vendredi 13 mai 2011

LA GRANDE MENACE (The Medusa Touch)

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site scifi-movies.com

de Jack Gold. 1978. Angleterre/France. 1h44. Avec Richard Burton, Lee Remick, Lino Ventura, Harry Andrews, Marie Christine Barrault.

Sortie en France en Novembre 1978.

FILMOGRAPHIE: Jack Gold est un réalisateur et producteur britannique né le 28 Juin 1930 à Londres. 1967: Famine, 1968: The Bofors Gun, 1969: The Reckoning, 1973: Who ?, 1975: Man Friday, 1976: Le Tigre du ciel, 1978: The Sailor's Return, La Grande Menace, 1980: Le Petit Lord Fauntleroy, 1984: The Chain, 1987: Les Réscapés de Sobibor, 1993: Der Fall Lucona.

                                      

"Au lieu de vous inquiéter pour ce cercueil de 3 milliards de dollars qui file vers la lune, accordez au moins une pensée aux millions d'êtres qui auraient pu être nourris avec tout cet argent consacré à l'ambition Nationale. Ecoutez moi Docteur Zonfeld, j'ai trouvé le moyen de Faire le sale boulot de Dieu à sa place ..... , dans quelques minutes les astronautes approcheront de la sphère lunaire et majestueuse,  je vous donne ma PAROLE qu'ils ne reviendront Pas et Jamais "

Sorti la même année que Patrick et Fury, et trois avant Scanners, le britannique Jack Gold s'inspire du roman de Peter Van Greenaway pour traiter du thème de la télékinésie avec La Grande Menace. Pour rappel, cette faculté métapsychique consiste à mettre en mouvement la matière par la force mentale de l'esprit (du mot grec, télé: à distance, et kinésie: mouvement). Le romancier John Morlar est retrouvé sauvagement assassiné le crane fracassé dans son appartement londonien. Chargé d'une mission en Angleterre, l'inspecteur français Brunel mène enquête quand bien même la victime reprend subitement vie. Son investigation s'oriente vers le témoignage du psychiatre Zonfeld qui eut la tâche de suivre en consultation la victime Morlar. Un patient persuadé de provoquer des catastrophes par la simple force de son esprit. 

                                       

Production franco-anglaise à la distribution étonnamment hétéroclite, La Grande Menace fut mal accueilli à sa sortie par la presse alors qu'il engrange tout de même dans notre pays hexagonal 241 762 entrées uniquement sur Paris. Aux Etats-Unis, le film est même nominé un an plus tard pour le Saturn Award du Meilleur film d'horreur sans toutefois bénéficier du prix royal. Quand bien même au fil des décennies, il finit par se forger une réputation élogieuse de la part des fantasticophiles. Car dans un habile alliage d'enquête policière, de fantastique et même de catastrophe, La Grande Menace tire parti de sa densité de par l'originalité de son intrigue charpentée et du portrait cérébral imparti au potentiel coupable. Remarquablement incarné par Richard Burton littéralement magnétique en écrivain névrosé au regard saphir perçant, le film cultive une constante vigueur grâce à sa prestance névrosée à l'ambivalence identitaire. Avec classe et retenue, Lee Remick lui partage la vedette en psychiatre rationnelle délibérée à le ramener à la raison, faute de son incrédulité à cautionner l'existence du surnaturel. Enfin, le charismatique Lino Ventura se fond dans le corps de l'inspecteur Brunel dans une posture à la fois austère et studieuse afin de découvrir qui a tenté d'assassiner Morlard et pour quel mobile. Pour en revenir au cheminement narratif, et par le biais de nombreux flashbacks, Jack Gold nous brosse notamment avec détails surprenants le portrait de ce frondeur déjà brimé par son entourage depuis son enfance. Tant auprès de son professeur d'histoire tyrannique, de ses parents condescendants que de la désinvolture de sa femme infidèle épaulée d'un amant arrogant.

                                     

Persuadé qu'il est capable de nuire à autrui par la seule force de sa pensée, Morlar, névrosé et réduit à la solitude, contacte donc un psychiatre afin d'extérioriser ses tendances psychotiques émanant de sa susceptibilité et sa dépression, faute d'une insoluble quête identitaire. Au-delà de l'intensité de son suspense intelligemment captivant (notamment auprès de son incroyable épilogue catastrophique !) exacerbé d'une solide réalisation, les séquences-chocs qui émaillent le récit sont toutefois désamorcées par la suggestion plutôt que l'outrance lors des évènements dramatiques particulièrement meurtriers. Une façon finaude d'y manipuler le spectateur, dubitatif mais constamment fasciné par la persuasion de Morlar, car partagé dans le doute pour ses éventuels pouvoirs surnaturels jusqu'à sa conclusion aussi bien cinglante que terrifiante. Quand bien même durant toute l'intrigue, et depuis la tentative d'assassinat, Morlar est malgré tout réduit à la paralysie car confiné dans une chambre d'hôpital dans un état semi comateux. Or, peu à peu régénéré de ses facultés mentales, il  commence à inquiéter le corps médical et policier décontenancé de son cas pathologique inopinément robuste. Ainsi, sur le principe du genre catastrophe, le point d'orgue, en l'occurrence contrairement homérique, redouble d'intensité et de suspense exponentiel lorsque Brunel finit par se laisser convaincre de l'affront surnaturel du patient au point de tenter de sauver lors d'une ultime bravoure des centaines de dévots venus inaugurer l'immense cathédrale.

                                       

Angoissant, troublant et rondement mené sous le pilier d'une enquête surnaturelle laissant planer le doute quand au profil équivoque des potentiels coupables, La Grande Menace fascine en crescendo à travers la subtilité de sa mise en scène solide tentant d'élucider le portrait névralgique du meurtrier névrosé en proie à une impitoyable solitude. Et ce jusqu'au nihilisme de son épilogue improbable résolument escarpé, de manière également à immortaliser sur écran un profil démonial inextinguible ! 

