"Quand on aime, on aime toujours trop". "Quand on aime on voit les belles choses".
mercredi 27 avril 2011
TALK RADIO
de Oliver Stone. 1988. U.S.A. 1h50. Avec Eric Bogosian, Ellen Greene, Leslie Hope, C. Mac Ginley, Alec Baldwin, John Pankow, Michael Wincott
Sortie en salles en France le 12 Avril 1989, U.S.A: 21 Décembre 1988.
FILMOGRAPHIE: Oliver Stone (William Oliver Stone) est un réalisateur, scénariste et producteur américain né le 15 Septembre 1946 à New-york. 1974: La Reine du mal (Seizure), 1981: La Main du Cauchemar, 1986: Salvador, Platoon, 1987: Wall Street, 1988: Talk Radio, 1989: Né un 4 juillet, 1991: The Doors, J.F.K, 1993: Entre ciel et terre, 1994: Tueurs nés, 1995: Nixon, 1997: U turn, 1999: l'Enfer du dimanche, 2003: Commandante (documentaire sur Fidel Castro), Persona non grata (documentaire sur l'Israel et la Palestine), 2004: Looking for fidel (télé-film), 2004: Alexandre, 2006: World Trade Center, 2008: W: l'improbable président, 2009: South of the border (documentaire sur Hugo Chavez), 2010: Wall Street: l'argent ne dort jamais.
Après Salvador, Platoon et Wall Street, le pourfendeur Oliver Stone délivre avec Talk Radio un pamphlet virulent sur une Amérique mise à nue dans son portrait acide d'une civilisation névrosée en dégénérescence. Une jungle urbaine schyzophrène où des individus lambdas livrés à leurs tourments sont totalement en perte de repaire, vers une quête de reconnaissance existentielle par l'entremise d'une station de radio libertaire.
A Dallas, un animateur de radio, Barry Champlain, diffuse une émission autonome à succès auquel n'importe quel interlocuteur est libre de discuter à sa guise. Provocateur cynique et psychologue sans vergogne, il n'hésite pas à agresser verbalement ses fidèles auditeurs de manière à les réencadrer dans une véritable prise de conscience subjective. En cette nuit spécifique, l'intervention des différents témoins va sérieusement remettre en doute l'intérêt professionnel de Barry davantage dépité de la (in)tolérance de ces conversations haineuses irraisonnées.
Attention film choc cinglant ! On peut dire ici que le virulent Oliver Stone n'y va pas de main morte avec ce brûlot contestataire d'une violence inouïe dans sa manière rigide de dépeindre la faune aliénée new-yorkaise d'une société malade de ses repères.
A travers une émission de radio où tout le monde peut s'exprimer en toute liberté sans systématiquement être censuré, le réalisateur anticonformiste ne va pas hésiter à nous mener vers une insinueuse descente aux enfers abrupte profondément dérangeante et nauséeuse auquel il sera difficile de sortir indemne.
C'est une galerie de personnages tous plus dérangés et pathétiques les uns des autres que l'animateur Barry se doit d'affronter chaque soir devant son micro pour tenter de déraisonner et édifier avec beaucoup d'agressivité leurs états d'âme écornés, déconnectés par la banalité du quotidien.
Homophobes, xénophobes, antisémites, violeurs, camés, psychopathes, pervers refoulés défilent de manière machinale chaque soir pour se laisser sévèrement provoquer et insulter par un radiophoniste misanthrope. Mais un anarchiste lucide de l'hypocrisie humaine, de leurs simulacres implicites et de l'inégalité des classes sociales engendrant les pires rebuts de l'espèce humaine.
Dans un monde tendancieux asservi par le profit, le voyeurisme et le spectacle morbide de la mort impondérable, Talk Radio stigmatise la résultante de ce qu'une société peut engendrer de pire quand l'individu esseulé sans repère est totalement démotivé de son destin. Des quidams incapables d'affronter une vie individualiste altérée par le mensonge, l'avilissement et le pouvoir des nobles.
A travers l'esprit révolté de Barry vilipendant chaque auditeur masochiste, c'est le portrait dérangé que nous assène Oliver Stone sur ces quidams licencieux se nourrissant de la souffrance des autres pour tenter de renouer avec une parcelle de bonheur chimérique évaporé dans un bain d'acide.
On reconnaitra dans un moindre rôle le débutant Alec Baldwin dans celui du patron consciencieux à rappeler à l'ordre le moindre dérapage évoqué en la personne de son régisseur de radio pour une émission destinée à être diffusée dans le pays entier du fait de son succès d'audience florissant.
Eric Bogosian crève l'écran dans celui du radiophoniste contestataire motivé à décrypter le vrai visage de chaque interlocuteur osant affronter par l'entremise de leur téléphone un échange de conversations établies sur le mode du fascisme, de la perversité et de l'idéologie nazie quand il ne s'agit pas de détresse suicidaire.
Injustement méconnu mais volontairement occulté à cause de son caractère social trop subversif et d'une idéologie expéditive fustigeant la démocratie, Talk Radio est un éprouvant témoignage choc d'une Amérique à l'agonie, noyée dans sa déchéance humaine, faute à une société conservatrice réfutant l'égalité, la clairvoyance d'esprit pour mieux engourdir sa population soumise.
Par la liberté d'expression délibérée à discourir sur les maux de notre civilisation, Oliver Stone dévoile l'une des plus féroces charges sur le conditionnement de l'hypocrisie humaine et son égoïsme primaire, l'accoutumance haineuse et l'aliénation neurotique.
En résulte une oeuvre sulfureuse, implacable et terrifiante, une descente aux enfers vertigineuse dont le final redouté nous achève dans une amertume encore plus néfaste par son intolérance abrutissante.
27.04.11. 3.
Bruno Matéï.
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