIKINGS

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site cover.box3.net

"The Vikings" de Richard Fleischer. 1958. U.S.A. 1h55. Avec Kirk Douglas, Tony Curtis, Janet Leigh, Ernest Borgnine, James Donald, Alexander Knox, Maxine Audley

Sortie salles France: 15 Décembre 1958. U.S: 28 Juin 1958

FILMOGRAPHIE: Richard Fleischer est un réalisateur américain né le 8 décembre 1916 à Brooklyn, décédé le 25 Mars 2006 de causes naturelles. 1952: l'Enigme du Chicago Express, 1954: 20 000 lieux sous les mers, 1955: les Inconnus dans la ville, 1958: les Vikings, 1962: Barabbas, 1966: le Voyage Fantastique, 1967: l'Extravagant Dr Dolittle, 1968: l'Etrangleur de Boston, 1970: Tora, tora, tora, 1971: l'Etrangleur de Rillington Place, 1972: Terreur Aveugle, les Flics ne dorment pas la nuit, 1973: Soleil Vert, 1974: Mr Majestyk, Du sang dans la Poussière, 1975: Mandingo, 1979: Ashanti, 1983: Amityville 3D, 1984: Conan le destructeur, 1985: Kalidor, la légende du talisman, 1989: Call from Space.


Grand classique hollywoodien au pouvoir de fascination trouble, de par son réalisme historique surfant dans un contexte de spectacle flamboyant,  Les Vikings est bel et bien un chef-d'oeuvre du film d'aventures au souffle épique d'une étonnante envergure. A l'instar de sa spectaculaire bataille finale déployant gros moyens techniques et moult figurants sous l'oeil avisé de Richard Fleischer en pleine possession de ses ambitions. La vigueur des combats barbares se renouvelant sans cesse grâce au dynamisme du montage véloce exploitant aussi bien décors naturels que ceux de la bastille avec un brio d'autant plus formel (sa photo sépia sublimant sans modération des images picturales que l'on croirait extrait d'un bouquin d'histoire !).


Outre ce morceau d'anthologie à la fois immersif et palpitant, le récit se permet en prime de renchérir le goût du spectacle avec une diabolique efficacité lorsque Einar et Erik iront se combattre épées à la main sur la tour de la chapelle. Là encore, Fleischer chorégraphie ce corps à corps avec une inventivité constante car multipliant les angles de vues alambiqués au sein d'un cadre exigu édifié sous haute altitude ! En prime de la qualité percutante d'un jeu d'acteurs expansifs (le toujours aussi fringant Kirk Douglas se dispute ardemment la vedette avec Tony Curtis inopinément crédible dans sa posture bourrue d'esclave en quête d'affirmation et de rébellion héroïque !), Les Vikings bénéficie d'un scénario solide autour de la rivalité de deux frères pour autant indulgents car (inconsciemment lucides de leur parenté puis) communément contraints de collaborer afin de soutirer la promise du roi anglais, Aella. Janet Leigh se glissant dans le corps ténu de la princesse Morgane avec douce fragilité, tourments et perplexité quant à sa nouvelle condition de soumise en proie au chantage des vikings complaisamment machistes et belliqueux.


Décrivant dans un premier temps avec réalisme et souci du détail, fougue passionnelle et violence incisive (même si le hors-champs est souvent préconisé) les us et coutumes des vikings et leur goût pour la guérilla (notamment leur code d'honneur de périr avec l'épée afin de gagner le repos dans l'au-delà), Richard Fleischer parvient à infiltrer un souffle à la fois épique et romantique au fil d'un récit fertile en dissension psychologique lorsque les liens du sang fraternel sont compromis par un terrible secret autour des sentiments d'une promise. Envoûtant, sauvage et d'une beauté formelle capiteuse ! 

Bruno Dussart
2èx

jeudi 19 octobre 2017

MORT SUSPECTE D'UNE MINEURE

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au blog Lupanarsvisions

"Morte sospetta di una minorenne / Too young to die" de Sergio Martino. 1975. Italie. 1h40. Avec Claudio Casinelli, Mel Ferrer, Lia Tanzi, Massimo Girotti, Barbara Magnolfi.

Inédit en salles en France. Italie: 12 Août 1975

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Sergio Martino est un réalisateur, producteur et scénariste italien né le 19 Juillet 1938 à Rome (Italie). 1970: l'Amérique à nu. Arizona se déchaine. 1971: l'Etrange vice de Mme Wardh. La Queue du Scorpion. l'Alliance Invisible. 1973: Mademoiselle Cuisses longues. 1973: Torso. 1975: Le Parfum du Diable. 1975: Morte sospetta di una minorenne. 1977: Mannaja, l'homme à la hache. 1978: La Montagne du Dieu Cannibale. 1979: Le Continent des Hommes poissons. Le Grand Alligator. 1982: Crimes au cimetière étrusque. 1983: 2019, Après la Chute de New-York. 1986: Atomic Cyborg. 1989: Casablanca Express. 1990: Mal d'Africa. Sulle tracce del condor.