*Bruno
28.01.19.
13.05.11

REVENGE (Haevnen/In a better World) OSCAR DU MEILLEUR FILM ETRANGER 2011



de Susanne Bier. 2010. Danemark/Suede. 1h53. Avec Mikael Persbrandt, Trine Dyrholm, Ulrich Thomsen, Markus Rygaard, William Jøhnk Nielsen, Bodil Jorgensen, Elsebeth Steentoft, Martin Buch, Anette Støvlebæk, Kim Bodnia…

Sortie en salles en France le 16 Mars 2011

FILMOGRAPHIE: Susanne Bier est une réalisatrice danoise née à Copenhague le 15 Avril 1960.
1989: Songlines, 1991: Freud quitte la maison, 1992: Lettre à Jonas, 1994: Affaires de famille, 1995: Like it never was before, 1997: Sekten, 1999: The One and Only, 2000: Once in a lifetime, 2002: Open Hearts, 2004: Brothers, 2006: After the Wedding, 2007: Nos souvenirs brûlés, 2010: Revenge. 

                     

Auréolé du prix commun du meilleur film Etranger pour la cérémonie des Oscars ainsi que celle des golden Globes 2011, Revenge est un drame intense et bouleversant venu du pays Danois sur les difficultés relationnelles parentales et le traitement de la violence extériorisée, innée en chaque être humain. 

Elias, un garçonnet dont les parents viennent de se séparer est le souffre douleur d'une bande de collégiens trubilions. Il se lit d'amitié avec un nouveau camarade, Christian, qui vient de perdre sa mère décédée d'un cancer. Ce dernier va lui porter secours en rouant de coups et menaçant l'un des oppresseurs d'Elias avec un couteau dans les toilettes du collège. Depuis, les deux enfants se lient d'une amitié complice mais un affrontement physique entre le père d'Elias hostile à toute forme de violence contre un inconnu castrateur vont leur permettre l'éventualité d'une vengeance incongrue. 

                       

Sur le thème on ne peut plus d'actualité de la banalisation de la violence dans les milieux scolaires et les relations parentales souvent conflictuelles à tenter de former l'éducation de leur progéniture,Revenge décrit avec sobre vérité humaine et acuité psychologique deux portraits de famille fragilisés par une fracture conjugale commune. 
La réalisatrice Susanne Bier nous fait partager avec une sensibilité prude les moments intimes de deux enfants fragilisés, introvertis sur eux-mêmes par la cause indirecte de parents déjà lourdement éprouvés par leur échec sentimental impliquant l'idylle amoureuse de leur vie. 
C'est d'abord Christian, pronfondément perturbé par la disparition de sa mère décédée rigoureusement d'un cancer qui interpelle le spectateur dans ses blessures morales infligées contre son gré et sa violence radicale extériorisée de manière brutale envers des rejetons insolents cédant mécaniquement à la provocation de la violence par complexe d'infériorité. 
Alors que le jeune Elias, fils d'un père docile, médecin renommé dénué d'agressivité car déjà lourdement accablé par les conflits guerriers d'un camp africain de réfugiés dont il a la tâche de devoir soigner chaque blessé, se retrouve inévitablement en rôle de victime malgré lui. Un enfant chétif au bord du marasme car n'ayant pas les outils en main pour avoir l'instinct de fierté et l'amour propre à pouvoir se défendre en cas d'agression verbale ou physique offusquée dans les brimades de son honneur bafouée. 
C'est à la suite d'une rixe entre le père d'Elias et un ouvrier irascible que les deux enfants rebutés vont décider de venger ce père pacifiste se refusant à tolérer le droit de se défendre par la riposte machinale de la violence inculte. Et cela, même si celui-ci va prouver une dernière fois aux enfants que répondre à la brutalité gratuite par la violence vindicative ne peut résoudre un conflit de prime abord accès sur l'imbécilité primaire.
Cette vengeance abrutissante à haut risque compromise par deux ados rebelles déstructurés est le fruit de leur blessure intérieure, leur malaise existentiel, leur quête indentitaire pour le passage délicat d'une adolescence cruelle, de surcroît entaillée par un désordre conjugale dont l'un est destitué de sa mère inéquitablement décédée. 

                      

Susanne Bier nous démontre sans pathos ni discours grandiloquant ou moralisateur les relations abstraites et exigeantes que les parents issus ici d'un réseau social confortable doivent faire face avec difficulté et assumer pour leur postérité en devenir. Le portrait établi envers Christian et Elias, pronfondément meurtris dans leur chair illustrent à quel point la période la plus fragile de l'existence humaine se trouve dans le difficile cap de l'adolescence. 

Par l'impartialité naturelle de comédiens magnifiquement modestes (les parents érudits sont aussi criant d'humanité que les deux enfants poignants de fébrilité innocente) et structuré d'un scénario d'une rare densité, Revenge nous entraine contre vents et marées dans une magnifique initiation à la tolérance et l'inculcation infantile. 
Mis en scène avec réalisme brut mais tempéré, cette oeuvre bouleversante est autant une réflexion immuable sur le désir de vengeance, sur les effets néfastes de la violence banalisée, sur sa répercusion morale intuitive et notre comportement épidermique face à l'intolérance néfaste. A moins d'imposer une certaine forme de lacheté loyale octroyée contre toute forme de véhémence tendancieuse. Une oeuvre fébrile à deux doigts de sombrer dans la tragédie la plus répréhensible mais sauvée par l'humanité rédemptrice de nos héros désemparés.

                     
12.05.11
Brnuo Matéï.

                                                     

dimanche 8 mai 2011

Justice Sauvage / Walking Tall


de Phil Karlson. 1973. U.S.A. 1h40. Avec Joe Don Baker, Elisabeth Hartman, Leif Garrett, Daw Lyn, Noah Beery Jr, Lurene Tuttle, Ed Call, Dominick Mazzie, Lynn Borden.

