vendredi 13 mai 2011

LA GRANDE MENACE (The Medusa Touch)

                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site scifi-movies.com

de Jack Gold. 1978. Angleterre/France. 1h44. Avec Richard Burton, Lee Remick, Lino Ventura, Harry Andrews, Marie Christine Barrault.

Sortie en France en Novembre 1978.

FILMOGRAPHIE: Jack Gold est un réalisateur et producteur britannique né le 28 Juin 1930 à Londres. 1967: Famine, 1968: The Bofors Gun, 1969: The Reckoning, 1973: Who ?, 1975: Man Friday, 1976: Le Tigre du ciel, 1978: The Sailor's Return, La Grande Menace, 1980: Le Petit Lord Fauntleroy, 1984: The Chain, 1987: Les Réscapés de Sobibor, 1993: Der Fall Lucona.

                                      

"Au lieu de vous inquiéter pour ce cercueil de 3 milliards de dollars qui file vers la lune, accordez au moins une pensée aux millions d'êtres qui auraient pu être nourris avec tout cet argent consacré à l'ambition Nationale. Ecoutez moi Docteur Zonfeld, j'ai trouvé le moyen de Faire le sale boulot de Dieu à sa place ..... , dans quelques minutes les astronautes approcheront de la sphère lunaire et majestueuse,  je vous donne ma PAROLE qu'ils ne reviendront Pas et Jamais "

Sorti la même année que Patrick et Fury, et trois avant Scanners, le britannique Jack Gold s'inspire du roman de Peter Van Greenaway pour traiter du thème de la télékinésie avec La Grande Menace. Pour rappel, cette faculté métapsychique consiste à mettre en mouvement la matière par la force mentale de l'esprit (du mot grec, télé: à distance, et kinésie: mouvement). Le romancier John Morlar est retrouvé sauvagement assassiné le crane fracassé dans son appartement londonien. Chargé d'une mission en Angleterre, l'inspecteur français Brunel mène enquête quand bien même la victime reprend subitement vie. Son investigation s'oriente vers le témoignage du psychiatre Zonfeld qui eut la tâche de suivre en consultation la victime Morlar. Un patient persuadé de provoquer des catastrophes par la simple force de son esprit. 

                                       

Production franco-anglaise à la distribution étonnamment hétéroclite, La Grande Menace fut mal accueilli à sa sortie par la presse alors qu'il engrange tout de même dans notre pays hexagonal 241 762 entrées uniquement sur Paris. Aux Etats-Unis, le film est même nominé un an plus tard pour le Saturn Award du Meilleur film d'horreur sans toutefois bénéficier du prix royal. Quand bien même au fil des décennies, il finit par se forger une réputation élogieuse de la part des fantasticophiles. Car dans un habile alliage d'enquête policière, de fantastique et même de catastrophe, La Grande Menace tire parti de sa densité de par l'originalité de son intrigue charpentée et du portrait cérébral imparti au potentiel coupable. Remarquablement incarné par Richard Burton littéralement magnétique en écrivain névrosé au regard saphir perçant, le film cultive une constante vigueur grâce à sa prestance névrosée à l'ambivalence identitaire. Avec classe et retenue, Lee Remick lui partage la vedette en psychiatre rationnelle délibérée à le ramener à la raison, faute de son incrédulité à cautionner l'existence du surnaturel. Enfin, le charismatique Lino Ventura se fond dans le corps de l'inspecteur Brunel dans une posture à la fois austère et studieuse afin de découvrir qui a tenté d'assassiner Morlard et pour quel mobile. Pour en revenir au cheminement narratif, et par le biais de nombreux flashbacks, Jack Gold nous brosse notamment avec détails surprenants le portrait de ce frondeur déjà brimé par son entourage depuis son enfance. Tant auprès de son professeur d'histoire tyrannique, de ses parents condescendants que de la désinvolture de sa femme infidèle épaulée d'un amant arrogant.

                                     

Persuadé qu'il est capable de nuire à autrui par la seule force de sa pensée, Morlar, névrosé et réduit à la solitude, contacte donc un psychiatre afin d'extérioriser ses tendances psychotiques émanant de sa susceptibilité et sa dépression, faute d'une insoluble quête identitaire. Au-delà de l'intensité de son suspense intelligemment captivant (notamment auprès de son incroyable épilogue catastrophique !) exacerbé d'une solide réalisation, les séquences-chocs qui émaillent le récit sont toutefois désamorcées par la suggestion plutôt que l'outrance lors des évènements dramatiques particulièrement meurtriers. Une façon finaude d'y manipuler le spectateur, dubitatif mais constamment fasciné par la persuasion de Morlar, car partagé dans le doute pour ses éventuels pouvoirs surnaturels jusqu'à sa conclusion aussi bien cinglante que terrifiante. Quand bien même durant toute l'intrigue, et depuis la tentative d'assassinat, Morlar est malgré tout réduit à la paralysie car confiné dans une chambre d'hôpital dans un état semi comateux. Or, peu à peu régénéré de ses facultés mentales, il  commence à inquiéter le corps médical et policier décontenancé de son cas pathologique inopinément robuste. Ainsi, sur le principe du genre catastrophe, le point d'orgue, en l'occurrence contrairement homérique, redouble d'intensité et de suspense exponentiel lorsque Brunel finit par se laisser convaincre de l'affront surnaturel du patient au point de tenter de sauver lors d'une ultime bravoure des centaines de dévots venus inaugurer l'immense cathédrale.

                                       

Angoissant, troublant et rondement mené sous le pilier d'une enquête surnaturelle laissant planer le doute quand au profil équivoque des potentiels coupables, La Grande Menace fascine en crescendo à travers la subtilité de sa mise en scène solide tentant d'élucider le portrait névralgique du meurtrier névrosé en proie à une impitoyable solitude. Et ce jusqu'au nihilisme de son épilogue improbable résolument escarpé, de manière également à immortaliser sur écran un profil démonial inextinguible ! 

*Bruno
28.01.19.
13.05.11

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