Inédit en salles et sous support numérique sur notre territoire, Mort suspecte d'une mineure combine les composantes (en vogue) du polar (les puristes lui préfèreront le terme "poliziesco") et du giallo autour de l'efficacité d'un script assez bien structuré dénonçant (comme son confrère La Lame Infernale) la corruption d'un notable particulièrement aguiché par la coke et les jeunes adolescentes. En filature, un commissaire aux méthodes expéditives tente de découvrir le ou les coupables du meurtre sordide d'une mystérieuse adolescente avec l'appui d'un chapardeur véloce. Plutôt nerveux par son action policière entrebâillée d'une poursuite automobile étonnamment cocasse et assez violent auprès de quelques meurtres stylisés, Mort suspecte d'une mineure constitue un bon divertissement sous l'impulsion musicale du score percutant de Luciano Michelini n'ayant rien à envier au groupe Goblin (une partition rock et entêtante si bien que le chef-d'oeuvre d'Argento, Les Frissons de l'Angoisse s'y fait instinctivement écho !). Sans pour autant laisser de souvenir impérissable, cette série B correctement emballée par le spécialiste Sergio Martino doit notamment son capital sympathie grâce à la solidité de son casting réunissant Claudio Casinelli (très à l'aise en flic réactionnaire entêté), le vétéran Mel Ferrer et la charmante Barbara Magnolfi dans un rôle toutefois assez discret je dois avouer. Enfin, et à moindre échelle, on ne reste pas insensible à l'esthétisme raffiné des décors domestiques typiquement transalpins et parfois même baroques. A découvrir.


Eric Binford.

mercredi 18 octobre 2017

BETTER WATCH OUT

                                                   Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

de Chris Peckover. 2016. 1h29. U.S.A/Australie. Avec Levi Miller, Olivia DeJonge, Ed Oxenbould, Patrick Warburton, Dacre Montgomery, Virginia Madsen.

Sortie salles France: Prochainement. U.S: 6 Octobre 2017

FILMOGRAPHIEChris Peckover est un réalisateur américain.
2010: Undocumented. 2016: Better Watch out.


Conte de noel horrifique d'une saveur vitriolée dans son jeu de cache-cache avec la peur et de manipulation morale auprès des victimes démunies, Better Watch Out demeure une heureuse surprise dans le paysage familièrement formaté du genre car si peu avare en originalité, impudence et créativité. D'une audace détonnante pour ses éclairs de violence tranchés, cette série B remarquablement menée et techniquement maîtrisée (notamment pour l'inventivité et la souplesse de certains plans vertigineux et pour la flamboyance de sa photo !) doit son salut à son scénario à tiroirs constamment surprenant, et aux portraits juvéniles que forment des ados dévergondés.


En pleine période de Noël, Ashley (incarnée par la séduisante et néophyte Olivia DeJonge préalablement entrevue dans The Visit !) joue la babysitter auprès d'une famille respectable en gardant leur fils unique. Mais l'intrusion de mystérieux tueurs dans la demeure va inciter le duo à faire preuve de ruse et courage pour rester en vie, notamment en s'efforçant de récupérer l'arme du paternel planqué sous son lit. Voilà pour le pitch présageant un huis-clos tendu et effréné, sorte de pastiche horrifique de Maman j'ai raté l'avion accouplé d'un autre illustre métrage dont je tairais le nom afin de préserver tout effet de surprise. Car cumulant sur un rythme soutenu péripéties et soubresauts avec autant d'intelligence que d'efficacité (notamment au niveau des réactions censées des ados en porte-à-faux se mesurant à leur vaillance et à leur esprit de provocation), Better Watch out est une pochette-surprise jusqu'au-boutiste. Le spectateur s'interrogeant de prime abord à savoir si dans la séquence redoutée le réalisateur osera aller jusqu'au bout de son concept criminogène par le biais d'idées putassières sachant qu'en l'occurrence tous les protagonistes (ou plutôt la plupart) sont des ados pré-pubères portés sur la sexualité, le machisme et le désir du dépassement de soi.


Progressivement malsain donc quant à la tournure (radicale) des évènements, voir parfois même choquant et dérangeant (sans dévoiler les résultantes des situations stressantes d'embrigadement !), Better Watch Out constitue une farce méchamment sardonique, pied de nez au politiquement correct en cette période sereine des fêtes de Noël. Intense, inventif, subversif, assez captivant et d'un humour noir décapant, le divertissement convainc d'autant mieux sous l'impulsion de comédiens juvéniles épatants de fourberie ou de sobre appréhension du côté des victimes. Spoil ! En tirant mon chapeau à un des acteurs dont je tairais le nom car portant le film sur ses épaules avec un charisme d'une vénéneuse séduction ! Fin du Spoil. Pour l'anecdote, on est également ravi de retrouver en second-plan l'une des stars des années 80, Virginia Madsen (Electric Dreams, Dune, Hot Spot, Highlander, le retour, Candyman, etc...), presque méconnaissable dans son visage tuméfié. Très sympa. 

P.S: Je vous déconseille de visionner tous trailers ou éventuels extraits afin de préserver les nombreux retournements de situation !

En remerciant Pascal Frezzato pour la découverte !
Bruno Matéï