Sortie salles U.S.A: 22 Février 1973

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Phil Karlson est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 2 Juillet 1908 à Chicago, décédé le 12 décembre 1985 à Los Angeles. 1948: Rocky, 1949: Le Chat sauvage, 1952: Le 4è Homme, 1959: Les Incorruptibles défient Al Capone, 1961: Le Dernier passage (The Secret Ways), Les Blouses Blanches (The Young Doctors) , 1962: Un direct au coeur (Kid Galahad) , 1963: Massacre pour un fauve (Rampage) , 1966 : Matt Helm, agent très spécial (The Silencers) , 1967 : La poursuite des tuniques bleues (A Time for Killing) , 1968: Alexander the great (TV) , 1969: Matt Helm règle ses comptes (The Wrecking Crew), 1970 : l'Assaut des jeunes loups (Hornets' Nest) , 1972: Ben, 1973: Justice Sauvage (Walking Tall) , 1975: La trahison se paie cash  (Framed)

                                   

Tourné la même année qu'Un Justicier dans la Ville mais sorti un an et demi plus tard (le 24 Juillet 1974 aux USA), Justice Sauvage entame le courant du film d'auto-défense alors que le 23 Décembre 1971 explosait sur les écrans l'Inspecteur Harry de Don Siegel, créant ainsi son personnage iconique de flic charognard aux méthodes expéditives aussi brutales qu'illégales. Le film entrepris par Phil Karson aura lui aussi connu un tel succès public que trois autres suites seront rapidement mises en chantier durant toute la décennie seventie. PitchDans une contrée bucolique, un ancien catcheur à la retraite revenu dans sa région natale est élu par sa communauté du Tennessee pour devenir leur shérif. Un homme de loi drastique et équitable par qui la corruption et la criminalité seront définitivement bannis de sa ville empoisonnée par une mafia régnant en maître dans un bordel. Une guerre sans merci est alors livrée entre les deux camps.

                                      

Voici l'une des oeuvres fondatrices du film d'auto-défense, une série B célébrée par une horde de fans adeptes de la violence réac qui frappe brutalement dans un défouloir de scènes d'action explosives habilement concoctées. Si bien que ce pur western involontairement pittoresque (on jurerait qu'il fut réalisé durant les années 50) est aujourd'hui devenu un sommet de loufoquerie dompté par la présence robuste de Joe Don Baker auquel les scènes de violences très brutales surprennent encore par son âpreté et sa verdeur infligée. La narration est d'un classicisme on ne peut plus balisé dans cette incessante guerre de rixe entre un shérif redresseur de tort condamné à rétorquer de manière sauvage auprès d'une bande de crapules immorales, propriétaires d'un bordel champêtre. S'ensuit donc à rythme métronome une succession d'incidents majeurs commis en défaveur de notre shérif continuellement pris à parti mais armé d'un imposant gourdin pour y nettoyer les truands opiniâtres des quartiers de son patelin en ébullition. Il faut le voir dans sa posture de catcheur entrer dans l'enceinte d'un tribunal, saisi de sa matraque pour présenter au juge les derniers larrons qu'il vient d'appréhender ! Des situations aussi improbables et grossières, Justice Sauvage en regorge à foison et tous les personnages sont si caricaturés à l'extrême qu'il transcendent la consternation pour créer la sympathie. Que ce soit la femme chérissante de Budford, chétive, craintive et aimante, les enfants dociles fascinés par leur paternel  héroïque, les grands parents puritains et protecteurs, l'acolyte de couleur noir à la trogne bonnard fidèlement associé au shérif inflexible ou les malfrats lâches et orduriers davantage rancuniers dans leurs trafalgars obtempérés.

                                    

Ainsi, au sein de ce vrai western (faussement) contemporain reprenant tous les poncifs du genre, l'ambiance est si surréaliste dans son époque contée, exacerbée de personnages saugrenus, convaincus de leur prestance cordiale que Justice Sauvage entraîne de bonne foi le spectateur dans une guérilla puérile lardée de scènes de violences sauvages ! Les coups de poing et de burin pleuvants tous azimuts et les décharges de chevrotine explosant les corps ensanglantés par de furieux impacts de balle. A ce titre, la scène la plus foudroyante dans son intensité explicite est ce moment dramatique arrivant de manière fortuite, pour un personnage clef décimé par une balle explosant l'arrière de sa boite crânienne durant une poursuite automobile. De surcroît, la spontanéité rigoureuse et l'impressionnant charisme viril du personnage principal campé par Joe Don Baker apporte une dimension humaine équivoque de par l'illégalité et la tolérance de ses exploits héroïques suicidaires, alors qu'il manquera à trois reprises de mourir in extremis sous les balles perfides de l'ennemi rival. Le manque d'enjeu dramatique s'y fait malgré tout cruellement sentir durant le fil narratif et devient plus contraignant à force que le métrage évolue dans ces incessantes attaques vindicatives répertoriées dans les deux camps opposés. Jusqu'à ce que l'ultime quart d'heure reprenne une certaine ampleur lors de sa tragédie familiale, ultime point d'orgue d'une vengeance meurtrie aveuglée par la haine et la rancoeur.

                                    

Ainsi donc, Justice Sauvage se décline en petit classique d'exploitation faisant aujourd'hui office d'attachant divertissement rétro assez atypique. Le savant dosage de violence rrugueuse, les situations toutes plus saugrenues les unes que les autres, ces personnages stéréotypés à l'extrême et l'imposante présence de Joe Don Baker achèvent de rendre ce succédané sémillant, à défaut d'être passionnant, que les inconditionnels du genre ne manqueront pas d'affectionner.

