vendredi 25 mars 2016

Sweeney Todd: Le Diabolique Barbier de Fleet Street

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Allocine.fr

"Sweeney Todd: The Demon Barber of Fleet Street" de Tim Burton. 2007. U.S.A/Angleterre. 1h56. Avec Johnny Depp, Helena Bonham Carter, Alan Rickman, Edward Sanders, Jamie Campbell Bower, Timothy Spall, Jayne Wisener

Sortie salles France: 23 janvier 2008. U.S: 21 Décembre 2007

FILMOGRAPHIE: Timothy William Burton, dit Tim Burton, est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né le 25 Août 1958 à Burbank en Californie. 1985: Pee-Wee Big Adventure. 1988: Beetlejuice. 1989: Batman. 1990: Edward aux mains d'argent. 1992: Batman, le Défi. 1994: Ed Wood. 1996: Mars Attacks ! 1999: Sleepy Hollow. 2001: La Planète des Singes. 2003: Big Fish. 2005: Charlie et la Chocolaterie. 2005: Les Noces Funèbres. 2007: Sweeney Todd. 2010: Alice au pays des Merveilles. 2012: Dark Shadows. 2012: Frankenweenie. 2014: Big Eyes. 2016 : Miss Peregrine's Home for Peculiar Children.


D’après un roman publié en 1846 par Malcolm Rymer et Thomas Peckett, Sweeney Todd s’inspirerait des exactions d’un véritable serial killer : un barbier ayant sévi à Paris au XIVᵉ siècle avec la complicité d’un pâtissier installé en face de son échoppe, lequel cuisinait des pâtés en croûte à partir des cadavres livrés par son acolyte. Adaptée au fil du temps au cinéma, en téléfilm, en radiophonie et en théâtre — de 1847 jusqu’en 2006 -, la légende réapparaît en 2007 sous la forme d’une comédie musicale horrifique sous la houlette de Tim Burton. À la vision d’un tel spectacle, à la fois iconoclaste et hardcore, on se demande encore comment le cinéaste a pu convaincre Hollywood de financer pareille entreprise. Burton ne lésine pas sur les gerbes de sang, offrant des égorgements d’un réalisme tranchant, tout en orchestrant une fable de vengeance, de romance et de folie. Le film retrace le sombre destin de Benjamin Barker, barbier londonien emprisonné quinze ans pour un motif dérisoire par la cruauté d’un juge véreux, épris de sa femme. Devenu Sweeney Todd, et épaulé par une pâtissière spécialiste des tourtes à la viande, il prépare sa terrible revanche contre le juge Turpin (impeccable Alan Rickman, entre orgueil tranquille et cruauté décomplexée), tout en espérant retrouver son épouse prisonnière de cet imposteur.


Émaillé de mélodies éclectiques chantonnées avec emphase par une troupe habitée, Sweeney Todd oscille sans cesse entre comédie et horreur pure, brassant des émotions d’une austérité funèbre. Porté par un apparat gothique - décors expressionnistes, costumes endeuillés, photo désaturée, reconstitution criante de vérité - le film enivre la vue, guidé par le duo maudit Todd/Mrs. Lovett. Johnny Depp incarne avec froideur hiératique un barbier mélancolique rongé par une rancune incurable, tandis qu’Helena Bonham Carter oppose une sensualité trouble, complice secrètement amoureuse dont le regard vénéneux insuffle une sournoiserie subtile. Si l’intrigue dramatique sacrifie le suspense à la mécanique implacable de la vengeance, le film séduit et effraie par son ambiance hybride, quasi indicible, où la violence barbare se mêle à une galerie d’âmes corrompues. Le réalisme du climat opaque - parfois dépressif - déconcerte, d’autant que la tournure cruelle des événements ne laisse place à aucune illusion. La folie du barbier est retranscrite sans romantisme, jusqu’à l’issue nihiliste de l’épilogue qui laisse sans voix.


Tour à tour baroque et sardonique, profondément malsain et sordide, romantique et tragiquement cruel, Sweeney Todd s’impose comme un spectacle horrifique halluciné, alliant l’ivresse des numéros musicaux à la sauvagerie d’un ultra-gore à couper au rasoir. Refusant le divertissement ludique, Tim Burton cisèle avec une virtuosité technique un ofni inclassable, convoquant à la fois l’héritage du muet et la modernité de l’horreur graphique. Par son climat onirico-macabre, aussi méphitique qu’envoûtant, le film prévient d’emblée le spectateur : son aura vitriolée ne laisse pas indemne. Œuvre magnifique, mais traversée d’un désespoir mélancolique en perdition morale, elle laisse dans la bouche une amertume dramatique difficile à digérer sitôt le générique clos.
Public averti.

— le cinéphile du cœur noir
2èx. 29.08.25. Vost

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