08.05.11.
*Bruno

vendredi 6 mai 2011

LE CHATEAU DES MORTS-VIVANTS (Il castello dei morti vivi)


de Luciano Ricci et Lorenzo Sabatini. 1964. Italie/France. 1h31. Avec Christopher Lee, Donald Sutherland, Gaia Germani, Philippe Leroy, Jacques Slanislawski, Mirko Valentin, Antonio de Martino, Luigi Bonos, Luciano Pigozzi, Ennio Antonelli.

FILMOGRAPHIE: Luciano Ricci est un réalisateur et scénariste italien né le 16 Novembre 1928, mort le 22 Juin 1973. 1962: Solo contro Roma. 1962: Giuseppe venduto dai fratelli. 1964: Senza sole nè luna. 1964: Le chateau des morts-vivants.
Lorenzo Sabatini est un réalisateur et scénariste italien. 1964: Le Chateau des morts-vivants. 1969: Juliette de Sade. 1970: Echec à la maffia.

                                  

Inédit en France, Le Chateau des Morts-Vivants est un modeste film d'épouvante concocté par un  trio de réalisateurs, et ce d'après un scénario de Michael Reeves (non crédité au poste d'assistant réalisateur). Il me parait paradoxale que cette production franco-italienne, particulièrement influencée par le gothisme de Mario Bava (Le Masque du démon sortit sur les écrans 4 ans au préalable), soit resté invisible dans nos contrées, non seulement en salles mais aussi en vidéo. D'autant plus qu'en têtes d'affiche se bousculent la valeur sûre Christopher Lee, le français Philippe Leroy et enfin  Donald Sutherland dans un triple rôle (secondaire). Au 19è siècle, une troupe d'animateurs ambulants sont invités par le comte Drago dans son château reculé. Malgré la mise en garde d'une vieille sorcière sur leur chemin du trajet, nos héros poursuivent leur chemin. Accueillis par le serviteur Sandro, ils ne se doutent pas que Drago cache dans une pièce une exposition de cadavres monolithiques.

                                        

Débutant par un prologue sarcastique en trompe l'oeil, cette oeuvre bisseuse au charme vintage attise immédiatement la sympathie, notamment auprès de ces attachants personnages. Des forains concoctant auprès d'une foule champêtre du 19è siècle des spectacles macabres de mises à mort ! Epaulé d'une superbe photo noir et blanc et de décors gothiques singuliers, l'intrigue nous entraîne dans le refuge macabre d'un manoir antique abritant des animaux embaumés ainsi que des cadavres humains figés pour l'éternité. Une amusante variation en somme auprès des mannequins de cire tant et si bien que le Comte Drago renoue avec les travaux obsessionnels de Vincent Price entrepris dans l'Homme au masque de cire tourné 9 ans plus tôt. L'efficacité du récit émane des disparitions inquiétantes de chacun des personnages piégés dans le dédale funéraire du comte Drago. A ce titre, le final somptueusement baroque dévoilant enfin les travaux finaux de ses horribles méfaits nous scande sa plus belle séquence de poésie corporelle, qui plus est accentuée d'une atmosphère feutrée étrangement surnaturelle !

                                   

Avec une classe autorité et un magnétisme glaçant, Christopher Lee réussit une fois de plus à camper un personnage aussi bien lugubre qu'orgueilleux lors de ses exactions, pour ne pas dire azimuté dans sa quête obsessionnelle d'embaumer des humains afin de préserver leur jeunesse auprès d'un procédé révolutionnaire. Son valet incarné par Mirko Valentin ne manque pas non plus de charisme mortifère en faire-valoir criminel maladivement fasciné par les expériences morbides de son maître. D'autres personnages secondaires, telle la sorcière fétide (superbement campée par Donald Sutherland dans un rôle ternaire !), le nain Nick (Antonio De Martino), Eric le leader ambulant (Philippe Leroy) ou la ravissante Laura (Gaia Germani) instaurent une présence aussi convaincante afin de rehausser l'aura ombrageuse de cette farce macabre.

                                        

Soigneusement réalisé avec savoir-faire formel, Le chateau des Morts-vivants constitue une  surprenante curiosité latine. Une série B bisseuse agréablement rétro, parfois même violente (en se resituant dans le contexte de l'époque) et surtout exacerbé d'un décorum parfois baroque, telles ses immenses statues de pierre animalières ornant les jardins du château. L'efficacité du récit habilement conté, la beauté fulgurante de certaines images macabres ainsi que son casting inquiétant achèveront de séduire les amoureux du genre gothique que Bava inaugura de son empreinte avec Le Masque du Démon.

* Bruno

Dispo chez ARTUS FILMS en dvd.

06.05.11

jeudi 5 mai 2011

ZOMBIE LOVER (MAKE-OUT WITH VIOLENCE) Grand Prix du Jury au festival d'Atlanta 2008.


des frères Deagol. 2008. 1h41. Avec Eric Lehning, Cody DeVos, Leah High, Brett Miller, Tia Shearer, Jordan Lehning, Josh Duensing, Shellie Marie Shartzer, Amanda Bailey, David Carney, Jack Doyle, Kevin Doyle, Patricia Doyle, Zach Duensing, Steve Duensing.

Traduction Française: Rouler une pelle avec violence.

Sortie en France le 03 Mai 2011.

                        

FILMOGRAPHIE: Les frères Deagol sont des réalisateurs, scénaristes et producteurs de leur premier long-métrage, Make-out with violence.

Patrick et Carol sont deux frères jumeaux venant juste de terminer leurs études universitaires. Ils vivent dans une petite ville américaine de banlieue avec leur jeune frère Beetle. Un jour, la belle Wendy, une amie de l’université, disparaît. Un moment difficile pour les deux jumeaux, secrètement amoureux de la jeune femme. En se baladant dans les bois, les frères vont tomber sur le cadavre de Wendy. Un cadavre, mais vivant… Les jumeaux vont alors ramener la jeune femme chez eux et essayer d’en prendre soin en secret

                        

Bon, c'est un excellent film indépendant qui sort vraiment des sentiers battus. C'est parfois touchant, original, troublant mais irritant, déroutant, très frustrant car je ne m'attendais pas du tout à ça. Le personnage de la morte vivante est magnifiquement exploitée mais uniquement dans la posture atypique d'un comportement anémique de zombie inerte, totalement lymphathique. L'archétype est ici habilement renouvelé, réexploité.
2/3 scènes sont absolument magnifiques dans leur poésie trouble et macabre (le gateau d'anniversaire, le final dans la piscine) mais la romance nécrophile, mélancolique et désespérée passe trop en second plan je trouve. De ce fait, je trouve que le relation entre le garçon amoureux et sa dulcinée exsangue perd beaucoup de son intensité émotionnelle présagée au profit des romances éperdues entre les autres personnages et celles qui souhaite entamer une vraie relation amoureuse.
La bo est formidable, les personnages ont tous une belle dimension humaine (le petit garçon est formidable de naturel), la mise en scène est inspirée et inventive mais ce faux film de zombie peut largement rebuter ceux qui n'étaient pas avertis.
A découvrir pour public averti.

                          
05.05.11.
Bruno Matéï.

mercredi 4 mai 2011

Fort Bronx - New-York Connection / Night of the Juggler


de Robert Butler. 1980. U.S.A. 1h41. Avec James Brolin, Cliff Gorman, Linda Miller.

Sortie en France en Septembre 1980.

FILMOGRAPHIE: Robert Butler est un réalisateur et producteur américain né le 17 novembre 1927 à Los Angeles, Californie (États-Unis). 1974: The Ultimate Thrill . 1978: Hot Lead and Cold Feet . 1980: Fort Bronx, New-York Connection. 1981: Underground Aces . 1984: Up the Creek . 1997: Turbulence à 30 000 pieds. 2009: Where do the Balloons Go ?


                                    

Sortie dans l'indifférence générale à l'orée des années 80, Fort Bronx - New-York connection est un film d'action urbain mis en scène par un spécialiste de séries TV. A mi chemin entre la comédie (involontaire) et la série B d'exploitation pleine de vigueur, ce film Bis fait presque figure d'ovni dans son alliage de cocasserie, d'action échevelée et de péripéties toutes plus dantesques et débridées les unes que les autres. Le Pitch: Ancien flic devenu chauffeur de poids lourd, Sean Boyd est contraint de se lancer à la poursuite d'un mystérieux kidnappeur qui vient d'enlever sa fille Kathy sous ses propres yeux. Après une longue traque insoluble à travers les rues de Los Angeles, le père adresse une déposition à son ancien commissariat mais tombe sous les mains du sergent Barnes, un homme qu'il fit condamner pour corruption. S'ensuit une violente altercation entre les deux hommes mais Sean réussit in extremis à s'échapper des locaux pour tenter à nouveau de retrouver sa fille en désespoir de cause.

                                       

Après dix minutes d'exposition de nos protagonistes (le père de famille divorcé, sa fille docile chérissant celui-ci ainsi que le kidnappeur prêt à commettre son irréversible méfait), l'intrigue démarre sur les chapeaux de roue avec une incroyable course poursuite à pied et en véhicule entre Sean Boyd (constamment à la traîne mais imperturbable et déterminé) et son odieux ravisseur dans la jungle urbaine de New-York. Formidablement mis en scène avec une habile gestion  des évènements exposés à travers son incessant jeu de cache-cache de ruelles bondées de citadins, le réalisateur s'emploie à filmer avec une intense efficacité un florilège d'incidents impromptus compromis contre nos deux protagonistes intrépides. Après ce moment haletant riche en frénésie saugrenue, notre héros vindicatif  se retrouvera dans un commissariat afin d'y déposer sa plainte pour enlèvement.  

                                         

La narration échevelée de Fort Bronx, New-york connection (quel titre bisseux alléchant !) étant établie en fonction des rencontres fortuites que Sean traversera durant son cheminement à travers une urbanisation aliénée où s'y côtoient proxénètes, porto-ricains, travellos, prostituées, sdf crapuleux dans des décors glauques de peep-show (on remarquera au passage l'apparition clin d'oeil d'une célèbre actrice X dont j'ignore le nom) ou de terrains vagues insalubres et malfamés. L'intrigue 
parfaitement rythmée prend donc des allures de délire pittoresque dans ces incessantes rixes avec des personnages effrontés ou putanesques tel ce groupe de porto-ricains déterminé à faire la peau à notre héros blanc venu empiéter sur leur territoire. Sean, qui était élancé en pleine poursuite contre son oppresseur devra donc aussi se mesurer contre cette bande organisée de délinquants meurtriers prêts à le poignarder! Et le plus jubilatoire dans tout celà c'est qu'il foncera tête baissée contre ces énergumènes pour frapper sur tout ce qui bouge, au péril de sa vie. Le profil hébété de notre kidnappeur inculte n'est pas non plus dénué de fantaisie saugrenue dans sa tâche ardente d'avoir kidnapper une adolescente contre une importante rançon. Une entreprise à haut risque pour ce faux contestataire, peu adroit dans sa psychologie rudimentaire, décidant au moment opportun de partir à l'étranger parmi la présence bienvenue de son otage juvénile en guise de filiation improvisée.

                                     

Hormis un doublage français exécrable (tirant le film vers la série Z), Fort Bronx, New-York Connection est un chouette délire assumé d'action chevronnée et de revirements improbables, de manière à combler le spectateur investi dans une traque ne nous laissant rarement de répit. Dominé par un James brolin pugnace et quelques seconds couteaux épatants de charisme indocile (Dan Hedaya parfait en sergent irascible), cette furieuse série B illustre également en toile de fond une description réaliste d'une Amérique en état de marasme, écho à la folie environnante de cette furieuse équipée lâchée dans l'antre d'un dédale urbain.
                     
04.05.11.
Bruno



mardi 3 mai 2011

MAS NEGRO QUE LA NOCHE (Plus noir que la nuit)

                     

de Carlos Enrique Taboada. 1975. Mexique. 1h45. Avec Claudia Islas, Susana Dosamantes, Helena Rojo

FILMOGRAPHIE:  Carlos Enrique Taboada est un réalisateur, scénariste et producteur mexicain né le 18 Juillet 1929, mort le 15 Avril 1997.

Une femme reçoit une ancienne demeure en héritage d'une tante. Elle s'y installe avec trois amies mais très vite des événements étranges se produisent...







dimanche 1 mai 2011

NOCES SANGLANTES (He knows you're alone)


de Armando Mastroiani. 1980. U.S.A. 1h33. Avec Caitlin O'Heany, Don Scartino , Elisabeth Kemp, Tom Rolfing, Lewis Arlt, Patsy Pease, James Rebhorn, Tom Hanks.

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Armand Mastroianni, né le 01 Aout 1948 à New-York est un réalisateur et scénariste américain surtout actif à la télévision.
1980: Noces Sanglantes, 1982: Un tueur dans la ville, 1986: The Supernaturals, 1987: Machinations, 1989: Cameron's closet, 1990: Double Revenge, 1991: Perfect Crimes (télé-film), 1994: La Blonde et le privé (télé-film), 1995: Virus (télé-film), 2007: Sharpshooter, Final Approach, Pandemic (télé-film), 2008: A Gunfighter's Pledge, Black Widow, Grave Misconduct (télé-film), 2009: Une seconde vie.

                          

Par le réalisateur du sympathique thriller fantastique, Un tueur dans la ville, Armando Mastroiani avait réalisé deux ans auparavant son premier essai derrière la caméra avec He Knows you're alone, traduit en France par Noces Sanglantes (titre pour une fois mieux approprié que son homologue originel !).
Un petit slasher fortement inspiré du mythique Halloween de John Carpenter, tourné 2 ans au préalable, auquel il empreinte la même structure narrative dans le cheminement meurtrier d'un tueur fantomatique déterminé à décimer tous les couples infidèles sur le point de se marier.

Dans une bourgade des Etats-unis, un mystérieux psychopathe sévit pour décimer tous les couples ayant une relation infidèle avec leurs amants. Mais l'un des maris veufs a juré de retrouver le coupable de sa défunte dans une traque inlassable et studieuse.
C'est suite à une rupture sentimentale qu'il aura lui même subit quelques années plus tôt avec sa dulcinée que notre tueur vindicatif s'est engagé dans une irrépressible folie meurtrière. 
Bientôt, Amy est sur le point d'épouser son compagnon tandis que l'un de ses ex amis irascible de jalousie réfute à ce qu'elle se laisse passer la bague au doigt.
Le tueur méthodique rode autour de sa nouvelle proie et observe chaque témoin fréquentant la jeune aimante.

                       
 
Deux ans après la sortie du chef-d'oeuvre Halloween, Armand Mastroiani s'attelle lui aussi à exploiter le filon du tueur fou commettant une vague de crime dans une paisible bourgade avec plus ou moins de dextérité dans son sens de l'efficacité soumis.
Le préambule, inventif et surprenant, a été à coup sûr une véritable source d'inspiration pour Bigas Lunas, responsable du remarquable et expérimental Anguish (en français, Angoisse) mais aussi Wes Craven avec son second volet de Scream.
Aux abords d'un terrain vague bucolique, un couple se bécote dans une voiture alors qu'une présence hostile rode aux alentours. Revirement de situation ! il s'agissait en faite de la ritournelle du "film dans le film" ! Nous étions entrain de voir la séquence angoissée d'un métrage que des spectateurs d'une salle de ciné étaient entrain d'observer via l'écran géant. Alors que l'une des spectatrices terrorisée va se réfugier dans les toilettes, un véritable tueur s'est introduit dans l'enceinte du cinéma ! De retour des sanitaires, la jeune fille ombrageuse rejoint la place de son siège située à côté de sa comparse inflexible tandis que le meurtrier se retrouve assis juste derrière elle. Sur l'écran de cinéma, l'autre tueur fictif s'apprête à décimer la protagoniste, témoin affolée du meurtre de son compagnon. Mais dans la salle de cinéma, le vrai tueur attend le moment opportun pour revoir ce fameux passage meurtrier et perpétrer lui même en direct du hall cinématographique son nouveau crime. Un meurtre sauvagement exercé à l'arme blanche envers une dulcinée infidèle qui était sur le point de se marier !

                        

Après avoir assisté à cette séquence étonnante et intense, il est impossible de ne pas songer au fil de l'intrigue d'Angoisse de Bigas Lunas ! Tant au niveau des décors avec ces lieux lugubres et anxiogènes, des toilettes à la salle de ciné, des protagonistes dont l'une se trouve en état de marasme et du fameux tueur fou influencé par la violence fictive d'un meurtre imagé sous pellicule !
Après cette première scène choc pertinente, toute la narration se résume facilement à un jeu de cache cache entre le tueur et sa prochaine victime parmi deux, trois meurtres tolérés. Cette structure scénaristique est brodée de la même manière que le chef-d'oeuvre de Carpenter. Silhouette fantomatique et errance du tueur inquiétant, unité de lieu oppressant avec une habile gestion de l'espace de ces décors restreints, suspense lattant et atmosphère lourde accentuées par une partition musicale monocorde sur un air similaire à celle de Carpenter.
Là où la plupart des slashers orthodoxes des années 80 vont miser sur le caractère spectaculaire des séquences chocs gores savamment mis en scène par l'assistance d'FX virtuoses, Armand Mastroiani opte pour une sobriété vertueuse sans effusion de sang et oriente de prime abord sa mise en scène studieuse dans l'attente d'un suspense planifié.
Grâce à une frugale interprétation moins stéréotypée que la traditionnelle, Noces Sanglantes réussit à maintenir le spectateur en haleine en dehors de certaines facilités ou ficelles inutilement requises (la voiture qui peine à démarrer, l'héroïne qui trébuche maladroitement, le tueur qui se relève de ses blessures au dernier moment).
De surcroît, le criminel à la trogne délurée d'ahuri (sorti tout droit d'un Blood Feast vétuste) possède un charisme assez inquiétant dans l'opacité de son regard maladif.
Pour l'anecdote clin d'oeil, les amateurs reconnaîtront aussi la toute première apparition de l'illustre Tom Hanks dans un court rôle, alors âgé de 23 ans !

                          

Agréablement mené, Noces Sanglantes est une curiosité oubliée des années 80, un bon slasher sortant du lot traditionnel des ersatz classiquement établis sur le mode du gore outrancier.
Hormis un final un peu décevant et grossier (avant son épilogue savoureusement sarcastique)quelques situations rebattues et son caractère désuet, il mérite une attention particulière pour le fan du genre dans sa façon impartiale de livrer une série B soigneusement mise en scène, largement influencée par le chef-d'oeuvre de Carpenter, Halloween.
A découvrir.

02.05.11
Bruno Matéï.                          

mercredi 27 avril 2011

TALK RADIO


de Oliver Stone. 1988. U.S.A. 1h50. Avec Eric Bogosian, Ellen Greene, Leslie Hope, C. Mac Ginley, Alec Baldwin, John Pankow, Michael Wincott

Sortie en salles en France le 12 Avril 1989, U.S.A: 21 Décembre 1988.

FILMOGRAPHIE: Oliver Stone (William Oliver Stone) est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 15 Septembre 1946 à New-york. 1974: La Reine du mal (Seizure), 1981: La Main du Cauchemar, 1986: Salvador, Platoon, 1987: Wall Street, 1988: Talk Radio, 1989: Né un 4 juillet, 1991: The Doors, J.F.K, 1993: Entre ciel et terre, 1994: Tueurs nés, 1995: Nixon, 1997: U turn, 1999: l'Enfer du dimanche, 2003: Commandante (documentaire sur Fidel Castro), Persona non grata (documentaire sur l'Israel et la Palestine), 2004: Looking for fidel (télé-film), 2004: Alexandre, 2006: World Trade Center, 2008: W: l'improbable président, 2009: South of the border (documentaire sur Hugo Chavez), 2010: Wall Street: l'argent ne dort jamais.

                                  

Après Salvador, Platoon et Wall Street, le pourfendeur Oliver Stone délivre avec Talk Radio un pamphlet virulent sur une Amérique mise à nue dans son portrait acide d'une civilisation névrosée en dégénérescence. Une jungle urbaine schyzophrène où des individus lambdas livrés à leurs tourments sont totalement en perte de repaire, vers une quête de reconnaissance existentielle par l'entremise d'une station de radio libertaire.

A Dallas, un animateur de radio, Barry Champlain, diffuse une émission autonome à succès auquel n'importe quel interlocuteur est libre de discuter à sa guise. Provocateur cynique et psychologue sans vergogne, il n'hésite pas à agresser verbalement ses fidèles auditeurs de manière à les réencadrer dans une véritable prise de conscience subjective. En cette nuit spécifique, l'intervention des différents témoins va sérieusement remettre en doute l'intérêt professionnel de Barry davantage dépité de la (in)tolérance de ces conversations haineuses irraisonnées.

                                    

Attention film choc cinglant ! On peut dire ici que le virulent Oliver Stone n'y va pas de main morte avec ce brûlot contestataire d'une violence inouïe dans sa manière rigide de dépeindre la faune aliénée new-yorkaise d'une société malade de ses repères.
A travers une émission de radio où tout le monde peut s'exprimer en toute liberté sans systématiquement être censuré, le réalisateur anticonformiste ne va pas hésiter à nous mener vers une insinueuse descente aux enfers abrupte profondément dérangeante et nauséeuse auquel il sera difficile de sortir indemne.
C'est une galerie de personnages tous plus dérangés et pathétiques les uns des autres que l'animateur Barry se doit d'affronter chaque soir devant son micro pour tenter de déraisonner et édifier avec beaucoup d'agressivité leurs états d'âme écornés, déconnectés par la banalité du quotidien.
Homophobes, xénophobes, antisémites, violeurs, camés, psychopathes, pervers refoulés défilent de manière machinale chaque soir pour se laisser sévèrement provoquer et insulter par un radiophoniste misanthrope. Mais un anarchiste lucide de l'hypocrisie humaine, de leurs simulacres implicites et de l'inégalité des classes sociales engendrant les pires rebuts de l'espèce humaine.
Dans un monde tendancieux asservi par le profit, le voyeurisme et le spectacle morbide de la mort impondérable, Talk Radio stigmatise la résultante de ce qu'une société peut engendrer de pire quand l'individu esseulé sans repère est totalement démotivé de son destin. Des quidams incapables d'affronter une vie individualiste altérée par le mensonge, l'avilissement et le pouvoir des nobles.
A travers l'esprit révolté de Barry vilipendant chaque auditeur masochiste, c'est le portrait dérangé que nous assène Oliver Stone sur ces quidams licencieux se nourrissant de la souffrance des autres pour tenter de renouer avec une parcelle de bonheur chimérique évaporé dans un bain d'acide.

                                   

On reconnaitra dans un moindre rôle le débutant Alec Baldwin dans celui du patron consciencieux à rappeler à l'ordre le moindre dérapage évoqué en la personne de son régisseur de radio pour une émission destinée à être diffusée dans le pays entier du fait de son succès d'audience florissant.
Eric Bogosian crève l'écran dans celui du radiophoniste contestataire motivé à décrypter le vrai visage de chaque interlocuteur osant affronter par l'entremise de leur téléphone un échange de conversations établies sur le mode du fascisme, de la perversité et de l'idéologie nazie quand il ne s'agit pas de détresse suicidaire.

Injustement méconnu mais volontairement occulté à cause de son caractère social trop subversif et d'une idéologie expéditive fustigeant la démocratie, Talk Radio est un éprouvant témoignage choc d'une Amérique à l'agonie, noyée dans sa déchéance humaine, faute à une société conservatrice réfutant l'égalité, la clairvoyance d'esprit pour mieux engourdir sa population soumise.
Par la liberté d'expression délibérée à discourir sur les maux de notre civilisation, Oliver Stone dévoile l'une des plus féroces charges sur le conditionnement de l'hypocrisie humaine et son égoïsme primaire, l'accoutumance haineuse et l'aliénation neurotique.
En résulte une oeuvre sulfureuse, implacable et terrifiante, une descente aux enfers vertigineuse dont le final redouté nous achève dans une amertume encore plus néfaste par son intolérance abrutissante.

                                      
27.04.11.  3.
Bruno Matéï.

lundi 25 avril 2011

CAMPUS (Dangerously close)


       

de Albert Pyun. 1986. U.S.A. 1h35. Avec John Stockwell, J. Eddie Peck, Carey Lowell, Don Michael Paul, Thom Matthews.

FILMOGRAPHIE: Albert Pyun est un réalisateur, scénariste et producteur américain né en 1954 à Hawaii. Il fut dans un premier temps assistant du réalisateur Akira Kurosawa avant de se consacrer personnellement à la mise en scène.
1982: L'Epée Sauvage, 1985: le Dernier missile, 1986: Campus, 1987: Pleasure Planet, le Trésor de San Lucas, 1988: Alien from L.A., 1989: Voyage au centre de la terre, Cyborg, 1991: Captain America, Kickboxer 2, Dollman, 1993: Nemesis, Knights, 1994: Kickboxer 4, 1995: Nemesis 2, 1996: Nemesis 3, Omega doom, Adrenaline, Nemesis 4, 1997: Prise d'otages à Atlanta, 1997: Mean Guns, 1998: Crazy Six, 1998: Postmortem, 1999: Urban menace, Corrupt, 2001: Explosion imminente, 2005: Infection, 2007: Bulletface, Left for dead.

                                    

Par le réalisateur de l'Epée Sauvage (démarquage bis de Conan le Barbare sorti la même année) et de Cyborg (western spaghetti post nuke), Campus est une série B oubliée des années 80, un thriller efficace illustrant les exactions militantes d'une milice juvénile endoctrinée par un briscard totalitaire.

Un étudiant est retrouvé assassiné près de sa fac auquel il enseignait.
Danny, un jeune universitaire se lie d'amitié avec un groupe d'élèves surnommé Les Sentinelles. Bientôt, il va comprendre que ce groupe extrémiste particulièrement violent est à l'origine du meurtre perpétré. Tandis qu'un autre élève disparait mystérieusement de la circulation.

                                    

Ancré dans son époque eightie par le look et la tenue vestimentaire des protagonistes, sa mise en scène inspirée du vidéo-clip et une bande musicale omniprésente alternant parfois le rock industriel à la new-wave, Campus impressionne de prime abord dans sa texture visuelle particulièrement soignée et stylisée.
Le prologue est à lui tout seul une réussite esthétique prégnante héritée des ambiances envoutées (de velours bleu) telles que Nomads, la Chasse du Comte Zaroff ou Razorback, sorti deux ans auparavant.
Dans la nuit ténébreuse d'une forêt nappée de brume, un jeune garçon fuit à travers bois une bande d'individus cagoulés, munis d'arbalète, poignard et revolver ainsi qu'une caméra pour filmer leurs exploits primitifs !
Après un jeu perfide de lutte pour la survie et d'un simulacre de tentative de meurtre, l'organisation laisse la vie sauve au quidam désorienté. En guise de revanche, celui-ci décide quelques instants plus tard de riposter en les provoquant verbalement et physiquement par le lancer d'une pierre assénée sur le pare brise de leur véhicule. L'un des trois individus masqués décide alors par instinct de rancoeur de supprimer l'adversaire en l'égorgeant de sang froid. Une séquence dramatique glaçante qui sera filmée dans un effet technique de ralenti afin d'exacerber l'horreur réelle de la situation improbable. Voilà pour le moment choc le plus intense du film élégamment réalisé.

                                  

La suite narrative s'évertue à présenter nos différents protagonistes où héros, victimes et oppresseurs s'entrecroisent pour nous embarquer dans une intrigue haletante établie sous la forme du thriller.
Sachant qu'à la fin, un ultime rebondissement fortuit permettra de réinterpréter le fond du film dans son discours social stigmatisant un groupuscule extrémiste endoctriné par un mentor manipulateur.
Albert Puyn démontre alors l'influence que peut exercer un activiste chevronné sur la jeunesse issue ici d'un milieu favorisé. C'est la montée du fascisme qui est illustré de façon insolite dans un survival game auquel de jeunes universitaires opportunistes s'amusent à élaborer une doctrine fustigeant les individus marginaux ou dénués d'ambition singulière. Le spectre du nazisme voile donc à peine le bout de son nez dans l'union d'une puissance érudite et drastique, assujetti à déprécier les plus faibles citoyens assumés dans leur extravagance effrontée ! (la mode punk était alors en pleine effervescence durant les années 80).

Superbement photographié dans une nuance bleutée contrastant avec les teintes pastels en clair obscur et bien interprété par de jeunes comédiens ayant depuis percé dans le milieu comme John Stockwell (Christine) ou Thom Matthews (le Retour des Morts-vivants), Campus est un thriller efficace mené sans temps morts d'autant plus agréable à suivre qu'il est doté d'une bande son endiablée consolidée dans son époque new wave.
Spécialiste du nanar explosif, Albert Puyn, plus inspiré que jamais, n'aura depuis pas pu rivaliser ou surpasser cette série B alarmiste depuis 1986.

25.04.11.
Bruno Matéï.